Aller au contenu

Classiques Garnier

Résumés

  • Type de publication : Article de collectif
  • Collectif : Raconter la douleur. La souffrance en Europe (xviie-xviiie siècles)
  • Pages : 249 à 254
  • Collection : Rencontres, n° 347
  • Série : Le dix-huitième siècle, n° 26
  • Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN : 9782406070382
  • ISBN : 978-2-406-07038-2
  • ISSN : 2261-1851
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-07038-2.p.0249
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 11/05/2018
  • Langue : Français
249

Résumés/Abstracts

Gérard Danou, « Raconter la douleur ? Littératures et médecine »

Depuis le tournant narratif des années 1990, les chercheurs accordent une grande valeur de connaissance aux récits personnels sur les maladies. Ces écritures et témoignages permettent daccéder au vécu intime de la maladie ainsi quaux relations complexes avec le corps médical.

Since the narrative shift in the 1990s, researchers have paid much attention to personal accounts of diseases. These individual stories and testimonies shed light on the patients intimate experience of diseases and their complex relationships with the medical establishment.

David Le Breton, « La douleur est toujours de la personne »

Quoique se manifestant par la chair, la douleur nest pas une condition du corps, mais de la personne. Lexpérience douloureuse renvoie toujours, et demblée, à la question du sens : la souffrance est une réponse subjective à la douleur. À travers une réflexion sur diverses formes de douleur (subie ou consentie, voire recherchée), cet article éclaire la dimension anthropologique de lexpérience douloureuse et la quête de sens quelle déclenche.

Even if it expresses itself through the flesh, pain is not only a condition of the body, but of the whole person. Painful experience is in close connection with the question of meaning: suffering is the subjective response to pain. Through a reflexion on different forms of pain (undergone, accepted or sought for), this article explores the anthropological dimension of pain and suffering and the search for sense through the painful experience.

250

Laurent Curelly, « Larmes de douleur et mise en scène du corps souffrant dans la poésie de dévotion anglaise du premier dix-septième siècle »

Cette contribution a pour objectif de réfléchir à la façon dont la poésie de dévotion anglaise du xviie siècle, celle du catholique Richard Crashaw et celle de Henry Vaughan, de confession anglicane, sapproprie les théories médicales sur la fabrication des larmes afin de représenter le corps souffrant. Il sagit de mettre en évidence ce qui, dans leurs poèmes, relève de la matérialité du corps humain souffrant et de montrer comment la larme participe de léconomie des passions de lâme.

This essay looks into the way two seventeenth-century English devotional poets, the Anglican Henry Vaughan and the Catholic Richard Crashaw, represent suffering by drawing upon contemporary medical theories on the production of tears. It shows that their poems are as much about the spiritual as the material dimensions of suffering and that tears partake of the economy of the passions of the mind.

Adriana de Feo, « Quelques considérations sur les représentations de la souffrance dans le livret dopéra entre les xviie et xviiie siècles »

Cette étude vise à mettre en lumière, à travers différents exemples, le parcours emprunté par la représentation de la douleur et de la souffrance au sein dun genre complexe et multiforme, lopéra, entre les xviie et xviiie siècles. Plusieurs fluctuations se dégagent à travers les siècles et les lieux où il est pratiqué, et diverses traditions confluent dans les différentes représentations des passions douloureuses qui sexpriment au travers de la musique.

Through various examples, this study aims to highlight the diverse courses taken by the representation of suffering in the complex and multifaceted operatic genre in the seventeenth and eighteenth centuries. These representations have fluctuated and several traditions have blended into the staging of painful passions rendered through music, considered as a way to express and represent the movements of the soul.

Mathilde Vanackere, « Physique de la douleur dans la Correspondance de Sévigné. Exploration et pratique de soi »

En marge des reconfigurations épistémologiques de linterprétation de la douleur dans la seconde moitié du xviie siècle, la Correspondance de Mme de Sévigné offre une réflexion en mouvement sur les manifestations physiologiques 251de la souffrance physique. Au-delà des flottements conceptuels qui soutiennent la réflexion sévignéenne, lexpérience de la douleur, véritable terrain dexercice de la langue, est le moment dune méditation sur le sentiment de lintériorité et la pratique de soi.

On the fringes of the epistemological reconfigurations of pain in the second half of the 17th century, of Madame de Sévignés Letters offer a lively reflexion on the physiological manifestations of physical suffering. Beyond the vagueness of the concepts underlying Sévignés reflexion, the experience of pain–as an occasion to experiment with language–is the locus of a meditation on interiority and self-elaboration.

Catriona Seth, « Écriture de la douleur et douleur de lécriture. La Vie de Françoise-Radegonde Le Noir, une mystique limougeaude des Lumières »

Morte en odeur de sainteté à Limoges en 1791, Françoise-Radegonde Le Noir a laissé une autobiographie spirituelle, éditée à titre posthume, dans laquelle elle évoque ses souffrances physiques et morales. Elle vit ses maux du corps en particulier comme des châtiments lorsquelle sécarte du chemin de la croix ou, au contraire, comme des marques délection dans sa tentative pour se rapprocher de Dieu par la passion.

Françoise-Radegonde Le Noir, who died in an odour of sanctity in Limoges in 1791 left an extraordinary spiritual autobiography which was published posthumously. In it she evokes her physical and moral suffering. She interpreted her physical pain, in particular, as a form of punishment when she strayed from the way of the cross or, on the contrary, as a mark of election in her attempt to get nearer to God through passion.

