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Classiques Garnier

Comptes rendus

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Revue Verlaine
    2023, n° 21
    . varia
  • Auteurs : Degott (Bertrand), Dupas (Solenn)
  • Pages : 223 à 231
  • Revue : Revue Verlaine
  • Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN : 9782406165736
  • ISBN : 978-2-406-16573-6
  • ISSN : 2426-8860
  • DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-16573-6.p.0223
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 20/03/2024
  • Périodicité : Annuelle
  • Langue : Français
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Guy Goffette, Verlaine, Paris, Buchet/Chastel, Libella, coll. « Les Auteurs de ma vie », 2021, 186 p.

Dun livre à lautre, le poète Guy Goffette brûle de saisir et dexprimer son attachement à Verlaine, ce qui lui paraît nouer entre elles leurs vies autant que leurs poésies. « Je fus longtemps moi aussi exposé à lerrance, écrit-il dans Partance et autres lieux (2000), jusquà ce quun poète, mort il y a un siècle et des poussières, Verlaine, ce fils prodigue de lArdenne et de la pluie, me ramène au pays des loups gris, des sapins bleus et du tabac. » Alors, comme toutes ces choses quon aimerait dire avoisinent lindicible, les livres se suivent et ne sont chaque fois ni tout à fait le même ni tout à fait un autre1. « Ce quil aura fallu de temps pour que je me convertisse à Verlaine, renchérit-il dans LAutre Verlaine, combien derrances, derrements, de ciels perdus, de pluies, de larmes avant que le vieil Ardennais dexil me rende à ma terre denfance avec le fil du cœur et le sens de ma route, je nen reviens toujours pas. » Le réenracinement grâce à Verlaine devient conversion à et par Verlaine, mais toujours comme on relate une rencontre dautant plus essentielle quelle est tardive : de celles qui donnent envie de poser ses valises et dentrer. « Verlaine est entré dans ma vie comme la foudre dans une maison fermée, écrit-il ici. Javais plus de quarante déjà et je me dis souvent que cest une chance dentrer dans une œuvre pareille à cet âge-là » (p. 10 et 11). Les modalités de léchange sont ainsi clairement définies : entrer dans une œuvre poétique, dautant quon est soi-même poète, revient à laisser entrer ce poète dans sa vie. « Les auteurs de ma vie » ne sont-ils pas, non seulement les écrivains qui jalonnent ma vie, mais ceux aussi qui contribuent à la constituer, tous ceux qui la construisent, qui lorientent et la meublent ? Au début de laventure en quelque sorte (au plus près de sa rencontre avec Verlaine2), Goffette avait écrit un Verlaine 224dardoise et de pluie pour la collection « Lun et lautre », laquelle collection ambitionnait doffrir « des récits subjectifs, à mille lieues de la biographie traditionnelle ». Après ce Verlaine dardoise et de pluie, biographie romancée du poète, après LAutre Verlaine, suite de récits où lautobiographique se mêle au biographique, le présent titre Verlaine augurerait-il dun renoncement à la subjectivité ? Ne nous y trompons pas, cette sobriété est imposée par la collection où voisinent rééditions composites (Schopenhauer par Thomas Mann, Virgile par Jean Giono) et œuvres originales récentes (La Fontaine par Jacques Réda, Dostoïevski par Julia Kristeva). En tout état de cause, ce qui est écrit nétant plus à écrire, Goffette peut ici en réinvestir la matière avec la distance des ans ; et cest ce quil fait fort bien dans une première partie de louvrage intitulée « Comme un coquelicot dans le brouillard ». « Verlaine : cest fragile et allumé comme un coquelicot dans le brouillard » : cette citation de Claudel figurait déjà en épigraphe de Verlaine dardoise et de pluie, mais quelle paraisse à ce point séduisante – faite dune comparaison familière coulée en deux décasyllabes – suffit-il à en assurer la pertinence ? En « Ouverture » (9-16), Goffette rapporte le souvenir dun écolier qui, en deuil de sa mère, lui avait récité avec beaucoup de conviction « – Ah ! Seigneur, quai-je ? Hélas ! me voici tout en larmes » ; et lui de résumer alors lhomme et lœuvre à ce vers de Sagesse et à cet instant démotion. Pour lui, Verlaine, cest le « pauvre Verlaine » (10), « le chemineau Verlaine » (11), « un enfant qui ne savait pas grandir » (15), « le premier poète de son temps à avoir mis absolument son “cœur à nu” » (id.), vision réductrice qui le porte à affirmer que « la vulgarité le dégoûtait plus que tout » (id.), et ce contre une bonne partie de lœuvre, même si chacun est en droit destimer quelle nest pas la meilleure. Tout aussi discutable, et témoignant vraisemblablement de mauvais souvenirs scolaires : « Avec Verlaine, il ny a guère moyen déchapper à la biographie. Sauf à se perdre dans létude et lanalyse de textes. Tâche souvent desséchante, surtout dans le cas dun poète aussi souple, limpide