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Classiques Garnier

Résumés et présentations des auteurs

  • Type de publication : Article de collectif
  • Collectif : Théâtre et Peuple. De Louis-Sébastien Mercier à Firmin Gémier
  • Pages : 581 à 593
  • Collection : Rencontres, n° 332
  • Série : Études théâtrales, n° 3
  • Thème CLIL : 4028 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes de littérature comparée
  • EAN : 9782406068662
  • ISBN : 978-2-406-06866-2
  • ISSN : 2261-1851
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-06866-2.p.0581
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 21/12/2017
  • Langue : Français
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Résumés
et présentations des auteurs

Pierre Frantz, « Le peuple dans la théorie théâtrale des Lumières. Diderot et Mercier »

Pierre Frantz est professeur de littérature française à luniversité Paris-Sorbonne. Spécialiste du théâtre du xviiie siècle, ses principaux domaines de recherche sont lhistoire et lesthétique du théâtre, et lhistoire des idées esthétiques. Il dirige en ce moment lédition du théâtre complet de Voltaire.

Pour analyser la place du peuple dans la théorie théâtrale des Lumières, il faut remonter au procès de différenciation progressive que les historiens ont observé et qui, du xvie au xviiie siècle, caractérise la culture des élites et la sépare de formes culturelles de longue durée. Déterminant dans une terminologie complexe les relations entre le théâtre et le peuple, les théories théâtrales des Lumières ont inscrit leur pensée dans lécart qui sépare lutopie de la réalité du public de théâtre.

Gauthier Ambrus, « Charles IX, 4 novembre 1789. La tragédie sur la scène du peuple »

Gauthier Ambrus prépare une thèse sur Marie-Joseph Chénier. Il est lauteur de plusieurs articles sur le théâtre de la Révolution et sur Jean-Jacques Rousseau. Il a coédité avec François Jacob, le Théâtre de Marie-Joseph Chénier (Paris, 2002).

Créé au Théâtre-Français en novembre 1789, Charles IX, ou la Saint-Barthélemy, tragédie historique de Marie-Joseph Chénier, inaugure la révolution du monde des spectacles. Contestation radicale de la censure, la pièce renouvelle la question du public en lidentifiant non plus à une élite mais au peuple, conçu à la fois comme nation, comme opinion éclairée et comme masse collective. Les témoignages contradictoires des contemporains donnent la mesure du bouleversement politique et esthétique qui sen est suivi.

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Maurizio Melai, « La représentation du peuple dans les dernières tragédies classiques au xixe siècle (1819-1845) »

Maurizio Melai, docteur en lettres modernes des universités de Pise et Paris-Sorbonne, est actuellement professeur de français dans le secondaire. Spécialiste du genre tragique en France au xixe siècle, il a récemment publié Les Derniers Feux de la tragédie classique au temps du romantisme (Paris, 2015) et dirigé un numéro de la revue Orages (Le Tragique moderne, no 14).

Comparant les tragédies du xixe siècle à sujet romain et celles à sujet médiéval, cet article mène une réflexion sur lévolution du concept de fatum tragique à lépoque postrévolutionnaire. Les dramaturges libéraux voient dans lantiquité romaine un espace préchrétien où le libre arbitre exercé par le peuple échappe à la tyrannie du fatum, incarnée par le trône et lautel. Par ce biais, ces dramaturges critiquent toute tentative de revenir à lAncien Régime et préconisent le progrès social.

Patrick Berthier, « Les personnages populaires et le genre “poissard” au théâtre des Variétés (1807-1820) »

Patrick Berthier, professeur émérite à luniversité de Nantes, a travaillé sur Honoré de Balzac, le romantisme, la presse littéraire des années 1830, lhistoire du théâtre. Il a notamment publié Le Théâtre en France de 1791 à 1828 (Paris, 2014) et dirige la première édition intégrale de la Critique théâtrale de Théophile Gautier (Paris, depuis 2007).

Ouvert en 1807, le théâtre des Variétés prend la suite du théâtre Montansier, lui-même tributaire du théâtre « poissard » de Vadé dans les années 1750. Les décrets impériaux officialisent cet héritage en inscrivant dans son privilège ces thèmes du « poissard » et du « grivois ». Létude proposée examine à cette lumière ce que ce théâtre, dans ses quinze premières années dexistence, a de populaire dans son répertoire et ses acteurs.

