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Classiques Garnier

In angulo Italiæ Bossuet et la république de Venise

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Revue Bossuet Littérature, culture, religion
    2020, n° 11
    . Bossuet et l’Italie (xviie-xxe siècle)
  • Auteur : Van Hamme (Clément)
  • Résumé : S’intéresser à la représentation de Venise dans l’œuvre de Bossuet éclaire la place que donne ce dernier à cette zone apparemment périphérique de l’Italie dans son érudition ecclésiastique, et permet d’interroger le traitement qu’une telle référence subit chez un évêque dont le gallicanisme a été intensément discuté, alors même que la république et son théologien officiel, Paolo Sarpi, ont suscité le vif intérêt des milieux gallicans de la fin du XVIe et du début du XVIIe siècle.
  • Pages : 47 à 67
  • Revue : Revue Bossuet
  • Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN : 9782406110491
  • ISBN : 978-2-406-11049-1
  • ISSN : 2494-5102
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-11049-1.p.0047
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 09/11/2020
  • Périodicité : Annuelle
  • Langue : Français
  • Mots-clés : Bossuet, Venise, Sarpi, antiromanisme, république, Interdit, unité, variations, protestantisme
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In angulo Italiæ

Bossuet et la république de Venise

Quand il sagit de juger les hommes et les événements dun autre pays et dune autre race, — quelque bien instruit que lon soit de la matière dans les mêmes faits, et quelque pénétration et quelque impartialité que lon apporte à les examiner, — on court le danger den méconnaître grossièrement le sens et la portée, si lon na pas été, pour ainsi dire, introduit et acclimaté par avance à lesprit et à la conscience de la nation quon veut étudier, si lon y pénètre sans être informé au préalable, — et dans un détail suffisant, — de ses institutions, de ses mœurs, de ses façons, publiques et privées, de penser et de sentir1.

Faudrait-il reprendre, en lappliquant à lItalie, ce jugement quAlfred Rébelliau portait sur les erreurs commises par Bossuet au sujet de lAllemagne luthérienne ? On serait aujourdhui réticent à employer les mêmes termes quen 1891 pour décrire le rapport de lévêque de Meaux à la péninsule italienne, qui renvoient à une manière désormais dépassée de considérer les relations entretenues par les auteurs dAncien Régime avec les pays étrangers. Certes, Bossuet lisait un peu litalien et témoignait dun intérêt anecdotique pour les productions culturelles de lItalie2 ; il a chargé son neveu, labbé Bossuet, dacheter pour lui des copies de tableaux et destampes lors de son séjour outre-monts3. Il sintéresse aux voyages des bénédictins de Saint-Maur et tire profit 48de lIter Italicum et du Museum Italicum de Jean Mabillon, publiés en 1687 et dont il a suivi lélaboration4. Cela reste trop peu pour supposer quil ait été acclimaté à lesprit de lItalie, ou informé de ses façons de sentir : ce serait donner à son érudition, principal canal de ses représentations de lItalie, un objectif qui nétait pas le sien. Lidée dune nation italienne, par ailleurs, lui aurait sans doute paru étrange en un temps où la péninsule était fragmentée en différents États. À lépoque moderne, tout particulièrement dans la littérature religieuse, la question de lunité sapplique moins à lItalie quà la communauté chrétienne en général. « Lidée italienne », qui ménage un ensemble composite dentités séculières distinctes sans être tout à fait indépendantes, entre en dialogue et parfois en conflit avec « lidéal chrétientaire5 » dune république chrétienne unie et pacifiée, au moment même où elle est menacée par la Réforme au nord et par le Turc à lest. Cet idéal ne survit quen sadaptant à « un processus de dissociation entre lien dappartenance confessionnelle et rapport de sujétion civile6 » : chez les prédicateurs, les controversistes et les historiens, les frontières intérieures et extérieures de lItalie sont tantôt estompées au profit dun idéal dunité chrétienne, tantôt mises en évidence au gré des alliances et des mésalliances, des conciles et des schismes, des guerres armées et des conflits doctrinaux.

De même que « lItalie intellectuelle », dans la seconde moitié du xviie siècle, « ne recouvre pas la péninsule dans son entier7 », lItalie de Bossuet semble avant tout dominée par Rome. À lopposé de la « fontaine babylonienne de corruptions spirituelles8 » décrite par les controversistes protestants, la capitale antique et le siège des papes, berceau de lhumanisme et de la Contre-Réforme, souffre peu la comparaison, chez lui, avec ses voisins géographiques. Le centre romain occupe une 49place prépondérante, parfois au risque docculter au détour dune formule la diversité politique et culturelle de la péninsule. En ce pays-là, qui est un seul espace géographique, deux réalités apparemment distinctes : Rome et lItalie.

La France, plus favorable à [la] puissance sacrée [des papes] que lItalie et que Rome même, leur devint comme un second siège9. — Cette remarque de M. Simon nest bonne quà faire penser aux libertins quen étudiant la théologie, cest-à-dire en approfondissant la doctrine chrétienne, on sen dégoûte et on devient hérétique ; que cest là le sentiment de lItalie et de Rome même, et que toute létude de ce pays-là nest que politique et intérêt10.

Décentrer le regard vers la république de Venise permet dinterroger la fortune dune zone apparemment secondaire de lItalie chez Bossuet, en cherchant la place qui lui est réservée dans léconomie générale de son œuvre. Une telle démarche offre surtout loccasion dobserver le traitement quune telle référence subit chez un évêque dont le gallicanisme a été lobjet de vives discussions, alors même que Venise a particulièrement suscité lintérêt des milieux gallicans de la fin du xvie et du début du xviie siècle. Frappée dinterdit en 1606 pour avoir contesté le pouvoir spirituel indirect que voulait exercer le pape sur ses affaires temporelles, la république a saisi loccasion de sériger en « porte-parole des exigences des États contre les prétentions ecclésiastiques11 ». La légitimité de cette posture antiromaine fut défendue par Paolo Sarpi12 et trouva un écho au sein du gallicanisme français. Depuis le difficile avènement dHenri IV, Venise passait pour une « Église sœur » qui cherchait, comme la France, à 50concilier « autonomie nationale, cogestion de lÉglise par les deux pouvoirs spirituel et temporel, et respect de la communion romaine13 ». Lattrait pour lhistoire vénitienne sest généralisé dans les milieux érudits. La référence à Venise, tout au long du xviie siècle, traîne souvent derrière elle les traces dun mythe politique systématisé à partir de la fin du xve siècle par des historiens pro-vénitiens14 et répandu en France grâce à la diffusion et à la traduction de leurs ouvrages dans la seconde moitié du xvie siècle. La longévité des institutions de Venise y est justifiée par une lecture idéalisée de son histoire : forte de douze siècles dexistence, plus ancien État du monde, la république aurait échappé à lemprise des puissances extérieures depuis sa fondation et détiendrait encore cette liberté originelle. Elle devrait sa conservation tant à la protection directe de Dieu quà la coexistence, au sein de son gouvernement, de principes monarchiques (le doge), démocratiques (le Grand Conseil) et aristocratiques (le Sénat)15. Érigée en modèle de stabilité et en exemple de cohésion politique16, Venise devait apparaître comme une alternative à deux modèles historiques, politiques et religieux concurrents : Florence et Rome. Bossuet fut-il amené à reprendre, pour les reconduire ou pour les critiquer, les formulations essentielles de ce mythe vénitien ?

