Aller au contenu

Classiques Garnier

"L’histoire secrète de notre cœur" De Massillon au premier romantisme

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Revue Bossuet
    2016, n° 7
    . varia
  • Auteur : Tabet (Emmanuelle)
  • Résumé : Cet article analyse l’influence de Massillon sur le premier romantisme et les raisons pouvant expliquer le grand retentissement de son éloquence jusqu’au milieu du xixe siècle, qui contraste avec l’oubli dans lequel est tombé l’évêque de Clermont. Les romantiques seront sensibles à la profonde mélancolie dépeinte par l’orateur, qui insiste sur le vain enivrement que procure le monde, sur l’insatisfaction fondamentale logée au cœur de l’homme et sur le « dégoût affreux » qui succède aux vaines espérances.
  • Pages : 103 à 118
  • Revue : Revue Bossuet
  • Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN : 9782406066798
  • ISBN : 978-2-406-06679-8
  • ISSN : 2494-5102
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-06679-8.p.0103
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 22/12/2016
  • Périodicité : Annuelle
  • Langue : Français
103

« LHISTOIRE SECRèTE
DE NOTRE CŒUR »

De Massillon au premier romantisme

« Je ne sais rien de plus beau ni de plus vrai, écrivait Sainte-Beuve, que le sermon pour le troisième dimanche de Carême, qui traite des passions et de leurs suites, de la satiété incurable, de ce vide immense et précoce, qui était alors le malheur de quelques uns, et que lon a vu depuis la maladie dun grand nombre » : dans son article paru dans le Moniteur en 1853 et repris dans ses Causeries du Lundi1, Sainte-Beuve établit une filiation qui réunit Job, Massillon et Chateaubriand en une même peinture de la maladie de lâme. Dans le Génie du christianisme, Chateaubriand cite longuement les sermons de Massillon, choisissant en particulier les développements de lorateur sur « labîme de nos passions2 » et sur la mélancolie des cœurs insatiables. Dans le chapitre quil lui consacre, il place le « doux Massillon » au-dessus de Bourdaloue et de Fléchier, faisant écho à la profonde admiration que lon portait, tout au long du xviiie siècle, à un auteur tombé aujourdhui dans un quasi oubli. Ainsi Buffon considérait Massillon comme « le premier de nos prosateurs, sans même excepter Bossuet3 » ; Blair lévoquera comme « le plus éloquent de tous les prédicateurs quont produit nos temps modernes4 ». Massillon a ainsi été lobjet dune véritable admiration, y compris chez les encyclopédistes. DAlembert écrit : « Le Petit Carême est sinon le chef-dœuvre, au moins le vrai modèle de léloquence de la chaire5 ». Voltaire avait, dit-on, toujours sur sa table le Petit Carême à côté 104dAthalie et voyait dans les Sermons de Massillon « un des plus agréables ouvrages que nous ayons dans notre langue6 ». Et il y fait de nouveau allusion dans La Henriade comme « un chef dœuvre déloquence, et le modèle presque inimitable des sermons7 ». La peinture amère de lâme du pécheur en proie aux tourments des passions insatiables continue de résonner chez les romantiques. Le Petit Carême fait encore partie des titres les plus fréquemment réimprimés entre 1815 et 18208. On compte sous la Restauration au moins quatorze éditions de Massillon, cinq sous la Monarchie de Juillet, six de 1848 à 1865, auxquelles sajoutent les nombreuses rééditions du Petit Carême ou des Morceaux choisis, qui se trouvaient dans toutes les bibliothèques du premier xixe siècle. On peut ainsi être frappé par le contraste entre labsence de réédition de Massillon depuis le milieu du xxe siècle – qui saccompagne dune bibliographie critique quasi inexistante – et le grand retentissement que connut son éloquence depuis les dernières années du xviie siècle jusquau milieu du xixe, et sans doute au-delà. On peut dès lors sinterroger sur les raisons à la fois de cette fascination et de cet oubli. Quest-ce qui peut donc expliquer linfluence de son éloquence dans le romantisme français ? Peut-on lire chez Massillon ce quAndré Monglond appelait les « racines du romantisme chrétien9 » ?

Né à Hyères en 1663, formé par lOratoire, Massillon est ordonné prêtre en 1692. Il commence à prêcher au moment où la carrière des grands orateurs sacrés se termine – celles de Bourdaloue, de Mascaron, de Bossuet et de Fléchier. Il commence sa carrière à léglise de lOratoire de la rue Saint-Honoré, mais cest par lAvent de 1799 quil se fait véritablement connaître. Le jour de la Toussaint, il monte en chaire dans la chapelle de Versailles, pour prêcher devant Louis XIV et sa Cour, en ouvrant sa prédication sur une transfiguration du langage où la langue des larmes et lexigence de la réforme intérieure se substituent à lexpression de la gloire :

Sire, si le monde parlait ici à la place de Jésus-Christ, sans doute il ne tiendrait pas à Votre Majesté le même langage []. Mais Sire, Jésus-Christ ne 105parle pas comme le monde. Heureux, vous dit-il, non celui dont lhistoire va immortaliser le règne et les actions dans le souvenir des hommes, mais celui dont les larmes auront effacé lhistoire de ses péchés du souvenir de Dieu même []. Heureux enfin, non celui qui, toujours arbitre de la destinée de ses ennemis, a donné plus dune fois la paix à la terre, mais celui qui a pu se la donner à soi-même, bannir de son cœur les vices et les affections déréglées qui en troublent la tranquillité10

