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Classiques Garnier

Dictionnaire-glossaire

  • Type de publication : Chapitre d’ouvrage
  • Ouvrage : Les Soliloques du pauvre
  • Pages : 189 à 340
  • Collection : Classiques de l'argot et du jargon, n° 1
  • Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN : 9782812442216
  • ISBN : 978-2-8124-4221-6
  • ISSN : 2264-4199
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-8124-4221-6.p.0189
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 15/12/2009
  • Langue : Français
189
DICTIONNAIRE-GLOSSAIRE
précédé d'une
« Étude rapide de la langue
des Soliloques

190 191
Étude rapide de la langue des Soliloques

Le langage du recueil reproduit avant tout le parler populaire de la région parisienne', mâtiné de quelques régionalismes du Nord-Ouest où est né Jehan Rictus (Boulogne-sur-Mer). Ce parler offre trois types de caractéris- tiques souvent associées les unes aux autres (déformations phonétiques ; déformations syntaxiques et morphosyntaxiques ;lexique expressif) et qui se rapprochent parfois du parler enfantin, sans que l'on puisse toujours déterminer dans ce rapprochement la part résultant de la transcription de phénomènes observés dans le peuple (corridor > collidor est une déformation souvent relevée dans les dictionnaires de fautes de langage) de celle résultant des besoins d'expression de l'auteur.
Voici un tableau rapide de ces caractéristiques qui seront reprises pour chaque mot dans le dictionnaire-glossaire, même s'il n'a pas été possible de toutes les y décrire.
I. Déformations phonétiques
A. Suppressions, en particulier dans des mots très fréquents de la langue — du phonème-voyelle instable appelé e muet (cauchemar> cauch'mar), ainsi que de phonèmes-voyelles phonétiquement proches de ce dernier (peut- être > p't-être  ; d~à > d~à  ; où est-c' que réduit en ousque)  ;
de certains phonèmes dans des mots grammaticaux  :voyelles (tu > t'  ; qui > qu ~ ou consonnes (il > i, transcrit y  ; elle > a  ; quel > qué  ; quelque chose > quéqu' chose, mais aussi quét' chose  ; sur > su', parce que > passque) ;
de serai-consonnes transcrites par les lettres u (depuis > d'pis) et i

(bien > ben) ;
des consonnes liquides dans des groupes consonantiques, plus souvent l (plus > pus, pluie > puïe, escalier > escaïer) que r (propriétaire > popié- taire) ;
d'autres phonèmes-consonnes inclus dans des groupes consonantiques, lesquels se trouvent simplifiés  :extraire > extraire, artiste > artiste, peut- être > p't-êt'.
B. Adjonctions
— du phonème-consonne de liaison [z], souvent marque de pluriel (qui ont > qui z'ont) Z, mais pas toujours (a eu > a z'eu, il y a un troupeau > gn â z'un troupeau)  ;
' I1 ne s'agit cependant pas d'un patois rural d'une province proche de
Paris, comme celui dans lequel Gaston Couté avait commencé à composer et à déclamer à cette époque.
z Jehan Rictus ajoute parfois typographiquement la lettre z de marque du pluriel là où elle est inutile  : leurs z'amis, les z Hommes, etc.
192 ajout de la consonne d'appui n devant voyelle (avec > n'avec, en v'là > n'en v'là)  ;
ajout (prosthèse) du phonème-voyelle [a] au début de verbes commençant par rl  : r poser > arr poser  ;
prononciation de lettres devenues muettes en finale2  : alors > alorss, ceux > ceuss, gens > genss  ;
la suppression du phonème-voyelle e instable est contrebalancée par la prosthèse de cette voyelle en début de mot, phénomène transcrit soit par e (de > ed') soit par eu (le > eul ~.
C. Modifications
— des phonèmes-consonnes articulés à l'avant de la bouche sont prononcés à l'arrière de la bouche, notamment s'ils sont suivis de phonèmes-consonnes d'arrière (travail > çravail) ou de la semi-consonne la plus postérieure [j] (Dieu > Guieu, tiens  ! > c~uiens  !, n ÿ a > ~'a, métier > méc~uier)3  ;
le phonème-voyelle [s] (transcrit par è ou ai) en position initiale s'ouvre parfois en [a]  :elle > alle, aimer > amer  ;
le phonème-voyelle [u] (ou) est parfois transformé en o ouvert aujourd'hui > aujord'hui, pourquoi > porquoi  ;
autres susbstitutions de phonèmes-consonnes sur des mots de forme inhabituelle pour la plupart (corridor > collidor, celluloïd > cellunoïd), mais pas tous (oreiller > oreiller).
lI. Déformations syntaxiques et morphosyntaxiques
A. Suppressions
— du pronom il impersonnel  : elle est systématique dans il y a, rare dans d'autres tournures impersonnelles (il f'ra > f'ra)  ;
de la première partie de la négation (ne)  : si tu ne peux pas > si tu peux

pas;
réduction de où est-c' que en ousque.
B. Adjonctions
— de la particule/conjonction que de détachement et/ou de renforcement  : à qui qu'on a menti  ; comm' si qu' j'aye  ; si qu'a fait peau neuve  ; si qu ÿ r'viendrait  ;
de la particule de renforcement z ÿ (après leur)  : ça leur z ÿ donne ;
emploi de la forme interrogative (ousque) à la place du pronom relatif renforcé par que (la minute ousque...)
formes renforcées du subjonctif  : aie(s) > aye, sois ou soit > soye  ;
C. Modifications
— auxiliaire avoir au lieu de l'auxilaire être (s'est trompé > s'a trompé)  ; désaccords entre sujets et verbes  : ceuss' qu'a d' la guigne.
' Trait de prononciation repéré plus fortement dans la région de Boulogne- sur-Mer.
z Ces consonnes étaient encore prononcées à cette époque dans l'usage
populaire, si bien qu'il s'agit d'une adjonction par rapport à la norme qui était alors recommandée dans les classes cultivées et qui s'est peu à peu imposée. s Phénomène inverse dans quelque chose > quét' chose (antériorisation pour l'articulation avec ch).
193 III. Lexique expressif
L'expressivité des unités lexicales que les dictionnaires marquent comme propres aux usages familier, populaire et argotique résulte de différents procédés de formation qui opposent aux mots de la langue normée neutre des substituts permettant aux énonciateurs de colorer leurs discours de subjectivité et/ou de présenter les choses sous un jour autre. Jehan Rictus a exploité ces procédés et il l'a fait le plus souvent en reprenant des mots et des tournures qui circulaient dans le parler populaire parisien de son temps, voire figuraient dans des dictionnaires d'argot  ;parfois aussi il en a forgé lui-même, sans qu'il soit toujours facile de déterminer à coup sûr quelles sont ses propres créations  : comment être sûr que le composé lappe-la-boue, formé comme substitut de soulier, est un mot d'auteur  ?
Dans le dictionnaire-glossaire qui suit, je m'efforcerai d'apporter des précisions sur la présence ou non des termes non seulement dans des dictionnaires d'argot antérieur, en particulier le « Glossaire argotique  »ajouté par Jean Richepin à la fin de La Chanson des Gueux (éd. de 1881), le Dictionnaire d'argot moderne (1881) de Lucien Rigaud, qui s'appuie sur son Dictionnaire du jargon parisien (1878), le Dictionnaire historique d'argot (onzième édition en 1889, les précédentes échelonnées depuis 1858) de Lorédan Larchey ainsi que son Supplément (troisième édition en 1889, la première en 1880)1 et le Dictionnaire argot français &français-argot (1896) de Georges Delesalle, mais aussi dans L'Argot au XXe siècle (1901  ;voir mon introduction p. 13), dictionnaire français-argot qui illustre près d'une centaine de termes par des citations des Soliloques de 1897 et dont je publie dans la présente collection une édition inversée et raisonnée après l'avoir étudié dans Bruant et l'argotographie française (2004, Champion)Z.
Cette étude décrivait différents procédés de formation à l'origine des argotismes recensés dans Bruant et l'on peut appliquer cette description au lexique des Soliloques recensé et référencié dans le glossaire
1 Le dictionnaire-glossaire ne précise pas à quelles dates Rigaud ou Larchey ont recensé tel ou tel item. Seules des rééditions critiques des dictionnaires de ces deux auteurs permettront d'affiner la description des emprunts du premier au second (à partir de 1878), puis du second au premier (à partir de 1881) ; il restera à étudier leurs rapports avec le Dictionnaire de la langue verte de Delvau (1866 et autres éd. ultérieures) qui, ne semblant pas avoir été utilisé par Jehan Rictus, ne sera pas beaucoup exploité ici, pas plus que le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France, dont les feuillets des lettres A à F ont été publiés progressivement de 1894 à 1897, ni que le Dictionnaire thématique français-argot de Lermina & Lévêque, datable de 1896-1897. En revanche, j'ai cité à plusieurs reprises les Curiositez françoises d'A. Oudin (1640) et le Dictionnaire comique, satyrique, critique, burlesque, libre et proverbial de P.-J. Le Roux (1718 à 1786).
z On consultera avec profit également le Dictionnaire historique des argots français de Gaston Esnault (1965) et, malgré ses lacunes et inexactitudes en matière d'argot, le Trésor de la langue française (1971-1994, version numérisée 2004).
194 A. Procédés de manipulation de la forme phonique
1. Corruptions phonétiques (voir aussi la partie I. ci-dessus)
— Substitutions de phonèmes comme dans collidor pour corridor ou égledon pour édredon ;
Suppressions de phonèmes comme dans 'tit pour petit (aphérèse), artiste pour artiste (apocope), escaïer pour escalier ou chueux pour cheveux (syncopes) ;
— Manipulations phonétiques plus complexes (dans phizolofie pour philosophie, il y a désordre syllabique et jeu graphique), reposant parfois sur des confusions ou des à-peu-près (chien de fer pour chemin de fer, trottoir pour trottoir).
2. Procédés morphologiques de déformation plus importante
— Réduplication (ou redoublement)  : Nini pour Eugénie, baba pour ébahi ; Apocope avec ou sans recherche d'une finale expressive  : aristo pour aristocrate, tram pour tramway ;
Largonji  :loufoque pour fou.
3. Procédés morphologiques ou syntaxiques de formation avec ou sans déformation
— Adjonction de suffixes ou d'appendices expressifs soit sans apocope (gueulard, flemmard ;gueuleton) soit avec apocope (anarcho pour anarchiste, Parigot pour Parisien, proprio pour propriétaire) ;
Suffixation savante parodique  : excitatoire et vomitatoire ;
Composition populaire de type Verbe +Nom (bouffe purée "miséreux") ou Verbe +Groupe du Nom Clappe-la-boue "chaussure (de miséreux)", fout- la faim "miséreux") ou de type Préposition +Nom (sans-coeur, sans pognon)  ; Périphrases humoristiques  : Comte Flageolant-des-Abattis, Baron de l'Asphalte.
4. Emprunts (avec ou sans déformation) à d'autres langues  : (pas) bezef (arabe) pour (pas) beaucoup, clebs (arabe) pour chien, schnick "eau-de-vie" (dialecte germanique lorrain ou alsacien).
B. Procédés de manipulation sémantique
— Métaphore  : anglais "menstrues" (couleur rouge de l'uniforme des Anglais) ;particulièrement, application aux humains de mots concernant les animaux comme dans groin "nez"  ;
— Métonymie  :Blafarde "lune" (caractéristique de couleur pour désigner l'objet, avec conversion d'adjectif en nom propre), tube "chapeau" (caractéristique de forme pour désigner l'objet)  ;
— Antonomase  :poubelle (du nom du préfet de la Seine qui en prescrit l'usage en 1883), boucicaut (du nom du chef de rayon devenu propriétaire du Bon Marché et qui a développé et transformé cet établissement en l'un des premiers Grands Magasins parisiens).
195
DICTIONNAIRE-GLOSSAIRE
Abréviations

CC = Crève-Caeur, pp. 127-132.
D = Déception (trilogie III), pp. 63-72.
E = Espoir (trilogie II), pp. 53-61.
Ep = Épilogue, pp. 157-163.
F = Farandole des Pauv's tits Fan-fans, pp. 165-168.
H = L'Hiver, pp. 23-31.
IP = Impressions de Promenade, pp. 32-38.
MM = Les Masons (partie II du poème « Les Masons  »), pp. 141-146.
MN Nocturne (partie I du poème « Les Masons  »), pp. 135-139.
MP La Maison des Pauvres (partie III du poème « Les Masons), pp. 147-
152.
P1 Le Printemps (partie I), pp. 101-111.
P2 Le Printemps (partie II), pp. 113-116.
P3 Le Printemps (partie III), pp. 117-125.
Rl Le Revenant (partie I), pp. 75-78.
R2 Le Revenant (partie II), pp. 79-90.
R3 Le Revenant (partie III), pp. 91-97.
SCA = Soliloque du Chanteur ambulant, pp. 155-156.
SM = Songe-Mensonge (trilogie I), pp. 31-49. v = vers n°
N. B. 1  : Dans ce glossaire, la lettre e est restaurée à la place de l'apostrophe qui la remplace dans les Soliloques (par ex., gueuleton pour «  gueul'ton  »). N. B. 2. : Pour les mots employés plusieurs fois dans le recueil, les occurrences ne sont pas nécessairement toutes recensées.
N. B. 3. : Les références des dictionnaires utilisés dans ce glossaire, dont certaines sont données p. 193, sont fournies dans ma bibliographie finale. N. B. 4  : L'attestation d'un mot dans un dictionnaire d'argot ne doit pas le faire considérer comme relevant nécessairement du seul usage argotique (si tant est qu'il soit possible de définir celui-ci), mais avant tout comme une unité à laquelle les argotographes reconnaissent une valeur expressive. N. B. 5  : « fro-de-siècle  »concerne des mots à la mode à la fin du XIXe s.
— A —

a [prou. pers. sujet 3e pers. fém. devant consonne]  :corruption pop. d'elle(s) en région parisienne et autour [SMv40, Ev156, R3v14, etc.] (voir aussi elle).
à [prép. ;quelques confusions orthographiques avec le précédent dans cer- taines éditions des Soliloques]
1 ° à la +groupe substantivé
de telle ou telle manière, par ex. dans à la j' m'en fous et à la p'têt'-bien [Ev32] et dans à la tourtereaux [MMv71]
Remarques)  :procédé fréquent dans l'usage populaire.
196 2° Voir aussi dure pour à la dure, flan pour à la flan, manque pour à la manque, rebiffe pour à la r'biffe et roue pour à la roue.
abattis [n. m.]
membres (corporels) [MNv20, Epv167]
Remarques)  :métaphore recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud) avant 1897, puis dans Bruant.
admirab' [adj.]  :corruption populaire d'admirable [SCAv6].
signe donc  ! [loc. interjective]
(exprimant la violence des coups, comme han ~ [Fv77] Remarques)  :usage populaire.
aile [n. f. ]
savoir où donner de l'aile
savoir où aller [Ev37]
Remarques)  :métaphore populaire.
elle [prou. pers. 3e pers. fém.]  :corruption pop. d'elle en région parisienne et autour [Ev161, R3v95, Fv68 («  all'-même  »), etc.] (voir aussi a).
aller [v. ;souvent forme populaire je vas (par exemple Hv93-105) pour je vais ou je m'en vas (par exemple Hv134, R2v261, MNv88) pour je m'en vais]
I. je m'en vas +infinitif
je vais +infinitif [Hv134, SMv116, R2v261-264]
Remarques)  :tournure populaire expressive pour l'auxiliaire de futur proche.

