Résumés
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Scènes d’énonciation de la poésie lyrique moderne . Approches critiques, repères historiques, perspectives culturelles
- Pages : 351 à 356
- Collection : Rencontres, n° 389
- Série : Théorie littéraire, n° 9
- Thème CLIL : 4053 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Théorie Littéraire
- EAN : 9782406082026
- ISBN : 978-2-406-08202-6
- ISSN : 2261-1851
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-08202-6.p.0351
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 11/05/2019
- Langue : Français
Résumés
Amir Biglari et Nathalie Watteyne, « Présentation »
Cet ouvrage collectif décrit le fonctionnement énonciatif de la poésie lyrique moderne, par l’analyse des enjeux discursifs, historiques et culturels s’y trouvant impliqués. Il élucide les conditions de production et de réception du discours lyrique et explicite les effets argumentatifs, rhétoriques et pragmatiques qu’il véhicule. Si l’on ne dispose pas d’une définition du lyrisme qui soit la même pour différents usages, époques ou cultures, l’on peut cependant rendre compte de scènes d’énonciation lyriques, selon des scénographies spécifiques.
Dominique Maingueneau, « Le lyrisme. Quelques réflexions sur une catégorie problématique »
Cette contribution, dans une perspective d’analyse du discours, propose une réflexion sur la catégorie même de lyrisme, qu’on ne peut définir seulement par une série de caractéristiques linguistiques ou thématiques. Elle montre qu’il s’agit d’une catégorie historique, à appréhender comme telle. Plutôt que de raisonner en termes de conditions nécessaires et suffisantes, elle s’appuie sur une conception de la catégorie comme prototype. En l’occurrence, ce prototype est constitué d’un corpus de poèmes écrits en France au xixe siècle.
Per Aage Brandt, « De l’énonciation poétique »
Ce texte met l’accent sur le fait que, entre chanson et fiction, la poésie se démarque empiriquement. La thèse défendue, c’est que celle-ci n’est pas chantée collectivement, et sa voix n’est pas celle d’un narrateur. C’est dire que le sujet de son énonciation n’est pas un rôle à assumer ou à jouer en le performant par le chant, et il n’est pas doté de l’ubiquité fictive d’un narrateur qui connaît tout d’un monde événementiel. La poésie se distingue ainsi, mais théoriquement, elle est difficile à déterminer positivement.
352Marc Dominicy, « L’énonciation lyrique et la théorie des actes de langage »
Dans une approche dualiste du lyrisme fondée sur la théorie des actes de langage, cette étude identifie d’abord les états mentaux que l’organisation linguistique attribue à divers sujets de conscience, ainsi que les conflits ou incertitudes sémantico-pragmatiques non résolus par le traitement « en ligne » de l’organisation linguistique. Elle porte ensuite sur les effets évocatifs déclenchés tant par ces conflits ou incertitudes que par l’interface entre les organisations linguistique et poétique.
Christian Doumet, « Larghetto. La voix des disparus »
Cette contribution avance que l’on reconnaît l’énonciation lyrique à ses effets de déconcertation. Inspirée par la lecture d’une nouvelle de Kafka, elle tente de comprendre la manifestation du lyrisme à l’aide des traits paradoxaux qui font l’étrangeté de ce texte en les appliquant à une interprétation du Larghetto du second concerto de Chopin. L’analyse met en lumière le rôle qu’y jouent l’exposition, la sidération et une forme d’historicité hors du temps qui est la marque, dans toute expression lyrique, de la voix des disparus.
Laure Himy-Piéri, « De la valeur émotionnelle du lieu commun dans la poésie lyrique »
Ce travail explique que si le lyrisme est lié au chant, c’est qu’il est performance dans laquelle il s’agit de toucher l’autre, parvenant à éveiller l’intime en lui par-delà ce qui pourrait sembler singularité irréductible. La performance lyrique est moins alors le fait de l’actualisation d’un texte sur scène ou par la lecture, que l’établissement d’un espace commun d’adhésion, par-delà les frontières entre texte et monde, ou entre consciences, qui modifie en cela autant la perception du texte que la conscience percevante.
