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Classiques Garnier

Résumés

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Résumés

Marie-Laurence Desclos, « Avant-propos ou Dionysos »

Parler de Platon citateur soulève un certain nombre de problèmes. Tout dabord labsence de mot – quil soit grec ou latin – pour désigner ce quest une citation. Outre cela, encore faut-il sentendre sur ce que lon désigne par le mot « citation » : interdiscursivité, -appropriation, criture, -énonciation ? Selon quelles modalités et pour quelles finalités ?

Karine Tordo-Rombaut, « Platon citateur par Platon philosophe. Rép., III, 392 c 6-398 b 9 »

Lusage platonicien de la citation obéit-il à une méthode ? Lexposé sur lénonciation (λέξις) (R. III 392c6-398b9) donne les règles à suivre pour rapporter le discours de quelquun dautre. La confrontation entre cette théorie, forgée par Socrate « instituteur ridicule et flou » et la pratique de Socrate citateur des poètes démontre que « la citation est une énigme ». Cette proposition a une valeur pragmatique : elle invite le lecteur à prendre part à lexamen dialectique des discours cités.

Mauro Tulli, « Un héros de la philosophie. Achille dans lApologie de Platon »

Dans lApologie (28 b-d), Platon, avec la citation directe du chant XVIII de lIliade (78-106), suggère la comparaison entre Socrate et Achille. On peut reconnaître ici un glissement de sens qui fait signe vers le paradigme de lintellectuel engagé en faveur du concept de justice. Le rapport avec le texte dHomère est développé par des expansions et par des silences : la citation directe est lobjet dune manipulation, avec des lacunes, des faux ajouts et même une variante emblématique.

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Catherine Collobert, « Interprétation et jeux de sens dans les Dialogues. Socrate et les poètes »

Ce chapitre montre que linterprétation de la poésie dans les Dialogues a une fonction didactique et protatique, fondée sur lidée que la poésie se prête à de multiples jeux de sens. Ces derniers sont regroupés en deux types dinterprétation : lallegoresis et lexemplification. La première se subdivise en trois espèces : réfutative, offensive et positive, la seconde en deux : offensive et positive. Ces interprétations reposent sur un anti-intentionalisme et sur une décontextualisation.

François Renaud, « Homère interlocuteur ? La citation dialectique chez Platon »

Cette étude cherche à démontrer que lemploi platonicien de certaines citations homériques révèle dun rapport dialectique, et non pas simplement antagoniste, au grand poète grec. Les trois passages homériques ici retenus, dont deux sont cités à trois reprises dans le corpus platonicien, illustrent divers usages dialectiques : la citation comme point de départ à réfuter, comme reprise dune opinion à affirmer, soit reprise telle quelle, soit transformée.

Michele Corradi, « “Mon cher frère, arrêtons tous deux ensemble la force de cet homme”. Homère, Iliade, XXI, 308-309 = Platon, Protagoras, 340 a : les citations homériques dans lanalyse platonicienne de la pensée de Protagoras »

Dans les pages que Platon consacre à la pensée de Protagoras il est possible de remarquer la présence constante de références à la poésie dHomère. Dans certains cas il est possible de penser que Platon tient à rendre hommage aux études homériques du sophiste (Prot. 340a, Crat. 391e-392b, Tht. 152e). Dans dautres cas, les citations homériques semblent suggérer une stratégie littéraire et philosophique de plus longue haleine : cest le cas des références à lOdyssée dans le Protagoras.

Francesca Scrofani, « Une citation dHomère et Hésiode dans le Minos attribué à Platon »

Homère et Hésiode sont cités dans le Minos pour louer Minos comme meilleur roi et législateur et réhabiliter son image négative présente dans la 449tragédie qui en faisait le tyran à opposer à Thésée, champion de la démocratie. Le contraste avec la tragédie est inséré dans une conception plus vaste de la poésie, qui aurait la fonction de décerner éloges et blâmes. Lusage dHomère et dHésiode pour louer des personnages afin de construire des exempla est attesté ailleurs dans le milieu socratique.

Albert Joosse, « Hésiode contre Homère dans le Charmide de Platon »

Seront analysées la citation de lOdyssée xvii, 347, cité par Socrate (161 a 4) et la citation dHésiode, Les Travaux et les Jours, 311, cité par Critias (163 b 4-5). Le contexte dorigine chez Hésiode rend très plausible le fait que la citation de Critias constitue une réponse substantielle à celle de Socrate. Ces citations permettent non seulement de donner plus de relief à la représentation des personnages du dialogue, mais également dapprofondir la réflexion sur la σωφροσύνη.

Paola Dolcetti, « Hésiode dans le Cratyle platonicien. Citations explicites, reprises diffuses et contextes étendus »

Dans les cinq passages du Cratyle où figure le nom dHésiode, Platon ne se limite pas à réutiliser et à intégrer des éléments se rapportant à lœuvre du poète ; dans certains cas lanalyse dun contexte plus vaste – chez Platon mais aussi dans le texte dHésiode – permet de rappeler un contenu poétique dont le philosophe se souvient bien et quil sait reprendre de façon allusive mais efficace afin de répondre à ses objectifs.