Roxane Martin, « Du peuple et du populaire dans le mélodrame de Pixerécourt. Fondements dune poétique »

Roxane Martinest professeur à luniversité de Lorraine. Spécialiste du théâtre français du xixe siècle, elle a notamment publié La Féerie sur les scènes parisiennes, 1791-1864 (Paris, 2007), et LÉmergence de la notion de mise en scène dans le paysage théâtral français 1789-1914 (Paris, 2014). Elle dirige lédition des Mélodrames de Pixerécourt (Paris, depuis 2013).

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Les notions de « peuple » et de « populaire » sont intimement liées à la pratique et la réception du mélodrame. À travers lanalyse des textes théoriques de Pixerécourt, éclairée par celle de ses mélodrames et de la façon dont le peuple y fut représenté, larticle met en perspective le rôle esthético-politique que lauteur attribua au genre et, par ricochet, éclaire la fracture idéologique qui se fit jour sous la monarchie de Juillet entre le père du mélodrame moderne et les défenseurs du drame romantique.

Sylviane Robardey-Eppstein, « Foules belliqueuses pour foules sentimentales. Le Théâtre du Cirque-Olympique comme école du peuple dans le discours critique : visions paradoxales »

Sylviane Robardey-Eppstein, maître de conférences HDR en littérature française à luniversité dUppsala, est lauteur dune thèse sur la métathéâtralité dans le drame hugolien (Uppsala, 2004). Ses travaux portent notamment sur les didascalies et les relations texte-scène dans le théâtre romantique. Elle a codirigé Revoir la fin. Dénouements remaniés au théâtre (xviiie-xixe siècles) (Paris, 2016).

Souvent historiques et militaires, toujours « oculaires », les pièces du Cirque-Olympique lui ont valu le statut décole du peuple, notion chargée didéologie et de mésestime. Le discours critique du temps a exacerbé le clivage axiologique entre littéraire et spectaculaire et mis en avant le rôle didactique et social de ce théâtre. Ainsi a été occulté son apport esthétique, précurseur de la rénovation scénique moderne, qui avait fait du peuple le premier témoin du romantisme théâtral naissant.

Noémi Carrique, « Histoire du théâtre, histoire populaire. Regard de Guizot sur les liens entre le peuple et la scène dans son Étude sur Shakspeare, 1821 »

Noémi Carrique, normalienne agrégée de lettres, écrit une thèse sur les figures dassassins dans le théâtre romantique. Elle a publié en ligne des contributions sur Robert Macaire et Giuseppe Fieschi. Dans louvrage collectif Revoir la fin (Paris, 2016), elle étudie les enjeux du parricide. En 2014 elle a travaillé sur les figures dassassins chez Mérimée et sur le geste homicide au mélodrame.

En 1821, François Guizot préface sa nouvelle traduction du théâtre de William Shakespeare. Il y mène une analyse fine et approfondie de ce quest, ce que fut et ce que devrait être le théâtre, où la notion de peuple tient une place essentielle. Ses réflexions complexes et parfois paradoxales sur les liens entre le peuple et le théâtre, mêlant histoire politique et histoire littéraire, 584aspirations utopiques et réalités concrètes du théâtre, donneront quelques ingrédients à la théorie romantique.

Florence Naugrette, « Le public idéal des romantiques : peuple, foule, masse ? De lutopie au malentendu »

Florence Naugrette, professeur à luniversité Paris-Sorbonne, a publié Le Théâtre romantique (Paris, 2001), Le Plaisir du spectateur de théâtre (Levallois-Perret, 2002) et Le Théâtre de Victor Hugo (Lausanne, 2016). Elle a codirigé Le Théâtre français du xixe siècle (Paris, 2008), Victor Hugo. Le Théâtre et lexil (Caen, 2009). Elle dirige lédition collective en ligne des lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo.

