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Classiques Garnier

Le Cœur froid Un conte économique du romantisme allemand

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Revue d’histoire de la pensée économique
    2016 – 2, n° 2
    . varia
  • Auteur : Disselkamp (Annette)
  • Résumé : Le conte Le Cœur froid de l’écrivain Wilhelm Hauff (1827) comporte une série d’allusions manifestes à la vie économique. Faisant référence aux débuts du capitalisme, il se montre hostile aux institutions économiques les plus fondamentales, l’argent et l’échange. Mais au-delà de ses aspects dénonciateurs, la narration offre une vision originale de l’économie, dont la teneur apparaît à la lumière des thèmes privilégiés du romantisme littéraire.
  • Pages : 149 à 165
  • Revue : Revue d’histoire de la pensée économique
  • Thème CLIL : 3340 -- SCIENCES ÉCONOMIQUES -- Histoire économique
  • EAN : 9782406063506
  • ISBN : 978-2-406-06350-6
  • ISSN : 2495-991X
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-06350-6.p.0149
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 13/12/2016
  • Périodicité : Semestrielle
  • Langue : Français
  • Mots-clés : Économie et littérature, romantisme allemand, Hauff, richesse, bonheur, désir, argent, échange
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Le Cœur froid

Un conte économique du romantisme allemand

Annette Disselkamp

CLERSÉ UMR 8019

Université de Lille

Introduction

Le conte Le Cœur froid (Das kalte Herz) de lécrivain Wilhelm Hauff, paru en 1827, est resté célèbre en Allemagne jusquà nos jours, non seulement en littérature mais également dans les discussions actuelles à propos de léconomie. La référence au « cœur froid » revient de manière récurrente jusque dans la presse spécialisée, avec des commentaires comme celui-ci : « Les marchés financiers sont vus par leurs critiques comme le cœur froid du capitalisme. Libres démotions. Orientés vers le seul profit. Sans pitié » [Steingart (2011), p. 13].

Lhistoire se passe dans la Forêt-Noire. Le protagoniste Peter Munk, insatisfait de sa condition modeste de charbonnier, envie le sort des verriers et des flotteurs de bois, plus riches et mieux considérés. Un jour, il rencontre le terrifiant « Hollandais Michel », avec lequel il conclut un marché, une sorte de pacte diabolique, aux termes duquel il obtient la richesse en échange de son cœur. Muni dès lors dun cœur de pierre, il se transforme en une personne insensible et brutale. Mais sa nouvelle vie, le luxe, le faste, lennuient. Las, incapable déprouver ni tristesse ni joie, il sadresse à nouveau au Hollandais Michel. Moyennant une ruse, il récupère son vrai cœur, rejoint sa famille et vit heureux désormais.

Ce résumé en quelques lignes suffit pour signaler que les connotations économiques du Cœur froid sont flagrantes. Nul ne doute que le conte 150sinspire des réalités données et les blâme à la fois. Lauteur souligne ainsi que lavidité du gain gagne la Forêt-Noire du jour où les flotteurs savisent de vendre le bois, coupé en grande quantité, non plus à Cologne mais en Hollande, afin daugmenter leurs marges ; il précise encore que le Hollandais Michel doit son immense richesse au fait de court-circuiter les commerçants intermédiaires : « Ce que nous obtiendrons en sus sera notre profit » [Hauff (1827), p. 308]. Puis, sur cet arrière-plan, il y a un jugement de valeur : lhistoire illustrerait les effets déshumanisants de léconomie du marché, avec lavènement dun esprit étroitement matérialiste, la perte de lidentité personnelle, la perversion des mœurs.

Cependant, est-ce là assez pour en faire un conte économique par excellence ? Cest linterrogation que nous nous proposons dexplorer dans la présente contribution. Deux choses frappent. Dune part, une interprétation comme celle qui vient dêtre esquissée considère la sphère économique par ses côtés destructeurs uniquement, en la réduisant à un système axé sur le profit et des façons dagir vicieuses. Dautre part, elle aboutit à la formulation de règles de vie qui sont au fond banales sinon dépourvues de bon sens, comme les suivantes : la richesse corrompt, lopulence ne rend pas heureux.