Marilina Gianico, « Bonheur de la douleur, douleur du bonheur. Une réflexion sur lherméneutique de la souffrance au dix-huitième siècle »

Si la veine romantique dexaltation de la douleur ne fait pas de doute, son rapport à la pensée des Lumières demande à être éclaircie : lattitude du xviiie siècle vis-à-vis de la souffrance se révèle plus complexe quon ne pourrait le croire, surtout si elle est comparée avec le discours eudémonologique de lépoque et analysée à laune de lidée de sensibilité, appartenant à la fois au discours littéraire et au discours médical et permettant de retrouver des échanges osmotiques entre les deux.

252

The romantic taste for an exalting representation of pain is not to be put in doubt, while its relationship to the Enlightenment is yet to be established: the attitude of the 18th century toward suffering seems more complex than we could think. This stands out if we compare it with the eudaimonological discourse of the time and examine it within the framework of the idea of sensibility, belonging to both literary and medical discourses sometimes to be linked by osmotic reciprocal exchanges.

Christine Hammann, « Mourir de douleur ? »

Peut-on mourir dun cœur brisé ? Comment sappréhende dans les textes du xviiie siècle cet effet mystérieux dautodestruction psychosomatique ? Selon la médecine classique, la douleur est une passion qui dépend non seulement de la perception dun mal mais également de la volonté du sujet. Lexamen de quelques morts passionnelles dans la littérature semble corroborer cette pensée, décelant le « mensonge romantique » avant le romantisme, et avec lui, la préférence occidentale pour le malheur.

May one die of a broken heart? How does eighteenth century literature treat this phenomenon of psychosomatic self-destruction? Classical medicine consider pain as a passion that proceeds not only from the perception of an evil but also from the will of the subject. The review of several cases of broken heart syndrome in literature seems to corroborate this idea by representing deaths that highlight the “romantic lie” before romanticism, and with it, the Western preference for misfortune.

Filippo Sani, « Souffrance, solitude et maladie de lhomme de lettres dans la culture italienne du xviiie siècle »

Bernardino Ramazzini, dans son De morbis artificum diatriba (1700), consacre un chapitre aux maladies des gens de lettres où il apparaît que la mélancolie du savant perd ses qualités divines et devient une maladie professionnelle. Létude se penche en détail sur lhistoire médicale qui, en matière de maladies des gens de lettres, commence avec Ramazzini et se poursuit avec Giovanni Verardo Zeviani (1755), Giuseppe Antonio Pujati (1762) et Vincenzo Chiarugi (1793-1794).

Bernardino Ramazzini, in his De morbis artificum diatriba (1700), devotes a chapter to the diseases of literati. In this work, the scholars melancholy loses its divine qualities and becomes a professional disease. This article examines the medical history of the diseases of literati, beginning with Ramazzini and continuing with Giovanni Verardo Zeviani (1755), Giuseppe Antonio Pujati (1762) and Vincenzo Chiarugi (1793-1794).

253

Pascal Hintermeyer, « Souffrir du mal du siècle au début de lépoque contemporaine »

À la fin du xviiie et au début du xixe siècle, de nombreux textes décrivent les souffrances récurrentes, insupportables et irrémédiables bientôt appelées « mal du siècle ». Larticle essaie de définir les caractéristiques, les symptômes et les conséquences de cette maladie. Il montre ensuite lambivalence des attitudes envers le mal du siècle et il présente ses significations sociales et politiques.

At the end of the 18th and the beginning of the 19th century, many texts describe the recurring, unbearable and irreparable sufferings soon to be called « mal du siècle ». This article tries to define the characteristics, symptoms and consequences of this disease. Then it shows the ambivalence of the attitudes towards mal du siècle and it presents its social and political meanings.

Marco Sirtori, « Douleur et science médicale dans quelques pages du Discorso dellindole del piacere e del dolore e Osservazioni sulla tortura de Pietro Verri »

À travers le Discours sur la nature du plaisir et de la douleur (1781) et les Observations sur la torture (1777) Pietro Verri sinterroge sur la nature de la douleur à partir du cadre épistémologique de son époque mais aussi sur la base de ses connaissances médicales. La souffrance est envisagée comme énergie négative, mais nécessaire : elle amène les hommes à la formulation dun contrat social fondé sur le statut universel de la douleur physique.

In his Discourse on the Nature of Pleasure and Pain (1781) and his Observations on Torture (1777) Pietro Verri questions the nature of pain according to the epistemological context of his age but also on the base of his limited but solid medical knowledge. Pain is considered as a negative but necessary form of energy leading humankind to the formulation of a social contract based on the universal essence of physical suffering.

Loïc Chalmel, « Jean-Frédéric Oberlin (1740-1826) et son combat contre misère et souffrance au xviiie siècle. Du rapport paradoxal entre science et théologie »

Prendre soin du corps pour espérer élever lâme, combattre la misère sous toutes ses formes pour rendre à lhomme dignité et sens de lhonneur, faire de la science une arme pour lutter contre le poids de lignorance et des préjugés : 254le récit publié par Jean-Frédéric Oberlin en 1786 dans ses Annales nous paraît exemplaire de ce combat engagé au service de la vie. Le passage analysé dans cet article suggère que les ressources de la science nont de sens que dans une perspective de progrès social.

Taking care of the body to uplift the soul, fighting poverty to restore mans dignity and sense of honour, making science a weapon against the weight of ignorance and prejudice: the story published by John Frederic Oberlin in 1786 seems representative of this fight for the preservation of life. The passage analysed in this article seems to suggest that the resources of science acquire their meaning only in a context of social progress.