Bossuet et le modèle vénitien

Linventaire après décès dressé en 170417 permet de formuler des hypothèses sur les lectures vénitiennes de lévêque de Meaux, si on le complète par le catalogue de la vente publique de sa bibliothèque et 51de celle de son neveu18 — même si ce catalogue nautorise, quant à lui, que des suppositions sur létendue réelle de la bibliothèque de lévêque de Troyes à lintérieur de celle de son oncle19. La quasi-totalité des livres consacrés à Venise ne figurent pas dans linventaire après décès mais dans le catalogue de vente, bien que les ouvrages concernés soient antérieurs à 1704. Seules deux mentions de linventaire, absentes du catalogue, font référence à Venise. La première se rapporte malgré son imprécision aux travaux de ses historiens officiels. Les Rerum venetarum historiae20 peuvent tout à la fois être celles de Pietro Bembo (Paris, 1551), celles de Pietro Giustiniani (Venise, 1560), rééditées à Strasbourg en 1610 et en 1611, ou celles de Marco Antonio Coccio, dit Sabellico, imprimées plusieurs fois à Venise de 1487 à 1556 et rééditées à Bâle en 1670. Puisquaucune histoire de Venise na été éditée en dix volumes avant lanthologie des Istorici delle cose Veneziane (Venise, 1718-1722), il faut supposer que les dix volumes regroupés dans la seconde mention sous le titre « De republica veneta21 » désignent lHistoria della republica veneta de Giovan-Battista Nani, publiée en deux volumes séparés en 1662 et en 167922. Les références du catalogue de vente sont plus précises : on y trouve, outre lédition originale vénitienne de la Venetia città nobilissima de Francesco Sansovino, publiée en 1581 et quil faudrait associer aux historiens cités ci-dessus, les Pièces du mémorable procès ému lan 1606 entre le pape Paul V et les seigneurs de Venise (Genève, 1607), lHistoire générale de Venise de Théodore de Fougasses (Paris, 1608), lHistoire du gouvernement de Venise de Nicolas Amelot de la Houssaye (Paris, 1677) et sa traduction de lExamen de la liberté originaire de Venise23 (Ratisbonne, 1677). On y 52trouve également deux éditions de lHistoire du concile de Trente de Paolo Sarpi, lune en italien24 (Genève, 1629), lautre en français, dans une réimpression de la traduction donnée par Amelot de la Houssaye sous le pseudonyme de La Mothe Josseval (Amsterdam, 1685).

Bossuet dispose donc de ressources sur lhistoire vénitienne qui le mettent tout à fois en présence des élaborateurs, des continuateurs et des premiers critiques du mythe politique vénitien. À côté des historiens favorables à Venise, dont Théodore de Fougasses est lun des émules au lendemain de la crise de lInterdit, Nicolas Amelot de la Houssaye est le principal représentant, à la fin du xviie siècle, dune tradition anti-vénitienne dont les origines remontent à la troisième guerre dItalie (1508-1513). Son Histoire du gouvernement de Venise, publiée en 1676, provoque la colère du sénat vénitien au point de lui valoir un séjour de six mois à la Bastille et linterdiction de son ouvrage. Dès 1677, il propose au public une traduction de lExamen de la liberté originaire de Venise — écrit anonyme italien mis en circulation en 1612, qui entendait démontrer que lindépendance originelle dont Venise se vantait vis-à-vis des puissances extérieures était une fable. La variété de ces lectures vénitiennes tient sans doute moins au souci dexhaustivité de Bossuet, quil manifeste par exemple au moment de la querelle du quiétisme25, quà sa tendance à vouloir prendre connaissance des ouvrages les plus réputés, récents ou anciens, au moment du préceptorat du Dauphin26.

Linfluence réelle de ces lectures se mesure difficilement, faute de références explicites dans les œuvres où elles ont pu être exploitées. Les Pièces du mémorable procès font exception : on peut supposer quelles 53ont servi à la rédaction du chapitre xii du livre IV de la Defensio declarationis — seul endroit, sauf erreur, où Bossuet fait mention de lInterdit. Lévêque, en tout cas, nentre pas de front dans le débat sur le modèle vénitien, pas plus quil ne se montre sensible à une lecture providentialiste de lhistoire républicaine de Venise. Ce nest pas quil veuille passer sous silence un exemple historique qui contesterait la primauté du système monarchique27. Sil admet écrire « dans un État monarchique » et tourner « les instructions [quil] tir[e] de lÉcriture au genre de gouvernement où [il vit]28 », il donne aux autres formes de gouvernement la place que les histoires, sainte et profanes, leur accordent légitimement. « Les histoires nous font voir un grand nombre de républiques », dit-il, dont « les formes de gouvernement ont été mêlées en diverses sortes29 » et sur lesquelles « Dieu na rien prescrit au genre humain30 ». Le régime républicain nest lobjet daucun parti pris, dans la mesure où Bossuet entend démontrer légale respectabilité de toutes les formes de gouvernement et leur capacité à être légitimes. Quelques passages de la Politique nhésitent dailleurs pas à déceler dans certaines républiques des caractéristiques monarchiques en puissance31. Le terme de république, dans le reste de son œuvre, ne désigne que rarement une forme spécifique de gouvernement quand il est employé absolument. Il 54est synonyme de sociétés au pluriel et désigne la fragmentation du genre humain en différents États32 : cest le sens de lunique occurrence du terme dans ses sermons33.

Que devient alors un idéal républicain comme celui de Venise sil ne rencontre aucune opposition de principe ? Bossuet évoque les événements qui lui sont traditionnellement rattachés. Si la naissance de Venise prend la forme dune tournure de style dans le Discours sur lhistoire universelle, « Venise séleva au milieu des eaux34 », il situe la fondation de la ville en 452 et non le 25 mars 421 comme le veut la tradition — date que lExamen de la liberté lui-même reprend. Au mystère théologico-politique dune fondation le jour de lAscension, onze ans après le sac de Rome, Bossuet préfère une naissance dictée par les contingences historiques, au milieu des invasions barbares, lannée où lavancée dAttila pousse des habitants de Padoue et dAquilée à se réfugier dans la lagune. Plus encore, Bossuet réfute lidée dune liberté originelle vénitienne, suivant lidée qu« il ny a point de république qui nait été autrefois soumise à des monarques35 » :

Venise même, qui se vante dêtre république dès son origine, était encore sujette aux empereurs sous le règne de Charlemagne et longtemps après : elle se forma depuis en État populaire, doù elle est venue assez tard à létat où nous la voyons36.

Cette mention de Charlemagne se comprend à la lecture du deuxième livre de lAbrégé de lhistoire de France. Renvoyant à lhistoire médiévale de lItalie, Bossuet souligne labsence de souveraineté des États italiens : Nicétas, patriarche dOrient, prend la Dalmatie à Charlemagne et chasse 55de Venise les tenants de son parti37. Cette perspective sur lhistoire italienne, qui conteste lexistence dune souveraineté dans la péninsule au temps de ses recompositions territoriales, est reprise comme argument à la suite de lassemblée générale du clergé de France de 1682 : elle est appliquée à Venise dans lExamen de la liberté38. Le rôle de la république dans lorientation de la quatrième croisade (1202-1204), traditionnellement mis en avant pour avoir permis la reprise de Constantinople, est occulté en faveur de la France à cette exception près que Venise y est honorée par la figure de son doge, Enrico Dandolo, qui, « quoique fort âgé et aveugle, promit de se croiser39 ». Bossuet, sur la question des devoirs des pays chrétiens contre les infidèles, semble reconduire une forme de préférence nationale qui ne laisse pas de place à une mise en valeur du rôle stratégique joué par Venise, dans la droite ligne de la destinée manifeste que le royaume sétait depuis longtemps attribuée vis-à-vis du Turc40. Les références à la guerre de Candie (1645-1669), menée depuis Venise, sont dissimulées derrière une évocation plus générale de la croisade antiturque, « vieux rêve cher à Bossuet41 », dans loraison funèbre de Marie-Thérèse dAutriche en 168342 et dans une lettre adressée à Innocent IX en 1678 :

Cest le grand honneur de la France de se pouvoir glorifier que depuis douze-cents ans que ses rois ont embrassé la foi catholique, [] [et] ce nest pas 56un petit honneur à lÉglise romaine, que le trône le plus ancien et le plus auguste de lunivers ait toujours été le plus soumis et le plus libéral envers le Saint-Siège. Quand [Monseigneur le Dauphin] considérera que le Roi son père a été le seul à qui le zèle, et non le besoin, a fait prendre les armes déjà deux fois pour défendre la chrétienté attaquée par les infidèles, il connaîtra que lun de ses devoirs est de réprimer leur audace43.