Nancy Murzilli, « L’énonciation lyrique du point de vue de l’expérience de la lecture »
Cette étude interprète les enjeux de l’énonciation lyrique d’un point de vue pragmatique, à partir de l’expérience de lecture que l’on en fait. En considérant les textes poétiques comme des événements pour un lecteur qui en expérimente les effets, elle interroge la façon dont la notion d’énonciation 353lyrique permet de clarifier les conditions de possibilité d’une expérience de lecture des textes poétiques.
Jean-Michel Maulpoix, « Dynamique du lyrisme dans Les Contemplations de Victor Hugo »
Portant sur Les Contemplations, ce texte définit le lyrisme non pas comme « expression des sentiments personnels du poète », mais comme puissance d’amplification, de conjonction et de conversion qui travaille à résorber les antagonismes. Il s’intéresse notamment au discours de la « bouche d’ombre », tel qu’il excède le sujet et fait mouvement vers les extrêmes à travers une surabondance verbale.
Ludmila Charles-Wurtz, « Le personnage lyrique dans Les Contemplations ou l’autre transmigration »
Cette contribution défend l’idée selon laquelle la théorie hugolienne de la transmigration des âmes combine métempsycose, dualisme chrétien et lecture littérale et hallucinée du cycle naturel. Sous cet angle, le personnage lyrique – qui est une position de parole – permet la transmigration de l’âme de la fille morte du poète dans le corps des autres « vierges » du recueil. La réapparition de ce personnage sous des identités différentes sous-tend les structures concurrentes du recueil : la chronologie ; la mise en abyme ; le miroir.
Amir Biglari, « La plasticité énonciative et ses effets sur le lecteur dans Les Contemplations de Victor Hugo »
Ce texte examine le mode d’énonciation des Contemplations de Victor Hugo en essayant d’en dégager les effets de sens produits, notamment la façon dont il implique le lecteur, et plus précisément la façon dont le processus du faire éprouver est mis en œuvre. Après avoir évoqué la pluralité et la polyphonie énonciatives du recueil, l’étude insiste sur sa plasticité énonciative, principalement par l’analyse du pronom « on », non seulement en tant que lexème, mais aussi en tant qu’élément central du contenu d’une isotopie énonciative.
354Luc Bonenfant, « Le lyrisme ouvrier, entre sublimation métaphorique et dévoiement synecdochique »
Cette contribution fait ressortir que le sujet lyrique de la poésie ouvrière est romantique par sa manière de prendre volontairement la parole, ce qui le place dans la perspective d’une démocratisation de la parole. Une telle parole, aussi bien nouvelle que singulière par son inconvenance stylistique et esthétique, suggère que les poètes ouvriers empruntent tantôt la voie d’une sublimation métaphorique, tantôt celle d’un dévoiement d’ordre synecdochique.
Jean-Michel Gouvard, « Le lyrisme dans Le Spleen de Paris ou comment être lyrique sans l’être »
L’impossibilité d’être un poète lyrique, au sens romantique du terme, est inscrite au cœur même du projet du Spleen de Paris. Une telle impossibilité préside au choix de la poésie en prose, qui n’était pas un genre établi dans les années 1850-1860, et permet de comprendre pourquoi le poète pastiche et détourne les modalités propres à l’expression lyrique, par divers procédés que cette étude s’applique à dégager. Ce faisant, Baudelaire prend le risque de ne plus être lyrique, pour pouvoir l’être encore.
Nathalie Watteyne, « Le lyrique et l’épique redynamisés chez le premier Rimbaud »
Cette étude montre que les sens mélioratif et péjoratif accolés à la poésie lyrique et au lyrisme s’exacerbent avec Arthur Rimbaud, qui met à mal deux paramètres de l’élévation au xixe siècle : l’expression des sentiments et l’impassibilité parnassienne. C’est dans le contexte de la crise politique qui secoue la France que sont analysés les poèmes écrits entre 1869 et 1871, tant par les invectives et le vocabulaire ordurier du jeune poète que par le ton subversif et l’élan révolutionnaire qui animent son chant de résistance.
