Aller au contenu

Classiques Garnier

Résumés

  • Type de publication : Article de collectif
  • Collectif : Mineurs, Minorités, Marginalités au Grand Siècle
  • Pages : 375 à 382
  • Collection : Rencontres, n° 425
  • Thème CLIL : 3916 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Philosophie -- Histoire de la philosophie
  • EAN : 9782406092087
  • ISBN : 978-2-406-09208-7
  • ISSN : 2261-1851
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-09208-7.p.0375
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 19/11/2019
  • Langue : Français
375

Résumés

Gilles Declercq, « Malséances raciniennes. Réflexions sur lhétérodoxie de limaginaire tragique »

La régularité exemplaire de la dramaturgie racinienne est une donnée constitutive de lœuvre de Jean Racine et de sa réception pluriséculaire. Toutefois ce paradigme dune tragédie idéale, régulière, consécutivement bienséante, est contredit par lexamen de limaginaire racinien nourri de la topique violente et cruelle de lœuvre sénéquienne et ovidienne. Cest au déchiffrement de ce palimpseste « malséant » que sapplique la présente étude.

Francine Wild, « Le statut paradoxal du poème héroïque »

Le poème héroïque est le genre le plus noble, loué par tous les théoriciens. Mais aucun des poèmes publiés au milieu du xviie siècle na le retentissement de ceux de Virgile ou du Tasse. Longuement élaborés, ils semblent ne plus convenir à lesprit de la société lorsquils paraissent. Le merveilleux chrétien, les formes de lhéroïsme quon y trouve, ne sont plus acceptés. Ils disparaissent et restent incompris, et même inclassables, malgré des qualités que certains redécouvrent.

Tiphaine Rolland, « “On a toujours besoin dun plus petit que soi”. La Fontaine et les marges facétieuses »

Lidentification de deux sources de La Fontaine, Le Recueil de plusieurs plaisantes nouvelles de Tyron pour la fable « Le Jardinier et son Seigneur », et Les Contes aux heures perdues de DOuville pour le conte « Les Aveux indiscrets », permet de cerner un rapport aux modèles qui nest pas, chez le poète, direct et rectiligne, mais réticulaire – doù la nécessité dune nouvelle topographie des relations littéraires, retraçant finement les interactions entre « majeurs » et « mineurs ».

376

Pierre Ronzeaud, « La réécriture symbolique de litinéraire dun mineur devenu majeur à la fin du règne de Louis XIV. Les Mémoires de Valentin Jamerey-Duval, petit berger analphabète devenu académicien »

Létude de la partie denfance des Mémoires de Valentin Jamerey-Duval, petit berger analphabète de la fin du xviie siècle devenu ensuite académicien, montre comment ce « mineur » devenu « majeur » présente le peuple quil a quitté par son accession à la culture écrite comme par son ascension sociale. Il raconte en fait sa différence. Comme si lon ne pouvait dire lAutre, le dissemblable, linférieur, le « mineur » en échappant aux Imagos qui informent la représentation sociale.

Anne Boutet, « Lagréable, lextravagant et lordure. Charles Sorel, lecteur des recueils français de nouvelles du xvie siècle »

Lhéritage narratif des conteurs de la Renaissance dans lHistoire comique de Francion est un défi de Sorel, romancier comique, à ses lecteurs. Cette influence littéraire, souvent grivoise et scatologique, et que Sorel marginalisera dans ses écrits critiques, demande une lecture aussi active quespiègle : le jeu fictionnel avec les marges de la bienséance et du genre romanesque invite non pas à se réjouir dune « écriture ordure », mais à interroger le choix de cette « extravagance » narrative.

Céline Fournial, « La tragi-comédie, un genre “mineur” matrice du débat théâtral moderne »

Parce que son succès est limité dans le temps et quelle nest pas héritée de lAntiquité comme la tragédie et la comédie, la tragi-comédie est pour lhistoire littéraire un genre mineur. Or tous les auteurs majeurs la pratiquent et elle enclenche une réflexion moderne sur le théâtre en prônant vraisemblance, plaisir, relativité. Le succès de ce genre oblige les Réguliers à refonder leur discours. La tragi-comédie, sinspirant de sujets et de formes modernes, éveille la critique dramatique.