« Douze-cents ans », « trône le plus ancien de lunivers » : voilà appliquées à la France des qualités que lon trouve également chez les tenants du mythe vénitien. Doit-on aller jusquà voir un reproche implicite adressé à Venise dans la mise en évidence des motivations françaises, « le zèle et non le besoin » ? On les retrouve dans la Defensio declarationis, appliquées au pape Grégoire II lorsquil exhorte le doge de Venise à sallier à lEmpire pour défendre la chrétienté contre les hérétiques44. Le vrai zèle, qui provient de la foi seule, est mis au crédit du pape et du roi de France : que conclure alors du « si pressant besoin45 » qui poussait en 1656 les Vénitiens à accepter le rétablissement des jésuites dans leur État en échange dune aide armée du pape contre lennemi commun ? Nous touchons là indirectement le cœur de la perspective de Bossuet sur la république de Venise, qui rejoint paradoxalement celle adoptée ailleurs sur les églises protestantes : celui de la variation. Limage est cohérente en dépit de la diversité de ses applications. Venise, similaire à ce « coin reculé de lItalie46 » où le pape Grégoire XII réunit son concile, in angulo Italiae, apparaît moins comme le sujet dun mythe historique à réfuter que comme une frontière du catholicisme et de la chrétienté dont lhistoire soulève des problèmes dordre religieux. Cest par cette voie quelle est 57lobjet, chez lui, dune forme de critique historique, mise au service exclusif de la théologie47. Sil ne trouve dans lhistoire vénitienne aucun changement de régime, elle est à ses yeux un réservoir malheureux de « soubresauts politiques48 » défavorables à Rome et à la France, quil interprète comme autant de signes dune identité chrétienne mobile, donc dangereuse — puisquelle a menacé plusieurs fois lunité chrétienne dont il est le garant en tant quévêque49.

Venise ou les dangers de la variation

LAbrégé de lhistoire de France contient la plus longue évocation historique de Venise de lœuvre de Bossuet, dans lintervalle qui sépare la ligue de Cambrai contre Venise (1510) du traité de paix du Cateau-Cambrésis (1559). Ces pages sinspirent dune historiographie anti-vénitienne inaugurée au temps de Louis XII, sans en reprendre la rhétorique pamphlétaire par souci pédagogique. La république du lion y est peinte en maîtresse dusurpation, bien loin des réalisations exemplaires de la république romaine où l« on gardait légalité et la modestie convenable à un état populaire, “sans que personne voulût dominer sur ses concitoyens50” ». Venise, au début du xvie siècle, « avait tous ses voisins pour ennemis », car « une République qui sétait ainsi agrandie aux dépens de ses voisins, et qui alors ne songeait encore quà continuer ses usurpations, leur devait être fort odieuse51 ». La république pose le problème dun État chrétien légitime dont lambition menace lintégrité des autres puissances chrétiennes :

Une si grande puissance tenait en jalousie toute lItalie, et semblait être en état de la soumettre, si les autres États ligués ensemble ne lavaient pas 58tenue en bride. Elle était gouvernée, comme elle lest encore, par la noblesse et par le sénat52.

Centre des préoccupations de la péninsule, Venise unifie paradoxalement contre elle le reste de lItalie, Rome comprise. Sa conduite est attribuée à un défaut de moralité des citoyens qui la représentent. Bossuet, pour qui « la simplicité et la bonne foi sont deux grands docteurs qui laissent peu de choses indécises53 », reproche aux Vénitiens leur duplicité et leur mauvaise foi, déclinaisons de lhypocrisie qui prennent la forme dun zèle falsifié. Alors que lamitié des anciens romains « était sûre54 », les Vénitiens, « assez lents dans leurs délibérations55 », sont « bien aise de nen point venir à une décision, de peur de mécontenter lun des deux rois56 » auxquels ils sallient au gré des circonstances. « Ennemis dinclination » de lempereur, « alliés seulement par force57 », les sénateurs « paraiss[ent] avec un visage fier58 » lorsquils sallient avec le Turc contre la chrétienté. Ils ne songent quà lui donner satisfaction, tout en se plaignant ostensiblement du manque de rigueur de Charles VIII à son encontre59. Blaise de Montluc, envoyé par François Ier, « homme si pénétrant, ne fut pas longtemps à Venise sans connaître quil ny ferait rien par la négociation60 ». Les guerres dItalie se concluent dailleurs chez Bossuet au prix de la reconnaissance explicite par les Vénitiens eux-mêmes, autorités à lappui, de lantiquité de la royauté française. Avec un zèle qui est plutôt un besoin, « le sénat pressé consulta les registres, où la préséance des rois très-chrétiens était établie sans aucun doute, comme étant les souverains du royaume le plus ancien de la chrétienté61 ».

La condamnation de la duplicité prend une autre forme quand Bossuet en vient à évoquer Paolo Sarpi. Le religieux servite, chargé de la défense théologique de Venise contre Rome en 1606, est la figure vénitienne la 59plus ostensible de son œuvre. On le doit à la virulence du portrait quil en dresse par endroits :

Fra Paolo « couvrait sous un froc monacal le pur calvinisme62 ». « Protestant sous un froc, qui disait la messe sans y croire, et qui demeurait dans une Église dont le culte lui paraissait une idolâtrie63 », « il cachait un cœur calviniste, et [] travaillait sourdement à discréditer la messe quil disait tous les jours64 ». Cétait « un protestant caché, qui regardait la liturgie anglicane comme son modèle », « qui faisait semblant dêtre des nôtres », qui « nétait en effet quun protestant habillé en moine » et qui « ne travaillait quà porter cette république à une entière séparation, non seulement de la cour, mais encore de lÉglise de Rome65 ».

Laccusation est reproduite jusque dans les notes chronologiques qui devaient servir à la suite du Discours sur lhistoire universelle, où le « Frère Paul servite célèbre par son Histoire du concile de Trente, par son savoir prodigieux et par son puissant génie, meurt en apparence dans la communion de lÉglise et en effet calviniste66 ». Chez lévêque de Meaux, Paolo Sarpi quitte donc le champ de la controverse théologique pour devenir un modèle dhypocrisie, dont il ne sagit pas de réfuter la pensée mais de discréditer lautorité morale. Sil fonde essentiellement son accusation sur le résumé de la vie de Sarpi donné par le protestant Gilbert Burnet dans lintroduction de sa Vie de Guillaume Bedell (Amsterdam, 1687), celle-ci remontait au temps de lInterdit. La virulence de lantiromanisme de Fra Paolo avait suscité lespoir chez les protestants, notamment chez Giovanni Diodati qui voyait en lui un nouveau Mélanchton, capable de convertir la république de Venise et dont il aurait reçu en personne laveu des raisons qui lempêchaient de se déclarer67. Elle inquiétait 60Rome, qui tenta dintercepter ses lettres pour constituer un procès en hérésie68, lettres réputées « toutes protestantes, quon avait dans toutes les bibliothèques », pour citer Bossuet, et « enfin rendues publiques69 » par leur publication à Vérone (sous la fausse adresse de Genève) en 1673. Le débat sur lorthodoxie de Fra Paolo ne sétait pas, en effet, arrêté avec sa mort : en 1646, son secrétaire Fulgenzio Micanzio publiait une Vie du père Paul, tentative de réhabilitation sous forme dhagiographie, traduite en français en 1661 et rééditée en 1694. Dans la préface de sa traduction de lHistoire du concile de Trente, en 1683, Amelot de la Houssaye prenait le parti des apologistes de Fra Paolo, contre lIstoria del concilio di Trento publiée en 1656-1657 par le cardinal romain Pietro Sforza Pallavicino pour réfuter celle du vénitien. Débat dactualité donc que lappartenance de Paolo Sarpi à la communion romaine, à un moment où les historiens français commençaient à se saisir de la question de la conversion de Venise au protestantisme grâce à des lettres conservées par le cardinal dEstrées70.