Si lon peut lire dans cette éloquence subtile une forme dastéisme où léloge sinsinue derrière lexpression de la vanité de la gloire, on peut aussi y voir une pénétrante mise en garde que lon a pu réinterpréter, aux lendemains de la Révolution, comme une prophétie. Ainsi Dussault déclare, dans le Journal des débats, à propos de cet exorde du Sermon sur le bonheur des justes prononcé au sommet de la gloire de Louis XIV :

Au milieu de cet enchantement des plus brillantes prospérités et des joies les plus flatteuses dont puisse séblouir et senivrer lorgueil humain, le nouvel orateur se présente avec un front où se peint la tristesse évangélique, et laisse tomber ces sévères et lugubres paroles, qui semblaient si peu daccord avec le présent, et quon a pu regarder comme une prophétie de lavenir : Bienheureux ceux qui pleurent11 !

On peut également voir dans cette vaste amplification du beati qui lugent un recentrage de la prédication autour de la réforme intérieure à laquelle doit se livrer tout homme, fût-il monarque : le combat de lâme contre les « dérèglements » du cœur. Cest en effet la profonde corruption de la cour et les vices attachés au développement de lincrédulité que le prédicateur dénonce dans son Grand Carême prêché devant la Cour en 1701 et 1704. On comprend pourquoi Chateaubriand, aux lendemains de la Terreur, choisira dans le Génie du christianisme, pour illustrer la force de léloquence de Massillon cet extrait de la Vérité dun avenir :

Voilà où se réduit la philosophie sublime des impies ; voilà cette force, cette raison, cette sagesse quils nous vantent éternellement. Convenez de leurs maximes, et lUnivers entier retombe dans un affreux chaos ; et tout est confondu sur la terre ; et toutes les idées du vice et de la vertu sont renversées ; 106et les loix les plus inviolables de la société sévanouissent ; et la discipline des mœurs périt ; et le gouvernement des États et des Empires na plus de règle ; et toute lharmonie des corps politiques sécroule ; et le genre humain nest plus quun assemblage dinsensés, de barbares, de fourbes, de dénaturés, qui nont plus dautres loix que la force ; plus dautre frein que leurs passions et la crainte de lautorité ; plus dautre lien que lirréligion et lindépendance ; plus dautres Dieux queux-mêmes : voilà le monde des impies ; et si ce plan de république vous plaît, formez, si vous le pouvez, une société de ces hommes monstrueux, tout ce qui nous reste à vous dire, cest que vous êtes dignes dy occuper une place12.

Dans cette représentation du chaos, où les rois ne sont plus que fantômes, où les lois les plus inviolables sont brisées, dans cette vision apocalyptique dun monde qui sécroule, on peut entendre une sorte de prémonition de la Révolution et de la Terreur.

Après avoir été écarté de la chapelle royale, il prêche devant Louis XV enfant le Petit Carême où lon a pu entendre, plus encore, une voix prophétique. Dans ces courts sermons qui par bien des endroits font écho au Télémaque, lorateur ressasse en effet comme un leitmotiv le malheur des grands qui abandonnent Dieu ; il dénonce le peu dhumanité envers le peuple, lenflure de lorgueil13 ; il invoque le « jour terrible » où « le roi et lesclave seront confondus14 », il démontre la « vanité des généalogies » en affirmant que « la noblesse du chrétien nest pas dans le sang quil tire de ses ancêtres, mais dans la grâce quil hérite de Jésus-Christ15 » ; il condamne la vanité et la cruauté des conquêtes, « le feu, le sang, le blasphème, labomination, et toutes les horreurs quengendre la guerre16 ».

Lœuvre de Massillon fut éditée par son neveu en 15 volumes après sa mort, de 1745 à 1748. La préface à cette édition indique bien ce qui séduira tant chez Massillon : « Il vous met votre propre cœur sous les yeux, selon lexpression du Prophète17 ». De fait Massillon non seulement 107interpelle son auditoire pour soutenir son attention, mais il feint de sadresser, non à tous à la fois, mais à chacun en particulier : « cest vous, affirme-t-il, mon cher auditeur, que ce discours regarde ». Le sermon conduit dès lors à lexamen de conscience, fondé sur lauto-observation de soi : « Massillon, écrivait labbé Attaix, se constitue auprès de ses auditeurs linterprète de leurs chagrins intimes et le confident de leurs secrètes angoisses18 ». La fonction première du sermonnaire doit être de tendre à son auditeur un miroir où il puisse se contempler dans sa vérité – ce qui suppose une connaissance approfondie du cœur humain, dans toute la complexité de ses passions : « je ne peins le monde que daprès votre cœur, cest-à-dire tel que vous le sentez et le connaissez tous les jours vous-même », déclare-t-il dans son Sermon sur le bonheur des justes. Il invite son auditeur à lintrospection, à lauto-analyse, à lexamen de conscience :