II. s'en aller de +nom de partie vitale du corps
être mortellement malade de cette partie vitale [R2v71 (poitrine)] Remarques)  :sens figuré (métaphore).
III. y aller de +nom d'extériorisation humaine faire entendre [CCv57]
Remarques)  :synonyme expressif.
alors [adv. et élément de loc. conjonctive de sub.]  :prononciation ancienne restée populaire d'alors [SMv137, R3v110, P3v208 («  alors que  »), CCv103, MNv87, etc.], recensée dans Bruant.
amener (s') [v.]
arriver [Dvl, CCv59, SCAv12]
Remarques)  : synonyme de l'usage populaire recensé dans Rigaud avant 1897, puis dans Bruant.
amer [v.]  :prononciation populaire (forme déjà employée par Villon) d'aimer [Dv126, Dv157, R1v50, P3v105, P3v141, Epv71, Fv57, etc.].
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amiquié [n. f.]  : corruption populaire et enfantine (palatalisation) d'amitié [SMv62].
anarcho [n.]
anarchiste [R1v64]
Remarques)  :apocope et suffixation avec ~ ; forme répandue dans l'argot politique d'alors et recensée dans Delesalle avant 1897, puis dans Bruant.
anglais [n. m.]
avoir ses Anglais
avoir ses menstrues [R1v32]
Remarques)  :métaphore recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud) avant 1897, puis dans Bruant.
appuyer (s') [v.]
s'appuyer qqn
avoir des rapports sexuels avec qqn [Ev196]
Remarques)  :tournure populaire recensée dans Supplément de Larchey avant 1897, puis dans Bruant.
Aristo [n.]
aristocrate [Ev129]
Remarques)  :apocope avec sélection de la finale ~ ;mot recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud) avant 1897, puis dans Bruant.
arpion [n. m.]
pied [Ev176, MNvS, MNv76]
Remarques)  :sens dérivé d'un mot emprunté au provençal (arpioun "griffe") et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin) avant 1897, puis dans Bruant.
arr'garder [R2v217], arr'nouveler [Plv4], arr'poser [Dv69, P3v203, MNv77], arr'sauter [CCvll1], arr'venir [Epvl]
regarder, renouveler, reposer, ressauter, revenir
Remarques)  :déformation populaire par prosthèse d'un a devant r (redoublé typographiquement), attestée plus fortement dans le Nord-Ouest.
artique [n. m.]  :corruption populaire d'article [Hv14 (de journal)].
artisse [n.]  :corruption populaire (déjà dans Richepin et fréquente dans les chansons de l'époque) du suffixe savant —iste du mot artiste [Ev57, R1v64, SCAv14].
asphalte [n. m.]
trottoir (ou rue) recouverte) d'asphalte [MNv21]
Remarques)  :métonymie passée dans l'usage courant au cours de la seconde moitié du XIXe siècle (voir aussi bitume et macadam).
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asticoter [v.]
tourmenter physiquement (frapper) [Fv31 ]
Remarques)  : Jehan Rictus joue sur l'association entre le nom asticot et le verbe asticoter (non dérivé du premier), pris dans cette acception qui est recensée dans Delesalle avant 1897, puis dans Bruant.
astuce [n. f.]
avoir de l'astuce
être adroit [Ev209, Dv146, Epv163]
Remarques)  :acception ancienne en vogue à la fin du XIXe siècle, recensée dans Bruant («  aplomb  »).
aujord'hui [adv.]  :corruption populaire d'aujourd'hui [R2v38, R2v92].
aut' [adj. ou pronom indéfinz~  : corruption populaire d'autre [adj. : IPv41, R1v68, etc. ; pron. : SMv16, SMv42, etc. (les autres)].
avoir [v. et aux. ;souvent forme aye(nt) au subj. au lieu de aie(nt)]
I. employé à la place de l'auxiliaire être dans des tournures pronominales «  s'a trompé  » [IPv52], «  s'a aigri  » [R1v30], «  s'a défilé  » [R2v134], «  s'a empiffré » et « s'a décoll'té » [Plvll-111], « s'a foutu » [CCv106]. Remarques)  :tournure populaire et enfantine.
II. s'en avoir +Groupe du Nom (sentiment)
éprouver +Groupe du Nom (sentiment) à cause de cela [P1v152]
Remarques)  : tournure populaire qui ne se limite pas aux sentiments (acceptions "avoir reçu", "avoir pris").
III. avoir dans gn'a, y a et y gn'a (et gn'a pas, y gn'a pas) [voir ces termes à leur place dans l'ordre alphabétique]
IV. avoir +groupe complément incluant nom marqué (expressif)  :voir ces mots (par ex. ci-dessus astuce pour avoir de l'astuce).
Azor [n. pr.]
nom de chien pouvant être donné comme surnom à tout chien [P1v202] Remarques)  :nom venu d'un opéra-comique à succès de 1771 (Zémire et Azor) et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
azuré [adj. qual.]
d'un bleu azur [Dv45 (bleu du sang de la noblesse) et CCv48 (bleu des beaux jours et du rêve)]
Remarques)  :emploi figuré propre au langage poétique (et qui n'a rien de populaire).
199
-B-

baba [adj.]
ébahi [CCv21]
Remarques)  : substitut formé par redoublement à partir de l'adj. ébahi et recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1900, puis dans Bruant.
bagatelle [n. f.]
amour physique [CCv66]
Remarques)  :acception particulière recensée dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1900, mais pas dans le Bruant, qui ne l'a sans doute pas jugée argotique.
bagnole [n. f.]
voiture [pas nécessairement automobile à l'époque] [P3v109]
Remarques)  :mot populaire employé dans différentes régions pour désigner de vieilles et/ou mauvaises voitures, puis toute voiture par extension ;recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
bagot [n. m.]
1° bagage
2° faire les bagots
décharger les bagages (notamment des fiacres) [R2v202]
Remarques)  : déformation par apocope et suffixation en ~t ; le dérivé
bagotier se trouve dans Delesalle avant 1897, puis dans Bruant avec une

citation de G. Herbert, dans laquelle se trouve également bagot, que le Bruant recense en citant aussi ce passage des Soliloques.
baigner [v.]
se les baigner (dans)
être plongé avec plaisir (dans) [P1v97]
Remarques)  : l'acception figurée courante de la tournure pronominale est revigorée par l'emploi sans antécédent du pronom les au référent viril.
baiser [v.]
posséder charnellement [Ev24]
Remarques)  : acception ancienne recensée dans Le Roux 1718, puis dans Delesalle avant 1897, puis dans Bruant ; Jehan Rictus l'a construite ici avec le complément la peau en jouant sur l'équivoque entre sens propre et sens figuré de l'expression (voir peau).
balade [variante ballade] [n. f.]
promenade [R1v39, MNv28, SCAvl (ballade, synonyme de tournée)] Remarques)  : nom populaire et familier dérivé par conversion de balader (voir ce mot) et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
200
balader [variante ballader] [v.]
1° marcher [R2v54, R3v103, P1v28 (ballader)]
Remarques)  : cet emploi intransitif avec cette acception, plus ancien dans l'usage populaire que la tournure pronominale (ci-dessous en 2°), est recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37 avec la définition « marcher sans but, flâner  », Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
2° se balader
se promener [Hv117, Epv162 (se ballader)]
Remarques)  :tournure pronominale recensée avec cette acception dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud) avant 1897, puis dans Bruant.
3° emplois transitifs
a) promener [P3v81 (ballader ses roupies)]
b) ballader ses testicules se promener [P2v19]
c) se faire ballader les rognons
se faire trimballer [Hv71]
Remarques)  :ces emplois transitifs avec cette acception, plus récents dans l'usage que les précédents (voir 1° et 2°), ont ici une expressivité renforcée grâce aux compléments choisis par l'auteur.
baladeur [adj. et n.]
1° adj. : rôdeur [Dv154]
n. : rôdeur [MNv22]
Remarques)  :adjectif ou nom, ce dérivé de balader est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
ballade, ballader, balladeur [voir balade, balader, baladeur]
balthasar ou balthazar [n. m.]
festin [Hv145, Epv6]
Remarques)  :antonomase s'appuyant sur l'anecdote biblique (Daniel, V) du festin au cours duquel Balthazar, roi de Babylone, vit apparaître les mots «  Mané — Thécel — Pharès  » qui annonçaient la chute de sa ville ; mot répandu en littérature dans la seconde moitié du XIXe siècle et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
barbe [n. m.]
maquereau (souteneur) [Ev23]
Remarques)  : apocope de barbeau ou de barbillon ("souteneur" par association entre maquereau et ces poissons barbus) ;mot recensé dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey à partir d'une citation de Méténier datée de 1885, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
201
barboter [v.]
patauger (avec idée d'engluement) [Ev72]
Remarques)  :sens figuré (métaphore) ancien dans l'usage familier.
barytonner [v.]
barytonner de la mouquette
péter [Fv46]
Remarques)  : expression burlesque sans doute forgée par Jehan Rictus à partir d'une métaphore sur barytonner associée au nom mouquette dont l'acception "derrière" serait toute récente (voir mouquette).
bath [adj.]
bien, bon et beau (à la fois) [Hv57, SMv65 et variante e de P1v89 (p. 182)] Remarques)  :mot recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
batifoler [v.]
s'ébattre [P1v51]
Remarques)  : la forme phonique du mot le fait parfois considérer comme fam. ou pop. dans les dict., surtout quand il se charge d'une connotation sexuelle ("lutiner").
bat-la-crève [n. m.] [voir aussi battre la crève et crève]
miséreux [R2v259]
Remarques)  : composé expressif formé sur l'expression battre la crève et semblable à bien d'autres de la même époque, ce dont témoigne leur liste dans Bruant (s.v. misérable).
bat-la-dèche [n. m.] [voir aussi dèche]
miséreux [variante b de R2v259 (voir p. 179)]
Remarques)  : composé expressif formé sur l'expression battre la dèche "vivre dans la misère" (déjà dans Larchey, puis Delesalle) et semblable à bien d'autres de la même époque, ce dont témoigne leur liste dans Bruant (s.v. misérable).
battant [n. m.]
estomac [R1v75 (se mettre ggch dans le battant)]
Remarques)  :mot recensé dans des dict. d'argot (Larchey avec la définition « gosier  », Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
battre la crève [loc. verbale] [voir aussi crève et battre la dèche]
traîner son épuisement (proche de l'agonie) [var. de la fin de CC (voir p. 186)] Remarques)  : on trouve dans Larchey et Delesalle (puis Bruant) battre la dèche "vivre dans la misère" (association avec battre le pavé).
bécan [n. m.]
oiseau [P1v51 (association humoristique avec vache) et P2v66]
202
Remarques)  :mot recensé dans des dict. d'argot avant 1897, mais avec forme différente et sens restreint  : becquant "poulet" dans Larchey, Rigaud, Delesalle ;Bruant, citant ce passage des Soliloques, accepte l'élargissement de sens.
bécassine [n. f.]
femme (sotte  ?) [Epv70, si l'on voit une équivoque entre "oiseau (à manger)" et "femme", amenée par le jeu sur les sens "meuble" et "mets" de canapé] Remarques)  : on trouve la métaphore bécasse "femme sotte" dans des dict. d'argot avant 1897 ("femme maigre" dans Larchey, "femme sotte" dans Rigaud, "femme grande, maigre et niaise" dans Delesalle), puis dans Bruant ("femme bête") [Bécassine, personnage de bande dessinée, date de 1905].
bécot [n. m.]
(petit) baiser [Dv124, P1v190, P3v91, CCv88, Fv6]
Remarques)  : ce dérivé affectif populaire déjà ancien est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite le premier passage des Soliloques.
bécotter [v.]
se bécotter
se donner des bécots [MMv71]
Remarques)  : verbe familier ancien formé sur bécot (variante bécoter) et recensé dans des dict. d'argot avant 1903 (Larchey avec citation d'une chanson de Béranger, Delesalle, Bruant).
béguin [n. m.]
toquade amoureuse [SMv75 (relation amoureuse)]
Remarques)  :avec ce sens figuré déjà ancien (l'amour vous enserre la tête comme la coiffe appelée béguin), le mot est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
beigne [n. f.]
coup [Fv8]
Remarques)  :mot ancien recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
belle [n. f. ]
partie qui détermine le gagnant [P3v43, Epvl l l]
Remarques)  : Jehan Rictus prend au sens figuré ce terme de l'argot des joueurs passé dans l'usage courant, mais encore recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897.
ben [adv. et interj.]
bien [Hv36-37, Hv93, Hv152, SMv131 et v134, Dv19, etc.]
Remarques)  :cette corruption populaire de bien dans ses emplois adverbiaux et en interjection [Hv93 = Eh bien  !] est signalée dans Delesalle, puis dans Bruant.
203
Beni-bouffe-hasard [n. composé]
miséreux (pour qui se nourrir dépend du hasard) [Epv166]
Remarques)  : composé humoristique forgé par Jehan Rictus sur (et par opposition à) beni-bouffe-tout (voir ci-dessous), avec influence phonique probable de beni-mouffetard "Parisien".
Beni-bouffe-tout [n. composé]
individu glouton (ici avec connotation de parasitisme) [Hv74]
Remarques)  : ce composé humoristique, forgé à partir de l'expression arabe au pluriel (beni "fils de" +élément changeant) déjà parodiée (beni-coco, beni- mouffetard sont attestés avant 1897), est curieusement absent de la quasi- totalité des dict. jusqu'à aujourd'hui, bien qu'il soit passé dans l'usage fam. ou pop. peut-être même avant les Soliloques. Le mot n'est pas recensé dans le Bruant, qui le cite pourtant dans ce passage en illustrant birbe (voir ci- dessous).
berge [n. f.]
année [R1v22, CCv25]
Remarques)  : mot emprunté au romani et recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
bergeoise [n. f.]
bourgeoise [Ev189]
Remarques)  :plutôt que déformation populaire, mot-valise forgé par Jehan Rictus à partir de bergère "femme" (voir article suivant) et de bourgeoise.
bergère [n. f.]
femme [SMv66]
Remarques)  :peut-être dérivé du sens "marmite" mais jouant aussi sur le féminin de berger, ce mot est recensé dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
betterave [n. f.]
individu arriéré [Ev113]
Remarques)  : le Bruant recensera une acception péjorative d'extension partiellement différente («  campagnard, paysan  ») pour les utilisateurs du mot.
beuglant [n. m.]
café-concert où l'on chante àtue-tête [SCAv2]
Remarques)  :participe substantivé expressif du verbe beugler "chanter àtue- tête", ce mot est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
beugler [v.]
geindre [IPv58 (en chantant), R2v91, MPv82]
Remarques)  : acception métaphorique du verbe beugler recensée dans Rigaud.
204
bezef [pr. indéfini (ici en emploi adverbial)]
beaucoup [Ev130 (pas bezej~]
Remarques)  : mot emprunté à l'arabe et recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
Bibi ou bibi [n. m. souvent substitut du pronom personnel de 1 ~ pers. sg. ] 1° enfant [Fv5 (bibi)]
Remarques)  : Jehan Rictus emploie ici un terme affectueux adressé à ceux que l'on aime et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud) avant 1897.
2° moi [IPv20, Ev139 et v143, Epv65 (Bibi)]
Remarques)  : application à soi-même du mot affectueux, fréquente à cette époque dans les usages marqués (La Muse à Bibi 1879-1882) et relevée dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
bibine [n. f.]
boisson de qualité inférieure [Epv66]
Remarques)  :mot recensé dans des dict. d'argot (Rigaud qui donne « bière  », Vocabulaire de la langue verte d'Hector France) avant 1897, puis dans Bruant (« bière inférieure  »).
bicher [v.]
ça biche
ça va ensemble, ça prend [Dv125]
Remarques)  :tournure peut-être dérivée de l'acception « mordre  » (à propos
du poisson dans le voc. de la pêche) et recensée dans des dict. d'argot

(Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
bicoque [n. f.]
petite maison sans prétention [Ev54]
Remarques)  :mot familier d'usage courant dans cette acception.
bicyclisse [n.]
bicycliste (aujourd'hui cycliste) [P2v44]
Remarques)  : corruption populaire (voir artisse) d'un mot récent à cette époque et recensé comme argotisme dans Delesalle et dans Bruant.
bide [n. m.]
1° ventre [R3v18, MPv47]
Remarques)  : dérivé par apocope de bidon "ventre", ce mot attesté avant 1897 (1885 selon Esnault) est recensé dans Bruant.
2° ne rien avoir dans le bide avoir faim [Epv117]
bidoche [n. f.]
viande (étendu ici au corps humain) [Rlv3 (charrier sa bidoche)]
205
Remarques)  :renvoyant au départ à la viande de bidet, le mot, recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897 et repris dans Bruant, a été étendu à toute viande, puis au corps humain
bile [n. f.]
ne pas se faire de bile
ne pas se faire de soucis [Hv85]
Remarques)  :déjà ancienne, l'expression familière se faire de la bile (avec ou sans négation) est recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897.
birbe [n. m.]
vieillard [Hv75]
Remarques)  :mot recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836- 1837, Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
bistrop ou bistrot (après l'éd. de 1903) [n. m.]
marchand de vin [P2v28, CCv14]
Remarques)  : mot recensé dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant ;graphie bistrop surprenante, propre aux premières éditions des Soliloques.
bitume [n. m.]
trottoir (recouvert de bitume) [Ev202, R2v60, P2v67, MNv18]
Remarques)  : extension de sens par métonymie (comme avec asphalte et macadam), mentionnée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897.
biture [n. f.]
excès (ici de nourriture) [Epv63]
Remarques)  : mot venu du vocabulaire des marins et recensé avec cette acception et/ou celle liée à la boisson («  cuite  ») dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
Blafarde [n. propre f. ]
Lune (personnifiée) [Dv121, MNv90]
Remarques)  :cette application à la lune, par métonymie, de l'adj. renvoyant à la pâleur est recensée dans Delesalle, puis dans Bruant, qui cite le premier passage des Soliloques.
blair [n. m.]
nez [SMv118, Dv143, P1v212, P3v81]
Remarques)  :dérivé par apocope de blaireau "nez", ce mot est recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Richepin, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
bléchard [adj. et n.]
laid [P1v59 (employé comme n. f.)]
206
Remarques)  :dérivé expressif de blèche "laid", ce mot est recensé dans le Suplément de Larchey (devenir bléchart "dépérir") et dans Delesalle, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
bloc [n. m.]
1° prison, salle de police [CCv98]
Remarques)  :mot recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1900, puis dans Bruant.
2° mettre au bloc
emprisonner [Epv137]
Remarques)  :expression recensée dans Rigaud, puis dans Bruant.
blot [n. m. ]
avoir son blot
avoir son compte [R2v266]
Remarques)  : Jehan Rictus donne la valeur "en avoir assez" à cette expression formée à partir du mot d'argot blot "prix" et de l'expression ça fait mon blot "ça me convient", tous deux recensés dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
bloum [n. m.]
chapeau (haut de forme) [Dv41, P1v77]
Remarques)  :peut-être dérivé par apocope du nom propre de commerçant Blumenthal, ce mot est recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite le premier passage des Soliloques.
boïaux [n. m. (pl. dans ce sens)]
intestins, entrailles [Hv88, MNv3, Fv34]
Remarques)  :forme graphique adoptée pour transcrire la prononciation de ce mot dans l'usage populaire, qui en a toujours appliqué le sens aux animaux et aux êtres humains
bois tortu [loc. n. m.]
vigne [Fv43]
Remarques)  : en reprenant cette expression ancienne encore recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897, Jehan Rictus joue-t-il sur une métaphore (sang des mauvais traitements /jus tiré du bois tordu)  ?
bon guieu de bois [voir Guieu]
boniment [n. m.]
discours (sans cesse répété) [Ev26]
Remarques)  :mot recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant ; Jehan Rictus exploite ici la valeur de ressasse- ment liée à l'origine foraine du terme.
bonne I. [n. f.]
servante, domestique [MMv72]
207
Remarques)  : ce sens de l'adj. substantivé est passé depuis longtemps dans l'usage général.
bonne lI. [n. f. pl.]
en avoir de bonnes
(se) raconter des histoires [Ev141]
Remarques)  :cet emploi avec en sans antécédent, ici antiphrastique comme dans d'autres expressions semblables (en avoir de belles, belles paroles, etc.), se rapproche de la tournure pop. ou fam. en avoir une bonne "avoir une bonne histoire", encore recensée dans des dict. d'argot avant 1897 (Rigaud, Larchey).
borgeois, borgeoise [adj. employé comme n.]  : prononciation pop. de bourgeois et de bourgeoise (voir ces mots).
Borgne [n. m.]
membre viril  ? [MMv73]
Remarques)  : la scène décrite et la majuscule personnifiante (cf. Popaul) suggèrent ce sens métaphorique (le pénis, également appelé cyclope en argot, n'a qu'un oeil), moins fréquent à l'époque que celui d' "anus" et qui, à la différence de celui-ci, n'est recensé dans aucun dict. avant l'éd. de 1903 des Soliloques.
botter [v.]
convenir, plaire [Dv65]
Remarques)  :extension métaphorique à partir du sens "aller bien" (à propos de chaussures ou de bottes), recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
bouchon [n. m.]
mettre un bouchon
frictionner (donner des coups) [SMv122]
Remarques)  : métaphore à partir des soins donnés aux chevaux ; les dict. d'argot (Rigaud et Delesalle, puis Bruant) recensent plutôt bouchonner dans cet emploi.
boucicaut [n. m.]
grand magasin [Ev192]
Remarques)  :antonomase métonymique à partir du nom d'Aristide Boucicaut (1810-1877), chef de rayon devenu propriétaire du Bon Marché et qui, ayant développé et transformé cet établissement en l'un des premiers Grands Magasins parisiens (fin des travaux en 1887 après sa mort), a servi de modèle à Zola pour le personnage d'Octave Mouret dans Au Bonheur des Dames  ; mot absent des dictionnaires.
boucler [v.]
fermer [R2v176, MMv29, MPv15]
Remarques)  : mot pop. ou fam. recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
208
bouffe-la-guigne [n. composé]
miséreux (malchanceux) [R2v149]
Remarques)  :composé humoristique formé sur bouffe-la-balle "goinfre" avec équivoque entre guigne "cerise" et guigne "malchance", ce mot est ensuite recensé pour la première fois dans Bruant (liste des substituts de misérable).
bouffe-purée [n. composé]
miséreux [MNv22]
Remarques)  : composé humoristique jouant sur l'équivoque entre purée "mets à base de légumes écrasés" et purée "misère" (créé par l'auteur  ?).
bouffer [v.]
1° manger [Hv79, IPvl 1, Ev60, R2v51, etc.]
Remarques)  :substitut expressif de manger sans doute lié au gonflement des joues, ce verbe est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle avec l'acception "manger avec excès") avant 1897, puis dans Bruant ;dans certains passages, Jehan Rictus l'emploie avec un sens figuré, par exemple dans R2v166, R3v48 et dans l'expression suivante.
2° bouffer de la tête de cochon
recevoir un coup de tête [SMv124]
Remarques)  : cette expression humoristique jouant sur l'équivoque du composé tête de cochon sera recensée dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
bouffi [adj. substantivé]
enfant grassouillet [Fv17]
Remarques)  : rien d'argotique ni même de populaire dans cet emploi de l'adjectif comme substantif.
bouillasse [n. f.]
misère [SMv96]
Remarques)  : ce dérivé de bouillie "misère" (ce dernier créé sur le modèle de purée et en jouant sur l'association avec boue, faite aussi pour bouillasse) sera recensé pour la première fois dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
boulot [n. m.]
travail [Hv58 et var. b (p. 184) de P2v123 (avec équivoque sur pain boulot)] Remarques)  :substitut de formation peu claire (mais lié au verbe plus ancien boulotter "vivre", d'où "travailler" et "manger") et que l'on trouve recensé également sous la forme bouleau, notamment dans Delesalle, puis dans Bruant, qui donne aussi boulot.
boulotter [v.]
manger [R2v262 (sens figuré agressif avec le complément «  la pomme d'Adam), MNv44 (sens figuré avec le complément « kilomètre  »), MPv53, Fv75]
209
Remarques)  : dérivé du sens plus ancien "vivre, prospérer", ce substitut expressif de manger est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
bouquin [n. m.]
livre [R2v165]
Remarques)  : ce substitut expressif fam. ou pop. de livre, répandu dans l'usage, est recensé dans Rigaud, mais pas dans les autres dict. d'argot de la fin du XIXe siècle.
bourgeois [adj. employé comme n. m.]
[individu] de condition aisée (par opposition aux ouvriers) [Hv7, R2v47, MMv141, Epv92]
Remarques)  : Jehan Rictus, qui privilégie la variante pop. borgeois, n'emploie plus ce mot pour désigner de façon objective les habitants des villes (bourgs), mais pour désigner en mauvais part les gens de condition aisée.
bourgoise [adj. employé comme n. f. ]
femme [CCv71(«  borgeoise  »par déformation pop.)]
Remarques)  : acception dérivée du sens "maîtresse de maison" et recensée dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1900, puis dans Bruant.
bourlinguer [v.]
avancer avec peine dans la vie [SMv4]
Remarques)  :Mot venu du voc. de la marine et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant («  être dans la misère  »).
bourrer [v.]
se bourrer les tripes
se goinfrer [IPv10]
Remarques)  :expression populaire expressive formée sur un moule commun dont le complément varie.
boustifaille [n. f.]
nourriture [P3v31, Epv97]
Remarques)  :mot populaire expressif associé à bouffer "manger avec excès" et recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite le premier passage des Soliloques.
bouzin [n. m.]
tapage [R2v18]
Remarques)  :mot populaire recensé, plus souvent sous la forme bousin, dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
boxon [n. m.]
bordel [P3v142]
Remarques)  : dérivé de bocard (même sens) par apocope avec adjonction d'une finale expressive, ce mot est recensé, parfois sous la forme bocson ou
210
bocçon, dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
braisé [adj.]
riche [SMv34]
Remarques)  : dérivé de braise "argent", ce mot est recensé dans le Dictionnaire français-argot de Lermina & Lévêque, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
branler [v.]
branler dans le manche
être secoué de tremblements [R3v14]
Remarques)  :emploi figuré courant d'une expression d'abord appliquée aux outils qui se démanchent
brasser (se) [v.]
se passer [CCvl l ]
Remarques)  :cet emploi pronominal comme substitut expressif de se passer est recensé dans le Trésor de la langue française sans citation ni attestation.
bricheton [n. m.]
pain (représentant plus largement la nourriture) [Dv30, R3v135, Epv136] Remarques)  :mot populaire expressif recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Richepin, Supplément de Larchey ,Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
briffer [v.]
manger [Hv113, SMv24]
Remarques)  : substitut poulaire de manger, recensé dans des dict. anciens (déjà dans Oudin 1640 et Le Roux 1718), puis dans des dict. d'argot (Richepin, Supplément de Larehey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
brique [n. f. ]
se caler des briques et des moellons
n'avoir rien à manger [R2v210]
Remarques)  : avec le second complément (moellons) ajouté au premier (briques ; au départ "miettes" selon Esnault 1965 ou "petit morceau" selon le Trésor de la langue française), Jehan Rictus renforce une expression issue du croisement de deux autres, répertoriées dans des dict. d'argot avant 1897
d'une part se caler les joues (ou autres noms de sens proche) ou se les caler "manger" (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle), d'autre part se coller ou s'enfiler des briques (ou autres noms de sens proche) "n'avoir rien à manger" (Supplément de Larchey pour se coller  ;Rigaud pour s'enfiler ; repris dans Delesalle) ;les expressions se caler des briques (suivi ou non de à la sauce caillou), des cailloux, des cloques, des jetons "être privé de nourriture, jeûner", sont recensées ensuite dans Bruant.
broyés) [participe-adj. employé comme n.]
celui qui est brisé par la vie (ceux qui sont brisés par la vie) [MPv94] Remarques)  :emploi nominal s'inscrivant dans le voc. politique progressiste.
211
bûcher [v.]
cogner, frapper [R1v89]
Remarques)  :cet emploi comme substitut de frapper (ici avec complément introduit par sur) est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
burnes [n. f. svtpl.]
couilles [MPv97]
Remarques)  : il faut deviner, amené par la rime à la place des points de suspension, ce mot populaire absent du Trésor de la langue française et pourtant recensé dans Delesalle, puis dans Bruant, avant 1903.
buter [v.]
buter dans et se buter dans
frapper à mort [SMv118, R1v53 (se buter dans), R2v261]
Remarques)  :emploi particulier, chez Rictus, de ce verbe dans lequel l'auteur semble réunir buter "heurter" et butter "assassiner, tuer", ce dernier étant recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
C —