Chez Bossuet, qui juge que « cest approuver lerreur que de ne pas sy opposer71 », lidée dune dissimulation de la foi rappelle et surpasse lhypocrisie des faux dévôts, qui « sont les plus pernicieux ennemis de Dieu [et] qui combattent contre lui sous ses étendards. Nul ne ravilit davantage lhonneur de la piété que lhypocrite qui la fait 61servir denveloppe et de couverture à sa malice72 ». Elle entraîne une condamnation sans appel. Lopposition entre ce qui est montré et ce qui est caché est dailleurs lune des dualités symboliques qui traversent la polémique avec les protestants. Le danger de lhérésie est proportionnel à sa capacité à échapper au contrôle en restant cachée. Lhistoire de lItalie le prouve : « Lélio Socin et ses compagnons tinrent secrètement en Italie leurs conventicules contre la divinité du Fils de Dieu73 » et le pape Gélase découvre à Rome des « restes cachés » des manichéens, qui « avaient des artifices inouïs pour sinsinuer secrètement parmi les fidèles74 ». La dissimulation rend lapostasie dautant plus redoutable que, telle une eau menaçant dengloutir terres, elle suit en chaque endroit des pentes imprévisibles :

De même quune eau débordée ne fait pas partout les mêmes ravages, parce que sa rapidité ne trouve pas partout les mêmes penchants et les mêmes ouvertures ; ainsi, quoique cet esprit dindocilité et dindépendance soit également répandu dans toutes les hérésies des derniers siècles, il na pas produit universellement les mêmes effets : il a reçu diverses limites, suivant que la crainte, ou les intérêts, ou lhumeur des particuliers et des nations, ou enfin la puissance divine, qui donne, quand il lui plaît, des bornes secrètes aux passions des hommes les plus emportées, lont différemment retenu75.

Contrairement à Charlemagne, qui « reçut la doctrine de lÉvangile et de lancienne tradition de lÉglise catholique » par « le canal76 » du Saint-Siège et des évêques, Paolo Sarpi est comparable à lhérétique qui veut « garder les eaux » et ne se « soucie pas du canal77 ». Il a travaillé à faire déborder ceux de Venise avec laide des réformés et sest ainsi rendu coupable dune désunion intérieure avec son Église, dautant plus blâmable quelle sest protégée derrière une union extérieure qui nétait quune apparence.

Cette condamnation de Paolo Sarpi comme protestant dissimulé permet à Bossuet de répudier dun même geste lhistorien de Trente. La 62recevabilité du concile et son caractère œcuménique sont des questions cruciales dans la polémique avec les protestants ; en écrivant son Histoire du concile de Trente et, pire encore, en la publiant clandestinement à Londres, sous un faux nom, avec laide de lapostat Marco Antonio De Dominis78, Sarpi devient un « ennemi déclaré du concile79 ». À des réformés comme Leibniz, qui rejettent le concile pour avoir été « un synode de la nation italienne80 » muselé par le pape, il offre une interprétation antiromaine du concile par un moine catholique81. La référence à Sarpi, dans les deux partis, joue sur sa duplicité supposée : les détracteurs du concile allèguent que Sarpi est bel et bien catholique et ses défenseurs quil était un protestant caché82. Ainsi la ferme condamnation émise par Bossuet vis-à-vis de lhistorien connaît-elle une forme dinflexion lorsquil peut alléguer lHistoire du concile de Trente comme argument contre les protestants eux-mêmes. Lautorité de Paolo Sarpi, irrecevable côté catholique, ne peut selon lui être réfutée dans le camp adverse puisquil faudrait contredire un membre de leur propre religion. Alfred Rébelliau suggère ainsi que Bossuet aurait emprunté à Paolo Sarpi les premières lignes de son histoire de Luther, en attribuant lorigine de ses prédications contre les indulgences à un conflit des Augustins avec les Dominicains83. En dépit de la protestation que 63lui a opposée le pasteur Paul Beuzart84, on doit lui reconnaître davoir su rapprocher les passages de Sarpi et de Bossuet, qui soulignent tous deux le glissement dune condamnation des abus à une étude des indulgences elles-mêmes85. Il ne dit pas de Sarpi, comme la cru Paul Beuzart, que « le crédit de son ouvrage aurait emporté lapprobation de Bossuet86 » : il montre plutôt quune telle référence permet à lévêque de Meaux de mobiliser contre les protestants une autorité quils ne pourront pas récuser alors quil la rejette lui-même87. Avec laide de labbé Pirot, il convoque Paolo Sarpi contre Gilbert Burnet, qui lui-même défendait la validité du témoignage de Sarpi sur le concile de Trente en invoquant son reniement de lallégeance romaine88. En certains endroits toutefois, la référence à Paolo Sarpi nest pas nettement distinguée de celle, très orthodoxe, au cardinal Pallavacino. Au moment dévoquer la convocation du concile de Trente dans la Defensio declarationis, Bossuet semble renvoyer indifféremment aux deux théologiens. Dans un passage ajouté à la Defensio au cours de lété 168589, il cite le texte latin de la bulle Laetare jerusalem de 154490, 64mais se réfère en note à la première bulle dindiction de 154291 tout en renvoyant à lannée 1544 chez les deux historiens du concile. Aucun ne reproduit ni ne commente pourtant le contenu de la seconde bulle à la date de 1544. Tout au plus Sarpi résume-t-il les principales affirmations de la bulle de 1542 à lannée qui convient, bulle qui énonçait une première fois les justifications qui sont simplement reprises dans celle 154492. Bossuet cite-il alors lannée 1544 par réflexe, ou souhaite-t-il renvoyer son lecteur à largumentation développée par le cardinal Pallavacino pour réfuter linterprétation antiromaine de la seconde convocation donnée par Sarpi93 ? Les deux références ne sont pas nettement hiérarchisées ; reste que Paolo Sarpi napparaît pas sans son principal contradicteur.

À la lumière du traitement quil réserve à cette figure emblématique de Venise, on comprend que Bossuet cherche à dissocier la république et le théologien chargé de sa défense dans le chapitre de la Defensio declarationis quil consacre à lInterdit vénitien94. Les leçons quil tire de la conduite de Venise, exclusivement représentée par les deux figures du doge et du sénat, plaident en faveur dune résistance aux prétentions temporelles du pape. LInterdit semble être, aux yeux de Bossuet, un des seuls exemples de lhistoire vénitienne qui puisse être interprété positivement. Le conflit lui montre quun prince excommunié nest pas déposé de sa puissance temporelle ; la nullité du bref émis par le pape est, dit-il, notoire ; la doctrine énoncée par le doge et par le sénat, solide ; la république, malgré sa désobéissance, demeure un enfant de lÉglise romaine. Venise sait ménager, dans les procédures officielles, la vigueur dune protestation légitime et le respect dû à Rome :

65

Le démêlé entre Paul V et la république de Venise sémeut sur la juridiction ecclésiastique. Venise est interdite. La République se défend avec respect, mais avec vigueur. Elle chasse les Jésuites qui seuls des religieux gardent linterdit. [] Par lentremise de Henri IV, les Vénitiens font un accord avantageux avec le Pape qui sétait trop avancé et qui fut bien aise de trouver par cette médiation une sortie heureuse95.