et musical que lui. » (id.) Ne pourrait-on porter au crédit de la critique récente quelle nélude pas la biographie de Verlaine et, surtout, quelle dissuade de figer ce poète dans des stéréotypes tels que « souple, limpide et musical » ? Mais sans doute sagissait-il aussi pour lauteur dannoncer une deuxième sous-partie proprement biographique, « Opéra » (17-65), où il entraîne son lecteur, suivant dix-sept stations, depuis la naissance du poète jusquà 225sa mort. À mi-parcours, arguant de lécho bien connu que « Mort ! » rend à « La Mort », il donne à ce « fait troublant » une portée prophétique : « Surgi au beau milieu dune série de biblio-sonnets, quil interrompt et laisse inachevée, ce poème encadrera, avec la pièce dédiée à Hugo, une vie et une œuvre entièrement vouées à la rêverie et à la sensation » (26), quitte à occulter à la fois le contenu de ces pièces, la rouerie et toutes les stratégies de reconstruction qui sous-tendent lœuvre. Tel serait en quelques traits le Verlaine que se figure Goffette : sa sélection de poèmes est à lavenant. En quoi ce Verlaine se distingue des deux précédents, cest quau lieu dentretisser la parole du poète à la sienne, Goffette propose ici, en accord avec les exigences de la collection, un choix anthologique. Cest loccasion dune seconde partie intitulée « Poésies choisies » (67-180). Notre intention nest pas de contester ces choix, dont éditeur et lecteurs attendent quils confirment limage du poète qua laissée la première partie de louvrage, ce cheminement « souple, limpide et musical », parmi les ardoises et la pluie, dans un pays denfance et de brouillard doù lon rapporte des coquelicots. Pour autant, il nest pas impossible dinterroger les partis pris quils affichent. Suivant lordre chronologique, les poèmes sont pour lessentiel extraits de quatorze des recueils principaux (de Poëmes saturniens à Invectives). Deux sections sy trouvent néanmoins ajoutées. Deux « Poèmes de jeunesse », au tout début, censés montrer que « sous les maladresses, la voix limpide et musicale du poète se fait jour » (69). Deux « Vieilles “Bonnes Chansons” », tout à la fin, qui, outre quelles furent en effet publiées très tard (dans les Confessions de 1895), confirment la propension de Goffette au bucolisme : aussi lui fallait-il en écarter les deux quintils « Tu parles davoir un enfant / Et nas quà moitié la recette, etc. » (OPC, 157). « Élégiaque, écrit-il de La Bonne Chanson, cette poésie, boudée par la critique, est simple, spontanée et dune sincérité ingénue » (89). Léloge nétait pas moindre dans la partie biographique : « La Bonne Chanson coule de source, fraîche et limpide, pareille à la voix dun enfant qui demande un baiser » (34). Sur les vingt et un poèmes du recueil, il en conserve huit, autant que sur les vingt-deux de Fêtes galantes. De ce dernier recueil, en revanche, il ne garde pas plus « Le Faune » que – et cest tant pis pour Rivette ! – « LAmour par terre », de crainte peut-être quils nen accusent trop fort la dissonance et ou quils nannoncent trop vite « La Dernière Fête galante » (laquelle ne figure pas davantage parmi 226les extraits de Jadis et Naguère). De Dédicaces, Goffette ne retient que quatre sonnets, dont les deux « À Arthur Rimbaud ». Si lon sait que le premier des deux, publié dans Le Chat noir deux ans avant la mort du dédicataire, nest pas dans lédition de 1890, peut-on sans rire présenter ce recueil comme « un touchant mémorial de lamitié » ? Il est vrai que Verlaine, dans la réédition de 1894, « joue dune grande variété de tons et de thèmes », mais est-ce uniquement pour « célébrer ses amis » (159) ? Est-il enfin besoin de préciser que lanthologiste na rien retenu, ni des poèmes de lAlbum zutique ni du reliquat de Cellulairement, occultant ainsi plus généralement la dimension politique de lœuvre et ce quelle peut contenir de subversif dans sa dimension parodique (voire auto-parodique). Il ne nous dit pas grand-chose non plus du versificateur, ce qui reste tout de même lune des spécificités de Verlaine. Les textes nen sont pas moins reproduits et typographiés correctement : à lexception d« À Clymène » (84-85) toutefois, dont la polymétrie est pourtant moins complexe que celle de « Chanson dautomne » ou de « Colombine » mais qui souffre dêtre ici entièrement justifié à gauche. Dun livre à lautre, le lecteur vétilleux a pu se demander si Goffette accentue ou non le de « Pauvre Lelian », mais il finit tout de même par conclure que la forme exacte, uniquement dans LAutre Verlaine, nétait due quà une relecture attentive. Il ne sagit là, bien sûr, que de quelques bémols, altérations indissociables du « mode mineur », qui nenlèvent rien à cet ouvrage : Goffette y montre assez sa connaissance de lœuvre et de la biographie – mais sy renouvelle aussi suffisamment – pour en justifier lincandescente nécessité.