Or lexercice consistant à réfléchir sur le thème « économie et littérature » serait en quelque sorte superflu sil ne sagissait que de découvrir, dans les productions de lart, des vérités moralisatrices. Afin de déceler des nuances plus originales, je me propose danalyser les motifs centraux du conte, celui du cœur froid et celui de lor, à partir de la symbolique romantique. Ce procédé permet de sengager dans des réflexions qui sont sans doute inhabituelles. Pour anticiper, le romantisme allemand décrit un être humain dont lexistence est comme suspendue entre le sensible et lintelligible, et dont la courbe de vie se dessine entre lespoir datteindre la perfection, et le désespoir de se voir toujours ramené à la réalité. Se pourrait-il que léconomique partage cette espèce de déchirement ?

Nous allons en un premier temps présenter un résumé du conte, puis nous procéderons en trois parties. Dabord, nous essaierons de dégager les critiques quil semble adresser à léconomie moderne sur un ton sermonneur. Puis, nous montrerons que la trame visible du conte contient des éléments qui relèvent demblée dune représentation plus différenciée, avec des réflexions proches de léconomie philosophique. La dernière partie traitera de la question suivante : quel est lapport sui generis de la perspective littéraire ?

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I. Lintrigue

Wilhelm Hauff, né en 1802 près de Stuttgart, en Souabe, mort à lâge de 25 ans dune maladie inexpliquée, développe dès son enfance un goût passionné pour la lecture et découvre son talent de narrateur, dont sa sœur et ses amies ont la primeur. Il fait des études de théologie protestante mais sans y attacher de véritable intérêt. En 1826, il publie un roman satirique (Communications des mémoires du Satan), qui emporte un grand succès et sera suivi dun roman historique et dautres nouvelles.

Hauff est considéré comme un « représentant tardif du romantisme souabe » [Dictionnaire du romantisme (2012), p. 322] ou de « lécole poétique souabe », groupe littéraire qui développe les thèmes romantiques de la nature, de la nostalgie, des « ténèbres intérieures » [Béguin (1991), p. 155], de linfini, en les teintant de couleurs locales. Influencé entre autres par Jean Paul, E. T. A. Hoffmann et C. von Brentano, il serait sans doute en partie oublié aujourdhui sil ny avait ses contes. Ce sont eux en effet qui sont les mieux connus, et non les récits qui lont rendu célèbre de son vivant. Le Cœur froid, lun des plus populaires, sinsère dans un Almanach intitulé LAuberge du Spessart, cercle de narrations ornées dun récit-cadre à la manière « orientale » [Dictionnaire du romantisme (2012), p. 322]. Le lecteur ouvre là des histoires que les compagnons de fortune qui se retrouvent le soir ensemble dans une auberge perdue au milieu de bois sombres se racontent entre eux pour passer le temps et vaincre leurs frayeurs, car le lieu est lugubre.

En Allemagne, Le Cœur froid est « aussi fameux que les contes des Frères Grimm » [Wachendorff (1827), p. 445]. Mais comme sa notoriété na guère passé les frontières nationales, il est nécessaire à cet endroit den donner un bref résumé.