Dans quelle mesure les romantiques ont-ils voulu réussir un théâtre populaire ? Les préfaces de Victor Hugo à son théâtre, étudiées dans leur évolution chronologique, permettent de suivre la relation fantasmée à son public du dramaturge romantique qui, avec George Sand, a laissé le plus de traces écrites sur cet idéal en partie utopique. Les travaux de la commission chargée sous la IIe République de réfléchir à la mission de lÉtat dans linstitution dun théâtre pour le peuple en montrent lenjeu politique.

Marion Lemaire, « Robert Macaire et Frédérick Lemaître. Héros du peuple, hérauts du théâtre populaire ? »

Marion Lemaire, docteure en études théâtrales, est lauteur dune thèse intitulée « Robert Macaire : la construction dun mythe. Du personnage théâtral au type social. 1823-1848 ». Elle consacre ses recherches à létude du couple Robert Macaire/Frédérick Lemaître et aux méthodes de lhistoriographie théâtrale.

Cette étude des discours critiques produits autour des représentations de LAuberge des Adrets et de Robert Macaire, permet de mesurer limpact social du personnage de Robert Macaire et sa réception comme héros du peuple. En devenant un type social, le personnage de Robert Macaire sous-tend des enjeux politiques et esthétiques que notre étude met en exergue afin de comprendre son influence dans le développement, au sein de la critique, de la catégorie du populaire.

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Marjolaine Forest, « Marie-Jeanne ou la Femme du peuple. Le mélodrame social en ses contradictions »

Marjolaine Forest est vacataire à luniversité Lumière – Lyon 2 et membre associée de lUMR IHRIM. Ses travaux concernent lhistoire des représentations mentales, sociales et culturelles dans le théâtre et lopéra romantiques. Elle prépare un essai dans lequel elle semploie à créer le concept de somatisation du social appliqué aux principales formes romantiques dexpression scénique.

Apparu dans les années 1840, le mélodrame social fédère un répertoire tendu vers le désir de mettre en acte sa réflexion sur la récente visibilité de la question sociale. Contant, à grand renfort de ficelles lacrymales, les multiples infortunes dune couturière, Marie-Jeanne a certes le mérite déclairer cette question à la lumière de la condition féminine ouvrière ; cependant, cette pièce se singularise aussi par léquivocité de sa représentation du peuple comme de la femme.

Alban Ramaut, « Présence du peuple et du populaire dans la musique et lopéra dHector Berlioz »

Alban Ramaut, ancien élève du CNSMD de Paris, est professeur de musicologie à luniversité Jean-Monnet – Saint-Étienne et membre titulaire du laboratoire IHRIM. Sa recherche porte sur larticulation xviiie-xixe siècle. Il a notamment publié Généalogies du romantisme musical français (Paris, 2012) et Dun Orphée lautre, 1762-1859. Métamorphoses dun mythe (Saint-Étienne, 2014).

La personnalité créatrice dHector Berlioz manifeste pour la musique du peuple une attirance qui mérite attention : cest le combat contre lacadémisme et le succès de la musique savante qui sy révèle. Lexemple du séjour de Berlioz à Rome est à ce titre très instructif puisquon voit le compositeur fuir les salons, les églises et les théâtres pour rejoindre les montagnes des abbruzzes et les musiques des villages. Autant de forces contradictoires qui sont mises en scène dans Benvenuto Cellini.

Philippe Régnier, « Lutopie saint-simonienne dune refondation religieuse et populaire du théâtre (1830-1836) »

Philippe Régnier, directeur de recherche au CNRS, a consacré lessentiel de sa carrière à mettre les outils de lhistoire et de lanalyse littéraires au service dune réinterprétation tous azimuts des textes et de laction du mouvement saint-simonien. 586Il a contribué à une réédition des Œuvres complètes de Saint-Simon (Paris, 2012), et est actuellement lun des partenaires du projet ANR saint-simonisme 18-21.

Relues de près, les diverses interventions publiques des saint-simoniens (conférences, articles de journaux, brochures, prédications, cérémonies en plein air…) paraissent trouver leur cohérence littéraire dans lambition esthétique quils présentent comme essentielle à leur projet de refondation religieuse moderne : réaliser performativement lutopie dune re-théâtralisation générale de la vie sociale et renouer ainsi avec les origines cultuelles et populaires les plus anciennes de la fête.