À lheure même où je vous parle, interrogez votre cœur : êtes-vous tranquille ? Ne manque-t-il rien à votre bonheur ? ne craignez-vous rien ? etc.19

Du reste, le jugement dernier est représenté chez Massillon comme linstant suprême où lâme se met à nu et où se dévoilent les profondeurs intimes de lêtre, où les récits flatteurs et les glorieux mémoires sont remplacés par « lhistoire la plus affreuse et la plus exacte de notre cœur » :

Ce qui nous surprendra le plus, ce sera lhistoire secrète de notre cœur, qui se dépliera tout entière à nos yeux : de ce cœur que nous navions jamais sondé, jamais connu ; de ce cœur qui se dérobait sans cesse à nous-mêmes, et qui nous déguisait la honte de ses passions sous des noms spécieux []. On nous fera rentrer dans notre cœur, où nous navions jamais habité ; une lumière soudaine éclairera cet abîme []20.

Mais lhomme peut-il réellement se connaître ? Si Massillon en appelle à lintrospection, il affirme en même temps, à linstar de Pascal, que lhomme demeure un mystère à lui-même et quil y a en chacun de nous une part irréductible dinconnaissable. Lhomme, ne cesse-t-il 108de répéter « est presque toujours un mystère à lui-même21 ». Notre cœur est un abyme dont nous ne voyons que la surface : les pécheurs, déclare-t-il, « nous racontent lhistoire de leur vie, mais ignorent celle de leur cœur ».

Dans la lignée des moralistes augustiniens, Massillon jette alors le doute sur les véritables mobiles qui gouvernent nos actions, fussent-elles en apparence les plus louables. Il ne cesse de dénoncer les illusions de lamour-propre, les détours innombrables quemploie la raison pour justifier ses crimes et se donner les apparences de la vertu, non seulement aux yeux du monde, mais à ses propres yeux. Il décrit avec une grande précision les stratagèmes de la mauvaise foi, les raisons qui « ne manquent jamais aux passions », les « prétextes saints » qui servent à justifier des « cupidités injustes22 ». Et de conclure en ces termes :

Cest ainsi, ô mon Dieu ! que nous passons presque toute la vie à nous séduire nous-mêmes ; que nous nemployons les lumières de la raison, quà obscurcir celles de la foi23.

Massillon rejoint ainsi ce que Paul Bénichou avait analysé, dans sa « métaphysique du jansénisme », comme une généralisation du doute sur la valeur du sentiment que chacun peut avoir de ses propres états, doute qui « peut atteindre finalement toute connaissance introspective de lhomme, en la déclarant sujette aux puissances trompeuses de lamour-propre24 ».

Cette remise en cause de la mauvaise foi passe par une réflexion sur la conversion. Massillon montre en particulier comment le confessionnal devient bien souvent le lieu où sélabore un discours dautojustification plus que de pénitence et il énumère les multiples prétextes invoqués pour adoucir la faute25. La confession est le plus souvent inutile, car faite de complaisances, de préjugés, et soumise à la morale des hommes (celle de lusage, de la bienséance) plus quà celles de lÉvangile : sonder sa conscience, cest alors, dit-il, « y répandre de nouvelles ténèbres ». Et 109il revient souvent sur les apparences trompeuses de la conversion, sur la « fausse pénitence », sur la « piété sensuelle26 », sur les « pratiques languissantes de religion27 », telles celles que lon consacre à Dieu entre deux plaisirs mondains, « moments de repos que nous nous donnons à nous-mêmes plutôt quà Dieu », « intervalle que nous mettons entre le monde et nous, pour y rentrer avec plus de goût28 ». Il dénonce la vertu « toute mondaine, superficielle, pharisaïque29 » et met à nu ces hommes respectables dont le monde loue la probité et qui couvrent sous le voile de la religion « une conscience souillée, et des mystères dignominie30 ».

Il y a donc au sein même de son éloquence une méfiance face à la parole, une parole qui, dans la société mondaine, nest plus « linterprète des cœurs » : « elle nest que le masque qui les cache et qui les déguise31 ». Il insiste sur la façon dont on se ment à soi-même pour se persuader que lon est devenu vertueux :

Que les véritables pénitences sont rares, mes frères !que de conversions superficielles et vaines ! et que dâmes changées aux yeux du monde, se retrouveront un jour les mêmes devant Dieu32 !

Or la pénitence imparfaite finit par engendrer plus de tourments que le crime, car les passions que lon a tenté dempêcher nen sont alors que plus violentes et plus furieuses. Il revient aussi sur les dangers inhérents au récit de conversion, qui par la narration des égarements qui précédèrent la conversion à Dieu conduit le lecteur – ou lauditeur – à justifier ses propres fautes :

Il semble que les égarements quelles pleurent, autorisent ceux que nous aimons, et dans lesquels nous vivons encore []. Ô étrange aveuglement des 110hommes, de trouver des motifs de dérèglement dans les exemples mêmes de pénitence33 !

