![Littérature et Art nouveau. De Mallarmé à Proust - Annexe V](https://classiques-garnier.com/images/Vignette/CybMS01b.png)
Annexe V Marie Dauguet, « Ô lune qui t’endors à côté des charrues… », Par l’amour, Paris, Éditions du Mercure de France, 1904
- Prix Robert de Montesquiou 2023
- Type de publication : Chapitre d’ouvrage
- Ouvrage : Littérature et Art nouveau. De Mallarmé à Proust
- Pages : 655 à 656
- Collection : Études romantiques et dix-neuviémistes, n° 124
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- EAN : 9782406143260
- ISBN : 978-2-406-14326-0
- ISSN : 2258-4943
- DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-14326-0.p.0655
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 22/02/2023
- Langue : Français
Annexe V
Marie Dauguet, « Ô lune qui t’endors à côté
des charrues… », Par l’amour, Paris,
Éditions du Mercure de France, 1904
À Monsieur Émile Gallé
Ô lune qui t’endors à côté des charrues,
Attirant jusqu’à toi, comme d’un sein ouvert,
Les parfums du sillon et des sauges bourrues
Que le soc a fendus aux premiers jours d’hiver,
Tu veilles les troupeaux, broutant près des tourbières
Le thym et les orchis aux grappes de rubis,
Et tu fais tressaillir vers ta molle lumière
Les agneaux enfermés aux ventres des brebis.
Lune printanière et maîtresse des germes,
Tu exaltes l’odeur des mares croupissant
Au long des murs d’étable et des portes des fermes
Qu’estompe à ta lueur un ténébreux encens.
Tu fais goûter l’odeur, douce comme une amie,
Qui traverse les toits abritant le bétail,
Celle des bœufs repus, des vaches endormies,
De la paille froissée où plonge leur poitrail.
Tu provoques la forte et sereine ambiance
Qui suinte des blés roux tassés sur les greniers
Et cette odeur de paix qui donne confiance
Des meules de fourrage et des tas de fumiers
656Ta saveur est profonde et pleine de mystère
Quand tu blanchis la roue au flanc du vieux moulin,
Frôlant le bois moussu fleuri de pariétaires
Où l’eau calme dégoutte en filet opalin.
La vanne est là, béant comme une énorme cuve
Dont l’âcreté ternit ton disque cristallin
Baigné au tournoiement des noirâtres effluves
Qui s’expriment tout bas en termes sibyllins.
Le magique parfum sort des eaux remuées,
Évocant [sic] la caresse et ses gestes hardis,
Et les baisers d’amour sur des lèvres pâmées,
Et l’étreinte reprise et les aveux redis [sic].