c'lui, c' que (et c' qui), c't' et c'te [voir ordre alphabétique (apostrophe non prise en compte)]
cabèche [n. f.]
tête [MPv83]
Remarques)  :pour ce substitut expressif de tête emprunté à l'espagnol cabeza "tête", les dict. d'argot donnent tantôt cabèce (Rigaud, Delesalle), tantôt cabèche (Larchey), le Bruant ayant repris les deux formes avant l'éd. de 1903 des Soliloques.
cabot [n. m.]
comédien [MNv71 ]
Remarques)  : dérivé de cabotin par apocope et peut-être association avec cabot "chien", ce substitut péjoratif de comédien est recensé avec la définition "acteur sans talent" dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle, Bruant) avant l'éd. de 1903 des Soliloques.
caca [n. m.]
1° excrément [P1v213, Epv38]
Remarques)  :mot pop. ou fam. ancien souvent employé à propos d'enfants (Epv38).
2° faire caca (sur)
souiller [Dv100]
Remarques)  : ce sens figuré est ancien et courant.
212 cador [n. m. ]
chien [P1v172]
Remarques)  : ce mot, sans doute emprunté à l'arabe gaddour "puissant > chef' et appliqué aux chiens peut-être par l'intermédiaire d'un nom de chien comme Capitaine (selon Esnault 1965), est absent du Trésor de la langue française, mais recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
cahute [n. f. ]
habitation misérable [MMv109]
Remarques)  :mot expressif ancien et courant.
cale [voir fond de cale (à)]
caler [voir se caler des briques à brique]
calicot [n. m. ]
commis de magasins de nouveautés [SMv27, Ev190]
Remarques)  : ce nom donné par métonymie (calicot "toile") en 1817 à un personnage de vaudeville, commis de nouveautés, et appliqué par antonomase à ces commis, est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
calleter [v.]
s'en aller vivement [variante d de P3v165-168 (voir p. 185)]
Remarques)  :mot recensé, plutôt sous les formes caleter ou calter, dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite avec la graphie calter ce passage des Soliloques de 1897.
cambrioleur [n.]
voleur (dans les habitations) [R1v65]
Remarques)  : ce mot est recensé, parfois sous la forme cambriolleur, dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
camoufle [n. f.]
chandelle [MMv73]
Remarques)  : ce mot est recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-1837, Larchey, Delesalle, Bruant) avant l'éd. de 1903 des Soliloques.
camp [n. m. ]
1° foutre le camp ou foutre son camp
s'en aller vivement [IPv20, CCv98]
Remarques)  :les expressions populaires ficher le camp et foutre le camp, venues du voc. militaire, sont recensées dans des dict. d'argot (foutre le camp dans Delvau 1866, ficher le camp dans Larchey, fiche le camp dans Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
213
2° tout fout le camp
tout se dégrade [R2v127]
Remarques)  :cet emploi au sens figuré, attesté avant 1897, sera recensé dans Bruant.
canasson [n. m.]
cheval [Dv136, P1v141, P1v197, Epv20]
Remarques)  : ce substitut expressif, péjoratif ou affectueux, de cheval est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
canon [n. m.]
verre de vin [P2v27, avec jeu déjà ancien sur canon "pièce d'artillerie"] Remarques)  : ce mot populaire est recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-1837, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
car' [voir Carle]
carapater (se) [v.]
s'en aller vivement [Hv4, Hv9]
Remarques)  : le mot est déjà recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud et Delesalle, qui donnent se carapater "se sauver"  ; Richepin, qui donne carapater "marcher, avec idée de fatigue") avant 1897, puis dans Bruant.
carcan [n. m.]
cheval efflanqué [CCv51 ]
Remarques)  : ce mot populaire est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1900, puis dans Bruant.
Carle [n. m.]
argent [CCv88 (variante car', p. 186)]
Remarques)  :mot recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Delesalle) avant 1900, puis dans Bruant.
carme [n. m.]
argent [Ev174]
Remarques)  :mot recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
carnier [v.]
payer [P1v108]
Remarques)  : mot recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
carne [adj. et n.]
rosse [SMv120, Ev120]
Remarques)  :ces emplois du mot, avec l'acception "rosse" donnée au nom féminin péjorativement appliqué à des animaux et à des mégères (Rigaud, Larchey, Delesalle), sont recensés dans le Trésor de la langue française sans
214
datation, avec citations de Céline 1936 et de Genevoix 1948 ; celles des Soliloques auraient été intéressantes, en particulier la première («  troupeau de carnes  »appliqué aux « bons types  »).
carrée [n. f.]
chambre [CCv63]
Remarques)  : mot recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey et Delesalle) avant 1900, puis dans Bruant.
caser [v.]
trouver une place (à qqn), établir (qqn) [Hv68]
Remarques)  :mot fam. entré bien avant 1897 dans des dict. de langue.
casser [v.]
à tout casser
sans retenue [CCv18 (avec jeu de mot sur casser "manger")]
Remarques)  : expression fam. recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1900, puis dans Bruant.
cassine [n. f.]
petite maison pauvre [MMv109] ou petite chambre pauvre [Epv69] Remarques)  :mot populaire ancien recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle, Bruant) avant l'éd. de 1903 des Soliloques.
cause-tout-haut [n. composé]
soliloqueur [MNv25]
Remarques)  : composé humoristique que l'auteur-diseur se forge pour se désigner lui-même.
causette [n. f.]
conversation sans manière [Epv44] Remarques)  :mot familier déjà ancien.
cavaler [v.] [voir aussi recavaller (se)]
1° a) courir [CCv53 (appliqué à des chevaux)]
Remarques)  : à partir du sens premier "aller à cheval" et du sens dérivé "courir", Jehan Rictus recrée un équivalent de galoper.
b) courir pour déguerpir (appliqué à des personnes) [R2v255, Epv169] Remarques)  :avant 1897, certains dict. d'argot recensent bien, pour le verbe intransitif non pronominal, cette acception qui est reprise dans Bruant («  fuir  ») avec citation du premier passage des Soliloques, mais on peut voir aussi dans ces deux impératifs une dérivation d'emplois pronominaux avec suppression du pronom réfléchi.
2° se cavaler
s'enfuir, se sauver [IPv6, P1v103, Epv96]
Remarques)  : emploi pronominal recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
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cellunoïde [n. m.]  : corruption populaire du néologisme technologique celluloïd désignant ici [Epv148] des globes décorant boulevards et places à l'occasion de la venue du tsar.
ce que [locution adv. exclamative (voir aussi c' que ou c' qu' ou c' qui dans l'ordre alphabétique, apostrophe non prise en compte)]
comme  !que  ! (adv. exclamatifs) [Dv157]
Remarques)  :voir c' que ou c' qu' ou c' qui.
cérémognie [n. f.]  :corruption (pop. ou due à l'auteur  ?) étendant au mot-base cérémonie la prononciation des dérivés (cérémonieux, cérémonial) [Epv9].
ceuss ou ceuss' [pronom démonstratif parfois précédé de l'article, souvent devant pronom relatif, le verbe étant parfois au singulier derrière la forme élidée qu' du pronom relatif sujet qui]
1° ceux [Hv3, Hv13 («  ceuss' qu'a d' la guigne  »), Hv55, Hv114, Hv144, IPv54 («  ceuss' qu'a voulu  »), SMv33 («  ceuss'-là  »), SMv86 («  des ceuss' qui  »), SMv121(«  ceuss' là  »), EvS, Ev95, Dvl 1, P1v176, MMv105 («  ceuss qu'a bâti  »), etc.]
Remarques)  :prononciation populaire (déjà transcrite dans Richepin 1881).
2° les ceusses (qui)
ceux (qui) [Hv62, R1v77, R2v167, P2v79, Fv4] Remarques)  :tournure syntaxique populaire.
chahut [n. m.]
tapage (de Pète) [SMv32, R2v17, Epvl l]
Remarques)  : mot recensé avec cette acception dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite le second passage des Soliloques.
chahuter [v.]
bousculer, culbuter [Dv103]
Remarques)  : mot recensé avec cette acception dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
chamailler (se) [v.]
se disputer [Ev90]
Remarques)  :mot ancien à peine familier.
chambard [n. m.]
agitation bruyante [SMv49 (qualifié de « faux  », autrement dit de vain)] Remarques)  : ce mot fin-de-siècle, dérivé de chambarder "bouleverser" et attesté à l'époque dans l'argot de Polytechnique où il désignait certains chahuts, est recensé dans Delesalle et repris dans Bruant.
chameau [n. m.] individu rosse [P1v64]
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Remarques)  :cette épithète métaphorique est recensée dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
chandelle [n. f.]
(voir) trente-six chandelles
être ébloui [Dv181]
Remarques)  :expression figurée déjà ancienne et courante.
charger [v.]
sans charger
sans exagérer [Ev49]
Remarques)  :emploi figuré déjà ancien et courant.
charlotte [n. f.]
type de femme (à préciser) [SMv61-62]
Remarques)  : explication à trouver pour cette comparaison («  les Nations s' pass'ront des langues, // Comm' des charlott's en amiquié  », «  Comm' des lolott's en amitié  » dans les éd. de 1897) reposant sur une antonomase désignant un type précis de femmes qui «  se passent des langues  » (voir langue) ; de nombreux personnages féminins, littéraires ou non, ont eu Charlotte pour prénom et Lolotte pour « petit nom  »avant 1897.
charrier [v.]
charrier sa bidoche
marcher péniblement [Rlvl-3]
Remarques)  : variante plus expressive de l'expression se charrier "se déplacer d'un côté, de l'autre" qui est recensée dans Rigaud  ;Bruant reprend charrier sa bidoche ou sa viande (aller) en citant ce passage des Soliloques.
châsses) [n. m. souventpl.]
oeil (yeux) [Ev176, R2v244, Fvl l]
Remarques)  :mot recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite le second passage des Soliloques.
chaud [adj. employé comme adv.]
1° il fera chaud +proposition temporelle (quand...)
cela n'arrivera pas de sitôt (ou jamais) [Hv79 (avec jeu sur la situation hivernale mise en scène dans le poème)]
Remarques)  :expression recensée dans Larchey.
2° vite [R2v26]
Remarques)  :cet emploi adverbial (ou interjectif) expressif déjà ancien est recensé dans Rigaud.
chaussettes russes [n. composé f. pl.]
chaussettes de fortune faites avec des morceaux de tissu entortillant le pied [Epv120 (avec jeu sur la visite du Tsar et dislocation du nom composé)]
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Remarques)  : expression recensée dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques de 1897.
chausson [n. m. employé comme adj.]
décrépit (avec connotation de prostitution pour certaines femmes) [P3v143] Remarques)  :acception recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897.
cheveu [n. m.]
se faire des cheveux
se morfondre [P2v91 ]
Remarques)  : expression fam. recensée dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
chialer [v.]
pleurer [Hv40, SMv116, Dv132, Fv73]
Remarques)  :mot recensé dans des dict. d'argot (Richepin, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant (avec citation de Richepin).
chichi ou chi-chi [n. m.]
1 ° manière affectée (avec connotation de chose vaine) [Epv91 ]
Remarques)  : mot fin-de-siècle recensé avec cette acception dans le Dictionnaire français-argot de Lermina & Lévêque et repris dans Bruant qui cite ce passage des Soliloques de 1897 pour illustrer le sens "chose vaine, fadaise".
2° bavardage, discours (cancanier) [P1v67]
Remarques)  :mot fin-de-siècle recensé avec cette acception dans Bruant.
chicot [n. m.]
dent cariée ou reste de dent cariée [MMv94 (à propos de masures)] Remarques)  :mot ancien appliqué depuis longtemps aux dents dans l'usage familier.
chien de fer [n. composé m.]
chemin de fer [R2v89 (avec hurlement), MNv56 (avec cri)]
Remarques)  : à-peu-près métaphorique recensé ensuite dans Bruant, qui cite le premier passage des Soliloques.
chiendent [n. m.]
voilà le chiendent
voilà la difficulté [Ev63 («  v'là l' chiendent  »)]
Remarques)  : sens figuré ancien (Le Roux 1718) recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
chiffortin [n.] chiffonnier [MNv69]
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Remarques)  : variante de chifferton (Vidocq 1836-37, Rigaud, Larchey, Delesalle) ou de chifforton (Bruant), ce dérivé de chiffe est recensé dans Bruant avant l'éd. de 1903 des Soliloques.
chiottes [n. f. pl.]
cabinets (d'aisances) [MPv64]
Remarques)  :mot pop. expressif recensé dans des dict. d'argot (Delesalle, puis Bruant), avant l'éd. de 1903 des Soliloques.
chiqué [n. m. ]
esbrouffe, faux-semblant [Ev67, Dv153, SCAv23]
Remarques)  :mot du vocabulaire des peintres, passé dans le langage courant avec valeur péjorative et recensé, parfois aussi sous la forme chiquet, dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
chopper [v.] [variante de choper]
1° voler, prendre [IPv7]
Remarques)  : mot recensé avec cette acception dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
2° attraper (une maladie) [R2v63]
Remarques)  : extension de sens signalée dans Bruant, mais attestée avant
1897.
choquotte [n. f.]
chose agréable [MPv59]
Remarques)  : mot recensé avec cette acception, notamment pour des expressions comme c'est de la choquotte, dans des dict. d'argot (Rigaud, Richepin, Supplément de Larchey avec citation de Richepin, Delesalle, Bruant) avant l'éd. de 1903 des Soliloques.
chose [n. f. en emploi adj. invariable (souvent précédé de tout)]
interloqué, mal à l'aise [Dv17]
Remarques)  : emploi expressif déjà ancien, recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897.
chosette [n. f.]
petite chose [Epv41]
Remarques)  :diminutif ancien à valeur généralement expressive.
chouatte [adj.]  :prononciation populaire de chouette (voir ce mot) en région parisienne et autour [MPv14].
chouette [adj. et interj.]
1° bon, beau, bien [Hv60, P2v95, MMv33]
Remarques)  :mot expressif recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
219
2° chouette  !
(interjection marquant la satisfaction) [Fv64]
Remarques)  :l'emploi interjectif est déjà signalé dans Rigaud et sera repris dans Bruant.
chouné [n. m.]
terme affectueux adressé à un enfant [Dv110]
Remarques)  : dans l'éd. de 1903, Jehan Rictus a remplacé nouné (voir ce mot) à ce même passage en 1897 par chouné, sorte de diminutif de chou ou réduction de bichounet avec influence des diminutifs méridionaux (pit- chounet) ;mot absent de tous les dictionnaires avant et après cette date.
chromo [n. m.]
estampe en couleur obtenue par chromolithographie [CCv69]
Remarques)  : abréviation par apocope, avec changement de genre, passée dans l'usage courant dans la seconde moitié du XIXe siècle.
chueux [n. m. pl.]  :corruption populaire de cheveux [Epv22]
cib [n. m.]
tête [P3v140]
Remarques)  :dérivé par apocope de ciboulot "tête" (voir article suivant), ce mot sera recensé dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
ciboulot [n. m.]
tête [Dv83]
Remarques)  : ce substitut expressif est recensé dans des dict. d'argot (Delesalle après Fustier 1883 dans Supplément au Dictionnaire de la langue verte de Delvau) avant 1897, puis dans Bruant.
cien [n. m.]  :prononciation régionale (nord) et enfantine de chien [Fv53]
cig [n. m.] [variante de Gigue ou signe]
pièce d'or de vingt francs [SMv33]
Remarques)  :mot recensé, sous les variantes signe et Gigue, dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey qui donne Gigue, Rigaud qui donne cig, Delesalle qui donne Gigue et cig) avant 1897, puis dans Bruant.
citron [n. m.]
tête [Dv56, P3v111, Fv72 (jeu sur le jus qu'on en tire quand on le presse)] Remarques)  :substitut métaphorique recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey et Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite le premier passage des Soliloques.
c'lui [prou. démonstratif]  :réduction de celui, moins fréquente aujourd'hui que çui dans l'usage populaire [Hv69 («  c'lui-là  »), SMv15, Rlvl l et v21].
clabaud [n. m.]
bavardage à grands cris [R2v173]
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Remarques)  :cet emploi dérivé du sens ancien clabaud "individu qui crie" (Le Roux 1718 ; recensé dans Supplément de Larchey, article clabaud de cohue), lui-même dérivé métaphoriquement du sens premier "chien de chasse aboyeur", sera ensuite repris dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
clampin [n. m. ]
individu qui se traîne (appliqué parfois aux enfants qu'il faut traîner) [P3v5] Remarques)  :mot ancien ("boiteux" dans Le Roux 1718) recensé dans des dict. d'argot (Richepin avec la définition "fainéant", Delesalle, qui ajoute "propre à rien") avant 1897, puis dans Bruant.
clapet [n. m.]
bouche [R2v125]
Remarques)  : métaphore dont cette attestation littéraire de 1897 dans les Soliloques est passée inaperçue, y compris dans Bruant ; à la suite d'Esnault 1965, les dict. d'aujourd'hui remontent seulement à boîte à clapet en 1907.
claque I. [n. m. ] bordel [MNv72]
Remarques)  :mot recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle, Bruant) avant l'éd. de 1903 des Soliloques.
claque lI. [n. f. ]
1° en avoir sa claque
en avoir assez [Hv109]
Remarques)  :expression recensée dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
2° ne pas valoir une claque
ne rien valoir [Ev149]
Remarques)  :dans cette expression ignorée des dictionnaires, Jehan Rictus semble avoir substitué claque à coup, tel qu'il se trouve dans valoir le coup  ; on pourrait aussi y associer le sens "applaudissement" recensé dans Bruant et dérivé de claque "groupe de spectateurs payés pour applaudir".
claque-dents [n. composé m.]
bordel[P1v227]
Remarques)  : composé expressif recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
claquer [v.]
mourir [Hv123]
Remarques)  : substitut expressif de mourir recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
clebs [n. m.]
chien [P1v167, P1v220, variante d de P3v168 (voir p. 185)]
221
Remarques)  : emprunt à l'arabe kleb "chiens" attesté avant 1897 (cleb dans Delesalle) et repris ensuite dans Bruant.
clignotants) [participe-adj. pris comme n. m.]
oeil (yeux) [Dv25, variante e de CCv99 (voir p. 186)]
Remarques)  : à partir de clignot(s) "oeil, yeux" formé sur cligner et recensé dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, Jehan Rictus semble avoir forgé ce dérivé de clignoter, ensuite recensé dans Bruant, qui cite le premier passage des Soliloques.
clique [n. f.]
toute la clique
toute la bande [R2v159]
Remarques)  : expression ancienne renvoyant à un groupe de personnes s'unissant pour commettre leurs méfaits.
clou [n. m. ]
foutre au clou
mettre au poste de police [IPv36]
Remarques)  : le mot clou est recensé avec l'acception "poste de police, prison" dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
cochon [n. m.]
I. 1° individu lubrique [Dv154]
Remarques)  : emploi ancien et courant avec connotation sexuelle, recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
2° individu méchant [CCv100]
Remarques)  : emploi ancien et courant (associable à l'expression jouer un tour de cochon ainsi qu'à cochonnerie "indélicatesse").
II. cochon de... (+ nom) [construction dite « qualitative  » ;voir garce] sale [Dv78 (ici au sens figuré de sale)]
Remarques)  :tournure injurieuse attestée avant 1897, mais non recensée dans les dict. d'argot.
III. mon cochon  !
mon vieux (terme affectueux adressé à quelqu'un qu'on aime) [MPv86] Remarques)  :emploi dérivé par inversion du sens du précédent comme dans mon salaud (avec influence de l'expression copain comme cochon) et recensé dans Bruant (avec citation de Courteline) avant l'éd. de 1903 des Soliloques.
IV. bouffer de la tête de cochon (voir bouffer)
cocotte [n. f.]
femme de moeurs légères [SMv64 (jeu phonique avec cocotier)]
222
Remarques)  : mot déjà ancien recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
cogne [n. m.]
représentant de l'ordre (gendarme ou policier) [variante a de P1v43 (voir p. 181)]
Remarques)  :après 1897, Jehan Rictus a remplacé par flic ce mot recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant (qui cite Richepin).
colle [n. f. ]
mensonge, faux-semblant [Epv17]
Remarques)  :acception fort ancienne encore recensée dans des dict. d'argot (Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897.
coller [v. ]
1° mettre [P3v140]
Remarques)  : substitut expressif de mettre recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
2° se coller
a) se mettre [R2v283]
Remarques)  :emploi pronominal réfléchi ancien et courant comme substitut expressif de se mettre, se placer.
b) se donner [Epv60]
Remarques)  : emploi pronominal réfléchi (avec des compléments d'objet variés) ancien et courant comme substitut expressif de se donner, s'octroyer.
collidor [n. m.]  :corruption populaire ancienne de corridor [MNv16], souvent relevée dans les dict. de fautes de langage avant 1897.
collignon [n. m.]
cocher (avec nuance péjorative) [1VIl~iv69]
Remarques)  :dérivé par antonomase du nom d'un cocher devenu criminel par irascibilité et exécuté en 1855, ce mot est recensé dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, Delesalle, Bruant) avant 1903.
colonne ou Colonne [n. f.]
membre viril en érection (surtout dans la masturbation) [SMv44]
Remarques)  :l'expression se polir la colonne "se masturber" est recensée dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
comète ou Comète
refiler la comète
vagabonder [SMv17, Dv53]
Remarques)  :expression métaphorique fin-de-siècle formée à partir du sens "ruban" de comète et recensée dans Delesalle avant 1897, puis dans Bruant, qui cite le premier passage des Soliloques.
223