Delphine Rumeau, « Polyphonie et lyrisme. L’exemple de quelques élégies à Pablo Neruda »
Cette contribution porte sur un ensemble d’élégies : Élégie à Pablo Neruda, de Louis Aragon, Elegi för Pablo Neruda, de l’écrivain suédois Artur Lundkvist, et El huracán neruda. Elegía de una canción desesperada, du Dominicain Pedro 355Mir. Ces textes sondent le lien du personnel et du collectif, du privé et du public. Non seulement le dialogisme travaille chacune de ces élégies, mais celles-ci doivent en outre se lire de manière chorale, formant un ensemble de voix qui s’unissent dans l’hommage et le doute à la fois.
Ute Heidmann, « La reconfiguration créatrice d’une scène d’énonciation emblématique. Paul Celan, Rose Ausländer et Sylviane Dupuis »
Cette étude explore le fonctionnement des scènes d’énonciation dans l’écriture poétique en l’exemplifiant par l’analyse comparative de textes de trois poètes. Elle montre que la configuration d’une scène d’énonciation est susceptible de relever d’une reconfiguration d’une scène d’énonciation connue ou devenue emblématique. Ces reconfigurations aboutissent à la création de nouvelles scènes d’énonciation suggestives par un travail complexe sur le plan langagier, scénographique, générique, intertextuel et interdiscursif.
Evelyne Gagnon, « Énonciations mélancoliques dans la poésie québécoise. Louise Dupré, Paul Chanel Malenfant, Paul Chamberland »
Cette contribution explique que si les élégies en mode mineur prolifèrent au sein du corpus québécois actuel, à même l’imaginaire mélancolique d’un monde précarisé, au seuil de l’incommunicable, les recueils de Dupré, de Malenfant et de Chamberland opèrent de subtiles permutations énonciatives qui relancent le désir de communication. Loin de tonalités apocalyptiques, cette rhétorique de la sobriété promeut une résistance tranquille, une solidarité inquiète face au xxie siècle, en quête d’un nouvel humanisme.
Elisa Bricco, « Sur les traces du sujet lyrique chez Cécile Mainardi »
Ce travail cherche à décrire la configuration du sujet lyrique dans le recueil Rose activité mortelle de Cécile Mainardi. Après une mise au point théorique, il suit les traces du sujet écrivant et du sujet lyrique tel qu’il se profile dans les poèmes. La raréfaction pronominale pourrait cacher un désir d’effacement. Mais elle permet de relever la volonté de s’exprimer par le biais des relations avec le monde et avec les autres.
356Pascal Fobah Eblin, « Aspects énonciatifs de la lyrisation du discours dans la poésie africaine francophone »
Cette étude cerne une des dimensions énonciatives du discours lyrique dans le cadre de la pratique poétique africaine. La figure du locuteur, qui embraie le discours et l’inscrit dans une structure énonciative fondamentalement dialogale, est son marqueur principal. Elle est d’ailleurs le responsable du construit textuel et son support linguistique le plus manifeste, même lorsque le cadre énonciatif est interactif. Il est aussi le sujet modal, source des opinions et des points de vue contenus dans le texte poétique.
Michèle Monte, « Les relations entre énonciateur textuel, locuteurs et personnages. Étude des scénographies poétiques chez José-Flore Tappy, Eugène Guillevic, Jacques-Henri Michot »
Ce texte précise les modalités de présence du poète-énonciateur textuel dans les poèmes lyriques. Il analyse d’abord un poème qui se caractérise par un syncrétisme entre le poète et le « je » opérant une fusion entre l’expérience sensible, la prise de parole et le projet esthétique, puis des poèmes où l’énonciateur textuel se distingue des locuteurs ou personnages, ce qui coïncide souvent avec une accentuation de la dimension esthétique du poème ou de son positionnement critique.