Michèle Longino, « Un plaidoyer pour les genres mineurs du Grand Siècle. La fable et le conte des fées »

Les Fables de La Fontaine et les Contes des fées de Perrault, sont classés avec la littérature enfantine, dite mineure, puisque Boileau les a classés ainsi. Des genres « mineurs », mais cultivés et savourés dans les salons les plus 377sophistiqués de lâge classique, ils ont jouit dune durée de popularité qui dépasse celle des œuvres dites majeures de lépoque classique. Ils ne sont pas mineurs, mais élémentaires, durables, transhistoriques.

Nathalie Freidel, « Lenvers du roman. Mme de Lafayette épistolière »

Le peu que nous avons conservé de la correspondance de Mme de Lafayette atteste dun usage stratégique de lépistolaire et de la posture dautorité inédite quelle confère aux femmes qui veulent écrire, en marge des institutions officielles. Espace privilégié daffirmation dune autonomie qui ne va pas de soi, terrain dexercice dun véritable don pour les affaires, la lettre selon Mme de Lafayette se révèle enfin lieu de revendication dune auctorialité problématique.

Nathalie Grande, « Écrire sur le mode mineur. Aux avant-postes de la mode littéraire, Jean de Préchac »

Alors que Préchac est tenu pour un auteur mineur, son œuvre abondante fait de ce courtisan de lentourage de Monsieur un innovateur en matière générique. À la fois amateur, par les postures adoptées dans ses discours péritextuels, et professionnel de la littérature, par lampleur de son œuvre comme par sa prise en compte du gain commercial potentiel, Préchac montre par sa carrière comment la marginalité dun auteur mineur, en lui laissant une plus grande liberté, peut servir une dynamique de création.

Sophie Tonolo, « Redéfinir les marges ? Les “petits poètes” du xviie siècle »

« Petits poètes », cest ainsi que Théophile Gautier nomma – et sauva – des versificateurs du xviie siècle méprisés. Mais que sont ces « petits poètes » ? Y a-t-il encore un sens à isoler une telle catégorie ? Cet article propose de reconsidérer ces questions à la lumière des Vies de Guillaume Colletet, lun des premiers bilans de la production poétique française et, à partir des perspectives qui sen dégagent, danalyser des cas singuliers tels Adam Billaut, Charles Beys ou Louis de Neufgermain.

Isabelle Trivisani-Moreau, « Écritures réfugiées entre modèles et invention »

Larticle confronte les trajectoires décrivains protestants passés au Refuge, Denis Veiras, Anne de La Roche-Guilhen, Simon Tyssot de Patot, 378Anne-Marguerite Petit-Du Noyer, au prisme de la minorité : leur mobilité a joué dans une approximation critique qui schématise leur parcours marginal. Leurs choix génériques témoignent de leurs stratégies pour capter des publics dotés dune expérience du conflit, auprès desquels ils cherchent à susciter une pratique de la double lecture.

Francis Assaf, « Jean Meslier, aussi athée que Louis XIV était Très-Chrétien (et même plus) »

Chevauchant les xviie et xviiie siècles, Jean Meslier (1664-1729) fut curé dÉtrépigny de 1689 à 1729. Élaborée secrètement et intensément personnelle, son œuvre manifeste un athéisme radical. Elle commença à être connue grâce à Voltaire à partir de lextrait publié à Genève en 1762. Enterrée par lAncien Régime, elle est exploitée par les Lumières, la Révolution française et celle dOctobre. Ces appropriations font de lui un chef de file qui était loin de se douter de son destin posthume.

Alex Bellemare, « Figurations de la marginalité. Prison, superstition et écriture de soi chez Pierre-Corneille Blessebois »

Dans cet article, nous étudions les figurations de la marginalité dans lœuvre de Pierre-Corneille Blessebois. Les narrateurs de Blessebois sont volontiers libertins et se situent en marge des espaces traditionnels de sociabilité. Cest à travers une esthétique de la tromperie que sincarne le libertin, à la fois déviant et monstrueux. Nous montrons en somme que lexclusion est vécue moins comme un châtiment quun triomphe sur autrui : la marginalité fait partie prenante de lidentité libertine.