comme qui dirait [loc. adv.]
pour ainsi dire [1VIl~iv8]
Remarques)  :expression familière attestée avant 1903.
commugnion [n. f.]  : prononciation populaire mouillée de communion, marquée par changement de graphie [P1v158].
Communeux [n.]
membre de la Commune de Paris de 1871 [Ev105]
Remarques)  :mot recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
connaître [v.]
je te connais comme si je t'avais fait
je te connais parfaitement [Dv49]
Remarques)  :expression familière dont les pronoms sont variables.
copahu [n. m.]
baume tiré du tronc du copayer et utilisé notamment contre la gonorrhée [SMv29]
Remarques)  :malgré son allure argotique et son utilisation en argot (copahu "infirmier", avaler le copahu "entendre son arrêt de mort"), le mot doit être pris ici dans son sens propre médical non argotique.
copain [n. m.]
camarade [SMv23, R1v51, R2v113, CCv20]
Remarques)  : mot pop. et fam. recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
cor ou cor' (core) [adv.]  :corruption populaire de l'adv. encore (répandue dans de nombreuses régions et recensée dans Bruant) [SMv78, Ev30, Ev120, Dv97, R1v23, R2v198, R3v16, R3v104, P1v72, P1v164].
costeau [adj.]
vigoureux [SMv133]
Remarques)  :mot expressif pop. et fam., également attesté sous les variantes costaud et costo et dont l'histoire lexicographique et argotographique n'est pas claire (association de costo avec costel "souteneur" dans Delesalle)  ; Bruant donnera costeau, costaud et costo avec les acceptions "fort" et "musclé".
couillon [adj et n. m.]
[individu] bête (parfois avec idée de lâcheté) [Ev206, R2v151 (« bon couillon  »)]
Remarques)  :vieux mot pop. également attesté sous les formes coïon, coyon et couyon et recensé dans des dict. d'argot plutôt avec le sens "poltron" (Larchey, Rigaud, Delesalle, puis Bruant) qu'avec le sens "bête" (Bruant).
224
coup [n. m.]
I. 1 ° le coup de...
quelque chose qui mérite d'être divulgué [Hv167 («  le coup d' la misère  »)] Remarques)  :sens expressif dérivé du sens pop. plus général "acte, action".
2° coup de chien
acte de violence (avec idée de surprise) [Ev14]
Remarques)  : "mauvais tour, trahison" dans Delesalle, puis dans Bruant, qui distinguera aussi le sens "acte de violence, bagarre" sans idée de traîtrise, ce qui est plus proche de cet emploi dans les Soliloques.
3° coup de Trafalgar
imprévu aux conséquences lourdes [R1v86]
Remarques)  :expression pop. et fam. formée sur le souvenir de la défaite de Trafalgar (1805) et attestée maintes fois entre 1877 et 1897, elle sera recensée notamment dans Bruant.
4° coup de traversin [voir traversin]
5° (quel) sale coup pour la fanfare
quelle sale histoire, quel mauvais coup [SCAv27 (qui touche ici un musicien des rues)]
Remarques)  :expression attestée à cette époque.
6° coup de fion [voir fion]
7° coup de tampon [voir tampon] 8° valoir le coup [voir valoir]
II. Dans des loc. adv.
1° du coup
suite à cela, à cause de cela [IPv17, variante e de CCv99 (voir p. 186)] Remarques)  :expression fam. maintes fois attestée avant 1897 (on la trouvera employée sept fois dans des exemples ou citations du Bruant).
2° un coup ;pour un coup
une fois [MMv76] ;pour une fois [Dv146]
Remarques)  :expressions fam. maintes fois attestées avant 1903 (notamment dans des exemples et citations du Bruant).
3° d'un coup
d'une traite, en une seule fois [R3v53]
Remarques)  :expression fam. maintes fois attestée avant 1897.
4° tout par un coup
tout d'un coup [Ev158, Dv7]
Remarques)  :variante expressive de tout d'un coup.
225
couple [n. f.]
paire [MNv37 (à propos d'heures)]
Remarques)  : variante féminine ancienne de couple attestée dans certains domaines et dans certains emplois régionaux (souvent vieillis).
courir [v.]
fatiguer, importuner [Epv115 (avec forme «  a m' courr'  » au lieu de « elle me court  »)]
Remarques)  :emploi transitif pop. dérivé de celui du domaine de la chasse et recensé dans Rigaud (la courer "ennuyer") avant 1897, puis dans Bruant (courir, associé éventuellement à une autre construction courir à qqn sur l'asperge, sur le haricot, etc., qui, selon Esnault 1965, évoquerait métaphoriquement le morpion).
c' que ou c' qu' ou c' qui (réduction de c' qu'il) [lot. exclamative] [voir aussi ce que]
comme  ! que  ! [Hv21-22 («  c'qui » pour « ce qu'il  »), variante o de Hv80 (voir p. 170), SMv21 («  c'qu'y » pour « ce qu'il  »), Dv59, Dv81 (prou. exclamatif : « c' que t'as pris  »), R2v163, R2v239, P1v161, P3v9, variante c de CCv90 (voir p. 186)]
Remarques)  : tournure exclamative courante dans l'usage oral («  c' que tu peux êt' bête  !  »).
crache-impôts [n. composé]
individu qui doit payer ses impôts [P2v5]
Remarques)  :composé formé sur le verbe expressif cracher "payer".
cramponner (se)
tenir bon [Ev16]
Remarques)  :emploi figuré expressif ancien.
cran [n. m.]
à crans
mieux, à bout de nerfs [CCv85]
Remarques)  :expression figurée recensée dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1900, puis dans Bruant ("de mauvaise humeur").
crasse [n. f.]
saleté physique (d'où, au sens figuré, condition sociale misérable) [Dv39, MMv103]
Remarques)  : le glissement vers le sens figuré indiqué ci-dessus est amorcé dans le second passage des Soliloques.
travail [n. m.]  :prononciation pop. et enfantine (palatalisation) de travail [R2v77], avec barbarisme pop. sur la forme du pluriel [P3v156 («  travails  »)].
travailler [v.]  :prononciation pop. et enfantine (palatalisation) de travailler [P3v201, CCv96].
226
cravailleur [n.]  : prononciation pop. et enfantine (palatalisation) de travailleur [P1v164, P2v3].
cré [adj. en début d'injure ou de juron]
sacré (en début d'injure ou de juron) [SCAv21 («  cré tas de...  »)]
Remarques)  :réduction ancienne de sacré dans cet emploi, recensée dans Larchey et Delesalle.
crème [n. f.]
crème de (ma) race
sperme [SMv71]
Remarques)  : le contexte incite à penser à cette métaphore, qui n'est recensée dans aucun dict. et ne semble pas être attestée dans la littérature avant 1897.
crevaison [n. f.]
mort [MPv96]
Remarques)  : dérivé de crever (substitut expressif de mourir), ce mot est attesté avant 1850 et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle, Bruant) avant 1903.
crevant [participe employé comme adj.]
1° mourant, au bout du rouleau [CCv84]
Remarques)  : le sens est ici directement hérité de celui du participe présent de crever "mourir" (voir ce mot).
2° navrant [Ev145]
Remarques)  : Jehan Rictus semble jouer sur l'équivoque du sens "navrant", recensé dans Larchey et Rigaud, avec le sens dérivé "drôle", recensé dans Delesalle ;ces deux sens seront repris dans Bruant.
crève [n. f.] [voir aussi battre la crève]
épuisement (proche de l'agonie) [variante k de la fin de CC dans la le éd. de 1900 (voir p. 187)]
Remarques)  : il semble que le sens de ce nom déverbal formé sur le verbe crever "exténuer" et recensé dans Bruant («  mort, agonie  ») avait une portée plus large que son association avec des maladies comme la grippe.
crevé [participe employé comme adj. ]
à bout de forces [Dv135, CCv84, MPv23]
Remarques)  : le sens est ici hérité de crever "exténuer", affaiblissement du sens "tuer".
crève-coeur [n. composé m.]
ce qui déchire le coeur (ici avec idée de déception extrême) [CC (titre)] Remarques)  :mot composé expressif très ancien.
crève-d'amour [n. composé]
individu en manque d'amour (sexuel) [SMv46]
227
Remarques)  : Jehan Rictus forge ce composé sur le modèle d'autres comme crève-la faim.
crever [v.]
I. se faire crever la peau
se faire tuer [Ev131]
Remarques)  :l'expression pop. (voir aussi peau) peut être prise ici au sens propre et au sens figuré ("se battre jusqu'au bout").
II. 1° mourir [R2v94, P3v16, SCAv48]
Remarques)  : cet emploi du verbe, attesté depuis longtemps dans l'usage populaire, comme substitut expressif de mourir, est recensé dans Le Roux 1735 et, après 1897, dans Bruant.
2° crever de faim
mourir de faim [P3v85]
Remarques)  : association ancienne avec la faim, attestée avant 1897 par l'existence de composés comme crève-la faim, celui-ci recensé dans Delesalle avant 1897, puis dans Bruant.
crible [n. m.]
avoir son crible (de)
avoir assez (de) [Ev77]
Remarques)  : expression attestée pour la première fois dans les Soliloques (1897) et sans doute dérivée de l'un des sens pris par crible "tamis" plutôt que du verbe argotique cribler "crier".
croc [n. m.]
dent [Dv135]
Remarques)  :l'acception de ce mot, résultant d'une extension ancienne aux humains d'un terme appliqué d'abord à des animaux, est recensée dans des dict. d'argot (Vice puni de Grandval 1725, Larehey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
crocodile [n. m.]
individu qui verse des larmes masquant son inhumanité [Hv87, Fv73 («  crocodi  »dans prononciation pop. et enfantine)]
Remarques)  :métaphore ancienne tirée d'une légende selon laquelle le croco- dilepleurait après avoir dévoré sa proie (voir Trésor de la langue française).
croquant [n.]
rustre [Dv104]
Remarques)  :mot ancien (Oudin 1640, Le Roux 118) repris dans Delesalle avant 1897, puis dans Bruant.
crottoir [n. m.]  :corruption populaire et enfantine (palatalisation) de trottoir, avec calembour sur crottoir (dérivé de crotte) [MNvl 1, Epv141].
228
croustiller [v.]
manger [P2v28]
Remarques)  :mot expressif recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
croûter [v.]
manger [variante f d'IPv24 (voir p. 172), MPv45-46]
Remarques)  :mot pop. (d'où sa suppression dans la bouche de privilégiés au vers 24 d'IP à partir de 1921) recensé dans le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France avant 1897, puis dans Bruant  ; il faut le rapprocher de l'expression déjà ancienne casser la croûte, puis du nom croûte "nourriture", attesté à la même époque et recensé dans France, puis dans Bruant.
croûton [n. m.]
tableau de mauvais peintre [P1v138]
Remarques)  : ce mot est dérivé des mots anciens croûte "mauvais tableau" et croûton "mauvais peintre", ce dernier étant recensé dans Delesalle et dans le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France avant 1897.
c't I. (c'tait à l'imparfait) [prou. démonstratif +est ou était]  :réduction pop. de c'est [P1v33 («  c't'  »)] et de c'était [Ev79 («  c'tait  »), P3v24 («  c'tait  »)].
c't' II. (c't serait préférable) [fém. c'te (ou c't')] [adj. démonstratif] réduction populaire de cet [Hv124 («  c't' Ange  »), SCAv45 («  c't' hiver  »)] et de cette [SMv81 («  c'te nuit  »), Dv62 («  à c't' heure  »), R3v43 («  c'te vach' de réalité  »), R3v95 («  c'te bête  »), Plv3 («  c'te putain d' Vie  »), P1v81 («  c'te vach'-là  »), P3v13 («  c'te garc' de République  »), CCv47 («  c'te fète  »), Epv91 («  c'te joie  »), Fv70 («  c'te bonn' Nouvelle  »)]  ;l'expression à c't heure [Dv62], parfois donnée comme patoise, est plutôt populaire.
c'tait [voir c't I.] c'te [voir c't' lL]
cuire [v.]
1° frapper [Epv146]
Remarques)  :acception métonymique (la peau brûle là où elle est frappée) expressive non recensée dans les dictionnaires.
2° dût-il m'en cuire
même si je devais en souffrir [Fv4]
Remarques)  :acception métonymique prise depuis longtemps au sens figuré dans les expressions de ce type.
cuite [n. f. ]
ivresse [Epv24]
Remarques)  : en rapport avec cuit "ivre", ce mot pop. est recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
229
cuiter (se) [v.]
s'enivrer [Epv 131 ]
Remarques)  : dérivé de cuite, le verbe est recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
cul [n. m.]
1° derrière [R3v68, P1v88, P1v178, MPv66] Remarques)  :mot pop. ancien.
2° poser son cul
s'asseoir (avec idée de se reposer) [Dv15]
culbutant [n. m.]
pantalon [P3v98]
Remarques)  : substitut expressif de pantalon, formé comme masculin de culbute "culotte" et recensé dans des dict. d'argot (Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant (avec citation de Richepin).
culbute [n. f.]
faire la culbute
faire l'amour [P3v97]
Remarques)  :expression métonymique ancienne.
D —
d'jà, d'pis [voir ordre alphabétique (sans prise en compte de l'apostrophe)]
dab [n. m. (parfois dâb dans éd. tardives des Soliloques ;accent non justifié)] père [R2v117, R3v117, Fv81]
Remarques)  :mot d'argot recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-1837, Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) bien avant 1897, puis dans Bruant.
dada [n. m. ]
idée à laquelle on revient sans cesse [Epv128]
Remarques)  :sens figuré ancien, calqué au XVIIIe siècle sur l'anglais hobby- horse.
danse [n. f.]
danse du ventre
danse orientale avec mouvements du ventre [Hv108]
Remarques)  :avec cette expression en vogue à son époque, Jehan Rictus joue probablement ici aussi sur le sens argotique antiphrastique (danse du ventre "faim"), dérivé d'expressions comme danser devant le buffet (voir article suivant) et qui sera recensé dans Bruant.
230
danser [v.]
danser devant le buffet
avoir faim [SCAv42]
Remarques)  : Jehan Rictus joue sur une homonymie facile avec le nom d'Eugénie Buffet, mais aussi sur la profession du chanteur, en employant cette expression antiphrastique recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
dardés [participe employé comme n. m. pl.]
seins [R2v130]
Remarques)  :avec cet emploi inhabituel (et non lexicographié) du participe comme nom, Jehan Rictus joue sur dard "arme pointue blessante" et sur darder "jaillir" qui pouvaient s'appliquer aux tétons et aux seins.
daron [n. m.] [voir aussi fém. daronne]
père [R1v13, R3v119, Fv81]
Remarques)  :substitut de père recensé dans des dict. d'argot (Vice puni de Grandval 1725, Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle) bien avant 1897, puis dans Bruant.
daronne [n. f.]
mère [Dv148, R2v116, P3v25]
Remarques)  :substitut de mère recensé dans des dict. d'argot (Vice puni de Grandval 1725, Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
datte [n. f. ]
ne pas en foutre une datte
ne rien faire [SMv6]
Remarques)  : le mot datte, en raison de la petitesse du fruit, servait à exprimer la négation ou le refus ; emploi recensé dans des dict. d'argot (Vocabulaire de la langue verte d'Hector France, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant ;pour le verbe, voir foutre, section I.
débagouler [v.]
proférer des paroles en abondance [Hv135]
Remarques)  : lié à l'idée de vomir, le sens figuré pop. de ce verbe, bien qu'ancien (Oudin 1640, Le Roux 1718), est encore recensé dans Delesalle avant 1897, puis dans Bruant.
débine [n. f. ]
misère [R3v46]
Remarques)  :mot pop. ancien (d'Hautel 1807), recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant ; Jehan Rictus lui ajoute l'adjectif épithète médical indurée pris dans un sens figuré "endurci" (voir aussi dèche).
débiner [v.]
se sauver [R2v255]
231
Remarques)  :emploi non pronominal ou impératif pronominal sans pronom pour ce verbe recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
dèche [n. f.] [voir aussi bat-la-dèche]
misère (par manque d'argent) [Hv102, SMv70, P1v104, P2v12, P3v33] Remarques)  : ce mot associé au départ à l'idée de dette ou de dépense s'est répandu dans son sens second "misère par manque d'argent", recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant  ; Rigaud jugeait la dèche plus passagère que la débine.

