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Classiques Garnier

Résumés

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Résumés

Amir Biglari et Nathalie Watteyne, « Présentation »

Cet ouvrage collectif décrit le fonctionnement énonciatif de la poésie lyrique moderne, par lanalyse des enjeux discursifs, historiques et culturels sy trouvant impliqués. Il élucide les conditions de production et de réception du discours lyrique et explicite les effets argumentatifs, rhétoriques et pragmatiques quil véhicule. Si lon ne dispose pas dune définition du lyrisme qui soit la même pour différents usages, époques ou cultures, lon peut cependant rendre compte de scènes dénonciation lyriques, selon des scénographies spécifiques.

Dominique Maingueneau, « Le lyrisme. Quelques réflexions sur une catégorie problématique »

Cette contribution, dans une perspective danalyse du discours, propose une réflexion sur la catégorie même de lyrisme, quon ne peut définir seulement par une série de caractéristiques linguistiques ou thématiques. Elle montre quil sagit dune catégorie historique, à appréhender comme telle. Plutôt que de raisonner en termes de conditions nécessaires et suffisantes, elle sappuie sur une conception de la catégorie comme prototype. En loccurrence, ce prototype est constitué dun corpus de poèmes écrits en France au xixe siècle.

Per Aage Brandt, « De lénonciation poétique »

Ce texte met laccent sur le fait que, entre chanson et fiction, la poésie se démarque empiriquement. La thèse défendue, cest que celle-ci nest pas chantée collectivement, et sa voix nest pas celle dun narrateur. Cest dire que le sujet de son énonciation nest pas un rôle à assumer ou à jouer en le performant par le chant, et il nest pas doté de lubiquité fictive dun narrateur qui connaît tout dun monde événementiel. La poésie se distingue ainsi, mais théoriquement, elle est difficile à déterminer positivement.

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Marc Dominicy, « Lénonciation lyrique et la théorie des actes de langage »

Dans une approche dualiste du lyrisme fondée sur la théorie des actes de langage, cette étude identifie dabord les états mentaux que lorganisation linguistique attribue à divers sujets de conscience, ainsi que les conflits ou incertitudes sémantico-pragmatiques non résolus par le traitement « en ligne » de lorganisation linguistique. Elle porte ensuite sur les effets évocatifs déclenchés tant par ces conflits ou incertitudes que par linterface entre les organisations linguistique et poétique.

Christian Doumet, « Larghetto. La voix des disparus »

Cette contribution avance que lon reconnaît lénonciation lyrique à ses effets de déconcertation. Inspirée par la lecture dune nouvelle de Kafka, elle tente de comprendre la manifestation du lyrisme à laide des traits paradoxaux qui font létrangeté de ce texte en les appliquant à une interprétation du Larghetto du second concerto de Chopin. Lanalyse met en lumière le rôle quy jouent lexposition, la sidération et une forme dhistoricité hors du temps qui est la marque, dans toute expression lyrique, de la voix des disparus.

Laure Himy-Piéri, « De la valeur émotionnelle du lieu commun dans la poésie lyrique »

Ce travail explique que si le lyrisme est lié au chant, cest quil est performance dans laquelle il sagit de toucher lautre, parvenant à éveiller lintime en lui par-delà ce qui pourrait sembler singularité irréductible. La performance lyrique est moins alors le fait de lactualisation dun texte sur scène ou par la lecture, que létablissement dun espace commun dadhésion, par-delà les frontières entre texte et monde, ou entre consciences, qui modifie en cela autant la perception du texte que la conscience percevante.

Nancy Murzilli, « Lénonciation lyrique du point de vue de lexpérience de la lecture »

Cette étude interprète les enjeux de lénonciation lyrique dun point de vue pragmatique, à partir de lexpérience de lecture que lon en fait. En considérant les textes poétiques comme des événements pour un lecteur qui en expérimente les effets, elle interroge la façon dont la notion dénonciation 353lyrique permet de clarifier les conditions de possibilité dune expérience de lecture des textes poétiques.

Jean-Michel Maulpoix, « Dynamique du lyrisme dans Les Contemplations de Victor Hugo »

Portant sur Les Contemplations, ce texte définit le lyrisme non pas comme « expression des sentiments personnels du poète », mais comme puissance damplification, de conjonction et de conversion qui travaille à résorber les antagonismes. Il sintéresse notamment au discours de la « bouche dombre », tel quil excède le sujet et fait mouvement vers les extrêmes à travers une surabondance verbale.

Ludmila Charles-Wurtz, « Le personnage lyrique dans Les Contemplations ou lautre transmigration »

Cette contribution défend lidée selon laquelle la théorie hugolienne de la transmigration des âmes combine métempsycose, dualisme chrétien et lecture littérale et hallucinée du cycle naturel. Sous cet angle, le personnage lyrique – qui est une position de parole – permet la transmigration de lâme de la fille morte du poète dans le corps des autres « vierges » du recueil. La réapparition de ce personnage sous des identités différentes sous-tend les structures concurrentes du recueil : la chronologie ; la mise en abyme ; le miroir.

Amir Biglari, « La plasticité énonciative et ses effets sur le lecteur dans Les Contemplations de Victor Hugo »

Ce texte examine le mode dénonciation des Contemplations de Victor Hugo en essayant den dégager les effets de sens produits, notamment la façon dont il implique le lecteur, et plus précisément la façon dont le processus du faire éprouver est mis en œuvre. Après avoir évoqué la pluralité et la polyphonie énonciatives du recueil, létude insiste sur sa plasticité énonciative, principalement par lanalyse du pronom « on », non seulement en tant que lexème, mais aussi en tant quélément central du contenu dune isotopie énonciative.