Ce que nous rappelle Massillon cest bien que le récit peut échapper à lorateur et produire une fascination qui le dépasse tant la représentation du péché charme involontairement lauditeur qui trouve dans lextrémité des péchés commis par le futur pénitent la caution de ses propres crimes qui, pense-t-il, pourront toujours être rachetés. Puisque Madeleine a vécu dans la débauche avant de se convertir, pourquoi ne ferais-je pas de même ? Tout raisonnement oratoire peut ainsi facilement être détourné ; et les exemples donnés acquièrent alors une forme dautonomie qui transforme le récit exemplaire dune conversion réussie en un portrait fascinant dune pécheresse voluptueuse. Du reste, Massillon lui-même a pu être soupçonné dune forme de complaisance avec le mal. Sa rhétorique est en effet une rhétorique fondée sur la répétition lancinante des termes qui confèrent à son éloquence un caractère quasi hypnotique, et qui permettent de capter lauditoire, mais qui engendrent en même temps une forme de fascination :

Le vice dont jentreprends aujourdhui dexposer les suites funestes ; ce vice si universellement répandu sur la terre, et qui désole avec tant de fureur lhéritage de Jésus-Christ ; ce vice dont la religion chrétienne avait purgé lunivers, et qui aujourdhui a prévalu sur la religion même, est marqué à certains caractères que je retrouve tous dans lhistoire des égarements de lenfant prodigue34.

Son sermon sur la Pécheresse a tout particulièrement fasciné Chateaubriand. De fait, comme le remarquera Brunetière, tandis que les autres prédicateurs réduisent Madeleine à nêtre que le symbole ou lallégorie de la pénitence, Massillon sefforce au contraire de préciser les traits, de lui donner une voix, un corps35. Et du reste le jeune Chateaubriand avouera dans les Mémoires avoir puisé dans les sermon sur la Pécheresse et sur lEnfant prodigue la matière même de ses premiers fantasmes : « Les volumes de Massillon qui contenaient les sermons 111de la Pécheresse et de lEnfant prodigue ne sortaient plus de mes mains », écrit-il dans les Mémoires de ma vie au sujet de léveil des passions chez le jeune adolescent, à savoir la découverte des plaisirs de la chair en même temps que de la représentation imaginaire du « fantôme damour » et des différentes manifestations de la Sylphide. Sil y a certes détournement de la parole oratoire, et amplification de lexemple, arraché à son contexte et relu dans son pouvoir de fascination, cette relecture des Sermons puise néanmoins sa source dans le fait que léloquence de Massillon sappuie précisément sur la puissance évocatoire des passions, renforcée par lenchantement du style.

Ce qui séduira les premiers romantiques cest la profonde mélancolie qui se dégage de cette peinture de lâme humaine. Comme Pascal en effet, lorateur peint le divertissement, les vaines tentatives de lhomme pour échapper à sa condition et trouver dans la multiplicité des distractions une « ivresse heureuse » qui le délivrerait de son poids. Mais, nous dit-il, on néchappe pas à lennui : « toute notre vie, affirme Massillon, nest quun art diversifié déviter lennui, et un talent malheureux de le trouver36 ». Dun sermon à lautre, lorateur sacré décrit toute lardeur et lénergie incalculable déployée par les grands de ce monde pour acquérir les honneurs, « le tumulte des places et des emplois37 », la reconnaissance, lestime dun monde qui sans cesse déçoit. Fidèle à lAugustin des Confessions, il ne cesse de montrer que le monde est vain non seulement au regard de Dieu et de léternité, mais au regard du monde même :

Que faudrait-il encore pour te détromper du monde, que lexpérience même que tu fais de tes ennuis et de ton propre malheur en le servant38 ?

Ce sont alors de longues descriptions du vain enivrement que procure le monde et de sa profonde cruauté – un monde est représenté moins du point de vue moralisateur qui est celui de lhomme dÉglise que du point de vue même qui est celui du mondain :

En effet, mes frères, quest-ce que le monde, pour les mondains eux-mêmes qui laiment, qui paraissent enivrés de ses plaisirs, et qui ne peuvent se passer de lui ? Le monde ? cest une servitude éternelle où nul ne vit pour soi, et où, 112pour être heureux, il faut pouvoir briser ses fers et aimer son esclavage. Le monde ? cest une révolution journalière dévénements qui réveillent tour à tour, dans le cœur de ses partisans, les passions les plus violentes et les plus tristes, des chaînes cruelles, des perplexités odieuses, des craintes amères, des jalousies dévorantes, des chagrins accablants etc.39

Lorateur ainsi fait éprouver de lintérieur la cruauté et surtout lingratitude du monde. Il ne cesse de redire le malheur du mondain qui a tout sacrifié, « son repos, sa conscience, ses biens, sa jeunesse, sa santé » et qui « se voit tout dun coup fermer les portes de lélévation et de la fortune, arracher dentre les mains des places quil avait méritées, et quil croyait déjà tenir40 ».

On en retrouve chez Chateaubriand de nombreux échos. À linstar de lorateur sacré, il oppose les plaisirs à la « félicité » : lhomme seul est en quête dune félicité qui lui échappe. La formulation de linsatisfaction fondamentale logée au cœur de tout homme sénonce dans les mêmes termes que ceux quemployait Massillon dans son Petit Carême :

Lunivers entier ne le satisfait point (Chateaubriand)41

Lunivers entier serait sa possession et son partage, quil sentirait toujours quil se dégrade, et ne se satisfait pas en sy fixant (Massillon)42.