s'esquiver (quand on a besoin de vous) [R2v134]
Remarques)  : acception métaphorique déjà ancienne, mais encore recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
déglingué [participe-adj.]
débraillé, en piteux état [Dv28]
Remarques)  : le sens vestimentaire du participe employé comme adjectif est recensé dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
dégueulas [adj.]
abject [variante e de P1v40 (voir p. 181) ;voir aussi note 1 p. 111] Remarques)  : l'adjectif dérivé de dégueuler est recensé, avec son sens physique et/ou moral, dans des dict. d'argot (Delvau, Rigaud, Richepin, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques de 1897.
dégueuler [v.]
vomir [SMv23]
Remarques)  :verbe attesté depuis longtemps et encore recensé dans des dict. d'argot (Dictionnaire de la langue verte d'Hector France, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
Délicat [adjectif employé comme n. m.]
coeur [variante h de Dv79 (voir p. 176)]
Remarques)  : ce nom qualifiant de l'éd. de 1897 inventé par Jehan Rictus est remplacé de 1903 à 1919 par le nom qualifiant « Ressautant  » (voir ce mot), lequel est remplacé à son tour à partir de 1921 tout simplement par « coeur  » [voir aussi Juge et sorbonne].
démanché [participe-adj.]
en désordre [P2v69]
Remarques)  :emploi poétique figuré introduit par comme.
dépasser qqn [v.]
surprendre ggn[P1v220]
Remarques)  :emploi figuré fam. ancien.
232
dépopulotter (se) [v.]
perdre son « populo » [Fv74]
Remarques)  :dérivé de populo (voir ce mot) forgé par l'auteur avec finale diminutive —ott (er) marquant la déliquescence.
dergnier [adj.]  :prononciation populaire (palatalisation) de dernier, marquée par changement de graphie [MPv25].
déringoler [v.]  :corruption populaire du verbe dégringoler dont l'expressivité est renforcée dans ces deux passages [R2v27, R2v141]
dessaler [v.]
initier [R3v130]
Remarques)  :emploi figuré fam. (plutôt en mauvaise part, ce qui ne semble pas être le cas dans ce passage), qui sera recensé dans Bruant.
détraqué [participe-adj employé comme n.]
individu au cerveau dérangé [Ev193 ; il s'agit ici de femmes]
Remarques)  : mot parfois recensé dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897.
deuil [n. m. employé comme un adj. attribut]
endeuillé, attristé [Dv97]
Remarques)  :emploi dérivé de l'expression régionale faire deuil "attrister".
dévisser (se) [v.]
être gravement malade, être mourant [Dv75]
Remarques)  : acception métaphorique recensée dans Delesalle et qui sera reprise dans Bruant.
diable [n. m.]
des cinq cent diables
extrême [Epvl l]
Remarques)  :formule superlative ancienne.
dire [v.]
ça ne peut pas se dire comme (ici suivi de « j'étais beau  ») [j'étais] extrêmement [beau] [CCv38]
Remarques)  :formule superlative fam.
d'jà [adv.]  :prononciation pop. de déjà [R3v129, P3v25, P3v48, Epv112].
doche [n. f.]
mère [P1v36]
Remarques)  :mot d'argot recensé dans des dict. d'argot (Rigaud sous les formes dauche et doche, Richepin, Supplément de Larchey, Delesalle) bien avant 1897, puis dans Bruant (avec citation de Richepin).
233
dodo [formule et n. m.]
1° dors (formule de berceuse) [Dv110] Remarques)  :formule très ancienne.
2° lit [CCv95]
Remarques)  :acception déjà ancienne (Vice puni de Grandval 1725) recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
donner [v.]
1° ne pas donner +valeur minime ou chose de valeur minime + de + complément
estimer gqch (ou qqn) comme n'ayant pas (ou plus) beaucoup de valeur [Ev150]
Remarques)  : expression ancienne encore recensée dans Bruant avec différents compléments (broquille, clou, etc.).
2° donner dans gqch
s'adonner à (ici avec idée adjacente de se laisser abuser) [Ev66]
Remarques)  :emploi ancien recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
3° (ne pas ou ne plus) savoir où donner de l'aile ou du groin [voir aile et groin]
donzelle [n. f.]
fille ou femme de moeurs légères [P3v108]
Remarques)  :acception fréquente dans la seconde moitié du XIXe siècle.
dorsale [n. f.]
épine dorsale (colonne vertébrale) [R1v68]
Remarques)  : réduction peu habituelle et non lexicographiée du nom composé épine dorsale.
douce (en) [loc. adv.]
doucement, en douceur [R1v84, P2v56]
Remarques)  :proche de la loc. à la douce recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle), l'expression en douce est donnée dans Delesalle avant 1897, puis dans Bruant, qui cite le premier passage des Soliloques.
douète (à) [loc. adv.]  :prononciation pop. régionale de droite (à) [Rlv2]. d'pis [prép.]  :prononciation pop. de depuis [Ev75, R2v231, R3v124, etc.].
droit [n. m.]
si je n'ai pas le droit, je le prends je me fiche du droit [Epv140-143]
Remarques)  :attestation littéraire intéressante pour cette formule d'insoumis- sion, courante dans l'usage.
234
dur [adv.]
durement [P3v7 (péniblement), Fvl l (violemment)] Remarques)  :emplois adverbiaux expressifs anciens.
dure (à la) [loc. adv.]
durement (de manière rude) [SMv97, R1v16, P3v149]
Remarques)  :expression attestée dès la première moitié du XIXe siècle.
E —
économisse [n.]  :réduction pop. de la finale –iste d'économiste [P3v190].
écoper [v.]
recevoir des coups [SMv125]
Remarques)  : acception figurée recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
écrabouiller [v.]
écraser [MMv140 (au sens figuré "coincer")]
Remarques)  :vieux mot expressif fam., parfois recensé dans des dict. d'argot (écarbouiller dans Delesalle, les deux formes dans Bruant) avant 1903.
écriveuse [n. f.]
femme qui écrit (écrivain, femme de lettres) [Ev194]
Remarques)  : dérivé marqué qui, comme le masculin écriveux (ou même écriveur), peut être interprété comme péjoratif ; le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France, lettre E avant 1897, donne « écriveur, écriveuse. Personne possédée de la rage d'écrire  ».
ed' I. [prép.]  :prononciation pop. de de, liée à la suppression du e instable devant consonne [Hv82 («  Ed' peint's  »), Hv88 («  ed' nos trip's  »), etc.].
ed' lI. [article indéfini pl.]  :prononciation pop. de de, liée à la suppression du e instable devant consonne [Hv60 («  ed' chouett's tableaux  »)].
ed' III. ou ed' d' (peu justifié) [article partitif)  :prononciation pop. de de, liée à la suppression du e instable devant consonne [SMv82 («  ed' d' la Bell' gonzesse  »)].
égledon [n. m.]  :déformation pop. d'édredon (couvre-pied rempli de duvet, d'eider au départ) [MMv54], plus complexe qu'une simple palatalisation.
égorgiller [v.]
rendre gorge  ? [P3v202]
Remarques)  : le verbe, d'usage familier, a plutôt les sens "égorger" et, au figuré, "nuire".
235
ej' [pron. pers. première pers. du sg]  :prononciation pop. de je, liée à la suppression du e instable devant consonne [SMv133 («  ej' s'rais  »), R2v261 («  Ej' m'en vas  »)].
el' ou el' l' (peu justifié) [article défini masculin] [voir aussi eul ou eul'] prononciation pop. de le, liée à la suppression du e instable devant consonne [Ev148 («  el' pus dans l'ordure  »), P3v5 («  el' l' pauvr' clampin  »), Epv31 («  el' l' caprice  »)].
embarquer [v.]
emmener avec soi, d'où séduire (si le complément renvoie à une femme) [P3v100]
Remarques)  : sens figuré attesté peu avant 1897 et qui sera recensé dans Bruant avec le sens "embaucher" mais illustré par une citation où il est bien question de séduire une femme.
empaumer [v.]
enjôler (avec idée de duperie) [R2v209]
Remarques)  :sens figuré courant attesté dès le XVIIe siècle.
empiffrer (s') [v.]
se goinfrer [P1v110, P2v39]
Remarques)  : ce mot attesté dès le XVIIe siècle avec le sens "devenir piffre (ventru)" sera ensuite recensé en 1905 dans Bruant avec citation de ce passage des Soliloques.
empoyé [n.]  :corruption populaire d'employé [Hv49].
encognure [n. f.]  :variante ancienne d'encoignure, conforme à sa prononcia- tion [CCv6].
enfilade [n. f.]
en enfilade
à la suite [P1v178]
Remarques)  : Jehan Rictus joue aussi ici sur le sens sexuel ancien enfiler "pénétrer", recensé dans Oudin 1640 et, avec nuance de sodomie, dans Le Roux 1718.
enfilé [participe-adj.]
perdant (originellement au jeu) [Epv104]
Remarques)  : à ce sens ancien recensé dans des dict. d'argot pour s'enfiler ("perdre au jeu" et "s'endetter" dans Larchey, "perdre plusieurs coups aux cartes" dans Rigaud, "perdre continuellement" dans Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant (se faire enfiler "perdre au jeu"), Jehan Rictus associe peut- être les sens "sodomiser" (Le Roux 1718, Delesalle) et "tromper" (Delesalle, puis Bruant).
236
ent'iler (s') [voir aussi ent'ilé]
1° entrer [R1v57 (avec jeu associant le sémantisme du verbe à celui du trou de l'aiguille du proverbe évangélique), Epv42]
Remarques)  :sens courant attesté dès le XVIIe siècle.
2° avaler [SCAv10]
Remarques)  : sens recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
engraisser (s') [v.]
prospérer [Ev102]
Remarques)  :sens figuré attesté maintes fois au XIXe siècle.
engueuler [v.]
invectiver avec force [Hv134, R2v285 (s'engueuler), Epv140]
Remarques)  : vieux mot expressif toujours recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
enquier [adj.]  :déformation phonétique populaire et enfantine (palatalisation) d'entier [Plv2].
enquiquiner [v.]
importuner [P1v141]
Remarques)  : mot expressif recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larehey corrigeant son dictionnaire à enquiquinement, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
ensauver (s') [v.]
s'enfuir [CCv114]
Remarques)  :vieux mot encore attesté régionalement.
entrelardé [participe-adj. pris comme n.]
mêlé (dans lequel se sont mêlés) [R1v65]
Remarques)  : Jehan Rictus emploie ici comme nom le participe d'un vieux verbe (Oudin 1640, Le Roux 1718) qui avait pris le sens figuré "mitiger".
épatant [participe prés. employé comme adj.]
formidable [Ev209, P1v33]
Remarques)  :cet adjectif, fort en vogue au XIXe siècle (comme le verbe dont est issu le participe ;voir épater), est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
épater [v.]
étonner [R2v10]
Remarques)  :verbe fort en vogue au XIXe siècle et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
épateur, épateuse [adj. et n.] séducteur, séductrice [Ev190]
237
Remarques)  : ce dérivé du verbe épater est recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
épave [n. f.]
individu que sa vie a abîmé [P3v32]
Remarques)  :sens métaphorique courant, maintes fois attesté au XIXe siècle.