Dans le nord de la Forêt-Noire, deux métiers jouissent de la plus grande estime, celui des flotteurs et celui des verriers. Le conte leur fait correspondre deux figures imaginaires, à savoir le Petit-Homme-de-Verre (Glasmännchen) ou Gardien du trésor (Schatzhäuser), « bon lutin haut de trois pieds et demi » [Hauff (1827), p. 298], de caractère bienveillant, généreux et espiègle, et le Hollandais Michel (Holländer Michel), personnage effrayant, « Maître de la forêt », « plus grand dune bonne tête que 152tous les autres » [Hauff (1827), p. 306], aux traits perfides, mesquins, avares, et possédant dimmenses richesses. Il se passe alors ceci : le charbonnier Peter Munk désire quitter le métier de ses ancêtres, métier dont lexercice salit les mains et rapporte peu. Son rêve est de sélever à la condition des verriers ou des flotteurs, comme le Gros-Ézéchiel, le Long-Schlurker et le Roi-de-la-Piste-de-Danse, le meilleur danseur à la ronde [Hauff (1827), p. 300]. Or Peter, né un dimanche, bénéficie dun privilège : il peut adresser trois vœux au Petit-Homme-de-Verre, qui vit caché dans la forêt. Au bout de plusieurs tentatives vaines, Peter réussit enfin à le rencontrer et à lui présenter ses souhaits. Son premier vœu est de savoir danser encore mieux que le Roi-de-la-Piste-de-la-Danse, et d« avoir toujours autant dargent en poche que le Gros-Ézéchiel » ; son second, de devenir le propriétaire de « la plus riche verrerie de toute la Forêt-Noire » [Hauff (1827), p. 305]. Le lutin les concède tout en faisant remarquer leur sottise, il refuse cependant le troisième vœu, des chevaux et une petite calèche. Peter apprend à ses dépens combien il a été stupide. Un jour quil joue contre Ézéchiel, à lauberge, il gagne aussi longtemps que celui-ci est chanceux, mais lorsquÉzéchiel perd toute sa fortune – contre Peter –, les poches de ce dernier se vident conformément à ce quil a bêtement souhaité. Laubergiste le met dehors. Couvert de honte, plus misérable que jamais, et par ailleurs incapable de soccuper de sa verrerie, il sadresse alors au terrible Hollandais Michel. Celui-ci lui procure toutes les richesses quil désire et même davantage, mais en échange, il lui arrache son cœur et lui implante un cœur de pierre. À partir de ce jour, Peter vit dans le luxe et lopulence. Seulement, il saperçoit que lexistence dhomme riche ne lui donne aucune satisfaction : cest que son cœur froid ne connaît pas démotions. Afin de tromper son ennui, Peter épouse la plus belle fille du village, mais le mariage ne lui porte pas plus de bonheur. Lavarice et la méchanceté le rongent et ne le laissent jamais tranquille ; à la fin, il tue son épouse dans un accès de rage, ne supportant pas sa bonté et sa générosité envers les mendiants. Pourtant, tout se terminera bien : moyennant un artifice que lui indique le Petit-Homme-de-Verre, Peter parvient à regagner son vrai cœur lors dune lutte finale dramatique avec le Hollandais Michel. Fort heureusement, il lui reste un vœu : Peter supplie alors le lutin de lui rendre son épouse. Le lutin exauce le troisième souhait et lorsque Peter retrouve la belle Lisbeth, il comprend que « mieux vaut 153être content et posséder peu, quavoir de lor et des biens et un cœur froid » [Hauff (1827), p. 434].

Tels sont les événements dont se tisse ce conte dune soixantaine de pages. Nous allons essayer den dégager la teneur économique : exercice à la fois évident et délicat, tant il est vrai que les multiples références sont multivoques.

II. Le bien, le mal

Tout en mettant en scène des figures surnaturelles, Le Cœur froid intègre des éléments significatifs de la situation économique réelle. Les années 1820 à 1830 voient se produire des changements importants en Allemagne. Lordre traditionnel hiérarchique seffrite, la société bourgeoise se met en place, le capitalisme connaît son premier essor [Schmitz-Emans (2004), p. 19]. Le surnom « Hollandais » fait allusion au développement du commerce du bois avec les Pays-Bas, marché auquel la Forêt-Noire doit limportation de capitaux considérables [Kittstein (2002), p. 26].

En signalant les références à la constellation historique, les commentateurs soulignent que lauteur dénonce les changements récents et quil fait léloge des mœurs passées. Que retiendra-t-on alors du Cœur froid relativement à la sphère économique ? Le conte symboliserait les lois implacables qui gouvernent léconomie du marché [Schmidbauer (2012), p. 155] et mettrait en garde contre son influence nocive : « cœur de pierre, assassinat de la conscience, cruauté sociale, partout où la réduction de la pensée à la seule utilité économique sunit à la brutalité » [Kuschel & Assmann (2011), p. 60].

Une lecture qui met ainsi en avant les réflexions critiques du conte à lencontre de léconomie du marché débouche souvent sur une vision dualiste, où lexistence se trouve divisée en deux camps, le bien et le mal. Le bien, ce sont la simplicité et la fidélité aux racines, autant de vertus qui sexprimeraient dans lexercice dun métier artisanal et la vie au foyer. En revanche, le mal, identifiable sous la forme des péchés capitaux, à savoir lenvie, lavarice (« avarice inhumaine », écrit Hauff [(1827), p. 301], la luxure, lorgueil, la gourmandise, la colère, la mélancolie – tous 154présents –, sincarnerait dans le fonctionnement du nouveau monde capitaliste. Il ny a pas jusquà la grande presse quotidienne qui ne se souvienne des avertissements du Cœur froid ; un article de la Frankfurter Rundschau regrette que le conte soit « si peu pris au sérieux » alors même quil est « lun des plus lus du romantisme » [Lodemann (2012), p. 2]. Que veut dire le journaliste ? Si la société acceptait les leçons de Hauff, il ny aurait pas de crises et les pauvres ne seraient pas oubliés.