Françoise Sylvos, « Le fouriérisme et le théâtre du peuple en France au xixe siècle »

Françoise Sylvos est professeur de lettres modernes à luniversité de La Réunion. Ses recherches portent sur la période romantique, mais aussi sur des auteurs de la fin de siècle et de locéan Indien. Elle privilégie une approche politico-historique et sociocritique de la littérature. Elle est lauteur de LÉpopée du possible ou larc-en-ciel des utopies, 1800-1850 (Paris, 2008).

Dans le monde meilleur des fouriéristes, le théâtre est un divertissement, un moyen déducation, délévation pour les classes modestes. Le théâtre est du reste une dimension intégrante du caractère humain et de la vie sociale. Au phalanstère (Condé-sur-Vesgres, familistère Godin), il occupe une place essentielle comme institution ou bâtiment et est présent, à travers des pièces pour enfants, dans des journaux dobédience fouriériste.

Amélie Calderone, « La Baraque à Polichinelle de Savinien Lapointe ou la forme théâtrale populaire à lépreuve de la légitimité du peuple »

Amélie Calderone est agrégée et docteur de luniversité Lumière – Lyon 2 en langue et littérature du xixe siècle. Elle a soutenu en 2015 une thèse intitulée « Entre la scène et le livre. Formes dramatiques publiées dans la presse à lépoque romantique (1829-1851) ». Ses recherches portent sur le théâtre romantique, en particulier dans les relations quil noue avec le monde éditorial et médiatique au xixe siècle.

Savinien Lapointe, ouvrier cordonnier, édite en 1849 dans le feuilleton du Journal de la Vraie République une série de textes politiques, La Baraque à Polichinelle. Ces écrits se veulent « action » pour relever les masses populaires. Mais la quête dune éloquence populaire semble vouée à devenir un populisme. Ces apories sont ainsi représentatives des difficultés rencontrées à lépoque par les classes les plus humbles pour faire émerger et reconnaître leur voix dans lespace public.

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Sarah Mombert, « Alexandre Dumas et le théâtre populaire »

Sarah Mombert est maître de conférences à lENS de Lyon et membre de lUMR 5317 IHRIM. Ses travaux portent sur le roman historique, le roman populaire et lhistoire de la presse au xixe siècle. Elle a dirigé lédition numérique des journaux périodiques dAlexandre Dumas.

Après la bataille romantique du théâtre, Alexandre Dumas cherche le moyen doffrir au peuple un théâtre à la mesure de lappétit culturel que lui a donné le progrès social de la monarchie de Juillet. Le Théâtre-Historique, immense salle dédiée aux représentations spectaculaires dadaptations dramatiques de romans, matérialise ce rêve. Balayé par la tourmente de Février, puis en butte à lhostilité du Second Empire, le rêve dumasien trouvera refuge dans la fiction des Mohicans de Paris.

Barbara T. Cooper, « Essai sur des pièces dites “populaires”. Lexemple des Carrières de Montmartre de Dupeuty et Bourget (1855) »

Barbara T. Cooper, professeure émérite de français à luniversité du New Hampshire (USA), est spécialiste du théâtre français de la première moitié du xixe siècle. Elle sintéresse aux grands auteurs romantiques, mais aussi au théâtre populaire et à la représentation des Noirs sur les scènes parisiennes. Elle a notamment publié Le Tremblement de terre de la Martinique (Paris, 2014) dAdolphe Dennery.

Cette étude porte sur un corpus de pièces écrites entre 1830 et 1869 qui comprennent le mot « populaire » dans leur désignation générique. Elle examine en particulier Les Carrières de Montmartre (1855) afin de voir si lon peut en dégager des caractéristiques spécifiques à cette sous-catégorie de pièces et mieux cerner le sens de ladjectif « populaire ».

Marine Wisniewski, « Le café-concert, scène populaire ? »

Marine Wisniewski est docteur en littérature française de luniversité Lumière – Lyon 2. Ancienne élève de lENS de Lyon, agrégée de lettres modernes, elle a consacré plusieurs articles au café-concert et à son inscription dans le paysage littéraire et culturel. Ses recherches portent sur les spectacles populaires, dans leur lien avec la littérature et le monde social.