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Luc Bonenfant, « Le lyrisme ouvrier, entre sublimation métaphorique et dévoiement synecdochique »

Cette contribution fait ressortir que le sujet lyrique de la poésie ouvrière est romantique par sa manière de prendre volontairement la parole, ce qui le place dans la perspective dune démocratisation de la parole. Une telle parole, aussi bien nouvelle que singulière par son inconvenance stylistique et esthétique, suggère que les poètes ouvriers empruntent tantôt la voie dune sublimation métaphorique, tantôt celle dun dévoiement dordre synecdochique.

Jean-Michel Gouvard, « Le lyrisme dans Le Spleen de Paris ou comment être lyrique sans lêtre » 

Limpossibilité dêtre un poète lyrique, au sens romantique du terme, est inscrite au cœur même du projet du Spleen de Paris. Une telle impossibilité préside au choix de la poésie en prose, qui nétait pas un genre établi dans les années 1850-1860, et permet de comprendre pourquoi le poète pastiche et détourne les modalités propres à lexpression lyrique, par divers procédés que cette étude sapplique à dégager. Ce faisant, Baudelaire prend le risque de ne plus être lyrique, pour pouvoir lêtre encore.

Nathalie Watteyne, « Le lyrique et lépique redynamisés chez le premier Rimbaud »

Cette étude montre que les sens mélioratif et péjoratif accolés à la poésie lyrique et au lyrisme sexacerbent avec Arthur Rimbaud, qui met à mal deux paramètres de lélévation au xixe siècle : lexpression des sentiments et limpassibilité parnassienne. Cest dans le contexte de la crise politique qui secoue la France que sont analysés les poèmes écrits entre 1869 et 1871, tant par les invectives et le vocabulaire ordurier du jeune poète que par le ton subversif et lélan révolutionnaire qui animent son chant de résistance.

Delphine Rumeau, « Polyphonie et lyrisme. Lexemple de quelques élégies à Pablo Neruda »

Cette contribution porte sur un ensemble délégies : Élégie à Pablo Neruda, de Louis Aragon, Elegi för Pablo Neruda, de lécrivain suédois Artur Lundkvist, et El huracán neruda. Elegía de una canción desesperada, du Dominicain Pedro 355Mir. Ces textes sondent le lien du personnel et du collectif, du privé et du public. Non seulement le dialogisme travaille chacune de ces élégies, mais celles-ci doivent en outre se lire de manière chorale, formant un ensemble de voix qui sunissent dans lhommage et le doute à la fois.

Ute Heidmann, « La reconfiguration créatrice dune scène dénonciation emblématique. Paul Celan, Rose Ausländer et Sylviane Dupuis »

Cette étude explore le fonctionnement des scènes dénonciation dans lécriture poétique en lexemplifiant par lanalyse comparative de textes de trois poètes. Elle montre que la configuration dune scène dénonciation est susceptible de relever dune reconfiguration dune scène dénonciation connue ou devenue emblématique. Ces reconfigurations aboutissent à la création de nouvelles scènes dénonciation suggestives par un travail complexe sur le plan langagier, scénographique, générique, intertextuel et interdiscursif.

Evelyne Gagnon, « Énonciations mélancoliques dans la poésie québécoise. Louise Dupré, Paul Chanel Malenfant, Paul Chamberland »

Cette contribution explique que si les élégies en mode mineur prolifèrent au sein du corpus québécois actuel, à même limaginaire mélancolique dun monde précarisé, au seuil de lincommunicable, les recueils de Dupré, de Malenfant et de Chamberland opèrent de subtiles permutations énonciatives qui relancent le désir de communication. Loin de tonalités apocalyptiques, cette rhétorique de la sobriété promeut une résistance tranquille, une solidarité inquiète face au xxie siècle, en quête dun nouvel humanisme.

Elisa Bricco, « Sur les traces du sujet lyrique chez Cécile Mainardi »

Ce travail cherche à décrire la configuration du sujet lyrique dans le recueil Rose activité mortelle de Cécile Mainardi. Après une mise au point théorique, il suit les traces du sujet écrivant et du sujet lyrique tel quil se profile dans les poèmes. La raréfaction pronominale pourrait cacher un désir deffacement. Mais elle permet de relever la volonté de sexprimer par le biais des relations avec le monde et avec les autres.

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Pascal Fobah Eblin, « Aspects énonciatifs de la lyrisation du discours dans la poésie africaine francophone »

Cette étude cerne une des dimensions énonciatives du discours lyrique dans le cadre de la pratique poétique africaine. La figure du locuteur, qui embraie le discours et linscrit dans une structure énonciative fondamentalement dialogale, est son marqueur principal. Elle est dailleurs le responsable du construit textuel et son support linguistique le plus manifeste, même lorsque le cadre énonciatif est interactif. Il est aussi le sujet modal, source des opinions et des points de vue contenus dans le texte poétique.

Michèle Monte, « Les relations entre énonciateur textuel, locuteurs et personnages. Étude des scénographies poétiques chez José-Flore Tappy, Eugène Guillevic, Jacques-Henri Michot »

Ce texte précise les modalités de présence du poète-énonciateur textuel dans les poèmes lyriques. Il analyse dabord un poème qui se caractérise par un syncrétisme entre le poète et le « je » opérant une fusion entre lexpérience sensible, la prise de parole et le projet esthétique, puis des poèmes où lénonciateur textuel se distingue des locuteurs ou personnages, ce qui coïncide souvent avec une accentuation de la dimension esthétique du poème ou de son positionnement critique.