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Classiques Garnier

Avant-propos

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Avant-propos

Conçu pour être le complément du Répertoire de mises en prose publié en 2014 dans cette même collection, et constituant lobjectif principal dun projet PRIN financé par le Ministère de lUniversité italien en 2017, ce second volume a pour objet les réécritures en prose danciens poèmes exclues dans létude fondatrice de Georges Doutrepont (1939). Comme lon sait, lattention du savant belge sétait concentrée sur les deux genres les plus représentés dans ce domaine : « épopées » et « romans chevaleresques », comme le spécifie son titre même. Quelques sondages partiels menés au cours des années 2010 avaient en effet conforté notre hypothèse que le phénomène de ladaptation en prose ne se basait pas sur le « genre » des poèmes-sources, mais touchait de manière beaucoup plus générale le goût des lecteurs de la fin du Moyen Âge dune part et, de lautre, la volonté des auteurs, et de leurs commanditaires, de préserver toute une tradition littéraire autochtone en en modernisant et la forme et la langue.

Deux premières enquêtes, de Barbara Ferrari et de Paola Cifarelli, avaient dailleurs confirmé lexistence dun corpus dœuvres hagiographiques dune part, de récits brefs de lautre, qui méritaient dêtre considérés au sein dun même corpus (Barbara Ferrari, « Réécritures en prose de poèmes hagiographiques français. Premier recensement », in Pour un nouveau répertoire des mises en prose. Roman, chanson de geste, autres genres, Paris, Classiques Garnier, 2014, p. 151-163 ; Paola Cifarelli, « Récits brefs et mise en prose », in Raconter en prose, xive-xvie siècle, Paris, Classiques Garnier, 2017, p. 303-324). Cest sur la base de ces résultats préliminaires quun noyau de titres a pu être établi, noyau qui sest ensuite élargi à dautres domaines – matière ovidienne, encyclopédies, livres bibliques, « miracles » – jusquà fournir la matière pour ce volume.

Laccueil que la communauté scientifique avait réservé au premier nous a confirmé que lorganisation interne pouvait en être conservée ; sans 8entrer dans les détails – pour lesquels nous renvoyons à lAvant-propos de 2014 – on trouvera donc ici non seulement la même présentation par ordre alphabétique des titres, mais aussi la même structure interne des notices : (A) la prose ; (B) la source ; (C) histoire de la prose ; (D) bibliographie. Des index (Œuvres, auteurs, traducteurs ; Artisans du livre manuscrit et imprimé ; Imprimeurs, libraires et éditeurs anciens ; Noms propres ; Manuscrits) et une Bibliographie ont aussi été prévus, cette dernière ne comprenant que les quelques titres et les sites très fréquemment cités dans les notices et qui constituent des références incontournables ; en contrepartie, nous avons décidé dexclure deux outils que tout médiéviste consulte quotidiennement et dont lindication pour chacun de nos titres aurait été redondante et, somme toute, superflue : le Dictionnaire des Lettres françaises – Le Moyen Âge (Paris, Pochothèque, 1992) et le site Arlima. Dans la mesure du possible nous avons indiqué lexistence des numérisations disponibles en ligne, que ce soit pour les Catalogues des bibliothèques, pour les manuscrits, ou pour les éditions anciennes : tout à fait conscientes que ces données sont vite périmées, il nous aurait néanmoins semblé dommage dy renoncer.

La différence majeure par rapport au Répertoire de 2014 porte sur lempan chronologique considéré, nettement élargi par rapport au premier, et qui a été imposé par les textes mêmes : le xiiie siècle sest en effet révélé riche en réécritures, principalement mais non exclusivement pour ce qui concerne lhagiographie. À lautre bout de la fourchette temporelle, notre dépouillement a confirmé deux aspects : dune part, la continuité fondamentale entre « Moyen Âge » et xvie siècle, ce dernier ayant réservé un accueil important à la production littéraire médiévale, dautre part le passage à limprimé pour la plupart de nos titres. Cest dailleurs là, dans la prise en compte de cette absence de fracture et de la nouvelle diffusion permise et encouragée par lédition, que se situe un des domaines de recherche les plus prometteurs, que dautres projets continuent de fouiller : quil nous soit permis de signaler, parmi ceux qui sont en cours au sein de notre PRIN même, la base de données EMAF15-16 (« Éditer le Moyen Âge Français aux xve et xvie siècle »), dirigée par Anne Schoysman de lUniversité de Sienne et abritée sur le site Mirabile de la Fondazione Ezio Franceschini de Florence.

Le déséquilibre apparent entre certaines notices, qui pourrait surprendre le lecteur, découle de fait des œuvres elles-mêmes, dont la diversité 9a parfois imposé des écarts dans les sous-entrées, amplifiées ici, réduites voire supprimées ailleurs. Plutôt que de poursuivre une uniformisation à tout prix, nous avons souhaité conserver cette diversité – à imputer parfois aux Auteur.e.s mêmes, à leur sensibilité ou à leur formation – en la considérant un enrichissement de lensemble.

Un mot enfin sur les manuscrits contenant des textes hagiographiques : les petites flèches () renvoyant dun titre à lautre ne sont pas sans révéler de menues divergences qui peuvent dépendre des sources utilisées ou de lattention réservée par chaque Auteur.e à un aspect de détail.