Bertrand Degott

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Verlaine, Poèmes saturniens, Fêtes galantes, Romances sans paroles,notes, questionnaires et dossier par Véronique Brémond-Bortoli, Paris, Hachette, coll. « Bibliolycée », 2022, 208 p.

La collection « Bibliolycée » éditée par Hachette propose aux jeunes lecteurs des « clés pour comprendre l[es] œuvre[s] », en vue notamment de les aider à préparer les épreuves de français du baccalauréat. Cest dans cette perspective que le présent volume publie trois des premiers recueils de Verlaine, Poèmes saturniens3, Fêtes galantes et Romances sans paroles. Après une très brève introduction, il donne à lire chacun des ensembles de poèmes, accompagnés de quelques notes offrant des éclairages lexicaux et référentiels4. Six questionnaires fournissent en outre des pistes dexplication linéaire. Un dossier dune trentaine de pages aborde ensuite la biographie de lauteur, la structure des recueils et leur contexte de publication, avant dévoquer les principales thématiques de lœuvre et desquisser quelques prolongements artistiques et culturels. Enfin, une rubrique « spécial Bac » inclut un groupement de textes autour dun parcours intitulé « poésie et sensation5 » ainsi que des sujets décrit6.

À travers ces apports, Véronique Brémond-Bortoli se propose de questionner la manière dont ces recueils contribuent au renouvellement de lexpression lyrique. Le recours à lironie, les jeux de masques, les 228procédés damuïssement voire deffacement du « je », lémergence dune « petite manière » « en sourdine » au cœur de paysages-états dâme « évanescents ou funèbres » (p. 9) sont notamment soulignés, de même que les échos à la chanson, ou encore lart de la dissonance et de « lexprès trop simple » (p. 185). Si ces axes savèrent dans lensemble pertinents, on regrettera cependant que les commentaires reconduisent un certain nombre de stéréotypes et danalyses discutables.