La résistance vénitienne a su profiter à lÉglise dans son ensemble parce quelle a su préserver lintégrité de lÉglise : cest à cette condition que lInterdit, bien que dactualité récente, peut servir à lédification générale. Ailleurs, Bossuet loue les mêmes Vénitiens pour avoir préféré Alexandre V à Grégoire XII au moment du concile de Pise, alors que ce dernier était vénitien96. Lindépendance de Venise vis-à-vis des puissances extérieures, que la crise permet aux Vénitiens dappliquer à lautorité pontificale, nest admissible ici que dans la mesure où elle a participé, in fine, au renforcement de lunité de lÉglise par lentremise diplomatique dHenri IV ; on sait désormais, dit Bossuet, quil est possible de « défendre les droits temporels [] sans violer la religion et sans déroger au respect dû au Saint-Siège97 ». Cependant, si lInterdit est le signe dun « siècle éclairé », « las de subir [les] entreprises98 » du pape, et sil dépasse le seul cadre vénitien, il reste une rare exception parmi les conflits internes qui peuvent menacer lÉglise. Bossuet tient dailleurs à préciser deux fois quil ne tire de lInterdit que « quelques observations qui ont rapport à [sa] question99 ». La guerre écrite quil a provoquée entre Paolo Sarpi et le cardinal Bellarmin, poursuivie par toute lEurope, ne peut recevoir dapprobation :

Nous ne parlons que malgré nous de ces sortes de démêlés avec la cour de Rome, et, pleinement convaincus quils ne peuvent être que très préjudiciables à lÉglise et à lÉtat, nous croyons que Dieu punira sévèrement ceux qui en sont les auteurs, qui se réjouissent de les voir naître, qui les fomentent, ou qui enfin ne consacrent pas leurs travaux et leur vie, sil le faut, pour les faire cesser100.

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Cette formulation générale est en réalité la conclusion dune ultime condamnation de Sarpi, accusé davoir profité du conflit pour travailler à lintroduction de lhérésie à Venise et de ne pas avoir eu « la hardiesse de rien proposer au sénat qui put diminuer la dignité du Saint-Siège101 ». Voilà comment se résume son œuvre de polémiste, jusque dans la crise doctrinale célèbre dont il fut lun des principaux acteurs, alors même que la traduction de son Histoire de lInterdit était rééditée102. Bossuet, confronté à un épisode incontournable de la mémoire collective dont il ne peut faire léconomie, reconduit une interprétation positive de lévénement similaire à celle des gallicans du début du xviie siècle, tout en refusant de partager leur enthousiasme pour les publications polémiques qui lont entouré. Ce sont, selon lui, autant de coups portés au souverain bien quest la paix de lÉglise.

La représentation de Venise dans lœuvre de Bossuet ne provient pas du mythe politique qui a inspiré la littérature de son temps. Elle nous donne toutefois de précieux renseignements sur son devenir au sein de lérudition ecclésiastique. Cest pourquoi il serait difficile de reprendre aujourdhui le jugement dAlfred Rébelliau cité en ouverture, tout comme celui dAugustin Gazier, qui affirmait que « royaliste à Paris, Bossuet eût été républicain en Hollande ou à Venise103 ». Bossuet, face à une république étrangère comme Venise, ménage tout à la fois une réflexion sur la légitimité des régimes républicains et une lecture critique de leur histoire. Une telle lecture est le fruit dune subordination de lérudition historique aux impératifs pédagogiques et religieux quénoncent les devoirs du précepteur et de lévêque ; elle est guidée, chez lui, par un amour profond de lÉglise, conçue comme une œuvre dunité dans la diversité, amour qui est « lune des grandes constantes de sa spiritualité104 ». La conduite de la république du lion ne reçoit chez lui dapprobation quà des conditions bien précises, que lInterdit de 1606 seul semble réunir : encore faut-il pour cela débarrasser Venise 67de Paolo Sarpi, trop occupé à diffuser lhérésie et à rabaisser la dignité du Saint-Siège sous son habit de moine pour être un défenseur recevable des vrais intérêts de son pays, cest-à-dire de ceux qui servent aussi lÉglise. Face à une telle constance dans la condamnation, on peut sétonner que labbé Réaume ait pu trouver dans le sermon sur lunité de lÉglise « comme un écho de Fra Paolo105 ». En dépit de lerreur de lecture quelle commet, une telle association invite à considérer les rapprochements dont Bossuet a pu faire lobjet avec certaines figures de la péninsule italienne. Le processus a commencé dès le xviiie siècle, quand lévêque de Meaux a servi dautorité théologique outre-monts106. Léditeur vénitien Giovanni Battista Albrizzi voulut proposer le premier, avec laide de labbé Bossuet, une monumentale et prestigieuse édition des Œuvres complètes de Bossuet en dix volumes (1736-1757) dont il confia lillustration aux grands artistes vénitiens de son temps107 ; parallèlement, le Saint-Office faisait référence à lévêque de Meaux pour condamner le Fra Paolo guistificato de Guiseppe Giacinti Bergantini, tentative de réhabilitation de Paolo Sarpi publiée en 1752108. Les rapports de Bossuet et de Venise ne se limitent donc pas aux chemins pris par la cité des doges au sein son œuvre, ni au regard quil a pu porter sur ses citoyens : ils sinscrivent dans un dialogue historique, politique et spirituel bien plus vaste entre France et Italie.

Clément Van Hamme

Sorbonne Université

Faculté des Lettres

CELLF

1 Alfred Rébelliau, Bossuet historien du protestantisme, Paris, Hachette, 1891, p. 421.

2 Thérèse Goyet, LHumanisme de Bossuet, Paris, Klincksieck, 1965, t. I, p. 120-121.

3 Lettres du 28 août 1696, du 3 septembre 1696 et du 4 mars 1697 à labbé Bossuet, Correspondance de Bossuet, éd. Charles Urbain et Eugène Levesque, Paris, Hachette, 1909-1925, t. VIII, p. 49, 57 et 178. Toutes nos citations de la correspondance renvoient à cette édition (CB). Nous citons également les sermons de Bossuet en suivant les Œuvres oratoires, éd. Joseph Lebarq, revue et augmentée par Charles Urbain et Eugène Levesque, Paris, Desclée de Brouwer, 1914-1926, 7 vol. (OO). Par commodité, nous indiquons également, après les références aux éditions originales ou critiques de ses autres œuvres, leur emplacement dans les Œuvres complètes, éd. Jean-François Lachat, Paris, Louis Vivès, 1862-1879, 31 vol. (OC).

4 Jean-Louis Quantin, « Bossuet et lérudition de son temps », dans Bossuet. Le verbe et lhistoire (1704-2004), éd. Gérard Ferreyrolles, Paris, Honoré Champion, 2004, p. 74.

5 Sylvio De Franceschi, « Les irrémédiables brisures de la chrétienté de lhistoire. Paolo Sarpi entre idée italienne et idéal chrétientaire », dans Le Sentiment national dans lEurope méridionale aux xvie et xviie siècles (France, Espagne, Italie), éd. Alain Tallon, Madrid, Casa de Velásquez, 2007, p. 273-293.

6 Ibid., p. 291.

7 Françoise Waquet, Le Modèle français et lItalie savante. Conscience de soi et perception de lautre dans la République des Lettres (1660-1750), Rome, École française de Rome, 1989, p. 23.

8 Jacques Solé, « LItalie dans la polémique confessionnelle française au temps de Mazarin », dans La France et lItalie au temps de Mazarin, éd. Jean Serroy, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, 1986, p. 125.

9 Sermon sur lunité de lÉglise, OO, t. VI, p. 133. On trouve également ce passage dans la Politique tirée des propres paroles de lÉcriture sainte, éd. Jacques Le Brun, Genève, Droz, 1967, VII, vi, 14, p. 286 ; OC, t. XXIV, p. 98.

10 Défense de la tradition et des Saints-Pères, dans Œuvres posthumes, Amsterdam, Aux dépens de la Compagnie, 1753, III, xviii, t. II, p. 107 ; OC, t. IV, p. 105.

11 Alessandro Fontana et Jean-Louis Fournel, « Le “Meilleur Gouvernement”. De la constitution dun mythe à la “terreur de lavenir” », dans Venise 1297-1797. La République des castors, Fontenay-aux-Roses, ENS éditions, 1997, p. 21.

12 Sur Paolo Sarpi (1552-1623), théologien officiel de la république de Venise au moment de lInterdit, consulter la très récente biographie de Bernard Dompnier et Marie Viallon : LHabit religieux du penseur politique. Une biographie de Paolo Sarpi, Paris, Classiques Garnier, 2019. Leurs éditions de son Histoire du concile de Trente (Paris, Honoré Champion, 2002) et de ses Lettres italiennes (éd. Marie Viallon, Paris, Classiques Garnier, 2016) sont précieuses pour comprendre la fortune de son œuvre et de sa figure à lépoque moderne.