Marta Marecos Duarte, « Léglogue au classicisme. Une harmonie entre lhumble et le sublime (chez Rapin, Fontenelle et Cruz e Silva) »

Rapin et Fontenelle réhabilitent le genre bucolique en le concevant en tant quart modérateur de léloquence et des mœurs, par la recherche dun juste milieu entre le style humble et le style sublime. Dans le cadre du néoclassicisme portugais, au xviiie siècle, la critique du style rustique, inspirée par ces auteurs, fut déterminante pour façonner une conception esthétique dont limposition ne laisse place, dans le Parnase, aux poètes qui ne suivent lidéale dimitation de la « belle nature ».

379

Deborah Steinberger, « Un nain géant. Le Mercure Galant devant ses critiques »

Le Mercure Galant de Jean Donneau de Visé se voit souvent attaqué pour la qualité peu distinguée de son contenu. De nombreux critiques contemporains ont trouvé le journal trop commercial, trop populaire, trop attaché à ladulation du roi. Cet article explore les préjugés que traduisent ces jugements négatifs au sujet dune publication novatrice aux contenus divers et variés, ouverte à la participation de ses lecteurs et lectrices, quils soient « qualifiés » ou simples amateurs.

Stella Spriet, « La Muse historique de Loret. Le récit dune Fronde en vers burlesque »

Notre étude porte sur la Muse historique de Jean Loret, œuvre marginale à double titre puisquelle est proposée parallèlement à la Gazette de Renaudot, louvrage de référence, et quelle est rédigée en vers burlesques. Nous examinerons en particulier les trois premières années de cette production hebdomadaire dont de nombreux fragments traitent des événements et acteurs de la Fronde.

Laura Bordes, « Du triolet des ruelles au triolet des rues. Un petit genre frondeur populaire au service dune bataille dauteurs »

Vingt-six recueils du petit genre mineur du triolet ont contribué à la diffusion de mazarinades pendant la Fronde. Engagé dans les batailles politiques, le triolet a été le support des témoignages de la vie difficile des Français tout en conservant une langue et un style burlesques. À la fois petit traité déducation du prince et porteur de linjure contre Mazarin, en dehors de son utilisation engagée, il a aussi servi de structure à une bataille desprits entre Scarron et Marigny.

Claudine Nédelec et Marie-Claude Canova-Green, « Gaston dOrléans, un mécène “marginal” ? »

Gaston dOrléans fut un prince « rebelle » : le mécénat étant une forme de représentation de soi, peut-on le considérer comme un mécène marginal, voire transgressif ? À côté des curiosités de lhonnête homme, son mécénat semble bien être lié à son tempérament enjoué, et à une façon dexprimer sa position 380politique particulière, ce qui induit une part de marginalité dans le choix des artistes et des formes artistiques quil a protégés, dans deux domaines : les ballets de Cour et la poésie.

Marta Teixeira Anacleto, « Des frontières polémiques de la “vraisemblance extraordinaire”. Deux pièces “mineures” de Pierre Corneille »

Cet article sattache à relire les deux « tragédies à machines » de Corneille (Andromède ; La Conquête de la Toison dOr) dans leur ancrage expressif et ambigu au Grand Siècle. Les deux textes « mineurs » de Corneille seront, de ce fait, une sorte de mise en abyme (théorique et argumentative) des frontières polémiques de la « vraisemblance » au xviie siècle et, en même temps, des emblèmes dun spectacle total – « pour les yeux » – que les Poétiques se voient contraintes de légitimer depuis Aristote.

Jean Luc Robin, « En marge de la cour. La dramaturgie spéculaire de La Comtesse dEscarbagnas de Molière »

Prétexte au Ballet des ballets, le spectacle des spectacles offert par le roi à la Palatine, La Comtesse dEscarbagnas met à nu le principe de second degré et lautoréférentialité de la comédie-ballet chez Molière. Axée sur lœil du prince, la présence du roi et de la cour dans la salle, sa dramaturgie spéculaire (en reflet inversé) et de la marge souligne comiquement limpossibilité dune imitation provinciale de la cour, république aristocratique aux frontières plus mentales que spatiales.

Fabien Lacouture, « Solitude et marginalité des enfants chez certains peintres du xviie siècle »

Au xviie siècle, certains peintres choisissent comme sujet lenfance pauvre, les jeunes mendiants, orphelins, ou travailleurs, des personnages mineurs par leur âge et leur place dans la société ou la famille. Lobjectif de cet article est danalyser la manière dont leur double marginalité, générationnelle et sociale, est mise en image et rendue, dans la construction plastique de certaines œuvres des frères Le Nain ou de Bartolomé Esteban Murillo, par une véritable marginalité picturale.