On ne saurait prétendre que ce type de lecture soit abusif. Prenons successivement largent et léchange

Largent. Le conte utilise largent et lor comme synonymes, les condamnant tous deux. Le verdict, rapporté à la façon dun témoignage venant de la bouche dun vieillard qui connaît bien la région et ses habitants, semble sans appel : « Il y a cent ans environ, cest du moins ce que disait mon grand-père, il ny avait pas de peuple plus honnête sur toute la terre que les habitants de la Forêt-Noire. À présent, depuis quil y a tant dargent dans le pays, les hommes sont devenus malhonnêtes et mauvais » [Hauff (1827), p. 306]. Non seulement largent « devenu Dieu » [Kuschel & Assmann (2011), p. 61] génère tous les vices qui existent sur terre, sa capacité colonisatrice et ravageuse fait en plus « perdre lesprit » [Hauff (1827), p. 300].

Léchange. Le conte connaît différentes situations déchange : il y a le commerce avec les Pays-Bas, il y a le pacte avec le diable. Bois contre argent, cœur vivant contre cœur de pierre. Dans tous les cas, cest une opération infâme : lorsque les flotteurs naviguent jusquaux côtes hollandaises en vue dobtenir le meilleur prix, ils vendent non seulement les plus beaux sapins de la région, ils en vendent lâme et la leur avec.

Hauff mobilise ici des mythes anciens et notamment celui du Faust, qui remonte au xve siècle ; ce mythe est sans doute dorigine populaire et dans la Forêt-Noire même plusieurs légendes y font appel [Schnierle-Lutz (2009), p. 4]. La version définitive du Faust I de Goethe a paru en 1808, dix-neuf ans seulement avant Le Cœur froid. Parmi les motifs du pacte diabolique, Hauff retient surtout lidée de son caractère aliénant. Léchange nous transporte ainsi en un lieu angoissant, en coupure totale 155avec le monde vécu et avec le familier. Tout est énorme et surdimensionné dans la salle souterraine quhabite le géant, le poêle, les bancs, les ustensiles. Mais curieusement, il ny fait pas obscur, la lumière est plus claire quau dehors jusquà devenir éblouissante. Or lexcès de lumière et la mort sont la même chose, puisque la vraie nature mélange au contraire le clair et lobscur.

Autre élément remarquable, dans léchange sunissent flagornerie, bassesse et fourberie. Le Hollandais Michel argumente, sefforce de persuader, essaie de prendre lautre par ses faiblesses et ce faisant débite des contrevérités. « Donne-moi cette stupide chose palpitante, et tu verras comme tu te sentiras bien » [Hauff (1827), p. 416] explique-t-il à Peter, pour vanter les mérites du cœur de pierre : « Cest dune fraîcheur très agréable. Pourquoi un cœur devrait-il être chaud ? En hiver, sa chaleur ne te sert à rien, un bon verre de kirsch est plus utile quun cœur chaud, et en été, quand tout est lourd et brûlant, tu nimagines pas à quel point un tel cœur peut rafraîchir » [Hauff (1827), p. 418]. Peter se laisse embrouiller, sans sapercevoir quil est dupe dune énorme escroquerie.

Finalement, léchange est incompatible avec la bonté car échanger est le contraire de donner. Comme le précise le conte, « le Hollandais Michel navait pas lair de vouloir donner de largent par pitié, sans demander quelque chose en échange ». Par contraste, le lutin, qui préfère dailleurs se montrer sur une butte où les sapins sont « si serrés et hauts quil y fait presque nuit en plein jour » [Hauff (1827), p. 303], donne gratuitement, ne serait-ce quaux enfants nés un dimanche. Il nexige rien en retour, il nargumente pas, il ne trompe pas. Il laisse en revanche à ses interlocuteurs la possibilité, ou plutôt la chance, de se tromper.

Les exemples de largent et de léchange le montrent, le conte porte un jugement sévère à lendroit des institutions économiques. Ce faisant, largent et léchange sont définis ici dune façon qui ne satisferait guère le spécialiste, car largent apparaît comme une matière dont la seule fonction consiste à pouvoir être accumulée, tandis que léchange se présente comme le troc dun bien contre un mal. À sen tenir à une telle représentation, le lecteur pourrait être tenté de conclure que les formes établies de léconomie, assimilées à la chrématistique, sont superflues : le constat de leur nocivité se confond alors subrepticement avec lidée que nous nen avons au fond pas besoin ; dans ce genre de perspective, tout se passe comme si le héros, du moment où il retrouve son vrai 156cœur, quittait léconomie tout court pour nobéir désormais quaux lois de lamour et de la générosité, qui, eux, ne se déploieraient quau sein dun règne pur dont léconomique serait absent.