Errant [adj. employé comme n. propre]
vagabond (individu que son destin condamne à être itinérant) [MPv118] Remarques)  :cet emploi de l'adjectif comme nom est attesté avant 1903.
escaïer [n. m.]  :corruption populaire et enfantine d'escalier [Epv155].
escargot de trottoir [nom composé m.]
sergent de ville (policier) [MNv64]
Remarques)  :expression recensée dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle, Bruant) avant 1903.
esgourde [n. f.] oreille [P1v83]
Remarques)  :mot expressif recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
ess'pliquer [MNv29], esspressément [MPv74], expulser [Epv133], esster- miner [Fv15], extraire [R2v25 (voir extraire)], ess'traordinaire [Epv64], etc. : simplification pop. des préfixes latins —ex et -extra devant consonne dans expliquer, expressément, expulser, exterminer, extraire, extraordinaire.
estomac [n. m.]
courage (avec idée de force) [R2v40-41 («  l'estomac de r'subir  »), R3v141 («  l'estomac de nous défendre  »), Epv163 (avoir de l'estomac)]
Remarques)  :sens figuré maintes fois attesté dans la seconde moitié du XIXe siècle et recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
état de santé [nom composé m.]
connaître l'état de santé de qqn
bien connaître les dispositions de qqn [IPv35]
Remarques)  :expression non recensée dans les dictionnaires.
étrenner [v.]
subir des dommages (en particulier des coups) [Ev70]
Remarques)  : acception recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
étroit, étroite [adj. employé comme n.] faire son étroite
faire sa mijaurée [P1v96]
238
Remarques)  :expression recensée dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
eul ou eul' ou eul' l' (peu justifié) [article défini masculin devant consonne] [voir aussi el']  :prononciation pop. de le, liée à la suppression du e instable devant consonne [Hv31 («  eul' moud'  »), Dv160 («  eul' Luxembourg  »), Rlv9 («  eul' trimardeur  »), etc.].
eun' [article indéfini fém.]  :prononciation pop. d'une [Hv38 («  eun' popula- rité  »), Hv46 («  D'eun' magnèr'  »), Hv57 («  eun' bath chose  », etc.], légèrement différente de celle retenue dans Richepin et transcrite par ein'.
euss ou euss' [prou. pers. 3e pers. pl. m.]  :prononciation populaire d'eux [Hv57, IPv12, SMv49, SMv59, SMv127, SMv129, etc.].
eustache [n. m.]
couteau (de poche) [R3v100]
Remarques)  :dérivé du prénom d'un fabricant de couteaux de Saint-Étienne (dès 1782), ce mot est recensé dans des dict. généraux et des dict. d'argot (Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
excitatoire [adj.]
qui provoque l'excitation (sexuelle) [CCv69]
Remarques)  :dérivé savant parodique qui n'est recensé dans aucun dict. ni avant ni après 1900.
extraire [v.]
y a d' quoi se l'extraire (on trouve aussi se l'attraper) et se la mordre
il y a de quoi être étonné au point d'extravaguer dans son comportement [R2v25]
Remarques)  :expression populaire colorée qui n'est recensée ni dans les dict. généraux ni dans les dict. d'argot ni avant ni après 1897.
F —
f saut [voir faisant], f s... (terminaison verbale) [voir faire]
fabrique [n. f.]
en fabrique
en construction [MMv18]
Remarques)  :sens vieilli du nom dans cet emploi.
fabriquer [v.]
voler [Hv18]
Remarques)  :cette acception, donnée aussi par l'argot au verbe faire dont fabriquer est un substitut expressif, est recensée dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
239
fafiot [n. m. ]
en fafiot
en papier [P2v78]
Remarques)  : le nom fafiot (ou fafiot) est recensé comme substitut de papier (pour plusieurs des sens de ce dernier) dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
faire [v. ] [on trouve des formes réduites comme «  f'sais  » pour faisais, «  f'sons  »pour faisons, etc.]
1 ° se faire à
s'habituer à [Hv131, P3v57]
Remarques)  :emploi courant du verbe faire quand il est pronominal.
2° la faire à
agir ostensiblement de telle ou telle façon (parfois avec nuance de tromperie) [SMv34, MMv139, Fv65]
Remarques)  : sens familier plusieurs fois attesté au XIXe siècle et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
3° faire le (ou la) ou son (ou sa) +nom de personne ou nom qualifiant des personnes
se comporter en (ou à la manière d'une ou des) personnels) du même type [SMv69 («  le jacque  »), Dv92 («  Osais ta poire  »), Plv7 («  sa poire  »), P1v95 («  mon Sagan  » ;voir note 1 p. 106), P1v96 («  mon étroite  »), MMv79 («  le jacque  »), MPv58 («  son Espagnole  »), Epv159 («  sa poire et sa Sophie  »)]
Remarques)  :pour la plupart des expressions, voir le nom qui suit.
4° faire +noms ou infinitifs sans préposition (caca, la culbute, la danse du ventre, la frime, sa gueule, une gueule, du joli, ses magnes, de l'ceil, du pétard, le pied-de-grue, pipi, son plâtre, tarter)
Remarques)  :voir ces noms et l'infinitif tarter.
5° se faire
a) suivi d'un nom dans une expression marquée (de la bile, des cheveux, une gueule, ta tête)
Remarques)  :voir ces noms.
b) suivi d'un infinitif dans une expression marquée (crever la peau, péter, scier)
Remarques)  :voir ces verbes.
6° faire dans +nom de profession
travailler dans [SMv30]
Remarques)  :emploi régional ou familier attesté avant 1897.
7° être fait marron [voir marron]
240
8° comment que ça se fait (que...)  ? pourquoi  ? [Evl, Ev13, Ev29]
Remarques)  :tournure familière courante.
9° je te connais comme si je t'avais fait [voir connaître]
faisant [n. m.]
camarade d'école (avec idée de complicité pour de mauvais coups  ?) [Epv18] Remarques)  : ce mot, parfois donné comme distinct de faisan "escroc", est recensé avec l'acception "camarade de collège" dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
falloir [v.]
1° faut
il faut [Hv32-37 et passim]
Remarques)  : Jehan Rictus emploie rarement il faut, souvent y faut (en particulier faut y), mais plus souvent encore faut sans pronom impersonnel, comme dans les usages fam. et pop.
2° (y) faurait
(il) faudrait [R1v52, R2v35, P1v226, P3v144, MPv103 et 107] Remarques)  :corruption populaire de la forme du conditionnel présent.
falot [n. m. ]
oeil [Dv170 («  rouvrir mes falots sanglants  »)]
Remarques)  :métaphore s'appuyant sur le sens "lanterne" et qui n'est pas recensée dans les dict. ; il est probable que Jehan Rictus joue aussi sur la ressemblance avec calot "oeil (rond)", mot qui figure en revanche dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle avant 1897, puis Bruant).
fan-fan [n. m. ]
enfant [titre de F, Fvl, Fv32, etc.]
Remarques)  : mot dérivé du nom enfant par redoublement hypocoristique (marquant l'affection normalement due aux enfants)  ; Jehan Rictus joue aussi sur l'association avec fantôme (Fv48).
falzar [voir phalzar]
fanfare [n. f.] [voir à coup l'expression sale coup pour la fanfare  !]
farfouiller [v.]
fouiller en triturant ou en retournant tout [Fv34]
Remarques)  : vieux mot expressif, recensé dans Delesalle pour expliquer deux expressions formées avec ce verbe.
fauché [participe employé comme adj.]
ruiné, sans le sou [SMv73, Ev18, Ev147]
Remarques)  :métaphore recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
241