381

Emmanuel Faure-Carricaburu, « Tensions et contradictions au sein de lAcadémie Royale de Peinture et de Sculpture au prisme de la notion de genre »

Cet article montre que lAcadémie représente une forme dynamique, une perspective qui invite à penser la place, la fonction et les effets de la hiérarchie des genres dans leur complexité et conduit à envisager lintrication de celle-ci dans des réseaux de pouvoirs. Cette approche peut permettre de sémanciper du paradigme classique qui consiste à voir lAcadémie comme le lieu dune opposition dialectique entre lautorité du pouvoir dun côté et la liberté des artistes de lautre.

Bertrand Porot, « Les finales musicaux au tournant du xviiie siècle. Un partage artistique entre scènes officielles et scènes mineures »

À la fin du xviie siècle, apparaissent, à la Comédie-Française, des finales chantés et dansés renouvelant la dramaturgie de son répertoire comique. Ils sont inspirés par les pratiques des scènes considérées comme « mineures », celle de la Comédie-Italienne et celle de lopéra-comique né dans les Foires parisiennes. Létude a donc pour but de mieux préciser les phénomènes de circulation artistique entre des théâtres souvent considérés comme cloisonnés et hiérarchisés.

Judith le Blanc, « Le “vassal du grand Opéra”. Parodies en marge de lAcadémie royale de musique »

Larticle propose détudier les parodies dopéras créées sur la scène de la Comédie-Italienne à la fin du xviie siècle. Si celles-ci relèvent de la sphère des minores, elles sont le symptôme de la porosité des frontières et de la résistance à la politique des privilèges, nentrant pas en contradiction avec la culture canonique. La culture savante et la culture populaire sont, en fait, lavers et le revers dune même médaille : le goût du public parisien pour lopéra lullyste.

Jean Leclerc, « Les minores dun genre mineur, ou sil faut réviser le statut historiographique des “imitateurs” de Scarron »

Faut-il réhabiliter les auteurs connus sous la dénomination d« imitateurs » de Paul Scarron ? Quelle place doit-on leur octroyer dans le panorama actuel 382des études sur le xviie siècle français ? À travers un parcours historiographique des jugements sur ces auteurs, il sagira didentifier les causes et les relais des préjugés qui maintiennent ces textes dans les marges de lhistoire littéraire et dinterroger des cas où ceux-ci font preuve doriginalité vis-à-vis de Scarron.

Guy Spielmann, « Un marginal essentiel. Thomas-Simon Gueullette, passeur culturel entre deux siècles »

Le cas de Thomas-Simon Gueullette (1683-1766) – conteur, dramaturge, historien, éditeur scientifique, traducteur – illustre le problème de la signifiance dune œuvre fragmentaire et diverse, quil a lui-même voulu minimiser. En reconnaissant le rôle essentiel de ce personnage discret dans lévolution de la République des Lettres et de lunivers des spectacles, on remet en cause une historiographie fondée sur la valeur esthétique accordée aux œuvres, et le statut assigné aux auteurs.

Sylvie Requemora-Gros, « Enjeux majeurs des lieux mineurs. Les premiers plaidoyers interculturels »

La liste des auteurs dits « classiques » ayant déjà pensé la relation interculturelle (en dautres termes mais dans le même esprit humaniste) est marginale car elle propose une réflexion aux marges dun centre culturel français, prédominant au xviie siècle. Dans la lignée de Montaigne, Descartes et Exquemelin, pourtant, il est possible denvisager létude de la marginalisation des premiers plaidoyers interculturels français.

Larry F. Norman, « Déclassiciser le classicisme français. La contestation transnationale du “Grand Siècle” »

La critique acerbe du classicisme français élaborée à lère romantique opère une marginalisation du « Grand Siècle » qui aujourdhui encore joue un rôle décisif dans la réception des « classiques » français. À lexamen des auteurs comme A. W. Schlegel et Germaine de Staël, on envisagera la possibilité de reléguer Racine à un statut dauteur mineur, tout au moins dans la conception dune littérature mondiale, ou Weltliteratur, destinée à minimiser la domination culturelle française.