Si l’oikos est certes un ensemble de personnes que distinguent leur statut, leur âge et leur sexe, et que la distribution de leurs fonctions respectives agence en une unité articulée, il ne s’y limite pas. Il est aussi une multiplicité matérielle d’activités et d’objets, occultée de la littérature savante pour les raisons méthodologiques et épistémologiques évoquées dans les pages précédentes. Pourtant, comme dans le cas des êtres humains, cette multiplicité pose elle aussi la question de sa mise en ordre unitaire : à la fois sur le plan pragmatique de l’utilité attendue des réalités qui la composent, et sur le plan pratique du Bien à l’horizon des trois opérations fondamentales de l’oikonomia – l’acquisition des biens ou richesses, leur conservation et leur bon usage. Les trois chapitres qui vont suivre portent sur chacune de ces opérations. L’acquisition des richesses ou des biens soulève la question de ses moyens et de ses limites, dans le cadre d’une réflexion technique, mais aussi éthique et politique. Il en va de même avec la conservation des ressources, étroitement liée au thème de leur dépense et à celui de leur disposition dans l’espace. L’agencement de la diversité des biens matériels dans l’oikos ou la cité, en effet, vise à assurer leur utilité effective mais aussi à rendre le monde quotidien lisible et intelligible, et par là habitable. L’usage, enfin, concerne la finalité des biens au-delà de leur utilité fonctionnelle. Il constitue en cela la fonction la plus directement liée à l’interrogation commune à ces trois opérations : dans quelle mesure l’oikonomia peut-elle être considérée comme un savoir et une pratique ayant le Bien pour objet ?