Nous tenons aussi à exprimer notre reconnaissance aux nombreux auteurs qui ont accepté la tâche, parfois ingrate, de satteler à un travail déquipe et de se soumettre à ses contraintes et à ses délais ; en ordre alphabétique : Antonella Amatuzzi (IsopetIII de Paris), Elisabetta Barale (Miracles de Nostre Dame de Jean le Conte ; Miracles de Notre Dame de Jean Miélot I et II), Hélène Bellon-Méguelle (Grantz Geanz), Anders Bengtsson (Vie de sainte Geneviève), Marc Boriosi (Vie de saint François dAssise), Stefania Cerrito (Ovide moralisé, versions « angevine » et « brugeoise », Pyrame et Thisbé), Paola Cifarelli (Ordene de chevalerie), Olivier Collet (Hystore de Julius Cesar de Jean de Thuin), Martina Crosio (Chastelaine de Vergi, LErberie, Mantheau mal taillé, Nouvelles dites de Sens, Songe du Vieil Pèlerin de Philippe de Mézières, Vie de saint Jacques le Majeur, Vie de saint Martin de Tours), Olivier Delsaux (Chemin de long estude de Jean Chaperon, Vigiles des morts de Jean Miélot), Sandra Ducruet Ancey (Vie de saint Julien lHospitalier), Barbara Ferrari (Conception Nostre Dame, Vie de saint Jean-Baptiste, Vie de sainte Marie lÉgyptienne, Vie des Trois Maries de Jean Drouyn), Adélaïde Lambert (Barlaam et Josaphat), Margherita Lecco (Vie de saint Édouard le Confesseur), Marco Maulu (Livre des Sept sages de Rome version « A », Roman des Sept sages de Rome version « D »), Anne-Laure Metzger-Rambach (Nef des folz du monde de Jean Drouyn), Amandine Mussou (Échecs amoureux moralisés dÉvrart de Conty), Yunhao Na (Vie de saint Fiacre), Pierre Nobel (Bible : Ancien Testament, Genèse, Macchabées), Ilaria Rota (Vie de saint Jean Paulus), Simone Sari (Vie des Trois Maries de Jean Drouyn), Christine Silvi (Agregacion des secrés de nature, Image du monde de Gossuin de Metz), Alessandro Turbil (Empereur Constant, Quinze signes du Jugement dernier).

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Ce deuxième volume nous permet aussi de remplir une lacune du premier et de proposer une version entièrement refondue de deux notices. Il sagit notamment du Roman de la Rose anonyme (seule la version de Jean Molinet figure dans le vol. I), dont la notice a été établie par Jean Devaux ; de Gérard du Frattre, par Adélaïde Lambert et François Suard ; et du Galien en prose, dont deux rédactions différentes sont maintenant reconnues : le Galien Restoré conservé par un manuscrit et des éditions parisiennes, et une une version « lyonnaise » à partir de lédition de Claude Nourry (1525) (notices de Maria Colombo Timelli et de Bernard Guidot). Contrevenant à lordre alphabétique annoncé, ces quatre notices trouvent place en fin de volume.

Cest encore avec plaisir que nous exprimons nos plus vifs remerciements aux collègues et amis dont le nom napparaît pas toujours dans les pages qui suivent, mais dont la générosité, la disponibilité et le savoir ont été irremplaçables : Sergio Cappello (Université dUdine), Nathalie Coilly (BnF), Graziella Pastore (BnF), Stéphanie Rambaud (BnF), Anne Schoysman (Université de Siena), Mary Beth Winn (University of New York) ; ainsi que les nombreux conservateurs et conservatrices dautres bibliothèques, françaises et britanniques surtout, qui nous ont transmis des reproductions ou nous ont fourni des informations de première main pendant les mois marqués par la pandémie où nos déplacements nétaient même pas envisageables.

À côté des deux Répertoires sur papier, le site « lavieenproses », abrité par lUniversité de Milan, continue dêtre accessible : seules les données « brutes » de chaque mise en prose y sont déversées, mais la bibliographie y est constamment mise à jour.

Reste à exprimer le souhait que, tout comme le premier, ce deuxième volume offre à nos collègues, surtout aux plus jeunes, des pistes pour continuer, voire entamer, un projet de recherche dans lun ou lautre des aspects abordés dans nos notices ; sur le plan philologique, les « proses » inédites demeurent nombreuses ; sur le plan littéraire et/ou linguistique, les études ne peuvent quêtre encouragées par la possibilité de collationner des versions différentes du même texte (vers et prose, certes, mais aussi modifications successives introduites dans la même prose) ; et encore, la prise en compte de lhistoire des œuvres sur une durée plus ou moins longue, sans coupure entre tradition manuscrite et imprimée, permettra de sinterroger sur les raison du succès, ou de léchec, de certains titres.

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« Lautrui avoir ne enrichist homme », écrivait Jean Miélot dans son recueil de proverbes ; ce volume se voudrait bien la preuve du contraire. Si le livre de Georges Doutrepont était bien le résultat dune entreprise individuelle, notre époque impose en quelque sorte le travail déquipe, où lavoir des uns – leur savoir – enrichist bien les autres.

Maria Colombo Timelli,

Martina Crosio,

Barbara Ferrari