Le « vague des passions » est indissociable du « vide du cœur » augustinien : du vide intérieur naît lerrance des passions. Et cest précisément ce vague (« vagus ») que Massillon décrit sans son Sermon sur le malheur des grands : « toutes leurs démarches, écrit-il en citant les Proverbes, sont vagues, incertaines, incompréhensibles : vagi sunt gressus ejus, et investigabiles43 ». Le quatrième sermon du Petit Carême occupe une place essentielle dans la genèse de ce « vague des passions ». Chateaubriand formulait ainsi la maladie qui fut celle de René et des enfants du siècle :

On habite avec un cœur plein un monde vide ; et sans avoir usé de rien on est désabusé de tout44.

113

Or Massillon écrivait, pour décrire le mal dont souffrent les grands de ce monde :

Tout est déjà usé pour eux à lentrée même de la vie ; et leurs premières années éprouvent déjà les dégoûts et linsipidité que la lassitude et le long usage de tout semble attacher à la vieillesse45.

La multiplicité des objets auxquels sattachent les passions leur ôte toute consistance : la « perpétuelle inconstance », écrit Chateaubriand, nest quun « dégoût constant46 » ; « ils ont beau diversifier [leurs plaisirs], écrivait Massillon en une formule tout aussi vigoureuse, ils diversifient leur ennui47 » ; aux vaines espérances, aux vagues désirs succède un « dégoût affreux48 ». La vie, pour ces êtres dennui, semble être déjà usée avant même quelle ne soit accomplie.

Telle est bien lune des spécificités de ce « vague des passions » : le désenchantement précède lexpérience ; la désillusion se loge en amont, à la source du désir. Toutefois, Chateaubriand radicalise en quelque sorte la réflexion de Massillon : les jeunes gens décrits par lorateur sacré ont épuisé toute forme de plaisir ou despérance car dès leur plus jeune âge, ils ont déjà tout possédé ; le monde sest vidé de sa substance après leur avoir trop appartenu. La jeunesse évoquée par Chateaubriand, quant à elle, est désabusée sans navoir rien pu posséder quà travers ses lectures ; le monde est vide, non parce que la place quelles occupent dans le monde les a dégoûtées du monde, mais parce quelles apparaissent au contraire comme « étrangères au milieu des hommes49 », « dégoûtées par leur siècle50 » sans doute suivant le double sens de ce terme désignant à la fois le monde profane et lépoque historique dans laquelle elles ne sauraient trouver leur place. Létat qui résulte de ce désenchantement demeure néanmoins très semblable à celui que décrit Massillon, comme en témoigne la conclusion du chapitre consacré au « vague des passions » :

114

Ces passions, sans objet, se consument delles-mêmes dans un cœur solitaire51.

Massillon écrivait de même :

Vos passions ayant essayé de tout et tout usé, il ne vous reste plus quà vous dévorer vous-mêmes52.

Les passions, devenues stériles, finissent par consumer, par dévorer celui qui nest plus capable de leur trouver un exutoire ; après avoir vidé le monde de sa substance, le « vague des passions » se retourne donc contre un cœur déjà vide. Du reste, dans lEssai sur les révolutions, Chateaubriand était plus proche encore de la formule employée par Massillon, lorsquil évoquait lhomme « seul au milieu de lunivers », « nayant à dévorer quun cœur vide et solitaire53 ».

Lamour humain ne saurait combler le « vide affreux » que nous sentons en nous-mêmes : telle est laffirmation répétée tout au long du Sermon sur la Pécheresse de lÉvangile. Or Chateaubriand cite longuement dans le Génie le sermon sur la Pécheresse pour illustrer lamour passionné :

Cest un désordre daimer pour lui-même ce qui ne peut être ni notre bonheur, ni notre perfection, ni par conséquent notre repos : car aimer, cest chercher la félicité dans ce quon aime ; cest vouloir trouver dans lobjet aimé tout ce qui manque à notre cœur ; cest lappeler au secours de ce vide affreux que nous sentons en nous-mêmes, et nous flatter quil sera capable de le remplir ; cest le regarder comme la ressource de tous nos besoins, le remède de tous nos maux, lauteur de tous nos biens… Mais cet amour des créatures est suivi des plus cruelles incertitudes : on doute toujours si lon est aimé comme lon aime ; on est ingénieux à se rendre malheureux, et à former à soi-même des craintes, des soupçons, des jalousies ; plus on est de bonne foi, plus on souffre ; on est le martyr de ses propres défiances : vous le savez, et ce nest pas à moi à venir vous parler ici de vos passions insensées54.

Et il paraphrase encore dans Les Martyrs de Dioclétien cet extrait de Massillon (qui lui-même paraphrase évidemment les Confessions de saint 115Augustin)55. Lamour nest jamais récompensé car sy instille toujours la crainte, la jalousie, le soupçon, linquiétude56. Lorsquil poursuit en expliquant qu« il manquait à lautre une certaine grâce du cœur et de lâme » et que ses yeux « souvraient sur des défauts inattendus57 », il demeure fidèle à laffirmation de lorateur déclarant : « nous découvrons bientôt dans les créatures qui nous linspirent [cet amour], des défauts et des faiblesses qui les en rendent indignes ». Enfin, lorsquil conclut par lappel à « cette beauté céleste qui peut seule combler limmensité de nos désirs58 », il ne fait que reprendre le cœur même du sermon sur la Pécheresse, conduisant au Seigneur « seul assez grand pour remplir limmensité de notre cœur59 ».