On le devine, tout évidente quelle soit, une telle interprétation népuise pourtant pas le sens de la narration. Il est nécessaire de la nuancer. Et avant même de se poser la question de savoir quel est lapport proprement original du conte à la compréhension de léconomique, il suffit dy regarder dun peu plus près pour sapercevoir que Le Cœur froid comporte des aspects qui brisent la dichotomie du bien et du mal telle quelle se dessine au premier coup dœil. Au-delà dune critique des institutions économiques jusquà leur diabolisation – le mal, ce sont les formes économiques, le bien, cest den être protégé –, lhistoire développe en effet une autre perspective, transversale à la première. Voici ce que nous entendons : le héros peut éventuellement se détourner des attraits de la richesse monnayable, il ne saurait pour autant quitter lordre de la production et de la consommation. Cest-à-dire que la réalité économique où se déroulent les destinées des personnages ne se résume pas à la négativité.

III. Une économie très intramondaine

Afin de faire ressortir cet autre registre, jai sélectionné les thèmes du bonheur et de la raison pratique. Notons que les réflexions de Hauff ne sont pas isolées relativement à ces sujets : le germaniste et philosophe J. Vogl [Vogl (2008)] la montré récemment, lhistoire de la littérature allemande offre, en de multiples endroits, une représentation non réductrice qui voit en léconomie autre chose quune sphère pervertie dont les manifestations sappellent « argent » et « échange ».

Le bonheur et la richesse. Le Cœur froid, anti-économique ou an-économique ? Il nen est rien. De fait, le conte peint les contours dun bonheur tout terrestre, en illustrant quune existence heureuse nest pas indépendante des conditions matérielles de production et de consommation. Noublions pas quà la fin, le 157héros se voit comblé de façon tangible : le lutin transforme sa chaumière en une belle ferme, et si celle-ci nest pas luxueuse comme le sont les maisons des verriers et des flotteurs, tout y est pourtant « abondant » et « beau ». En travaillant avec courage et application, Peter accède « à laisance ». Et comme si cela ne suffisait pas, le Petit-Homme-de-Verre lui offre « quatre rouleaux dargent » à loccasion de la naissance de son premier enfant – un garçon –, et plus exactement « de bons thaler badois tout neufs et pas une seule fausse pièce dedans » [Hauff (1827), p. 434-444]. Quest-ce à dire ? Lhistoire illustre non seulement que la soif insatiable de gains est délétère, elle illustre encore que savoir gérer une propriété vaut mieux que de vivre chichement dans une cabane. Linscription du bonheur au sein de lexistence économique résonne au demeurant dans le deuxième nom du Petit-Homme-de-Verre, « Gardien des Trésors » : nous lavons vu plus haut, le lutin veille particulièrement sur ceux qui sont nés un dimanche (Sonntagskinder), cest-à-dire ceux qui sont appelés à vivre une vie comblée de bonheur selon la croyance populaire. Or cest le même lutin qui veille également sur les richesses.

Raison pratique. En dehors des vertus de la bonté et de la générosité, que les commentaires ne se lassent de mettre en avant, il est une autre qualité dont le conte fait léloge, à savoir la capacité de bien raisonner. Le Petit-Homme-de-Verre a un visage « pâle, mais fin et intelligent » [Hauff (1827), p. 299]. Le Hollandais Michel en revanche, qui possède sans doute un certain sens des affaires, ne brille pas pour autant par sa subtilité. Cest pourquoi il nimpressionne guère le premier, qui le traite de « goujat » [Hauff (1827), p. 315].

Le conte dit ceci : à moins dexercer son intelligence, une personne ne fera pas son chemin dans le monde. Le défaut principal de Peter, ce nest pas dêtre vicieux : de fait, le protagoniste est un bon garçon. Son défaut est de mal raisonner. « Oh, stupide Peter Munk-le-Charbonnier ! », lui dit le Petit-Homme-de-Verre en réponse à son troisième souhait, celui quil refuse. « Des chevaux ? Une petite voiture ? Cest de la raison, je te le dis, une saine raison humaine et de lintelligence, cest cela que 158tu aurais dû souhaiter, mais non un petit cheval et une petite voiture » [Hauff (1827), p. 318]. La suite confirme ses appréhensions : si Peter soccupe mal de la verrerie, cest quil na pas appris ce métier et quil ne sait pas gérer les affaires.