13 Alain Tallon, « Venise, une Église sœur », dans Id., Conscience nationale et sentiment religieux en France au xvie siècle. Essai sur la vision gallicane du monde, Paris, PUF, 2002, p. 183.

14 Élisabeth Crouzet-Pavan, Venise triomphante. Les horizons dun mythe, Paris, Albin Michel, 1999, p. 249-265.

15 Jean-Louis Fournel, « Le modèle politique vénitien. Notes sur la constitution dun mythe », Revue de synthèse, no 118, 1997, p. 214.

16 Ibid., p. 212.

17 Eugène Levesque, « Le testament de Bossuet et linventaire de ses biens », Revue Bossuet, 1901, p. 140-147 et 148-157 ; Id., « La bibliothèque de Bossuet », Revue des jeunes, t. XXVII, 1927, p. 401-422.

18 Catalogue des livres de la bibliothèque de messieurs Bossuet, anciens évêques de Meaux et de Troyes, qui se vendra à lamiable le lundi 3 décembre 1742 dans une des salles du couvent des RR. PP. Augustins, Paris, Pierre Gandoin, Pierre Piget et Barois Fils, 1742.

19 À la suite dAlfred Rébelliau (op. cit., p. 151, n. 1) et de Jean-Louis Quantin (art. cité, p. 69, n. 3), nous considérons que les ouvrages antérieurs à 1704 ont appartenu à Bossuet.

20 Eugène Levesque, « Le testament de Bossuet et linventaire de ses biens », art. cité, p. 145.

21 Ibid., p. 156.

22 Leur succès en France donnera lieu à une traduction française de lensemble dès 1679. Il faut, pour soutenir cette attribution, supposer que seuls ces deux volumes sur les dix au total que recense la ligne de linventaire sont désignés par la mention « De republica veneta ». Le copiste aurait omis de préciser « Dix vol. in-4o, dont De republica Veneta » (Ibid., p. 156).

23 Texte tantôt attribué à Marcus Welser (1558-1614), historien allemand, tantôt au marquis de Bedmar, Alonso de la Cueva (1572-1655), cardinal espagnol et initiateur dune conjuration visant à livrer la ville de Venise à lEspagne en 1618.

24 Nous navons pas trouvé trace de lédition latine dont Jacques Le Brun dit quelle aurait appartenu à Bossuet dans son compte rendu de lédition de lHistoire du concile de Trente de Paolo Sarpi donnée par Marie Viallon et Bernard Dompnier (Paris, Honoré Champion, 2002 ; Revue de lhistoire des religions, t. 221, no 3, 2004, p. 369). Aucune des éditions latines connues ne se trouve dans linventaire de 1704 ou le catalogue de 1742 (voir Paolo Sarpi. Politique et religion en Europe, dir. Marie Viallon, Paris, Classiques Garnier, 2010, p. 422).

25 Jean-Louis Quantin, art. cité, p. 69. Bossuet a entretenu à cette époque une correspondance avec le cardinal de Padoue, Enrico Noris (1631-1704), à propos dun de ses ouvrages. Voir la lettre du 3 septembre 1696 à Enrico Noris, CB, t. VIII, p. 52-53.

26 On trouve dans sa bibliothèque la traduction du Prince de Machiavel par Amelot de la Houssaye (Amsterdam, 1683) et des éditions réputées, parfois anciennes, issues de limprimerie vénitienne. Aux travaux dhistoriens déjà cités, on peut ajouter les œuvres de Pétrarque (Il Petrarca, Venise, 1558), les Funerali Antichi de Thomaso Prochacci (Venise, 1574), les Lettres du Tasse (Venise, 1574) et LEneïde travestita de Giovanni Battista Lalli (Venise, 1635).

27 Voir Gérard Ferreyrolles, « La monarchie », dans Id. et alii, Bossuet, Paris, PUPS, 2009, p. 179-195.

28 Politique, II, conclusion, p. 63 ; OC, t. XXIII, p. 532.

29 Politique, II, i, 6, p. 51 ; OC, t. XXIII, p. 522.

30 Ibid., II, conclusion, p. 63 ; OC, t. XXIII, p. 532. Dans la Defensio declarationis, il précise que Dieu « a laissé à la volonté des hommes les choix des différentes formes de gouvernement ». (Défense de la déclaration de lassemblée du clergé de France de 1682 touchant la puissance ecclésiastique, trad. Charles-François Leroy, Amsterdam, Aux dépens de la Compagnie, 1745, I, iii, t. I, p. 176 ; OC, t. XXI, p. 192, « hominum arbitrio forma relicta ».) Nous citons par commodité la Défense de la déclaration dans cette traduction de Charles-François Leroy (1698-1787), qui se fonde sur lédition latine en deux volumes de la Defensio quil a lui-même donnée, la même année et chez le même éditeur — même si elle est souvent fautive (Aimé-Georges Martimort, LÉtablissement du texte de la Defensio declarationis de Bossuet, Paris, Cerf, 1956, p. 68, n. 144). On indique donc à chaque fois, à sa suite, lemplacement du texte latin dans les Œuvres complètes (où Jean-François Lachat a reproduit le texte de lédition latine), en précisant les leçons que le chanoine Martimort a tirées de létude des manuscrits.

31 Au temps de la république romaine, « on obéissait au magistrat annuel [] avec autant de soumission et de ponctualité quon eût fait dans les monarchies les plus absolues. » (Politique, X, ii, 16, p. 407 ; OC, t. XXIV, p. 216) ; « Il semble quau commencement les Israélites vivaient dans une forme de république. [] Cétait en effet une espèce de république, mais qui avait Dieu pour roi. » (Politique, II, i, 6, p. 52 ; OC, t. XXIII, p. 522.)

32 « Cest sur le cela quelle fonde les sociétés et les républiques, et quelle réprime linhumanité et la barbarie » (De la connaissance de Dieu et de soi-même, Paris, Robert-Marc dEspilly, 1722, V, vi, p. 344 ; OC, t. XXIII, p. 227). « Comment peut-on penser quil ne faille pas rapporter au même principe lassemblage et larrangement qui se voit parmi les hommes ; cest-à-dire leurs sociétés, leurs républiques et leur mutuelle dépendance, où consiste tout lordre des choses humaines ? » (Traité du libre arbitre, Paris, Barthélémy Alix, 1731, III, p. 30 ; OC, t. XXIII, p. 435.)

33 « Cest le règne, lassemblée et, pour parler de la sorte, la république des méchants » (Sermon sur lévangile des Zizanies, OO, t. I, p. 219).

34 Discours sur lhistoire universelle, Paris, Sébastien Mabre-Cramoisy, 1681, t. I, p. 127 ; OC, t. XXIV, p. 348.

35 Politique, II, i, 7, p. 53 ; OC, t. XXIII, p. 523.

36 Ibid.

37 Abrégé de lhistoire de France, OC, t. XXV, II, p. 26.

38 « Les papes lors de lélévation de Charlemagne à lEmpire navaient donc encore aucune souveraineté dans lItalie, quoique par sa libéralité et celle de Pépin son père ils y possédassent déjà le domaine utile dun très ample patrimoine » (LEsprit de Gerson ou instructions catholiques touchant le Saint Siège, s. l., 1691, p. 31). « Le doge Gradénigue obtint un privilège de Louis second [] pour jouir paisiblement de toutes les terres que le clergé et le peuple de Venise avaient possédées en vertu de laccord fait avec les grecs du vivant de Charlemagne » (Examen de la liberté originaire de Venise, trad. Nicolas Amelot de la Houssaye, Ratisbonne, Jean Aubri, 1677, p. 86).

39 Abrégé de lhistoire de France, OC, t. XXV, IV, p. 62. Quelques lignes plus loin, on lit « que la perte de sa vue ni son grand âge ne purent lempêcher de marcher en personne ». Bossuet aura pu trouver ce trait dans LHistoire de Constantinople de Louis Cousin (Paris, 1672-1674) et dans lédition du Louvre des Mémoires de Villehardouin (Paris, 1657).