« Le poète, lit-on par exemple dans le dossier à propos de la fameuse musicalité verlainienne, préfère employer les consonnes douces : on trouve peu docclusives dans ses vers, mais beaucoup de liquides (l, r) ou de fricatives (sifflantes, chuintantes…) qui produisent une harmonie beaucoup plus fluide » (p. 188). Ces remarques fondées sur la lecture de quelques pièces en particulier ne résistent guère à une approche élargie de lœuvre, dans sa diversité. Sans surprise dailleurs, les six poèmes retenus pour mettre en œuvre des exercices détude linéaire7 font partie des textes les plus souvent convoqués dans les anthologies, parce quils illustrent des versants familiers de la poétique verlainienne orientés vers lévanescence, le vague et la sensation. Ce choix confirme une difficulté tenace à embrasser lhétérogénéité et, dans une certaine mesure, la complexité de lœuvre.

Certaines analyses métriques proposées dans cette édition posent également question. Véronique Brémond-Bortoli illustre certes à bon escient quelques manifestations de l« un peu déjà libre versification » (« Critique des Poèmes saturniens ») revendiquée par Verlaine, en notant par exemple linversion de lordre des quatrains et des tercets dans « Résignation », la « rime orpheline » de lariette III et les rimes isosexuelles de lariette IV. En revanche, parler dune « dislocation du vers » dans « Charleroi » (p. 191) ou de « vers » « brisés » dans lensemble de la section « Paysages belges » (p. 170) ne semble pas aller de soi. Bien quelles aient été largement discutées par les métriciens et les spécialistes de Verlaine8, les caractéristiques prétendument intrinsèques de limpair occupent de plus une large place dans ces commentaires. 229Lhendécasyllabe, dans « lAriette IV », soulignerait « la confusion des sentiments » grâce à son « instabilité glissante » (p. 187). Plus largement, les analyses invoquent l« absence de symétrie » des vers impairs, censée créer « une impression [de] flou » et de vague, mais aussi de « légèreté », « [de] déséquilibre, [de] doux-amer [] » (p. 120).

De nombreux éléments de contextualisation littéraire manquent dautre part de précision dans le volume. Les Parnassiens, est-il noté en fin douvrage, cultivent « la forme pure, “lArt pour lArt” (comme le prône Théophile Gautier) », « [s]ans message philosophique ou politique » (p. 176). Le « Prologue » des Poèmes saturniens est dès lors résumé à une « Inspiration parnassienne », et l« Épilogue » à un « Credo parnassien : culte du Beau, rejet de lInspiration pour le Travail et la Volonté » (p. 168). Si Véronique Brémond-Bortoli ajoute quil est parfois difficile de cerner dans ces pièces « la limite entre fidélité et pastiche », « le goût de larchaïsme », « ou de lorientalisme », « fris[ant] quelquefois la parodie » (p. 181), elle présente dans lensemble les premiers recueils comme un parcours permettant à Verlaine de « se libérer de linfluence [] du Parnasse, pour inventer un nouveau lyrisme » (p. 8). Il serait utile de préciser que pour le poète, cette mouvance relève dabord dune nébuleuse constituée de personnalités créatrices diverses. Cest à ce titre quil participe au Parnasse, tout en manifestant une certaine distance à légard de ses représentants les plus doctrinaires9.

Pour illustrer limportance de lhéritage baudelairien, évoqué de façon très rapide dans louvrage, quelques exemples déchos intertextuels aux Fleurs du Mal auraient été bienvenus. On pourrait également signaler que lart de la répétition, particulièrement à lœuvre dans la section « Paysages tristes » des Poèmes saturniens,doit beaucoup à lintérêt que le jeune Verlaine porte à la poétique de son aîné. À ce propos, signalons 230que lexpression « jérémiades lamartiniennes » est attribuée à Baudelaire dans le dossier final (p. 176), alors quelle est employée par Verlaine dans son étude sur « Charles Baudelaire » (LArt, 186510).