Dabord considéré comme le divertissement des classes populaires, le café-concert, devient, avec lavènement de la iiie République, le vecteur publicitaire de lunité harmonieuse de la nation française. Sil peut donc être considéré 588comme une scène populaire à la fin du xixe siècle, ce nest pas tant parce quil serait lexpression dun groupe délimité de la société comme son ancêtre la goguette, mais parce quil ébauche une image efficace et pédagogique, fût-elle factice, du peuple-citoyen.

Claire Barel-Moisan, « Populariser les sciences sur scène. Lexpérience du théâtre scientifique de Louis Figuier »

Claire Barel-Moisan est chargée de recherches au CNRS (UMR IHRIM, ENS-Lyon). Spécialiste de la poétique romanesque balzacienne, elle a publié des travaux portant sur la littérature romanesque du xixe siècle (en particulier sur Honoré de Balzac, George Sand et Gustave Flaubert). Elle dirige lANR Anticipation, sur le roman danticipation scientifique au tournant du xixe siècle (1860-1940).

Entre 1877 et 1889, Louis Figuier écrit douze pièces pour « populariser la science par le théâtre ». Avec des biographies de savants héroïsés (Johannes Kepler) ou présentés dans un cadre familier (Benjamin Franklin), Figuier poursuit son œuvre vulgarisatrice sur un nouveau support. Mais au-delà de cet enjeu didactique, en recourant aux codes du mélodrame et du vaudeville, Figuier expérimente un nouveau genre de théâtre populaire et militant, où viennent sincarner les valeurs de la IIIe République.

Isabelle Martin-Pradier, « Populaires, spectaculaires, spéculaires. Les arts mineurs dans les premières œuvres pour la scène de Jean Cocteau »

Isabelle Martin-Pradier est professeure agrégée de lettres modernes en CPGE. Elle a soutenu à luniversité Lumière – Lyon 2, sous la direction dOlivier Bara, un Master 2 sur Jean Cocteau et les arts populaires, de Parade aux Parents terribles. Elle travaille désormais sur le théâtre inédit de George Sand et les petites formes adaptées des contes et féeries.

Enfant, hypnotisé par le spectacle, Jean Cocteau fait de cette modalité dadhésion lobjet dune quête poétique. Ses premières créations scéniques déploient les virtualités perçues dans la diversité des genres mineurs. Spectaculaires, il leur confère le pouvoir de régénérer le théâtre et le public. Le populaire est alors pensé comme la possibilité dun autre public avec lequel il sagit de coïncider, mais dont laltérité est résorbée dans une quête de soi et dont la séduction fragilise lassomption.

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Michèle Fontana, « Contre les “malfaiteurs du théâtre”. Combat de la réaction religieuse et politique »

Michèle Fontana, maître de conférences à luniversité Lumière – Lyon 2 jusquen 2012, est membre associée de lIHRIM. Spécialiste de lœuvre de Léon Bloy, elle a publié de nombreux articles sur les rapports entre politique, presse et littérature au xixe siècle, sur la question des altérités et sur la littérature populaire. Elle est lauteur de Léon Bloy, Journalisme et Subversion (1874-1917) (Paris, 1998).

Sous la IIIe République perdure une hostilité de principe au théâtre, jugé immoral et subversif. À largumentaire religieux devenu caduc se substitue lautorité scientifique établissant la nature malsaine du théâtre, à réserver à un public socialement privilégié. La censure fait place à des projets globaux déducation du peuple que conduisent républicains et ligues réactionnaires. On observe toutefois, issues du monde catholique, quelques initiatives visant à recréer un théâtre populaire.

Marion Denizot, « Histoire et mémoire du “théâtre populaire” »

Marion Denizot est maître de conférences habilitée à diriger des recherches en études théâtrales à luniversité Rennes 2. Ses travaux portent sur lhistoire des politiques et des institutions théâtrales, les héritages du théâtre populaire et les liens entre histoire et théâtre. Elle a notamment coédité Le Théâtre du Peuple de Bussang : cent vingt ans dhistoire (Arles, 2015) avec Bénédicte Boisson.