À lexamen des notions que nous venons de mentionner, il ressort que le message économique du Cœur froid ne saurait être confondu avec la seule dénonciation. Ce nest pas lhostilité à léconomique qui parle là. Certes, le conte jette lopprobre sur une économie du marché motivée par le profit à lexclusion de toute autre considération. Mais dans le même temps, il fait comprendre que lagent nest pas libre de se placer en dehors de la vie économique : ses choix peuvent être bons ou mauvais, ils ne sauraient être an-économiques. Voilà ce qui nous permet de dépasser la première lecture, la plus courante, qui ne voit dans le conte quun concentré danimosité exprimée à légard dune économie envahissante et dévastatrice.

IV. Une économie romantique

IV.1 – Entre le romantisme et le biedermeier

Tout en sopposant, les analyses ci-dessus se ressemblent en un point essentiel : à sy tenir, le conte ne fait quillustrer des thèmes et des notions économiques, il ny contribue guère de note propre. Or une telle approche a quelque chose de frustrant car du moment que la littérature nexprime que des vérités qui sont de toute façon connues par ailleurs, les mêmes sujets pourraient très bien être traités sans son secours. Pour pousser plus loin, je voudrais dès à présent essayer de déterminer quelles sont ses intuitions spécifiques. Ce questionnement nécessite de replacer le conte dans le contexte de la période romantique.

Il importe de noter dabord que la question de la périodisation du Cœur froid est complexe. Associé le plus souvent au romantisme tardif, Hauff est également proche du biedermeier, terme qui désigne à la fois une époque, celle qui sétend de 1815 à 1848, et un style. Lié à la Restauration, dinspiration plutôt conservatrice voire réactionnaire, le biedermeier est synonyme dun nouveau mode de vie, à savoir la recherche dun bonheur 159« bourgeois » réduit à la vie familiale, à lécart de la sphère publique, dans le confort et la tranquillité intimes. Les productions littéraires du biedermeier affectionnent lidylle, elles cultivent lamour dune nature intacte et les sentiments. Très souvent, le biedermeier comprend une critique de lindustrialisation et de ses conséquences, puisquil préfère lexistence harmonieuse du village au bruit de la ville.

Plusieurs commentateurs discernent les traits du biedermeier dans Le Cœur froid [Schwarz (1983), p. 125]. Le héros ne choisit-il pas à la fin dembrasser une existence étriquée au sein de la famille ? Ne fait-il pas son retour dans les schèmes ? Mais tout en reconnaissant quune certaine tension entre le biedermeier et le romantisme règne à lintérieur même du conte, la majorité saccorde pour affirmer que cest le second qui y donne le ton. Ainsi, chez Hauff, la nature nest pas un décor champêtre, elle peut se montrer menaçante et sur elle se projette toute langoisse ressentie par le héros : voilà lun des indices à lappui de cette position. Nous allons nous y ranger et essayer de comprendre quelle est, à la lumière de la symbolique romantique, la signification des motifs centraux du conte, le cœur froid et lor.

IV.2 – Le cœur froid et lor
dans la littérature romantique

La symbolique du « cœur » en général, puis du « cœur froid » en particulier, possède des racines anciennes, comme le note M. Frank, philosophe et germaniste lui aussi, qui rappelle que, « depuis toujours », le cœur sert de métaphore pour exprimer l« unité des fonctions de lâme et de lesprit ainsi que du corps » [Frank (1978), p. 256]. Les exemples sont nombreux de lAncien Testament jusquà la tradition littéraire moderne. Les paroles de Peter implorant le Petit-Homme-de-Verre, « Ôtez de moi cette pierre morte et donnez-moi mon cœur vivant » [Hauff (1827), p. 429], sont une citation presque littérale du prophète Ézéchiel, 11,19 : « Je leur enlèverai du corps leur cœur de pierre et je leur donnerai un cœur de chair ».

Conformément à la tradition, le cœur froid chez Hauff symbolise tout le désespoir de linsensibilité à soi-même et à autrui : « Cest comme si je ne vivais quà moitié », dit Peter [Hauff (1827), p. 421]. Ce qui distingue notre conte, cest sa façon darticuler ce motif ancien à celui de lor. Afin de mieux saisir les implications de cette association, il convient 160de rapprocher le Cœur froid dautres contes du romantisme auxquels il est souvent comparé, notamment Le Runenberg (1812) de L. Tieck [Tieck, 1978], Les mines de Falun (1819) dE. T. A. Hoffmann [Hoffmann, 1979], et Peter Schlemihl (1822) dA. von Chamisso [von Chamisso (1989)].

