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Classiques Garnier

Introduction

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Introduction

Le (vieux) professeur a aujourdhui le plus grand mal à être crédible lorsquil décrit à ses étudiants nés dans les années 1990 le monde dans lequel il évoluait lorsquil avait leur âge. Lépouvantail soviétique dont on craignait encore quil finisse par surpasser son rival américain ; le triplement en quelques semaines du prix du baril et lenvol de celui de lessence à la pompe ; linflation à deux chiffres et les taux demprunts hypothécaires supérieurs à 15 % ; lindexation ex-post des salaires grâce à léchelle mobile…

Ce monde a disparu en moins de dix ans pour faire place à la globalisation de léconomie et à ladhésion des pays nouvellement ouverts à léconomie de marché et à la finance dérégulée.

Comment un basculement aussi radical a-t-il pu se produire aussi rapidement ? Et quelles en étaient les racines ?

La désinflation et la baisse des taux dintérêt qui la accompagnée ont créé les conditions dun âge dor boursier (la capitalisation boursière américaine sera multipliée par quatorze en moins de vingt ans). Pourtant le bilan économique et financier de ce renouveau du capitalisme est loin dêtre concluant. Des crises de plus en plus violentes se sont succédées et labolition du cycle économique, Graal des tenants de la dérégulation, a lamentablement échoué dans la pire récession de laprès-guerre. Quant à la croissance globale, elle na cessé de ralentir tout au long de trois décennies. Les classes moyennes des pays industrialisés, reines des trente glorieuses et moteur de la croissance fordiste, sont laminées et celles du monde émergent, certes en forte progression, ne masquent ni linsécurité économique dans lesquelles elles évoluent ni la persistance dune extrême pauvreté (selon la Banque mondiale, près de 800 millions de personnes vivent encore avec moins de 1,90 dollar par jour). Ces performances médiocres nempêchent pas, bien au contraire, lattachement de ces classes moyennes au principe de capitalisation de lépargne individuelle, attachement par lequel elles sont devenues les alliés objectifs des détenteurs du capital.