Ainsi, les plaisirs paraissent minés par une secrète insatisfaction, par ce vide quils laissent en nous : « la condition la plus heureuse en apparence, écrivait Massillon, a ses amertumes secrètes, qui en corrompent la félicité60 ». Tel est bien, à la suite de lorateur sacré, le pressentiment du jeune Chateaubriand : « un secret instinct mavertissait quen avançant dans le monde, je ne trouverais rien de ce que je cherchais61 ». Les chimères semblent avoir arraché au monde le jeune homme ivre de son « fantôme damour », mais cette inaptitude au monde nest pas seulement ici le propre dun héros « romantique » déphasé par rapport à la vulgarité dun siècle, cest aussi la condition même de la vie chrétienne telle que la décrit Massillon, « linquiétude dun cœur qui nest point 116à sa place et qui ne peut la trouver sur la terre62 ». Limagination donne naissance à de vains fantômes : « nous ne jouissons jamais, nous espérons toujours63 ». Les pécheurs de Massillon se repaissent de « de fantômes et de chimères64 ». Le monde auquel nous sommes tant attachés nexiste nulle part, « cest une chimère qui nest quen nous-mêmes65 ».

Il manque en effet au cœur humain la fibre même de la félicité terrestre : « de peur que notre exil nous devienne trop aimable, nous y sentons toujours, par mille endroits, quil manque quelque chose à notre bonheur66 » ; « [il] sent toujours quil manque quelque chose à son bonheur67 » ; « je sens quil me manque quelque chose », déclarait aussi Jérôme dans Les Martyrs68. Il y a dans les plaisirs un « fonds dennui et de tristesse », une « amertume secrète » ne cesse de répéter Massillon. Mais chez lorateur chrétien, lamertume est le résultat direct du vice, des désordres du cœur humain ; le dégoût est consubstantiel au péché. Chez Chateaubriand, lamertume est dans le monde ; elle nest pas le résultat des chimères du jeune Chateaubriand, celles-ci constituant plutôt un refuge face aux « misères69 » de la destinée.

Chateaubriand semble avoir conçu le personnage de René à limage des êtres tourmentés, lassés du monde, envahis damertume qui hantent lunivers de Massillon : à linstar de René, ceux-ci errent dans le monde, « portant partout un cœur malade et inquiet, et ne trouvant rien qui les fixe et qui les calme70 ». Le portrait quil trace dans le sermon sur la pécheresse ou dans le sermon sur lenfant prodigue de lhomme errant dobjet en objet, cherchant désespérément un bonheur qui le fuit, et dont le cœur se révolte tout entier fait écho au René des Natchez : « il traîne toujours un fonds dinquiétude que rien ne peut calmer » ; « obligé de 117se fuir sans cesse, de peur de se retrouver avec sa propre conscience, il erre dobjet en objet, de passion en passion, de précipice en précipice71 ». René est bien la figure de ce que Massillon nomme dans son Sermon sur la Pécheresse la « pénitence imparfaite » : le remords qui ne va pas jusquà la conversion ne permet pas dapaiser les passions ; bien au contraire il ne fait que les amplifier. Le pénitent qui demeure dans lentre-deux est un pénitent profondément malheureux :

Vos passions plus violentes et plus furieuses, depuis que vous les aurez arrêtées et suspendues, sans les affaiblir et sans les combattre, vous feront éprouver des agitations et des orages que vous naviez jamais éprouvés, même dans le crime72.

Un fond de tristesse « le suit partout », écrivait Massillon à propos de lenfant prodigue ; René évoque à son tour « cette inquiétude, cette ardeur de désir qui [l]e suit partout73 ». En outre, la conclusion de René sur la première partie de son existence, précédant la tragédie dAmélie, ressemble étrangement au bilan dressé par les hommes du monde qui, chez Massillon, se destinent à la conversion : « Javais essayé de tout, et tout mavait été fatal74 », proclame René ; « Vous avez essayé de tout, et tout vous a lassé », déclare Massillon.

Ne reste ainsi à lerrant prisonnier de son crime que les « remords affreux de la conscience », la « tristesse du crime qui nous mine75 ». On peut alors dans les remontrances que le père Souel adresse à un René errant à la fois dans la passion et le remords lécho de la mise en garde que Massillon adresse au pécheur – « vous serez à vous-même une tentation continuelle [] ; vous serez un pénitent malheureux, sans consolation, sans paix ». Comme lécrira Sylvestre de Sacy en 1848 au sujet du sermon Sur les Afflictions : « Le sentiment qui y domine est celui dune mélancolie inconnue dans le siècle de Louis XIV76 ». En effet, par son exploration mélancolique des abîmes du cœur humain, par sa peinture 118amère dun monde où lon « dévore » ses agitations et ses peines, où des âmes insatiables cherchent sans le trouver un bonheur qui les fuit, où des êtres ennuyés deux-mêmes et blasés se heurtent à la fois à la violence des passions et au vide quelles laissent dans le cœur, Massillon continue de fasciner le premier romantisme – jusquà Sainte-Beuve ou Balzac déclarant encore au sujet du Lys dans la Vallée avoir « voulu (se) servir de la langue et du style de Massillon77 ».

