Résumés
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Platon citateur. La réappropriation des savoirs antérieurs
- Pages : 447 à 452
- Collection : Kaïnon - Anthropologie de la pensée ancienne, n° 17
- Série : Symposia, n° 7
- Thème CLIL : 3127 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Philosophie -- Philosophie antique
- EAN : 9782406104285
- ISBN : 978-2-406-10428-5
- ISSN : 2428-713X
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-10428-5.p.0447
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 11/01/2021
- Langue : Français
Résumés
Marie-Laurence Desclos, « Avant-propos ou Dionysos »
Parler de Platon citateur soulève un certain nombre de problèmes. Tout d’abord l’absence de mot – qu’il soit grec ou latin – pour désigner ce qu’est une citation. Outre cela, encore faut-il s’entendre sur ce que l’on désigne par le mot « citation » : interdiscursivité, ré-appropriation, récriture, ré-énonciation ? Selon quelles modalités et pour quelles finalités ?
Karine Tordo-Rombaut, « Platon citateur par Platon philosophe. Rép., III, 392 c 6-398 b 9 »
L’usage platonicien de la citation obéit-il à une méthode ? L’exposé sur l’énonciation (λέξις) (R. III 392c6-398b9) donne les règles à suivre pour rapporter le discours de quelqu’un d’autre. La confrontation entre cette théorie, forgée par Socrate « instituteur ridicule et flou » et la pratique de Socrate citateur des poètes démontre que « la citation est une énigme ». Cette proposition a une valeur pragmatique : elle invite le lecteur à prendre part à l’examen dialectique des discours cités.
Mauro Tulli, « Un héros de la philosophie. Achille dans l’Apologie de Platon »
Dans l’Apologie (28 b-d), Platon, avec la citation directe du chant XVIII de l’Iliade (78-106), suggère la comparaison entre Socrate et Achille. On peut reconnaître ici un glissement de sens qui fait signe vers le paradigme de l’intellectuel engagé en faveur du concept de justice. Le rapport avec le texte d’Homère est développé par des expansions et par des silences : la citation directe est l’objet d’une manipulation, avec des lacunes, des faux ajouts et même une variante emblématique.
448Catherine Collobert, « Interprétation et jeux de sens dans les Dialogues. Socrate et les poètes »
Ce chapitre montre que l’interprétation de la poésie dans les Dialogues a une fonction didactique et protatique, fondée sur l’idée que la poésie se prête à de multiples jeux de sens. Ces derniers sont regroupés en deux types d’interprétation : l’allegoresis et l’exemplification. La première se subdivise en trois espèces : réfutative, offensive et positive, la seconde en deux : offensive et positive. Ces interprétations reposent sur un anti-intentionalisme et sur une décontextualisation.
François Renaud, « Homère interlocuteur ? La citation dialectique chez Platon »
Cette étude cherche à démontrer que l’emploi platonicien de certaines citations homériques révèle d’un rapport dialectique, et non pas simplement antagoniste, au grand poète grec. Les trois passages homériques ici retenus, dont deux sont cités à trois reprises dans le corpus platonicien, illustrent divers usages dialectiques : la citation comme point de départ à réfuter, comme reprise d’une opinion à affirmer, soit reprise telle quelle, soit transformée.
Michele Corradi, « “Mon cher frère, arrêtons tous deux ensemble la force de cet homme”. Homère, Iliade, XXI, 308-309 = Platon, Protagoras, 340 a : les citations homériques dans l’analyse platonicienne de la pensée de Protagoras »
Dans les pages que Platon consacre à la pensée de Protagoras il est possible de remarquer la présence constante de références à la poésie d’Homère. Dans certains cas il est possible de penser que Platon tient à rendre hommage aux études homériques du sophiste (Prot. 340a, Crat. 391e-392b, Tht. 152e). Dans d’autres cas, les citations homériques semblent suggérer une stratégie littéraire et philosophique de plus longue haleine : c’est le cas des références à l’Odyssée dans le Protagoras.
Francesca Scrofani, « Une citation d’Homère et Hésiode dans le Minos attribué à Platon »
Homère et Hésiode sont cités dans le Minos pour louer Minos comme meilleur roi et législateur et réhabiliter son image négative présente dans la 449tragédie qui en faisait le tyran à opposer à Thésée, champion de la démocratie. Le contraste avec la tragédie est inséré dans une conception plus vaste de la poésie, qui aurait la fonction de décerner éloges et blâmes. L’usage d’Homère et d’Hésiode pour louer des personnages afin de construire des exempla est attesté ailleurs dans le milieu socratique.
Albert Joosse, « Hésiode contre Homère dans le Charmide de Platon »
Seront analysées la citation de l’Odyssée xvii, 347, cité par Socrate (161 a 4) et la citation d’Hésiode, Les Travaux et les Jours, 311, cité par Critias (163 b 4-5). Le contexte d’origine chez Hésiode rend très plausible le fait que la citation de Critias constitue une réponse substantielle à celle de Socrate. Ces citations permettent non seulement de donner plus de relief à la représentation des personnages du dialogue, mais également d’approfondir la réflexion sur la σωφροσύνη.
Paola Dolcetti, « Hésiode dans le Cratyle platonicien. Citations explicites, reprises diffuses et contextes étendus »
Dans les cinq passages du Cratyle où figure le nom d’Hésiode, Platon ne se limite pas à réutiliser et à intégrer des éléments se rapportant à l’œuvre du poète ; dans certains cas l’analyse d’un contexte plus vaste – chez Platon mais aussi dans le texte d’Hésiode – permet de rappeler un contenu poétique dont le philosophe se souvient bien et qu’il sait reprendre de façon allusive mais efficace afin de répondre à ses objectifs.