Le Cœur froid partage avec les autres contes deux traits principaux. Leurs héros sont des mélancoliques qui aspirent à échapper à la banalité de la vie ordinaire, et qui éprouvent un attrait irrésistible pour la sphère inanimée – les cristaux, les métaux, lor –, au point dy sacrifier jusquà lamour. Le personnage Elis Fröborn, dans Les mines de Falun, descend sous la terre, à la recherche de la pierre « Almandin », le jour même où il devait se marier. Christian, dans le Runenberg, quitte son foyer familial pour gagner les profondeurs dune montagne inhospitalière. Enfin, Peter Schlemihl vend son ombre, cette zone dobscurité qui accompagne, tel un fidèle camarade de route, tout corps physique exposé à une source lumineuse, en léchangeant contre la monnaie sonnante et trébuchante.

Or en relation avec ces récits, la critique littéraire a montré que la référence à lor ou aux cristaux nétait pas aussi univoque quil ny paraissait à première vue. Certes, les protagonistes saventurent dans les régions les plus effrayantes, et leur fuite ne porte que du malheur, à eux-mêmes et à leurs proches. Ainsi, Peter Schlemihl, dépourvu dombre, inspire la terreur, les autres personnes se détournent de lui, il est obligé de vivre la nuit afin de cacher sa monstruosité, puis il perd sa fiancée lorsque celle-ci découvre son secret. Linfortune est contagieuse, elle gagne lentourage : pour prendre un autre exemple, au moment où le héros du Runenberg, Christian, délaisse les siens, la misère sabat sur eux.

Pourtant, dautres motifs se font entendre. Il nest que de se demander quels sont les attributs des métaux précieux ou des cristaux qui les rendent si séduisants. La réponse semble simposer : ces matières sont impérissables, et elles brillent. Et cest en prenant ces caractéristiques que nous parvenons à déceler, en lattirance éprouvée par les protagonistes, autre chose quune vilaine soif de richesse. De fait, ce qui tente les personnages, cest lidée dune sphère qui ne connaît pas les vicissitudes du temps et qui résiste à la flétrissure : en dautres termes, léternel par opposition au temporel. Particulièrement saisissantes, les dernières pages des Mines de Falun : peu de temps après sêtre enfui sous la terre, Elis reste enseveli sous les décombres dun éboulement. Cinquante ans plus tard, des ouvriers découvrent son corps parfaitement conservé : le mort 161na pas vieilli. Sa fiancée, qui, elle, porte tous les traits du grand âge, le reconnaît. Prise démotions, elle expire au moment dembrasser une dernière fois son bien-aimé, dont le corps tombe en poussière aussitôt.

Quen ressort-il ? Si leur condition ne satisfait pas nos héros, cest quils ressentent vivement toute la futilité de lexistence mortelle. Or il ne sagit pas simplement pour eux dimaginer un paradis où les moments de félicité nont pas de fin. De fait, les caractéristiques de la durabilité et de léclat ne sont pas seulement le contraire du périssable et de léphémère ni ne se résument à la négation de la mort et de tout ce qui rend la vie pénible à supporter, elles font plutôt signe vers une dimension qui possède des qualités propres : à savoir, les sphères de lesprit et de lart. Au demeurant, lor et le cristal sont-ils vraiment inanimés ? Leur étincellement ne leur confère-t-il pas une espèce de similitude avec les êtres vivants, consistant dans le fait de ne jamais être pareils à eux-mêmes dinstant en instant ? Fluides, aux reflets chatoyants, ils semblent véritablement participer de la vraie vie.

IV.3 – La poésie de léconomie

Et ce sont ces allusions précisément que retiendra une lecture comparée du Cœur froid, en mettant en relief ce que lattitude dinsatisfaction du héros possède de noble : à savoir, son goût pour une existence qui transcende lordre du commun pour sélever dans une autre réalité, une existence qui baigne dans le sublime.

Ainsi, dans la création poétique, lor ou les cristaux servent de métaphore qui illustre, dune part, lessence de lart, son éloignement des affaires de ce monde, puis dautre part, la position de lartiste lui-même, sa séparation de la famille et lincompréhension de celle-ci, son arrachement social, sa renonciation à une vie normale pour ne pas dire médiocre, son émancipation morale, puis le fait quil côtoie constamment la folie [Voß (2008), p. 53]. À travers une telle grille de lecture, tout change. Lor, montrant son autre face, exprime un genre de non-conformisme. Son indifférence par rapport aux besoins et son non-utilité deviennent une force plutôt quune faiblesse, ils correspondent à la faculté, propre à lêtre humain, de se hisser au-dessus du primaire. La recherche de lor pour lor, la chrématistique, cest de la vanité : voilà ce qui demeure vrai. Mais dans le même temps, lor représente ici le contraire de la vanité, à savoir une sphère qui dépasse la quotidienneté.