Si les références aux Vilains Bonshommes et au Cercle zutique sont tout à fait opportunes dans les repères mis à disposition des lecteurs (p. 177), les apports consacrés au Symbolisme seraient quant à eux à vérifier. À plusieurs reprises, la commentatrice sous-entend en effet que ce courant est contemporain de la publication des trois recueils ici présentés. Il ne se mettra cependant en place quau milieu des années 188011, soit une douzaine dannées après la parution des Romances sans paroles. Selon Véronique Brémond-Bortoli, les recherches que Verlaine conduit sur « la sensation et limpression, sur lautonomie du mot poétique, dégagé des codes explicites du langage, sur la syntaxe, les formes métriques et la musicalité rejoignent celles des poètes symbolistes comme Rimbaud et Mallarmé qui lont considéré comme leur chef de file » (p. 181). Non seulement ces deux poètes ne peuvent être assimilés à des Symbolistes revendiqués, mais suggérer que Rimbaud et Mallarmé auraient pu considérer Verlaine comme leur « chef de file » dans le cadre de cette école savère franchement problématique.

Louvrage ne prétend pas sattarder sur les enjeux socio-politiques de lœuvre. La censure en vigueur sous le Second Empire (p. 175) et les « sympathies » du poète pour la Commune sont rapidement évoquées (p. 172), mais ces éléments de contexte ne sont pas pris en compte dans lanalyse des poèmes. Les audaces morales que ces recueils recèlent sont en revanche davantage soulignées par Véronique Brémond-Bortoli. La rubrique dédiée aux « Thèmes principaux » de lœuvre nélude pas la place que Verlaine accorde à lexpression du désir, dans « le dévoilement de linterdit [] ou dans le sous-entendu » (p. 189). Sur ce plan, certains éléments auraient néanmoins pu être précisés. Difficile par exemple de sen tenir à une définition du « faune » comme divinité « champêtre » « protect[rice] des troupeaux » (p. 111), sans préciser que cette figure évoque également « lespièglerie libidineuse, la lubricité12 ». À propos des suggestions homosexuelles mises en lumière dans lariette IV, il serait 231en outre intéressant dévoquer Les Amies,cette plaquette de six sonnets en rimes entièrement féminines que Verlaine publie clandestinement fin décembre 1867, chez léditeur belge Poulet-Malassis.

Dans cette édition conçue pour un lectorat lycéen, la représentation du poète et de son œuvre reste finalement assez largement empreinte de stéréotypes. Les repères biographiques qui concluent louvrage présentent ainsi la trajectoire personnelle et la création de Verlaine sous le signe dune inéluctable « dégrad[ation] » (p. 173). Limage dun poète marqué par lâge sous-tend dailleurs en creux lensemble du volume. De façon significative, des portraits de Verlaine réalisés à la fin de sa vie sont en effet privilégiés pour illustrer les textes de Poèmes saturniens, Fêtes galantes et Romances sans paroles. « Nevermore » (II) est accompagné dune illustration de Cazals intitulée « Paul Verlaine dans un paysage hivernal », réalisée entre 1886 et 1898 (p. 63). De même, la photographie du poète par Otto (p. 6), dont la date nest pas mentionnée en légende, a été réalisée en 1893, soit près de vingt ans après la publication des Romances sans paroles. Afin dactualiser cette iconographie, il aurait été intéressant de reproduire par exemple lun des portraits du poète récemment retrouvés, qui le montrent âgé dune vingtaine dannées13.

Pour conclure, quelques ressources bibliographiques actualisées auraient été bienvenues dans les dernières pages de louvrage, même si celui-ci ne se présente pas comme une édition critique dotée dambitions scientifiques. En fin de volume, un site est signalé par Véronique Brémond-Bortoli (http://paul-verlaine.net), mais ce dernier est désormais inaccessible. Tout en mesurant les contraintes quimplique la prise en compte des besoins du public lycéen, on pourra regretter en définitive que cette édition nexploite pas davantage les apports des travaux de recherche engagés depuis plusieurs décennies autour de ces recueils de Verlaine, au moment dinviter les jeunes lecteurs à les découvrir.

