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Classiques Garnier

Index des proverbes et locutions proverbiales

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INDEX DES PROVERBES
ET LOCUTIONS PROVERBIALES

Figurent ici, par ordre alphabétique du mot principal, les proverbes et sentences relevés des cinq pièces de ce volume : I : La Moralité du Jour Saint Antoine ; II : La Moralité du Chastiement du Monde ; III : La Moralité de la Croix Faubin ; IV : Le Jeu dArgent ; V : LAveugle et le Boiteux dAndré de la Vigne.

Le relevé et linterprétation des proverbes se fondent principalement sur les ouvrages suivants :

Cotgrave, Randle. A Dictionarie of the French & English Tongues, Reproduced from the first edition, London, 1641, with introduction by William S. Woods, University of South Carolina Press, Columbia, 1950, second printing [abrégé : Cot.].

Di Stefano, Giuseppe. Dictionnaire des locutions en moyen français, Montréal, CERES, 1991 [abrégé : Di Stef.].

Di Stefano Giuseppe et Rose Bidler. Toutes les herbes de la Saint-Jean : les locutions en moyen français, Montréal, CERES, 1993 [abrégé : Di Stef./Bid.].

Hassell, James W. Middle French Proverbs, Sentences, and Proverbial Phrases, Toronto, Pontifical Institute of Mediaeval Studies, 1982 [abrégé : Has.].

Langlois, Ernst. Anciens proverbes français, Paris, Bibliothèque de lÉcole des Chartes, 1899.

Leroux de Lincy, Antoine. Le Livre des proverbes français, 2 vol., (Paris, 1859) Genève, Slatkine reprints, 2 vol., 1968 [abrégé : Leroux].

Morawski, Joseph. Proverbes français avant le xve siècle, Paris, Champion, 1925 [abrégé : Mor.].

Schulze-Busacker, Elisabeth. Proverbes et expressions proverbiales dans la littérature narrative du Moyen Âge français : recueil et analyse, Genève, Slatkine ; Paris, Champion, 1985 [abrégé : SchB.].

Aider : Que je ne tayde, se ne taÿdes (I 1199). Phrase prononcée par Dieu, référence au proverbe « Aide toi et Dieu taidera », fréquent au xve siècle. Le proverbe est aussi cité dans un autre jeu scolaire, Le Jeu du Cœur et des cinq sens, Recueil général de moralités, I, p. 685). Di Stef. 261 ; Has. 88.

Argent :

Celluy qui a Argent / Tout son vivent / A bien si emplie (IV 1416-1418).

Quar pour toy, Argent, se fest tout, / Et bien, et mal (IV 220-221). Cf. Di Stef./Bid, p. 26, qui citent Froissart, II, 59 ; et la Moralité du Chastiement du monde, v. 1420 : Il est certain quargent tout gaste.

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Quia nichil factum est sine ipso Argento (av. 996) ; Cf. IV, av. 1020 : Quia sine illo nichil factum est.

Besogner : Lon doit essaier / De bien besoigner, / Pour bien avoir (IV 599-601).

Bon morceau : Nulz ne cest que bon mourcel vault / Sil ne gouste bien la sçaveur (IV 1708-1709).

Bonne Œuvre : Qui bon hevre fait, / Ne peult en effait / Que tout bien avoir (IV 587-589).

Brie : Brie sera belle (I 743, II 475). Expression de la satisfaction. André et Robert Bossuat la glosent par « tout ira bien, laffaire sera réglée » (éd. citée, p. 87, repris dans DMF). Le Chastiement du Monde use également de cette expression (voir note, II 475). Elle est citée dans plusieurs mystères du xve siècle, comme le Mystère de saint Laurent : « Resjouyr se fault : Brie est belle » (DMF). Non relevée par Di Stefano, la locution est à rapprocher du proverbe antérieur au xve siècle Or est Brie bone (Mor., no1554).

Châtier (se) : Bonne doctrine met en luy Qui se chastie par aultruy (II 497-498). Cf. Mor., 314 : Buer se chastie qui par autrui se chastie ; Langlois 97 : Beau se chatie qui par aultruy se chatie, rapproché du latin Felix quem faciunt aliena pericula cautum1 ; Voir aussi Jean Chartier : Belle doctrine prend en luy qui se chastie par autruy2.