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Quelles sont les conséquences pour notre propos ? Dès lors, léconomie nentre-t-elle pas dans une nouvelle dimension elle aussi, pour sinscrire dans le déchirement de la condition humaine, une condition tiraillée entre lattachement à lordinaire et le désir dy échapper ? On pourrait dire que léconomique, la production, la consommation, relèvent de ce même processus de création où le quotidien est transposé en des artéfacts porteurs de la volonté daller au-delà du donné. En sachant que cette sorte de multiplication du monde physique est un cheminement pavé de périls et bordé dabîmes, car il y a le danger, inhérent à tout effort pour sarracher au coutumier, de se fourvoyer jusquà laliénation. Lélan original est alors mué en son contraire, limmobilité complète, cest-à-dire la pétrification.

Il est vrai que le propos de Hauff demeure emprunt dambiguïté, comme sil voulait nous mener par le bout du nez. Voici ce quil écrit : « Un charbonnier dispose de beaucoup de temps pour réfléchir sur soi-même et les autres, et quand Peter Munk surveillait sa meule, cernée par les arbres sombres et le profond silence de la forêt, il avait envie de pleurer et une nostalgie inconsciente lenvahissait. Quelque chose lattristait, quelque chose lirritait et il ne savait pas bien quoi ». La nature, lobscurité, la réflexion, le silence, la nostalgie, une vague tristesse : ny a-t-il pas là tous les ingrédients de laspiration à fuir loin du commun ? Cela serait aller trop vite en besogne. De fait, en une tournure qui ne manque pas dhumour, lauteur poursuit : « À la fin, [Peter] saperçut de ce qui lirritait, et cétait – sa condition. “Un charbonnier noir et solitaire ! se disait-il. Cest une vie de misère. Comme ils sont considérés, les verriers, les horlogers, même les musiciens le dimanche soir !” » [Hauff (1827), p. 299]. Les pensées de Peter abandonné à sa libre imagination ne senvolent donc pas dans le fantastique, elles lui font miroiter une situation meilleure.

Ainsi, le héros ne se rabat pas immédiatement sur linfini. Le message du conte semble plutôt être celui-ci : comme lexistence nest jamais telle que les êtres humains le souhaiteraient, la sensation du manque est constitutive de leur nature. Cest pourquoi ils imaginent un ailleurs. Mais ils savent aussi quils nont que cette terre pour réaliser leurs désirs. Nécessairement, ils seront désappointés. Et léconomique prend part à ce mouvement sans issue et dangereux, dans lentrelacement – et non la division – de lordinaire et de lextraordinaire.

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Une lecture naïve pourrait puiser dans le conte des propos édifiants du type, « le cœur nourrit des désirs que léconomie ne saurait combler ». Or à mon sens, il faudrait retourner une telle affirmation en : les désirs et les aspirations de lêtre humain, qui ne peuvent par définition être assouvis, sexpriment dans toutes les sphères y compris léconomie. Nous lavons vu plus haut, Hauff montre que les choix de la vie sont économiques quoi quon fasse, aucune destinée ne saurait sy soustraire, il ny a pas de lieu préservé.

Conclusion

Nous avons montré que le conte comprenait plusieurs strates à teneur économique. Alors que la réception lassimile souvent à une critique non seulement anticapitaliste mais antiéconomique, il renvoie également à une autre conception, dordre philosophique, en faisant voir que la préférence accordée à la vie simple et libre de toute ambition daccumulation monétaire demeure bien un choix économique. Ensuite, il est apparu que le traitement romancé jette sur ces thèmes un éclairage nouveau, en révélant leur complexité. Situé dans lambiance littéraire du romantisme, le conte adopte en effet une signification inouïe : des propos paraissant simples et directs deviennent ambivalents, le message se modifie. Léconomie, exhibant des facettes insolites, se présente comme emportée par le désir, tout poétique, de sextirper de limmédiat, en sachant que ce désir est toujours accompagné de la tristesse de savoir quil nexiste pas de refuge pour se mettre à labri de la réalité.

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