Le théâtre populaire, en tant que notion polysémique et labile, doit être envisagé dans sa double dimension dobjet historique et denjeu mémoriel. Retracer lhistoire du théâtre populaire oblige à intégrer une perspective mémorielle, afin de déceler les effets de reconstruction et de distorsion, mais aussi les éléments de permanence et de continuité qui caractérisent son histoire tout au long du xxe siècle.

Romain Piana, « Le théâtre grec antique, modèle utopique pour le théâtre populaire. Exégèse dun lieu commun »

Romain Piana, maître de conférences à lInstitut détudes théâtrales de luniversité Sorbonne nouvelle – Paris 3, est lauteur dune thèse intitulée « La réception dAristophane en France de Palissot à Vitez, 1760-1962 ». Il sintéresse également à lhistoire du théâtre français du xixe siècle, sur lequel il a publié de nombreux travaux.

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Le théâtre grec antique apparaît généralement comme un mythe fondateur indiscuté pour le théâtre populaire, dont il est donné à la fois comme lancêtre et le modèle indépassable. Ce lieu commun est en réalité une construction du xixe siècle, inséparable de la réception du répertoire tragique et comique grec lui-même. Dabord véritablement structurant dans les utopies de théâtre populaire, le parallèle avec le théâtre athénien finit par se constituer en cliché à usage fréquemment idéologique.

Anne Pellois, « Lutopie symboliste dun théâtre populaire »

Anne Pellois est maître de conférences en études théâtrales à lENS Lyon. Elle travaille sur le théâtre symboliste et la question de lacteur (histoire, théories et pratiques du jeu, xixe-xxe siècles). Elle a codirigé Les Héroïsmes de lacteurau xixe siècle (Lyon, 2015) et Le Rythme, une révolution ! Émile Jaques-Dalcroze à Hellerau (Genève, 2015). Elle est membre du comité éditorial de la revue Agôn.

Il semble paradoxal dassocier théâtre populaire et théâtre symboliste, tant ce dernier véhicule limage dun théâtre abscons et élitiste. Il existe bien, sinon une réalité, du moins un rêve symboliste de théâtre pour le peuple, associant ainsi les poètes au grand mouvement de réflexion autour de la question à la toute fin du xixe siècle, et prenant pour modèle fantasmé le spectacle grec. Lanalyse questionne également les missions assignées à ce projet de théâtre : rassembler et éduquer.

Lucette Monnin-Tonetti, « La démocratisation de lOpéra de Paris sous la IIIe République »

Lucette Monnin-Tonetti est musicienne et docteur en littérature française et comparée. Sa thèse, intitulée « Le Cahier des charges au Palais Garnier (1879-1914) : grandeur et misères du grand opéra », a été obtenue en 2013 sous la direction dOlivier Bara et France Marchal-Ninosque. Elle est actuellement associée à léquipe de recherche du Centre Jacques Petit de Besançon.

Cest sous la IIIe République que les gouvernants, qui avaient à cœur de démocratiser lart musical, créèrent pour la première fois, en 1879, les représentations populaires, auxquelles sajoutaient les représentations gratuites qui pouvaient avoir lieu chaque fois que le gouvernement le requérait. Parallèlement, ladministration des Beaux-Arts sous légide du ministère de lInstruction publique tenta de créer un opéra populaire.

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Sylvain Nicolle, « “Il est là le vrai théâtre populaire”. Les “représentations-ceintures” de lœuvre des Trente ans de théâtre dans les faubourgs de Paris (1902-1914) »

Sylvain Nicolle, membre du Centre dhistoire culturelle des sociétés contemporaines (CHCSC) de luniversité de Versailles – Saint-Quentin-en-Yvelines, est docteur en histoire. Sa thèse, La Tribune et la Scène. Les débats parlementaires sur le théâtre en France au xixe siècle (1789-1914), a reçu en 2016 le prix de recherche du CL 19 et le prix de thèse en histoire et droit parlementaires de lAssemblée nationale.

« Le Bien par le Beau ». Telle est la devise que Gustave Larroumet donne à lœuvre des Trente ans de théâtre fondée par Adrien Bernheim en 1901. Cette société philanthropique vise à secourir les gens de théâtre nécessiteux en organisant dès 1902 une série de galas populaires dans les faubourgs de Paris. Cette expérience de démocratisation théâtrale est interrogée à partir dune enquête historique portant sur le choix des salles, le contenu du programme et laccueil qui lui fut réservé.