40 Voir Alya Baccar, Le Lys, le Croissant et la Méditerrannée à lépoque moderne, Tunis, LOr du temps, 1994 ; Géraud Poumarède, Pour en finir avec la croisade. Mythes et réalités de la lutte contre les Turcs aux xvie et xviie siècles, Paris, PUF, 2004.

41 Aimé-Georges Martimort, Le Gallicanisme de Bossuet, Paris, Cerf, 1953, p. 346, n. 1.

42 « Nos alliés ont ressenti, dans le plus grand éloignement, combien la main de Louis était secourable. » (OO, t. VI, p. 181.)

43 Lettre du 24 novembre 1678 au pape Innocent XI, CB, t. II, p. 87-88.

44 « Ce saint Pape [] veut être fidèle à son Souverain [] par zèle et par amour de la foi [et non par besoin] [], quoique ce soit un prince hérétique et persécuteur. » (Défense de la déclaration, II, xiii, t. I, p. 295 ; OC, t. XXI, p. 313, « zelo et amore … obedientia permanebat ».)

45 Blaise Pascal, Pensées, fr. 582 (éd. Sellier). Sur cet épisode de lannée 1656 et sa réception en France, voir notre article « Port-Royal et la république de Venise », dans Port-Royal et la République. 1949-1640 ?, éd. Simon Icard, Guillaume Métayer et Laurence Plazenet, Chroniques de Port-Royal, no 68, 2018, p. 267-269.

46 Cette formule, présente dans la rédaction de 1685 de la Defensio declarationis, est remplacée en 1696 au profit dune autre, « dans la bicoque dAustria », « in tenui atque ignobili Austriae oppido » (Défense de la déclaration, V, xii, t. II, p. 187 ; OC, t. XXI, p. 585). Voir Aimé-Georges Martimort, Létablissement du texte…, op. cit., no 186, p. 137.

47 Jean-Louis Quantin, art. cité, p. 101-103.

48 Id., « Bossuet et les protestants », dans Gérard Ferreyrolles et alii, Bossuet, op. cit., p. 80.

49 Anne Régent-Susini, « Dionysisme et gallicanisme. La figure de lévêque selon Bossuet », Revue de lhistoire des religions, t. 226, no 3, 2009, p. 429.

50 Politique, X, ii, 16, p. 407 ; OC, t. XXIV, p. 216. La citation biblique est tirée du premier livre des Macchabées (XIV, 16).

51 Abrégé de lhistoire de France, OC, t. XXV, XIV, p. 295.

52 Ibid., XIII, p. 252. Voir aussi, un peu plus loin : « Le Pape, les Vénitiens et Ludovic, qui tous voulaient faire la loi et étendre leur domination sur leurs voisins, ne pouvaient se supporter les uns les autres. » (Ibid., p. 275.)

53 Sermon sur la haine de la vérité, OO, t. IV, p. 36.

54 Politique, X, ii, 16, p. 406 ; OC, t. XXIV, p. 216.

55 Abrégé de lhistoire de France, OC, t. XXV, XIII, p. 259.

56 Ibid., XVI, p. 475.

57 Ibid., XV, p. 423.

58 Ibid., XIII, p. 264.

59 Ibid.

60 Ibid., XV, p. 430.

61 Ibid., XVI, p. 476.

62 Défense de la déclaration, IV, xii, t. II, p 111 ; OC, t. XXI, p. 509, « Frater Paulus Calvinianæ hæresi, quam cucullatus fovebat ». On lit, ailleurs : « Fra Paolo [], ce faux catholique, ce calviniste déguisé et caché sous un froc monacal, ennemi déclaré [] de la foi catholique », Ibid., appendice, I, iv, t. III, p. 289 ; OC, t. XXII, p. 475, « Frater ille Paulus Soavis [], inquam, Calvinista cucullatus et catholici nominis specie, [] fidei catholicæ insectator. »

63 Histoire des variations des Églises protestantes, Paris, veuve de Sébastien Mabre-Cramoisy, 1688, VII, cx, t. I, p. 448 ; OC, t. XIV, p. 317.

64 Ibid., p. 449 ; OC, t. XIV, p. 318.

65 Ibid., p. 448 ; OC, t. XIV, p. 317.

66 Histoire universelle. Chronologie, t. IV, Paris, Bibliothèque nationale de France, Ms. Fr. 12837, p. 588.

67 « Il semble que Dieu ait suscité à lItalie un autre Mélanchton [], tant [il] est prudent en toutes ses actions » : il « pourrait nous faire voir merveilles de nos jours ». (Lettre de Giovanni Diodati à Pierre Asselineau, le 16 mars 1609, cité dans Raoul Patry, Philippe du Plessis-Mornay. Un hugenot homme dÉtat (1549-1623), Paris, Fischbacher, 1933, p. 445, n. 274.) Sur les raisons attribuées à Sarpi, voir Eugène de Budé, Vie de Jean Diodati, théologien genevois (1576-1649), Lausanne, Georges Bridel, 1869, p. 55-56.

68 Voir Pietro Savio, « Per lepistolario di Paolo Sarpi », Ævum, t. XI, no 1, 1937, p. 85-90 ; William J. Bouwsma, Venice and the defense of republican liberty. Renaissance values in the age of Counter Reformation, Berkeley et Los Angeles, University of California Press, 1968, p. 499-305 ; Paolo Sarpi, Lettres italiennes, éd. citée, p. 305, n. 1.

69 Histoire des variations, VII, cx, t. I, p. 448 ; OC, t. XIV, p. 317.

70 La résolution de lInterdit par lentremise dHenri IV, en 1607, « causa autant de joie à la plupart des princes dItalie en les délivrant de lappréhension de la guerre quil donna de chagrin aux protestants, qui ne projetaient rien de moins que dengager la république de Venise dans leur parti et dans lhérésie à loccasion du différend dont il sagissait. Ce que je vais raconter de ce fait, est tiré de trois lettres du Cardinal Ubaldini, alors Nonce en France. » (Gabriel Daniel, Histoire de France depuis létablissement de la monarchie française dans les Gaules, Paris, Jean-Baptiste Delespine, 1713, t. III, col. 1969 ; la question est reprise par Trévoux dans ses Mémoires pour servir à lhistoire des sciences et des beaux-arts, Paris, Imprimerie royale, avril 1720, p. 794-802.)

71 Défense de la déclaration, appendice, I, iv, t. III, p. 189 ; OC, t. XXII, p. 475, « Error qui non resistitur, approbatur ».

72 Sermon sur le jugement dernier, OO, t. IV, p. 639.

73 Histoire des variations, XV, cxxiii, t. II, p. 612 ; OC, t. XV, p. 137.

74 De la communion sous les deux espèces, Paris, Sébastien Mabre-Cramoisy, 1682, I, v, p. 160-161 ; OC, t. XVI, p. 287.

75 Oraison funèbre dHenriette de France, OO, t. V, p. 529-530. Bossuet dit ailleurs que « le socinianisme [] déborde comme un torrent sous le nom de Tolérance » (Sixième avertissement aux protestants, Paris, Jean Anisson, 1691, p. 816 ; OC, t. XVI, p. 237).

76 Sermon sur lunité de lÉglise, OO, t. VI, p. 131.

77 Homélie sur lévangile de la femme adultère, OO, t. VI, p. 389.

78 « Marc Antoine De Dominis, archevêque de Spalatro dans la Dalmatie, médite des nouveautés sur la religion et se retire en Angleterre » (Histoire universelle. Chronologie, ms. cité, p. 574).

79 Défense de la déclaration, apprendice, I, iv, t. III, p. 289 ; OC, t. XXII, p. 475, « synodi Tridentinæ [] insectator. » Même formule dans lavertissement de la deuxième édition de lExposition de la doctrine de lÉglise sur les matières de controverse, Paris, Sébastien Mabre-Cramoisy, 1679, p. 85 ; OC, t. XIII, p. 24. Sarpi est dailleurs désigné par une variante du pseudonyme utilisé pour lédition originale de son histoire (Londres, 1619) : Paulus Soavis.