Jaume Pòrtulas, « οὔτε Ὁμήρου οὔτ̓ ἄλλου ποιητοῦ. Platon et certaines traditions de la poésie hexamétrique grecque »

Platon cite un bon nombre dhexamètres homériques. Le texte de ces citations diffère souvent de la vulgate homérique ; et, dans certains cas, leur attribution à Homère a été mise en doute. On a même pu suggérer que certains de ces textes avaient des connexions avec le vaste, et encore assez méconnu, domaine de lorphisme. Il sagira dans cet essai de réfléchir sur certains cas de ce genre, avant de conclure avec quelques remarques sur la polarité Homère vs Orphée dans lœuvre de Platon.

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Magali Année, « Ménon le mal nommé ou la réappropriation platonicienne de lancienne élégie dexhortation. Premières pistes pour un fondement (infra)-linguistique de la réminiscence »

Au seuil du Ménon, un double constat simpose : le nom du protagoniste Μένων correspond au participe présent du verbe μένειν « tenir bon, résister » ; chaque adresse que Socrate fait à Ménon génère un phénomène de clusters phoniques : μεν/μην/μον/μν/μαν. Concentrée sur la première partie du dialogue, une analyse de ces nœuds dictionnels, par-deçà le niveau logico-syntaxique de largumentation, dévoile un tissage sonore réinvestissant à ses fins la diction dexhortation des élégies de Tyrtée.

Fabio Stella, « Platon lecteur de Théognis dans le Ménon (95 d – 96 b 7). À propos de lapprentissage de la vertu »

Dans le Ménon, Platon fait-il lui-même les changements textuels dans les deux passages des Poèmes élégiaques que Socrate cite pour montrer la position dincertitude, tant des sophistes que de Théognis, quant à lenseignement de la vertu, ou tire-t-il sa version dune source inconnue ? Pour répondre à cette question, larticle propose une analyse du couple μανϑάνωδιδάσκω montrant que Platon a probablement changé volontairement le texte et indiquant les raisons possibles de ce changement.

Diego De Brasi, « Platon lecteur de Pindare. Une tentative de systématisation »

Les citations de Pindare dans lœuvre de Platon ont trois fonctions : accentuer le ton ironique des propos qui lui sont liés ; être partie intégrante de largument, sans toutefois lui apporter nécessairement une valeur ajoutée ; permettre le développement critique des thèses et des arguments. En plus, les mentions de Pindare contribuent dans les dialogues à construire une opposition entre une vie vécue sous la bannière de la philosophie et une vie non-philosophique.

Elisabetta Berardi, « Le Gorgias de Platon et lAntiope dEuripide. Entre distances formelles et réappropriation de savoirs anciens »

En reprenant des études récentes qui reconnaissent deux nouvelles allusions à lAntiope dans le Gorgias (Gorgias, 482 b-c ; 487 e-488 a), cet article 451entend montrer comment Socrate met en œuvre une mise en scène habile qui renvoie à la structure du drame dEuripide. Platon rendrait ainsi explicite sa volonté de faire allusion à Euripide comme à un savoir antérieur, quoiquen modifiant la sémantique du modèle, tout en réaffirmant une mise à distance formelle des mots dAmphion dans lἀγὼν λόγων.

Andrea Capra, « Le Gorgias et les deux Antiope. Tragique et comique »

Calliclès évoque lAntiope dEuripide pour souligner lopposition entre vie contemplative et vie active. Il y a pourtant un décalage étonnant entre le Socrate rustique du Gorgias et son prétendu modèle, lAmphion délicat dEuripide. Mais le Gorgias évoque aussi lAntiope dEubule. Cette comédie saccorde bien à cette image de Socrate et à lhédonisme vulgaire de Calliclès. Son discours nest quune tragédie dévoilée, dont les prétentions hautaines cachent une réalité ridicule.

Pierre Ponchon, « Thucydide dans Platon. Le cas exemplaire du livre VIII de la République »

Lanalyse des traces de la présence de Thucydide dans le livre VIII de la République permet de montrer que Thucydide nest pas pour Platon la source dun savoir historique, mais dune analyse philosophique et politique ; que lusage de Thucydide par Platon entremêle reprises cryptées et critiques virulentes quoiquimplicites ; quil sagit dune stratégie visant à exclure le discours thucydidéen du champs légitime de la philosophie.

Giuseppe Greco, « Lhistoire mythique comme preuve de larete dans le Ménexène de Platon »

Ce article porte sur la réappropriation de la tradition des epitaphioi logoi dans le Ménexène. À travers une comparaison avec les epitaphioi de Périclès et de Lysias et le Panégyrique dIsocrate, on réfléchira sur la valeur politique du genre, la continuité de larete et la fonction probatoire du passé. Lobjectif est didentifier les modes et les finalités de la réconfiguration platonicienne de ces topiques traditionnels, qui sont mis au service dune économie du discours différente.

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Catherine Darbo -Peschanski, « Le Timée de Platon. Un exemple de réappropriation par la philosophie des discours du savoir médical antérieur »

Cet article examine le processus de la nutrition et son principe central de parenté qui porte la nourriture vers le nourri, et les transformations que lui apporte Platon pour fonder le passage du mécanisme dabsorption du nutriment à celui du mouvement du monde visible, de lâme intelligible, de son éducation, et de la maladie. La nutrition, dont les traits fondamentaux sont hippocratiques, peut être qualifiée de paradigme épistémologique pour connaître la nature du Tout et des vivants quil abrite.