Solenn Dupas

1 Voir, du même auteur, Verlaine dardoise et de pluie (Paris, Gallimard, coll « Lun et lautre », 1995) et LAutre Verlaine (Paris, Gallimard, 2008).

2 Dans son récit éponyme « LAutre Verlaine », Goffette situe sa rencontre avec Verlaine (à Trois-Rivières, au Québec et dans lédition de la Pléiade) en 1991, soit quatre ans avant son Verlaine dardoise et de pluie.

3 La graphie Poëmes saturniens nest pas retenue dans louvrage.

4 Certaines de ces notations auraient pu être précisées, ponctuellement. La référence aux « fils de Raghû », dans le « Prologue » des Poèmes saturniens, est par exemple expliquée par lintérêt que Verlaine portait aux « grandes œuvres de la mythologie hindoue, comme le Ramayana ou le Mahabharata » (p. 13). Il conviendrait dajouter que loin de relever dun engouement personnel, cette prédilection était partagée par un certain nombre de contemporains, dont Louis-Xavier de Ricard et Leconte de Lisle, entre autres.

5 Ce groupement de textes inclut des poèmes de Baudelaire (« Correspondances »), Laforgue (« Complainte dun autre dimanche »), Rimbaud (« Aube ») et Apollinaire (« Nuit rhénane »).

6 Dont un sujet de dissertation invitant à discuter lanalyse de Jean-Michel Maulpoix, selon laquelle la poésie de Verlaine traduit « les infinies ou indéfinies nuances de la vie intérieure, plutôt que des idées ou des sentiments » (La poésie malgré tout,Paris, Mercure de France, 1996).

7 Les poèmes accompagnés dun questionnaire détude linéaire sont les suivants : « Mon rêve familier » et « Chanson dautomne » (Poèmes saturniens) ; « Clair de lune » et « En sourdine »(Fêtes galantes), lariette III « Il pleure dans mon cœur… » et « Charleroi » (Romances sans paroles).

8 Sur ce point, voir en particulier Benoît de Cornulier, « Mètre “impair”, métrique “insaisissable” ? Sur les derniers vers de Rimbaud », dans Marc Dominicy (dir.), Le souci des apparences, Bruxelles, Éditions de lUniversité de Bruxelles, 1989, p. 75-91 et Steve Murphy, Poëmes saturniens,Paris, Honoré Champion, 2008,p. 365-368.

9 Comme le rappelle Steve Murphy, « le Parnasse était bien davantage à ses débuts une nébuleuse quune école. Cette conclusion, banale certes, a lavantage de mettre en relief le caractère inopérant de beaucoup de représentations du Parnasse qui sélectionnent une image où Verlaine, notamment, se trouve immédiatement exclu, comme sil était demblée entré en contradiction avec les principes du mouvement. Car il faudrait dabord saisir le manque de principes consensuels, ou pour mieux dire la surabondance de principes hétérogènes et inégalement partagés, du Parnasse de 1866-1870. Ce qui permet de comprendre comment Verlaine se situe à lintérieur de cette nébuleuse » (Marges du premier Verlaine,Paris, Honoré Champion, 2003, p. 88-89.)

10 La datation de « LAmour au théâtre italien » serait dautre part à corriger : la période de création de cette toile de Watteau est 1715-1717, et non 1515-1517 (p. 124).

11 On pourrait faire la même remarque pour le courant de la Décadence évoqué dans lintroduction, à propos dune période allant de 1866 à 1874 (p. 10).

12 Trésor de la Langue Française informatisé. Lacception érotique du terme « coquillages » pourrait aussi être signalée dans le poème des Fêtes galantes dédié à ce trouble objet. (Alfred Delvau, Dictionnaire érotique moderne,Paris, 10/18, 1997 [1864], p. 161 : « Coquille : la nature de la femme ».)

13 Voir Bernard Bousmanne, Elena Savini, « Sur les clichés dévoilés à Lécluse. Paul et Élisa en images », RV16,2018, p. 17-38.