Catherine Faivre-Zellner, « Le TNP de Firmin Gémier. Cheminement dune “marotte” »

Catherine Faivre-Zellner est docteur en études théâtrales de luniversité Sorbonne nouvelle – Paris 3. Elle est lauteur de Firmin Gémier, héraut du théâtrepopulaire (Rennes, 2006), et a publié Théâtre populaire, Acte I (Lausanne, 2006, textes inédits de Firmin Gémier) et Firmin Gémier (Arles, 2009).

Firmin Gémier consacre sa vie dacteur, de metteur en scène et de directeur de théâtre à donner forme à son idéal de théâtre populaire, sa marotte. Depuis le Festival Vaudois en 1903 jusquaux grands spectacles à partir de 1914, il invente le théâtre de la foule dont le Théâtre national populaire serait la structure institutionnelle. Premier directeur de la cinquième scène nationale fondée en 1920, puis abandonnée par les pouvoirs publics, Gémier jette les bases du théâtre populaire contemporain.

Nathalie Coutelet, « Firmin Gémier, une réforme scénique dédiée au “populaire” »

Nathalie Coutelet, maître de conférences au département Théâtre de luniversité Paris 8 – Vincennes – Saint-Denis, mène des recherches sur les formes de théâtre populaire, lhistoire de la mise en scène, les relations entre spectacle et politique 592(fin xixe-début xxe siècles). Elle a publié Le Théâtre populaire de Firmin Gémier (Sarrebruck, 2010) et Démocratisation du spectacle et idéologie républicaine (Paris, 2012).

Firmin Gémier, connu comme le père fondateur du Théâtre national populaire, a pensé les relations entre public et art dramatique non seulement en termes de lieu, de tarifs ou de programmation, mais encore en termes de mise en scène. Pour ce faire, il crée les conditions dun véritable rapprochement entre œuvre et public : fin du « quatrième mur » ; gigantesques escaliers ; richesse spectaculaire et sensorielle des scènes, afin de concrétiser le verbe pour les spectateurs modestes.

Amélie Gregório, « Henri-René Lenormand et Firmin Gémier. Une amitié au service du théâtre populaire »

Amélie Gregório est agrégée de lettres modernes. Professeure dans le secondaire, elle a soutenu une thèse de doctorat sur « LArabe dans le théâtre français, du début de la conquête de lAlgérie aux grandes expositions coloniales (1830-1931) », à luniversité Lumière – Lyon 2. Ses travaux portent sur la question de laltérité dans les arts de la scène, en relation avec la colonisation de lAfrique du Nord.

Firmin Gémier et le dramaturge Henri René Lenormand sont deux personnalités de premier plan dans le milieu du spectacle parisien du début du xxe siècle. Au cœur des combats de leur époque pour le renouveau de lart dramatique, ils nont cependant pas la même image auprès du public et de la postérité. Leurs parcours respectifs et les liens professionnels et amicaux qui les unissent permettent dexplorer la complémentarité, a priori paradoxale, entre le théâtre populaire et le théâtre dart.

Bérénice Hamidi-Kim, « Théâtres populaires (républicain + socialiste + paternaliste) = théâtre public ? De la diversité historique des grammaires du théâtre populaire en France »

Bérénice Hamidi-Kim, ancienne élève de lENS de Fontenay, maîtresse de conférences en arts de la scène à luniversité Lumière – Lyon 2, est directrice du laboratoire Passages XX-XXI (EA4160) et membre de lIUF. À la croisée de lesthétique et de la sociologie, ses travaux portent sur les enjeux politiques du théâtre entre fin xixe et xxie siècle et sur lhistoire des politiques publiques du spectacle vivant.

Limage du « long fleuve tranquille » a longtemps prévalu dans la description dune évolution esthétique et institutionnelle majeure du théâtre en France : 593la transformation du théâtre populaire en théâtre public dans les années 1940, institution reposant sur des valeurs républicaines et démocratiques. Le présent article cherche à comprendre les principes fondateurs autant que les tensions constitutives dun modèle qui prévaut encore aujourdhui.