Emmanuelle Tabet

CNRS (UMR 8599 / CELLF)

1 Sainte-Beuve, Causeries du Lundi, Paris, Garnier, 1857, p. 24.

2 Sainte-Beuve, Génie du christianisme, II, III, 2, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1978, p. 689.

3 Sainte-Beuve, Causeries du Lundi, Paris, Garnier, 1854, t. IX, p. 7 : « Buffon [] estimait Massillon le premier de nos prosateurs ».

4 Hugh Blair, Leçons de rhétorique et de Belles-Lettres, Paris, Gide, 1797, p. 28.

5 DAlembert, « Éloge de Massillon », in Œuvres complètes de DAlembert, Paris, Belin, 1821, t. II, 1e partie, p. 216.

6 Lettre à M. dArgental, 7 juillet 1769, in Œuvres complètes de Voltaire, Paris, 1785, tome 61, p. 128.

7 Œuvres complètes de Voltaire, Paris, 1785, t. 10, p. 231.

8 Martyn Lyons, Le Triomphe du livre. Une histoire sociologique de la lecture dans la France du xixe siècle, Paris, Promodis / Éditions du Cercle de la Librairie, 1987, p. 83.

9 André Monglond, « Massillon ou les origines du romantisme chrétien », in Pèlerinages romantiques, Paris, Corti, 1968, p. 41-55.

10 Massillon, « Sermon sur le bonheur des justes », in Œuvres de Massillon, Paris, Didot, 1838, t. I, p. 7.

11 Annales littéraires ou mélanges de littérature, choix des principaux articles insérés par M. Dussault dans le journal des débats depuis 1800 jusquà 1817, Paris, Grimbert, 1824, 5 vol., t. V, p. 475-497.

12 Chateaubriand, Génie du christianisme, III, IV, 3, éd. citée, p. 861.

13 Massillon, Petit Carême, « Sur lhumanité des grands envers le peuple », in Œuvres, t. I, p. 578.

14 Massillon, Petit Carême, « Sur le respect que les grands doivent à la religion », in Œuvres, t. I, p. 567.

15 Massillon, « Panégyrique de saint François de Paule », in Œuvres, t. II, p. 104.

16 Massillon, « Oraison funèbre de Louis le Grand », in Œuvres, t. I, p. 678.

17 Sermons de Massillon évêque de Clermont. Petit Carême, Paris, Estienne et Herissant, 1745, p. 10.

18 Abbé Attaix, Étude sur Massillon, Toulouse, Chauvin et fils, 1882, p. 95.

19 Massillon, « Sermon pour la fête de tous les saints. Sur le bonheur des justes », in Œuvres, t. I, p. 176.

20 Massillon, « Sermon pour le premier dimanche de lAvent. Sur le jugement universel », in Œuvres, t. I, p. 25.

21 Massillon, « Sermon pour le vendredi de la première semaine de Carême. Sur la confession », in Œuvres, t. I, p. 219.

22 Massillon, « Sermon sur limmutabilité de la loi de Dieu », in Œuvres, t. I, p. 463.

23 Ibid.

24 Paul Bénichou, Morales du Grand Siècle, Paris, Gallimard, 1948, p. 142.

25 Massillon, « Sermon pour le jour de Pâques. Sur les causes ordinaires de nos rechutes », in Œuvres, t. I, p. 394.

26 Massillon, Sermon pour le jeudi de la semaine de la passion, La Pécheresse de lÉvangile, Première Partie, in Œuvres, t. I, p. 496.

27 « Sermon pour le lundi de la semaine de Passion. Sur lemploi du temps », in Œuvres, t. I, p. 471.

28 Idem, p. 469.

29 Massillon, « Sermon pour le jeudi de la semaine de la passion, La Pécheresse de lÉvangile », Première Partie, in Œuvres, t. I, p. 495.

30 Massillon, « Sermon pour le premier dimanche de lAvent. Sur le jugement universel », in Œuvres, t. I, p. 25.

31 Massillon, Paraphrases sur les Psaumes (« Paraphrase du psaume X ») in Œuvres, t. II, p. 497.

32 Massillon, « Sermon pour le premier dimanche de Carême. Sur la parole de Dieu », in Œuvres, t. I, p. 166.

33 Massillon, « Sermon pour le jeudi de la semaine de la passion, La Pécheresse de lÉvangile », Première Partie, in Œuvres, t. I, p. 498.

34 Massillon, « Sermon pour le vendredi de la deuxième semaine de Carême. Sur lenfant prodigue », in Œuvres, t. I, p. 281.

35 Brunetière, Études critiques sur lhistoire de la littérature française, 2e série, Paris, Hachette, 1922, p. 63-120.

36 Massillon, « Sermon pour le lundi de la semaine de la Passion », in Œuvres, t. II, p. 548.

37 Ibid.

38 Massillon, « Sermon pour la fête de tous les saints. Sur le bonheur des justes », in Œuvres, t. I, p. 3.

39 Ibid.

40 Massillon, « Sermon pour la fête de tous les saints. Sur le bonheur des justes », in Œuvres, éd. citée, t. I, p. 116.

41 Chateaubriand, Génie du christianisme, Partie I, L. VI, ch. i, éd. citée, p. 603.

42 Massillon, « Sermon pour le troisième dimanche de Carême sur le malheur des grands qui abandonnent Dieu », in Œuvres, t. I, p. 572.