Compas : Ne ault ne bas, mais par compas (IV 714).

Corps/âme : Car le corps, il convient pourrir ; / Or est larme perpetuele (IV 1619-1620).

Devoir : Celuy qui fait son devoir / A bien vivre et longuement / Nen peulx tousjours que mieulx valoir (IV 1531-1533).

Droit (aller, voler droit) : Aller droit comme une caille, (V 61) : « se jeter comme loiseau dans le filet ». Locution relevée dans Di Stefano et le DMF, avec ce texte comme unique référence. Limage fait vraisemblablement allusion au motif de loiseau volant droit vers les filets de chasse ; cf. loc. « [être pris] comme la caille au caillier », « être séduit par lappel du chasseur » (DMF, Mor. 689).

Fin : Et sur tout regardés la fin (IV 761). Voir aussi 747 et 1163). Has. F 88 ; Mor. 174, 510, 2496 ; Leroux II, 232, 279, 282, 512 : A la fin doit on regarder. Cf. Gréban (1473) : Et mal conduit son avangarde / Celluy qui la fin ne regarde ; Bon Advis dans Les Enfants de Maintenant (Ancien théâtre français, III, p. 8) : In primo respice finem.

Fol :

Fol est qui en toy [Argent] a fience (IV 120, 126).

Fol est qui se prise (IV 1402). Devise figurant sur le linceul de LHomme (?), voir note Il est fol qui non considere / Que la mort si la a deffaire, / Et con ne set en verité / Quant ce sera (IV 815-818).

Un foul ensseigne biem un saige (II 294). Mor. 2450 : Ung foul conseille bien ung saige ; Langlois 794 : Ung fol advise bien ung sage ; Moralité de Bien avisé Mal avisé : Aulcunes fois advient que fol conseille bien un sage (v. 3205-3206)3.

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Fortune : Faulce Fortune (IV 1724). Cf. Has. F 125 : Fortune la fausse ; F. 126 ; Fortune la muable ; F. 127 : Fortune linstable ; F.133 : variable Fortune ; Mor. 764 : Fortune torne en petit deure ; cf. Leroux II, 301.

Froide joie : Que froide joye aies tu des costes (I 745-746). Formule de malédiction, « que la douleur te saisisse ». Di Stefano ne relève pas cette occurrence, mais renvoie aux Évangiles des Quenouilles, « que male froide joye en prist » (p. 453). Le DMF cite loccurrence de la Moralité du jour saint Antoine sans la commenter mais en la rapprochant de la loc. avoir froide joye de sa peau, avoir la chair de poule.

Fuseau : Commencement nest pas fusee (II 512). « Proverbe de création récente [quon trouve] fréquemment dans les textes du xve et xvie siècles4 ». Fusée désigne le fil enroulé autour dun fuseau, doù « Things are not done as soone as begun » (Cotgrave), ou « pour avoir bien commencé, on ne finit pas toujours bien » (von Wartburg, s.v. fusus).

Haut : Qui plus ault monte qui ne doit, / Plus bas dessent qui ne vouldroit/ Le saige si vous dist cella : / Notés le bien, je vous en prie (IV 690-693). Voir aussi 117-118 ; 698-699. Cf. Mor. 398 : Cil qui haut monte de haut chiet ; Has. F 123 : La terrible marrastre [Fortune] renverse souvent et subit les plus hault montés en la fange (Jean Molinet, Chroniques, éd. G. Doutrepont et Omer Jodogne, Bruxelles, 1935-1937, I, 101, vers 1475) ; Leroux, II, 421 : Tex cuide haut monter qui tumbe. Voir aussi La Moralité de la Croix Faubin, v. 299 : Tel fut haut qui chiet en fainge.

Labourer : Qui ne labore en la saison, / La vigne point ne fructiffie (III 48-49). Cf. III 77.

