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Classiques Garnier

Résumés

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Résumés

David Bouvier, « Les contradictions du contrat de philotès au chant III de lIliade »

On peut se demander pourquoi, contrairement au latin, le grec na pas retenu, pour dire la relation réciproque des citoyens, un terme lié à lidée de philia ou de philotês. Une relecture du chant III de lIliade permet de rappeler à quel point la philotês était dépendante de la puissance ambiguë dAphrodite. Voué à léchec, le pacte de philotês que Troyens et Achéens voulaient conclure est révélateur de limpossibilité grecque de penser, sans Aphrodite, une solidarité sociale non problématique.

Malika Bastin-Hammou, « La notion de φιλία chez Aristophane. De la critique des intérêts égoïstes à lexploration du lien politique »

La comédie ancienne est un genre notoirement agressif où les relations entre les personnages sont avant tout motivées par lintérêt. La question de la φιλία nen est pas pour autant absente : au contraire, chacune de ses modalités – conjugale, filiale, économique, politique – est isolée puis poussée à lextrême pour donner à voir, sur la scène comique, ce que seraient les relations entre les individus et les cités grecques si telle ou telle forme de φιλία prenait le pas sur les autres.

Mélina Tamiolaki, « Les enjeux de lamitié chez Hérodote »

À partir de certains épisodes où les termes comme φίλος, ἑταῖρος, ξεῖνος figurent, cet article trace certains motifs historiographiques dans la présentation hérodotéenne de lamitié. Ensuite, il étudié la connexion entre lamitié et la justice dans lœuvre de lhistorien. Enfin, il se concentre sur les épisodes dalliances, exemples damitié politique. Lhistoire dHérodote témoigne de la dimension politique de lamitié, ainsi que des complexités et ambiguïtés qui laccompagnent.

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Pierre Ponchon, « Philia et dikè chez Thucydide »

Partant du constat que La Guerre du Péloponnèse propose une approche similaire des notions de justice et damitié, on est conduit à sinterroger sur le sens de lopposition, tant au niveau international quà lintérieur des cités, entre la réduction réaliste, qui tend à traiter philia et dikè comme des prétextes masquant les relations de puissance et dintérêt, et une autre conception qui y voit les valeurs fondatrices de lordre social et politique.

Vincent Azoulay, « Xénophon et la redéfinition de la philia »

Dans le monde grec de lépoque classique, la philia est a priori une relation symétrique. Si Xénophon se fait parfois lécho de cette conception horizontale de la philia – en relayant lidéologie de l« amitié » civique propre à juguler la discorde –, il est loin de sy tenir. Dans la plupart de ses écrits, il propose une conception de lamitié, fondée sur lutilité, sur linégalité et même, parfois, sur la rupture avec le cadre civique – comme le manifeste son usage du terme philanthropia.

Évelyne Scheid-Tissinier, « Lusage de la dikè et du dikaion dans la rhétorique judiciaire »

Létude de lusage de dikè et dikaion, des données homériques et hésiodiques jusquaux emplois de la rhétorique judiciaire athénienne, permet de faire émerger la logique selon laquelle la culture grecque a élaboré ce quelle considère comme la justice, la dikè : un mécanisme de réparation dont le propos est de rétablir cet équilibre auquel est identifié le juste, le dikaion. La victime reçoit ce à quoi elle a droit, obtenant de lagresseur quil paie ce dont il sest rendu redevable.

Pierre Chiron, « LAmitié dans la rhétorique du ive siècle av. J.-C. »

Cet article étudie philia dans un corpus postérieur à la condamnation platonicienne de la rhétorique. Isocrate témoigne dune sorte de contre-réforme des rhétoriciens. La doxographie dépend du projet de chaque source. Léthique philosophique de lÉthique à Nicomaque diffère de léthique communicationnelle de Rhet. Le message isocratique dépend dun projet où la paideia justifie limpérialisme. Dans ces contextes différents, le rôle de lamitié demeure constant : il sagit de mettre une psychologie au service de politiques.