43 Ibid.

44 Chateaubriand, Génie du christianisme, Partie II, L. III, ch. ix, éd. citée, p. 714.

45 Massillon, « Sermon pour le troisième dimanche de Carême sur le malheur des grands qui abandonnent Dieu », in Œuvres, t. I, p. 573.

46 Chateaubriand, Génie du christianisme, Partie II, L. III, ch. ix, p. 715.

47 Massillon, « Sermon pour le troisième dimanche de Carême sur le malheur des grands qui abandonnent Dieu », in Œuvres, t. I, p. 575.

48 Ibid.

49 Chateaubriand, Génie du christianisme, Partie II, L. III, ch. ix, éd. citée, p. 716.

50 Ibid.

51 Ibid.

52 Massillon, « Sermon pour le troisième dimanche de Carême sur le malheur des grands qui abandonnent Dieu », in Œuvres, t. I, p. 575.

53 Chateaubriand, Essai sur les révolutions, Partie I, ch. lxx, Paris, Gallimard, « Pléiade », 1978, p. 265.

54 Chateaubriand, Génie du christianisme, Partie II, L. III, ch. 2, éd. citée, p. 690.

55 « Nous navions jamais trouvé dans nos attachements, ce repos du cœur et cette plénitude de jouissance que nous y cherchions » (Chateaubriand, Les Martyrs de Dioclétien, L. IV, p. 181, repris dans les Martyrs, variante de la page 179, Paris, Gallimard, « Pléiade », p. 1583) ; « Cest un désordre daimer pour lui-même ce qui ne peut être ni notre bonheur, ni notre perfection, ni par conséquent notre repos » (Massillon, « Sermon pour le jeudi de la semaine de la passion, La Pécheresse de lÉvangile », in Œuvres, t. I, p. 498).

56 « On doute toujours si lon est aimé comme lon aime : on est ingénieux à se rendre malheureux, et à se former à soi-même des craintes, des soupçons, des jalousies » (Massillon, « Sermon pour le jeudi de la semaine de la Passion, La Pécheresse de lÉvangile », in Œuvres, t. I, p. 497).

57 Les Martyrs, L. V, p. 179.

58 Ibid.

59 « Sermon pour le jeudi de la semaine de la Passion, La Pécheresse de lÉvangile », in Œuvres, t. I, p. 497.

60 Massillon, « Sermon pour le IIe dimanche de lAvent, Sur les afflictions », in Œuvres, t. I, p. 329.

61 Chateaubriand, Mémoires dOutre-Tombe¸éd. J.-C. Berchet, Paris, Bordas, 1989, L. III, ch. 13, p. 230.

62 Massillon, « Sermon pour le mercredi de la semaine de la Passion, Sur les dégoûts qui accompagnent la piété en cette vie », in Œuvres, t. I,, p. 484.

63 Massillon, « Panégyrique de saint Benoît », in Œuvres, t. II, p. 114.

64 Massillon, « Sermon pour le mercredi de la semaine de la Passion, Sur les dégoûts qui accompagnent la piété en cette vie », in Œuvres, t. I, p. 484.

65 Massillon, « Panégyrique de saint Benoît », in Œuvres, t. II, p. 114.

66 Massillon, « Sermon pour le IIe dimanche de lAvent, Sur les afflictions », in Œuvres, t. I, p. 328.

67 Massillon, « Sermon pour le mercredi de la semaine de la Passion, Sur les dégoûts qui accompagnent la piété en cette vie », in Œuvres, t. I, p. 483.

68 Chateaubriand, Les Martyrs, L. V, éd. citée, p. 180.

69 Chateaubriand, Mémoires doutre-tombe, L. III, ch. 12, éd. citée, t. I, p. 230.

70 Massillon, « Second sermon pour le mercredi des cendres, Motifs de conversion », in Œuvres, t. I, p. 132.

71 Massillon, « Sermon pour la fête de tous les saints. Sur le bonheur des justes », in Œuvres, éd. citée, t. I, p. 116.

72 Massillon, « Sermon pour le jeudi de la semaine de la Passion, La Pécheresse de lÉvangile », in Œuvres, t. I, p. 498.

73 René in Chateaubriand, Atala, René, Les Natchez, éd. J.-C. Berchet, Librairie générale française, « Le Livre de Poche », 1989, p. 204.

74 Chateaubriand, René, éd. citée p. 216.

75 Massillon, « Sermon pour le mercredi de la semaine de la Passion, Sur les dégoûts qui accompagnent la piété en cette vie », in Œuvres, t. I, p. 483.

76 Sylvestre de Sacy, Variétés littéraires, morales et historiques, Paris, Didier, 1858, t. I, p. 85.

77 Balzac, « Lettre à Mme Hanska doctobre 1835 », in Lettres à lÉtrangère (1833-1842), Paris, Calman Lévy, 1906, p. 278.