Manne (mangne) : Et je seray issi atendant / Que la mangne viegnie des cieulx (IV 251-252). Cf. Has. M 78 : Leur viengne des chieux comme maune (Froissart)

Monter : Tel fut haut qui chiert en fainge (III 299). Cf. Mor. 398 Cil qui haut monte de haut chiet ; Has. F 123 : La terrible marrastre [Fortune] renverse souvent et subit les plus hault montés en la fange (Molinet, Chroniques5). Voir aussi le Jeu dArgent (ca. 1470), v. 690-691 : Qui plus ault monte qui ne doit, / Plus bas dessent qui ne vouldroit.

Noix : Qui ne vault trestout une noix (IV 393). Objet de valeur minimale : « qui ne vaut rien ». Cf. Has. N 27 ; Di Stef./Bid. 82.

Oisons : Les oaisons mainront les oaies paistre (II 14). Has., O57. Cf. Pathelin, v. 1586, « Les oisons mainnent les oes paistre », commenté comme suit dans léd. Holbrook : « inversion humoristique du proverbe Loye mène loison paistre et le béjaune précède le maistre : cest Gros Jean qui en remontre à son curé6 » (p. 126). Michel Rousse glose « Cest le monde à lenvers, lordre naturel des choses est renversé7. Darwin Smith traduit « Les petits conduisent les grands8 ». Bossuat renvoie à God., 582et à Mor. 1108 : Les poucins mainent les gelines (éd. citée, v. 14).

Ouvrage : Louvraige louera le maistre / A la parfin, je le vous di (IV 567-568). Cf. DMF, Proverbes, ouvrier : A louvraige on congnoist louvrier (Mystère dune jeune fille, c. 1413-1445 [c. 1530]) ; Louvrier congnoit on par louvraige (Mystère de la Passion de Troyes, a. 1482, 508). Has. O 98 cite Molinet, Faictz et dictz I, 219) : On dit quil nest ouvrage que de maistre. Voir aussi Leroux, II, 136, 143 : la fin loue louvrier (xvie siècle). Voir aussi Cot. s. v. œuvre : a loeure on cognoist louvrier, one may discerne a workman by his work.

Parole : Bonne parrolle bon lieu tient (II 47). Mor. 278 : Bonne parole bon lieu a. ; Has. P52, 4.

Richesse : Considerés que la richesse / De ce monde riens si ne vault, / Car trop plus vauldroit une messe (IV 941-943).

Sage homme : Par deffault de sage homme mest on fol en chaere (II 896) : Deffectu gnari vidi stultum cathedrari. Langlois, no 519, Has. S9 (4 citations) ; cf. Mor. 1696, 1697.

Vent : Autant en porte le vent (I 8) : « cela ne sert à rien ». Locution proverbiale fréquente au xve siècle (cf. Villon, Testament, v. 392). Elle apparaît également dans le prologue du Mystère de Saint Sébastien (v. 56), partiellement identique à celui de la Moralité du jour saint Antoine, et dans dautres jeux moraux comme la Moralité de Povre Peuple (v. 182). Di Stef. 873).

Vêtu : Tel est vetu qui fut en lange (III 300). Formulation proverbiale non attestée dans Mor. et Has. Cf. note au v. 299-300.

Yeux : Plusieurs voient troup plus cler quun / Plura vident occuli quam occulus (II 313, 316). Has. Y1 : « Deux (plusieurs) yeux voient plus (clair) quun », et chez Gerson : « Plus aussi voient plusieurs yeulz que ung9 ».

1 Proverbia seriosa 424, éd. Hoffmann, Horae Belgicae, Leipzig, 1845 et Casus dementis correctio sit sapientis.

2 Chronique [1449], éd. Vallet de Viriville, II, 113.

3 Éd. J. Beck, Recueil général des moralités dexpression française, t. 3, Paris, Garnier, 2014.

4 Bossuat, éd. citée, p. 185, note 512.

5 Éd. G. Doutrepont et Omer Jodogne, Bruxelles, 1935-1937, I, 101, v. 1475.

6 Richard Holbrook, éd., Maistre Pierre Pathelin, 2e éd. rev. par M. Roques, Paris, 1962.

7 La Farce de Maître Pathelin, Paris, 1999.

8 Maistre Pierre Pathelin. Le Miroir dOrgueil, Saint-Bénoît-du-Sault, Tarabuste, 2002, p. 312.

9 Œuvres complètes, éd. P. Glorieux, Paris, 1960, t. VII, p. 1164.