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Anne Laure Therme, « Φιλία et δίκη dans les fragments présocratiques »

Φιλία et δίκη, en un sens physique ou éthique, sont pour les présocratiques des formes de nécessité laissant peu de place au choix : ainsi lamitié, quelle attire les contraires (Empédocle) ou les semblables (Démocrite). La justice, dabord relative aux lois de lunivers et de lêtre (Anaximandre, Héraclite et Parménide), est certes affaire de rétribution proportionnelle et de mesure, mais, dans sa dimension délibérative, elle se restreint à consentir ou non à la nécessité.

Olivier Renaut, « Lamitié comme instrument de la justice du Protagoras aux Lois »

Pour produire lunité de la cité, les fonctions respectives de la justice et de lamitié dans la cité platonicienne semblent complémentaires, comme en atteste le modèle protagoréen de la genèse de la cité dans le dialogue éponyme. Cependant, il existe une véritable tension entre ces deux moyens dès lors que lun est compris comme linstrument de lautre dans la République et les Lois. Cette contribution soutient que pour Platon, la philia doit demeurer subordonnée à un impératif de justice.

Létitia Mouze, « Être juste et savoir. Lanti-intellectualisme platonicien »

Il sagit de montrer que, si le paradoxe « nul nest mauvais (injuste) de son plein gré » signifie que lignorance de notre intérêt véritable est cause du mal que nous commettons, il reste que cette ignorance nest pas intellectuelle. Un examen approfondi de ce que signifie pour Platon « savoir » et « ignorer » montre en effet que cest lâme tout entière, dans toutes ses dimensions, tant affectives que rationnelles (et non pas seulement sa partie rationnelle), qui sait ou ignore.

Dimitri El Murr, « Les formes de la philia et lamitié civique dans les Lois de Platon »

Cet article porte sur un passage des Lois (VIII 836e-837d) dans lequel Platon, reprenant à nouveaux frais certaines de ses analyses antérieures (dans le Lysis et dans le Phèdre), propose une typologie des formes de philia en distinguant lamitié pour le semblable, lamitié pour le contraire et la forme mixte damitié. Les conséquences législatives de cette typologie sont examinées, et notamment la conception de lamitié civique qui sensuit.

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Charlotte Murgier, « Lamitié politique dans les Lois de Platon. Lecture de III 693d-697c »

La lecture des pages 693d-697c du livre III des Lois de Platon, consacrées au récit par lAthénien du rayonnement puis du déclin de lempire perse, permet de mesurer le rôle central joué par lamitié dans la cohésion dune communauté politique, en analysant les facteurs éthiques et politiques qui président à son apparition et à sa disparition.

Arnaud Macé, « La justice cosmique dans les Lois. Platon lecteur dHomère et dAnaxagore »

Platon, à loccasion des trois réfutations de limpiété insérées dans le livre X des Lois, fait de la justice la clef de voûte dun ordre universel, placé sous légide dun intellect divin. Il enrichit pour ce faire le modèle dintelligence cosmique élaboré par Anaxagore par la réactivation de motifs homériques, notamment militaires et pastoraux. Le jeu de petteia qui divertit les prétendants homériques lui fournit en outre une analogie propice à représenter une providence universelle.

Pierre Pellegrin, « De la philia politique chez Aristote. Malaise dans la cité ? »

Que l« amitié politique » soit, chez Aristote, la forme suprême de lamitié ne résiste pas à lexamen. La philia est lextension à un autre des sentiments que le sage éprouve envers lui-même. La philia a cependant une fonction politique, plus précisément une fonction idéologique, au sens marxiste, car elle aide les dominés à accepter leur sort ; elle joue ainsi joue un rôle proche de celui de lÉros chez Freud, celui de contenir les forces de dissolution de la vie collective.

Esther Rogan, « Unité et tensions de la justice et de lamitié chez Aristote »

Cet article envisage la richesse des points de vue dAristote sur les relations entre lamitié et la justice. Un paradigme éthique, où une justice digne de ce nom se trouve seulement dans lamitié première. Un paradigme politique, où amitié et justice sont des notions relatives et graduelles dont la proportion varie selon les koinoniai dans lesquelles elles se trouvent. Malgré cette affinité essentielle, dans la cité, les deux notions peuvent trouver une existence relativement séparée.