80 Réponse de Leibniz au mémoire de labbé Pirot, dans Œuvres [1859], éd. Foucher de Careil, Paris, Firmin Didot, 1867, t. I, p. 472. Jean-François Lachat insère cette réponse dans la correspondance de Bossuet (OC, t. XVIII, p. 184-207) ; le mémoire de Pirot, De lautorité du concile de Trente, a été publié par Charles Urbain dans la Revue de lhistoire de lÉglise de France, t. 3, no 13, 1912, p. 78-98.

81 « Sous prétexte que le concile de Trente na pas voulu entrer en beaucoup de difficultés, nos adversaires ne cessent, après Fra Paolo, de lui reprocher quil a expliqué les dogmes avec des manières générales, obscures et équivoques, pour contenter en apparence plus de monde » (Histoire des variations, XV, clviii, t. II, p. 642 ; OC, t. XV, p. 157).

82 « On a imprimé ici ses lettres mais on croit quon en empêchera le débit à cause que messieurs de Rome y verraient quil entretenait commerce avec ceux de notre religion [] et quainsi ils récuseraient son témoignage touchant lhistoire du concile que nous leur opposons plausiblement comme dun moine quil a été » (Pierre Bayle, lettre du 21 septembre 1671, citée par Marie Viallon dans son édition des Lettres italiennes de Sarpi, p. 26).

83 Alfred Rébelliau, op. cit., p. 424-425. Voir lHistoire des variations, I, v-vi, OC, t. XIV, p. 22-23.

84 Paul Beuzart, « Petite contribution aux sources de lHistoire des Variations de Bossuet », Bulletin de la Société de lHistoire du Protestantisme Français, t. 95, oct.-déc. 1946, p. 161.

85 « Luther [] attaqua premièrement les abus que plusieurs faisaient des indulgences. [] Des abus il passa bientôt à la chose même. » (Histoire des variations, I, vi, t. I, p. 9 ; OC, t. XIV, p. 23.) « Il se contenta dabord dinvectiver contre labus [], mais [] il se mit à bien étudier la matière des indulgences, pour en connaître lorigine et les fondements » (Paolo Sarpi, Histoire du concile de Trente, trad. Nicolas Amelot de la Houssaye, Amsterdam, G. P. et J. Blaeu, 1685, p. 5).

86 Paul Beuzart, art. cité, p. 160.

87 Dans lHistoire des variations, il aurait ainsi laissé de côté « toutes les informations propres à exciter la défiance de ses adversaires » (Ibid., p. 67). Rebélliau suit lidée jusquà dire que lévêque de Meaux naurait pas utilisé lhistoire du cardinal Pallavacino dans les Variations (Ibid., p. 167), ce quil fait pourtant (une fois) au moment de défendre lautorité du pape et le concile de Trente (Histoire des variations, XV, clxv, t. II, p. 646-647 ; OC, t. XV, p. 160).

88 « Notre historien ne veut pas quil soit permis de révoquer en doute le témoignage de Fra Paolo, ni celui de M. de Thou. Quil écoute donc ces deux historiens » (Histoire des variations, VII, lix, t. I, p. 404 ; OC, t. XIV, p. 288). Voir la lettre du 7 juin 1687 de labbé Pirot à Bossuet, CB, t. III, p. 381.

89 « [Paul III] détaille les trois motifs qui lont déterminé à convoquer [le concile]. [] Afin dapaiser les différends de la religion, de réformer et les mœurs et de prendre de justes mesures pour faire la guerre aux infidèles. » (Défense de la déclaration, VII, 40, t. II, p. 438 ; OC, t. XXII, p. 102, « Tres concilii habendi … expeditionem ».) Voir Aimé-Georges Martimort, LÉtablissement du texte…, op. cit., no 369, p. 208.

90 « Ad tollenda in religione dissidia et ad reformandos Christiani populi mores, necnon ad suscipiendam sub sanctissimo crucis signo contra infideles expeditionem » (Concilium Tridentinum, éd. Stephan Ehses, Freiburg im Breisgau, Herder, t. IV, 1904, p. 387, l. 26-27). Sauf erreur, on ne trouve cette bulle ni dans les Sacrosancta concilia (Paris, 1672), auxquels il est fait ici référence, ni dans les Concilia generalia (Cologne, 1618), ni dans le Bullarium Romanum (Rome, 1638 ; Lyon, 1655), que Bossuet possède tous dans sa bibliothèque.

91 Sacrosancta concilia, Lutetiae Parisiorum, Societatis typographicae, 1672, t. XIV, col. 725-732 (Initio nostri hujus pontificatus).

92 « Afin que lon pût traiter avec plus de succès les affaires de la religion chrétienne, la réformation des mœurs, lunion et la concorde des princes et des peuples chrétiens, et les moyens de sopposer aux entreprises des barbares et infidèles » (Paolo Sarpi, Histoire du concile de Trente, éd. citée, p. 93-94).

93 « Il voyait bien que le terme était trop court pour envoyer partout des nonces, et que ce temps ne suffirait pas aux évêques pour préparer et faire leur voyage. Mais comme il trouvait son compte à la commencer avec peu de gens, il pressa les prélats dItalie, qui dépendaient de lui, de sy rendre les premiers » (Ibid., p. 100). Voir la réfutation de Pallavacino dans lIstoria del concilio di Trento, Roma, Angelo Bernabo, 1656, V, vii, t. I, p. 466-469.

94 Défense de la déclaration, IV, xii, t. II, p. 109-112 ; OC, t. XXI, p. 507-509.

95 Histoire universelle. Chronologie, ms. cité, p. 562-563.

96 Défense de la déclaration, V, xii, t. II, p. 187 ; OC, t. XXI, p. 585. Bossuet trouve singulier que le nonce vénitien Dolfin désapprouve lélévation de lun de ses concitoyens à la pourpre cardinalice, « croyant être cardinal plutôt que celui de son pays » (lettre du 5 août 1697 à labbé Bossuet, CB, t. VIII, p. 317).

97 Ibid., IV, xii, t. II, p. 111 ; OC, t. XXI, p. 509, « denfedique potuisse … reverentia ».

98 Ibid., p. 110 ; OC, t. XXI, p. 508, « oculato saeculo … possent ».

99 Ibid., p. 109 et 100 ; OC, t. XXI p. 507 et 508, « In quo annotamus ea quae ad quaestionem nostram faciunt », et « tantum observamus hic aliqua, quae causam nostram spectent ».

100 Ibid., p. 112 ; OC, t. XXI, p. 509, « Neque eo secius … ac sanguini perpercerint ».

101 Ibid., « Frater Paulus … majestatem ».

102 Histoire des différends entre le pape Paul V et la république de Venise ès années 1605, 1606 et 1607, Paris, François Muguet, 1688.

103 Augustin Gazier, Bossuet et Louis XIV (1662-1704). Étude historique sur le caractère de Bossuet, Paris, Honoré Champion, 1914, p. 120.

104 Jacques Le Brun, La Spiritualité de Bossuet, Paris, Klincksieck, 1972, p. 168.

105 Alexandre Réaume, Histoire de Jacques-Bénigne Bossuet et de ses œuvres, Paris, Louis Vivès, 1869, p. 113.

106 Voir Paolo Vismara, « Bossuet en question. Ecclésiologie et politique en Italie au xviiie siècle », dans Bossuet à Metz (1652-1659). Les années de formation et leurs prolongements, éd. Anne-Élisabeth Spica, Bern, Peter Lang, 2005, p. 305-318.

107 Voir Victor Verlaque, Bibliographie raisonnée des œuvres de Bossuet, Paris, Picard, 1908, p. 103-104 ; Storia di Venezia. Dalle origini alla caduta della serenissima, éd. Paolo Preto et Piero Del Negro, Roma, Istituto della Enciclopedia italiana, t. VIII, 1998, p. 18-28.

108 Marie Viallon et Bernard Dompnier, LHabit religieux du penseur politique, op. cit., p. 308.