Jaume Pòrtulas, « οὔτε Ὁμήρου οὔτ̓ ἄλλου ποιητοῦ. Platon et certaines traditions de la poésie hexamétrique grecque »
Platon cite un bon nombre d’hexamètres homériques. Le texte de ces citations diffère souvent de la vulgate homérique ; et, dans certains cas, leur attribution à Homère a été mise en doute. On a même pu suggérer que certains de ces textes avaient des connexions avec le vaste, et encore assez méconnu, domaine de l’orphisme. Il s’agira dans cet essai de réfléchir sur certains cas de ce genre, avant de conclure avec quelques remarques sur la polarité Homère vs Orphée dans l’œuvre de Platon.
450Magali Année, « Ménon le mal nommé ou la réappropriation platonicienne de l’ancienne élégie d’exhortation. Premières pistes pour un fondement (infra)-linguistique de la réminiscence »
Au seuil du Ménon, un double constat s’impose : le nom du protagoniste Μένων correspond au participe présent du verbe μένειν « tenir bon, résister » ; chaque adresse que Socrate fait à Ménon génère un phénomène de clusters phoniques : μεν/μην/μον/μν/μαν. Concentrée sur la première partie du dialogue, une analyse de ces nœuds dictionnels, par-deçà le niveau logico-syntaxique de l’argumentation, dévoile un tissage sonore réinvestissant à ses fins la diction d’exhortation des élégies de Tyrtée.
Fabio Stella, « Platon lecteur de Théognis dans le Ménon (95 d – 96 b 7). À propos de l’apprentissage de la vertu »
Dans le Ménon, Platon fait-il lui-même les changements textuels dans les deux passages des Poèmes élégiaques que Socrate cite pour montrer la position d’incertitude, tant des sophistes que de Théognis, quant à l’enseignement de la vertu, ou tire-t-il sa version d’une source inconnue ? Pour répondre à cette question, l’article propose une analyse du couple μανϑάνω – διδάσκω montrant que Platon a probablement changé volontairement le texte et indiquant les raisons possibles de ce changement.
Diego De Brasi, « Platon lecteur de Pindare. Une tentative de systématisation »
Les citations de Pindare dans l’œuvre de Platon ont trois fonctions : accentuer le ton ironique des propos qui lui sont liés ; être partie intégrante de l’argument, sans toutefois lui apporter nécessairement une valeur ajoutée ; permettre le développement critique des thèses et des arguments. En plus, les mentions de Pindare contribuent dans les dialogues à construire une opposition entre une vie vécue sous la bannière de la philosophie et une vie non-philosophique.
Elisabetta Berardi, « Le Gorgias de Platon et l’Antiope d’Euripide. Entre distances formelles et réappropriation de savoirs anciens »
En reprenant des études récentes qui reconnaissent deux nouvelles allusions à l’Antiope dans le Gorgias (Gorgias, 482 b-c ; 487 e-488 a), cet article 451entend montrer comment Socrate met en œuvre une mise en scène habile qui renvoie à la structure du drame d’Euripide. Platon rendrait ainsi explicite sa volonté de faire allusion à Euripide comme à un savoir antérieur, quoiqu’en modifiant la sémantique du modèle, tout en réaffirmant une mise à distance formelle des mots d’Amphion dans l’ἀγὼν λόγων.
Andrea Capra, « Le Gorgias et les deux Antiope. Tragique et comique »
Calliclès évoque l’Antiope d’Euripide pour souligner l’opposition entre vie contemplative et vie active. Il y a pourtant un décalage étonnant entre le Socrate rustique du Gorgias et son prétendu modèle, l’Amphion délicat d’Euripide. Mais le Gorgias évoque aussi l’Antiope d’Eubule. Cette comédie s’accorde bien à cette image de Socrate et à l’hédonisme vulgaire de Calliclès. Son discours n’est qu’une tragédie dévoilée, dont les prétentions hautaines cachent une réalité ridicule.
Pierre Ponchon, « Thucydide dans Platon. Le cas exemplaire du livre VIII de la République »
L’analyse des traces de la présence de Thucydide dans le livre VIII de la République permet de montrer que Thucydide n’est pas pour Platon la source d’un savoir historique, mais d’une analyse philosophique et politique ; que l’usage de Thucydide par Platon entremêle reprises cryptées et critiques virulentes quoiqu’implicites ; qu’il s’agit d’une stratégie visant à exclure le discours thucydidéen du champs légitime de la philosophie.
Giuseppe Greco, « L’histoire mythique comme preuve de l’arete dans le Ménexène de Platon »
Ce article porte sur la réappropriation de la tradition des epitaphioi logoi dans le Ménexène. À travers une comparaison avec les epitaphioi de Périclès et de Lysias et le Panégyrique d’Isocrate, on réfléchira sur la valeur politique du genre, la continuité de l’arete et la fonction probatoire du passé. L’objectif est d’identifier les modes et les finalités de la réconfiguration platonicienne de ces topiques traditionnels, qui sont mis au service d’une économie du discours différente.
452Catherine Darbo -Peschanski, « Le Timée de Platon. Un exemple de réappropriation par la philosophie des discours du savoir médical antérieur »
Cet article examine le processus de la nutrition et son principe central de parenté qui porte la nourriture vers le nourri, et les transformations que lui apporte Platon pour fonder le passage du mécanisme d’absorption du nutriment à celui du mouvement du monde visible, de l’âme intelligible, de son éducation, et de la maladie. La nutrition, dont les traits fondamentaux sont hippocratiques, peut être qualifiée de paradigme épistémologique pour connaître la nature du Tout et des vivants qu’il abrite.