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Giuliana Besso, « La question du juste et ses implications dans le discours aristotélicien sur lesclavage. Politique I 6, 1255a3-1255b15 »

Largumentation relative à lesclavage par nature ou selon la loi, au livre I de la Politique, reflète des problèmes réels concernant lesclavage (« juste et utile » dêtre un esclave ? esclavage par nature, légitimité de lesclavage de guerre, les barbares comme esclaves). Le cadre juridique complexe met en évidence un lien étroit entre la pensée aristotélicienne et la société de son temps, avec une référence spéciale au modèle de loikos, point de départ de lanalyse politique.

Silvia Gastaldi, « Amitié et justice dans lÉthique à Nicomaque dAristote »

Larticle examine les passages du livre VIII de lÉthique à Nicomaque, dans lesquels Aristote analyse le rapport entre lamitié et la justice, en particulier dans les communautés familiales. Aristote trouve dans la famille des analogies avec les constitutions politiques, et montre comment le chef de famille réalise la philia et la justice en se conduisant en bon roi à légard de ses fils, de façon aristocratique envers son épouse, et en maître à légard de ses esclaves.

Charlotte Murgier, « La médiation du propre dans la théorie aristotélicienne de lamitié »

Lobjet de cet article est de montrer, à travers une analyse dÉthique à Nicomaque VIII-IX et de Politique II, que la notion de propre joue un rôle de médiation dans la théorie aristotélicienne de lamitié, et cela à deux titres. Si le propre permet délucider le contenu de lamitié quon ne peut manquer déprouver envers soi-même, il se révèle aussi décisif pour rendre compte du plaisir pris aux actions de son ami, et, par ce biais, de la nécessité de lamitié dans la vie heureuse.

Pierre-Marie Morel, « Lamitié et le problème de la vertu dans léthique épicurienne »

Cet article examine le statut de lamitié dans la théorie épicurienne de la vertu, dans un contexte où le principe premier est la recherche du plaisir personnel et de lutilité. Contre une lecture purement utilitariste de la position épicurienne, létude soutient que lamitié permet de concevoir le souci dautrui, non pas comme un obstacle au plaisir, mais comme un aspect du 534bonheur personnel. Cela ne veut pas dire, pour autant, que lamitié soit une solution politique, applicable au niveau de la cité.

Christelle Veillard, « Saimer soi-même. À propos dune ambiguïté stoïcienne »

Hécaton, disciple de Panétius, énonce : « Tu demandes, en quoi jai progressé ? Jai commencé dêtre lami de moi-même ». Cette amitié auto-référentielle doit être distinguée de lamour de soi (philautia), né du sentiment dappropriation à soi (oikeiôsis). Si, au sens strict, seul le sage peut être objet ou sujet damitié, la phrase dHécaton incite à conclure que lamitié pour soi est aussi le fait de linsensé, à condition quil prenne en compte ses défauts et les intègre à sa personnalité.

Richard Bett, « Les Stoïciens ont-ils inventé les droits de lhomme ? »

Les Stoïciens ont-ils été les premiers philosophes des droits de lhomme ? Il est vrai que plusieurs de leurs thèses semblent saffranchir des données sociales et politiques de lépoque ; cest notamment le cas du cosmopolitisme. Mais les biens qui font lobjet des droits de lhomme sont toujours, pour les Stoïciens, des biens extérieurs qui nont quune valeur relative, alors que les véritables biens sont purement intérieurs et ne peuvent nous être ni enlevés ni conférés par laction dautrui.

Frédéric Fauquier, « Vertu politique et amitié dans le néoplatonisme tardif »

Après avoir déterminé la situation néoplatonicienne de la vertu politique dans léchelle des vertus puis dégagé une double caractéristique de la vertu politique, à savoir quelle est métriopathie, contrôle, et non suppression, des passions afin de rendre possible une vie en communauté, et vertu de lêtre en relation entendue dans un double sens, relation des parties de lâme entre elles mais aussi relation à autrui, il sagira de montrer comment lamitié la parachève idéalement.