faurait, faut [voir falloir]
fauvette [n. f. ]
jeune fille (avec idée d'inconstance) [Dv98]
Remarques)  : métaphore attestée depuis longtemps, notamment dans l'expression dénicheur de fauvettes "séducteur", et qui n'est pas toujours recensée dans les dictionnaires.
feignant [adj. et n.]
paresseux [Ev205]
Remarques)  :perçu comme variante populaire de fainéant, ce mot qui a la forme du participe présent de feindre est anciennement attesté, mais encore recensé à cette époque dans des dict. d'argot (Delesalle, Vocabulaire de la langue verte d'Hector France, puis Bruant).
ferme [adv.]
fortement (intensivité devenant abondance s'agissant de boisson) [Epv131] Remarques)  : ce passage des Soliloques apporte une attestation littéraire intéressante pour cet emploi adverbial, sans doute plus ancien, en contexte de boisson.
fermer [v.]
ferme ça  !fermons ça  !fermez ça  ! (fermer ça)
tais-toi  !taisons-nous  !taisez-vous (se taire) [R2v31 («  fermons ça  »)] Remarques)  : à partir d'expressions comme fermer +noms renvoyant à la bouche, s'est formée la tournure expressive avec déictique, qui sera recensée dans Bruant (avec citation et exemple) mais reste souvent ignorée par les lexicographes.
fieu [n. m.]
fils [R3v128]
Remarques)  :forme picarde de fils plus largement répandue, parfois recensée dans des dict. (Le Roux 1786), notamment d'argot (Delesalle, Vocabulaire de la langue verte d'Hector France, puis Bruant).
fifi [n. m. ]
enfant [Fv16]
Remarques)  : ce terme d'amitié, dérivé de fils par redoublement hypocoris- tique et qui se dit à des enfants ou à des animaux (notamment oiseaux en cage), est attesté avant 1897 (E. Sue, Mystères de Paris, 1842-43).
figue [n. m.]
anus [Ev44, P1v175 («  feuille de fagne  », par association contrastive avec la pudique « feuille de vigne  »)]
Remarques)  : ce mot expressif par grossièreté, sans doute dérivé de formes comme fignon ou fignard (eux-mêmes associés à troufignon et troufignard), est recensé dans des dict. d'argot (Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite le premier passage des Soliloques.
242
t'iler I. [v.]
s'enfuir [IPv33], courir [P1v179]
Remarques)  : acceptions anciennes (style poissard en 1754) mal recensées dans des dict. d'argot filer raide "marcher très vite" dans Rigaud, filer comme un dard "fuir" dans la partie français-argot du Delesalle) avant 1897  ; Bruant donnera filer comme un dard, un pet, un zèbre "fuir".
t'iler II. [v. ]
se filer (vers)
se glisser (vers) [MNv35]
Remarques)  :emploi se rattachant au verbe filer "introduire" et à la tournure se filer "s'introduire subrepticement" (recensée dans Delesalle et dans Bruant avant 1903), même si l'on peut la rapprocher aussi des acceptions données dans l'article précédent (t'iler I.).
fini, n, i [adj. ]
complètement fini [R2v137 («  n, i, c'est ben fini  »)]
Remarques)  : Jehan Rictus renforce, en la disloquant, cette formule de renforcement alphabétique final de l'adj., bien attestée à cette époque mais rarement recensée dans les dict. jusqu'à nos jours.
fiole [n. f. ]
1° tête (figure) [IPv15, CCv110]
Remarques)  : acception métaphorique pop. recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
2° se foutre de la fiole de qqn
se moquer de qqn [Epv109]
Remarques)  : cette expression pop. courante, variante de se ficher) de la fiole de qqn (voir s.v. fiole dans Supplément de Larchey), est moins bien recensée dans des dict. d'argot que se payer la fiole de qqn.
fion [n. m. ]
coup de fion
dernier soin pour (re)donner de l'allure (à un ouvrage) [P2v20]
Remarques)  : cette expression, déjà ancienne dans le voc. de l'art et de l'artisanat et se prêtant comme dans ce passage à des élargissements à d'autres domaines, est recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
Flamboyant [participe-adj. employé comme n. m.]
soleil rougeoyant [P2v57]
Remarques)  : nom qualifiant forgé par l'auteur comme substitut de soleil couchant.
243
flan [n. m. employé dans tournure au fém.]
à la flan
sans façon [P2v56]
Remarques)  : cette acception, pas toujours distinguée de l'acception "sans préméditation, au hasard", est recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
flancher [v.]
faiblir, vaciller [Ev48, Dv136, P2v57]
Remarques)  : cette acception de ce verbe au champ sémantique large est recensée parmi d'autres dans des dict. d'argot (Rigaud, Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
flanquer [v.]
flanquer sur
frapper [Fv3 («  sur le tu-tu  » ;voir ce mot)]
Remarques)  :substitut pop. ou fam. ancien de mettre (donné dans Le Roux 1718 et repris dans Delesalle) ; si le Bruant recense cette acception, il ne signale pas cette construction.
flanquet [n. m.]
pan de chemise [R3v91]
Remarques)  :ici employé métaphoriquement, ce mot régional du Nord-Ouest («  Supplément  » du Glossaire du patois normand de Du Bois/Travers 1856), qui s'explique par le fait que le pan de chemise tombe sur les flancs, est rarement recensé dans les dict. généraux et d'argot.
(laquant [participe-adj. employé comme n. m.]
soulier [SMv93]
Remarques)  : « leurs souliers trempés bâillaient en flaquant à tous leurs pas  » (Flaubert, Champs et grèves, 1848, cit. dans le Trésor de la langue française) ;voilà qui permet de comprendre comment Jehan Rictus a formé ce nom qualifiant à partir du verbe flaquer "clapoter", tout en jouant sans doute aussi sur la paronymie avec flacon "botte, soulier" (recensé dans Delvau, Rigaud, Supplément de Larchey et Delesalle, puis dans Bruant).
flaupé [participe-adj. employé comme n.]
les p'tits flaupés
les enfants battus [Fv2, Fv83]
Remarques)  : dans les expressions nominales de la « Farandole  » qui commencent par « les p'tits  », «  p'tits  » est épithète des noms qui suivent («  Fan-fans  », « bibis  », « bonshommes  », etc.) ; quand ce sont des adj. («  fourbus  ») qui suivent ou des participes adj. («  foutus  »), il vaut donc mieux les considérer comme des noms, même si Jehan Rictus a pu jouer sur l'équivoque de la construction («  les p'tits flaupés  »  :article +adj. épithète + N vs article + N +adj. épithète). Pour flauper, voir ce verbe à l'article suivant.
flauper [v.]
battre [variante b de Hv18 (voir p. 170), P3v178]
244
Remarques)  : ce verbe pop., qui a pour variantes Hauber (Le Roux 1718), Hoper ou Hopper, est recensé sous une forme ou sous une autre dans des dict. d'argot (floppée "volée de coups" dans Larchey,Hopée "grêle de coups" dans Rigaud, Hauper et Hopper dans Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant qui cite le premier passage (des Soliloques de 1897).
flemmard [adj. employé comme n.]
[individu] sans énergie (d'où "paresseux") [Ev127]
Remarques)  :mot expressif dérivé de flemme (voir article suivant) et recensé dans des dict. d'argot (flémard dans Rigaud, Supplément de Larchey et Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
flemme [n. f.]
1° manque d'énergie (d'où "paresse") [Ev127, Ev215]
Remarques)  :nom attesté et recensé au début du XIXe avec cette acception pop. dérivée du vocabulaire médical (flemme "pituite", laquelle laisse sans énergie), reprise ensuite dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant (voir ci-dessous battre la flemme).
2° battre la flemme
fainéanter [P3v191]
Remarques)  :expression reposant sans doute au départ sur la simulation de maladie (battre "feindre") et recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
3° tirer sa flemme
fainéanter [Epv162]
Remarques)  :expression parallèle à la précédente et donnée dans Delesalle (avec citation d'un texte de Bruant), puis dans Bruant.
4° foutre la flemme
laisser sans ressort [P1v78]
Remarques)  :dans cette expression, Hemme évoque plus le découragement que la paresse.
fleur d'orange [n. f.]
perdre sa fleur d'orange [P3v134]
perdre sa virginité
Remarques)  : Jehan Rictus modifie ici l'expression fleur d'oranger, reposant sur ce symbole de virginité et recensée avec cette acception dans la partie français-argot du Delesalle.
flic [n. m.] [varianteHickdans éd. de 1897]
agent de police (sergent de ville) [Ev188, P1v43, MNv73]
Remarques)  :mot recensé sous différentes variantes (fligue à dard, Hique à dard, Hique) dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37 qui donne Higue à dard, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
245
flingot [n. m.]
1° fusil (arme) [Ev98]
Remarques)  :dans ce passage, Jehan Rictus complète par «  à persécussions  » (voir ce mot) ce nom recensé, avec cette acception dérivée de flingot "fusil de boucher", dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
2° repousser du flingot
avoir mauvaise haleine [Ev178]
Remarques)  :Delesalle, repris par Bruant, donnait l'expression repousser du fusil "avoir mauvaise haleine" qui, tout en jouant sur les doubles sens, emploie le verbe avec un sens métonymique ("puer"  ;voir repousser) et le nom fusil avec le sens métaphorique "gosier, bouche (d'où "ventre")" (voir fusil) ; le remplacement de fusil par flingot dans cette expression, non relevé dans les dict., est attesté ici pour la première fois.
flotte I. [n. f. ]
eau [MNv38]
Remarques)  :mot fin-de-siècle recensé dans des dict. d'argot (Delesalle avec le sens "bain", Dictionnaire français-argot de Lermina & Lévêque, Diction- naired'argot de Léon Rossignol en 1901, Bruant) avant 1903.
flotte lI. [n. f. ]
des flottes
des foules [Epv135, MMv21]
Remarques)  : le sens "bande, société nombreuse" est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant  ;Delesalle, après Littré, le fait remonter au vieux français (flote "troupe, multitude" est bien attesté en ancien français) et c'est ce sens ancien, conservé dans l'usage populaire, qui apparaît ici dans les Soliloques.
foid [n. m.]  : déformation phonétique pop. et enfantine de froid [R2v216, MPv66].
fois [n. f. ]
des fois
1° parfois [IPv15 ; Rlvl, P1v200, MNv45 et v53, MNv76 («  des fois que » _ "parfois quand"), MMv119]
Remarques)  : loc. adv. pop.
2° des fois  !
par hasard  ! [Dv37, Epv2 («  non mais, des fois  !  »)] Remarques)  : loc. interjective pop.
3° des fois que
au cas où [R3v142]
Remarques)  : loc. conj. pop.
246
4° si des fois
au cas où [R1v91]
Remarques)  : loc. conj. pop.
fond de cale (à) [loc.]
être à fond de cale
être malheureux (avec nuances de ruine et/ou de désespoir) [Dv28] Remarques)  : cette expression métaphorique familière empruntée au voc. maritime est recensée dans des dictionnaires d'argot avant 1897, récemment dans Rigaud («  ne plus avoir le sou  ») et dans Delesalle (même sens), ensuite dans Lermina & Lévêque («  abattu  ») et dans Bruant (malheureux et ruiné).
fortifs [n. f. pl.]
fortifications (de Paris) [CCv12]
Remarques)  :dérivé par apocope et sélection de finale expressive —if, ce mot est recensé, souvent avec majuscule initiale, dans des dict. d'argot avant 1900 (récemment dans Richepin et Delesalle), puis dans Bruant.
fouatter [v.]  :prononciation populaire de fouetter (voir article suivant).
fouetter [v.] [sous la forme fouatter dans les Soliloques]
puer [MMv91 ]
Remarques)  :sens figuré recensé dans des dict. d'argot (Rigaud qui donne fouatter, Delesalle, Bruant) avant 1903.
fou-fou [adj. employé comme n.]
tout fou [Fv84]
Remarques)  :attestation littéraire ignorée des dict. pour ce mot dérivé de fou par redoublement hypocoristique (à valeur affective) et disparu, avec la « Farandole  », des éditions des Soliloques à partir de 1903.
fout', foute [variantes de l'infinitif foutre (voir ce mot)]
fout-la-faim [nom composé]
misérable [Ev2, R2v259]
Remarques)  : création expressive qui, comme fout-la-dèche, sera recensée dans Bruant.
foutre ou foutr' ou foute ou fout' [v.]
I. 1° faire [R2v201 («  quoi qu' tu vas foutre  ?  »)]
Remarques)  :cette acception de foutre, sans doute ancienne mais mal décrite dans les dict., est recensée dans Rigaud à propos de l'expression n'en pas foutre un coup, puis dans la partie français-argot du Delesalle comme correspondant argotique de faire, ce que reprendra le Bruant.
2° ne pas en foutre une datte
ne rien faire [SMv6]
Remarques)  :pour foutre, voir en I. 1 ° ;pour datte, voir ce mot.
247
II. 1 ° a) foutre qqn ou gqch +nom renvoyant à un lieu
mettre [R2v102 («  dans le même pagnier  »)], jeter [Epv141 («  sur le trot- toir  »)]
Remarques)  :les emplois de foutre comme substitut de mettre sont attestés à partir de la fin du XVIIIe siècle, mais sont souvent mal décrits dans les dict. ; beaucoup sont cependant repérables dans Delesalle et dans Bruant.
b) se foutre +nom renvoyant à un lieu se jeter [SMv137 («  à la Seine  »)]
Remarques)  :voir II. 1°.
2° foutre +nom renvoyant aux prisons
mettre en prison, emprisonner [IPv36 («  au clou  » ; voir clou), MPv98 («  foute en prison  »)]
Remarques)  :voir II. 1°.
3° foutre +nom renvoyant à un objet vestimentaire mettre tel ou tel objet vestimentaire (à quelqu'un) [P1v69] Remarques)  :voir II. 1°.
4° se foutre +expression évoquant le fait de se nourrir (ou de jeûner)
avaler [R2v125 («  dans le clapet  »), P3v20 («  à m' fout' dessous  » =sous la dent), Epv63 («  des bitures  », voir ce mot)]
Remarques)  :voir II. 1°.
5° a) foutre +nom renvoyant à des coups infliger [R1v81 («  d' nous fout' des coups  »)] Remarques)  :voir II. 1°.
b) se foutre +nom renvoyant à des coups échanger des coups [P3v110 («  des torgnioles  »)] Remarques)  :voir II. 1°.
c) foutre gqch sur la gueule à qqn ou à gqch frapper avec gqch sur qqn ou gqch [R3v73] Remarques)  :voir II. 1°.
6° a) j' vas vous en foutre, de (groupe du nom)
(formule exclamative antiphrastique d'opposition à qqn) [P2v45 («  des romances  »)]
Remarques)  :attestation littéraire qui précède celles fournies dans le Trésor de la langue française pour cet emploi souvent mal décrit dans les dict., voire oublié.
b) j' t'en fous
(formule exclamative de satiété) [P1v204 (avec jeu sur la connotation sexuelle du verbe foutre)] (ou formule antiphrastique de déconvenue) [SMv90, Ev102] Remarques)  : attestation littéraire intéressante pour cette tournure bien traduite dans le Trésor de la langue française (« penses-tu  »), mais assez mal
248
décrite  :elle ne se limite pas à être une réponse à des questions rhétoriques pour détromper le destinataire ; le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France la relève avec citation de vers de Bruant à l'article fiche (va te faire).
7° foutre +nom renvoyant à un sentiment
communiquer +sentiment [P1v78 (foutre la flemme "laisser sans ressort"  ; voir aussi femme), MNv59 («  trouille  »)]
Remarques)  : cet emploi courant de foutre comme substitut expressif de donner est mal décrit dans les dict.
8° foutre la paix [voir paix] 9° foutre le camp [voir camp]
III. se foutre à
se mettre à, commencer à [Hv134 («  j' m'en vas m' foute à  »), CCv106] Remarques)  :cet emploi courant de se foutre à comme substitut de se mettre à est sans doute assez ancien (le Trésor de la langue française donne une citation de 1883), mais mal décrit dans les dict.
IV. 1 ° se foutre de
se moquer de [Hv76]
Remarques)  :construction et acception anciennes (attestées au XVIIe siècle) encore recensées dans des dict. d'argot (Dictionnaire de la langue verte de Delvau en 1866, Rigaud qui donne se foutre du peuple, Delesalle qui donne se foutre du monde) avant 1897, puis dans Bruant.
2° a) se foutre de
n'avoir rien à faire de [Ev73, Dv12, R1v76, P1v223, Epv109, Fv77-79] Remarques)  :construction et acception anciennes (attestées au XVIIe siècle) ne se distinguant pas toujours nettement de celles de l'article précédent, mais, comme elles, encore recensées dans Bruant.
b) s'en foutre (de) [y compris je m'en fous]
n'en avoir rien à faire (de) [Hv150 («  j' m'en fous  »), Ev89, R2v211 («  j' m'en fous  »), R3v95, P1v121 («  j' m'en fous  »), SCAv47 («  fous-t'en  »), Epv147, Fv66 («  on s'en j' m'en fous  »  »)]
Remarques)  :cet emploi, qui se distingue plus fortement du précédent quand le pronom en n'a pas d'antécédent évident et qui semble moins ancien (attesté au XVIIIe siècle), n'est pas relevé à part des précédents dans les dict. d'argot avant 1897, mais le Bruant donnera je m'en fous comme correspondant argotique de ça m'est égal (s. v. égal).
c) à la j' m'en fous
n'importe comment [Ev32]
Remarques)  : attestation littéraire intéressante pour une tournure générale- ment absente des dict. ; le Bruant recensera à la va te faire foutre.
249
foutu [participe employé comme adj.]
I. 1 ° mal foutu
mal fait [P2v22]
Remarques)  : attestation littéraire intéressante pour cette application à des véhicules de la locution verbale mal foutu "mauvais", recensée dans des dict. d'argot (Delvau 1866, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, mais pas dans un contexte semblable à celui de ce passage des Soliloques.
2° employé comme n. : moribond [Fv2]
Remarques)  : Jehan Rictus transforme en nom (voir flaupé pour les emplois nominaux de ce type dans la « Farandole  ») cet adj. attesté depuis longtemps dans cette acception (que prend également fichu) et parfois recensé dans des dict. d'argot (partie français-argot du Delesalle pour moribond, Vocabulaire de la langue verte d'Hector France, puis Bruant).
II. épithète devant nom  :foutu + N
(formule exclamative se rapprochant des jurons avec foutre  !) [Dv24] Remarques)  :tournure déjà ancienne (attestation de 1789 dans le Trésor de la langue française), souvent absente des dict., mais recensée dans Delvau 1866 (foutue besogne « triste besogne  » et foutue canaille « canaille parfaite  »).
frais [adj.]
être frais
être mal en point [P1v89]
Remarques)  : Jehan Rictus revigore cet emploi par antiphrase, recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, en jouant aussi sur plusieurs sens de l'adj. (nouveauté du printemps, mais saison encore froide).
frangin [n. m.] [le fém. frangine n'est pas employé dans les Soliloques]
frère [dans le recueil, toujours au sens large  : Ev72, SMv60, P3v155, R1v24, R2v116, R3v104, MPv120]
Remarques)  : Jehan Rictus emploie toujours au sens large de fraternité chrétienne ou républicaine, la plupart du temps pour dénoncer l'absence de cette dernière, ce substitut de frère recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
frichti [n. m. ]
ragoût [MPv48]
Remarques)  : mot expressif recensé dans des dict. d'argot avec des acceptions variables  : "régal" dans Larchey, "repas de famille" et "ragoût de ménage" dans Rigaud (qui conteste le sens "grand dîner"), "régal" et "fricot" dans Delesalle, "fricot" dans Bruant.
frime [n. f.]
faire la frime de
faire mine de [MPvl l]
250
Remarques)  : ce nom pop. d'ancien français (frrme "semblant") recensé sous la forme frime dans Le Roux 1718 (avec citation de Molière) est recensé dans des dict. d'argot avec son acception dérivée ("visage") mais aussi, notamment dans l'expression pour la frime "en apparence", avec son sens premier ("simulation", donné dans Delesalle, puis dans Bruant), qui peut s'affaiblir, comme c'est le cas ici, dans l'expression faire la frime de "vouloir (ou commencer) à se comporter (se montrer) de telle ou telle manière".
frimer [v.]
1° frimer le (ou la) + N (associé à une manière d'être)
simuler, jouer au (ou à la) [SMv98 («  le marlou  » ;voir aussi ce mot)] Remarques)  : verbe recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques ; à la suite de quoi, Esnault 1965 relève « frimer le marlou, ne jouir qu'un jour des avantages d'un amant de coeur (pop., 1896)  » avec date correspondant à celle que ce lexicographe a retenue pour les Soliloques (non reprise dans le Trésor de la langue française qui cite Esnault, mais pas Jehan Rictus).
2° la frimer à (ou au) + N (associé à une manière d'être)
simuler, jouer au (ou à la) [MMv42 («  au vieux château  »)]
Remarques)  : la construction indirecte avec nom, généralement ignorée des dict., est ici renforcée par le pronom la sans antécédent, tel qu'on le trouve aussi dans l'expression populaire la jouer à "jouer la comédie de"  ; générale- ment absente aussi des dict., la construction renforcée vise ici, à travers leurs maisons, le comportement des riches, souvent parvenus.
fringué [participe employé comme adj.]
habillé, vêtu [SMv73 («  mal fringué  »), P1v100 («  mal fringué  »), CCv37 («  fringué à neuf  »)]
Remarques)  : le verbe et l'adjectif sont recensés dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897 ; le Bruant ne recensera que le verbe, mais l'adjectif y apparaît ailleurs dans des exemples ou des citations, notamment pour trèfle et turquois avec citations extraites des Soliloques (premier et deuxième passages).
frio [n. m. ]
froid [R3v2 (remplace frisquet à partir de l'éd. de 1903), variante f de CCv39- 42 en 1900 (voir p. 185)]
Remarques)  :mot fin-de-siècle populaire de provenance sans doute régionale, mal compris par Delesalle qui donne friod et en fait un anagramme de froid, mais dûment recensé dans Bruant (avec citation de l'une de ses oeuvres, «  V'là le frio  », parue dans la Lanterne de Bruant début 1899).
frisquet [adj. employé comme n. m.]
petit froid vif et piquant [variante a de R3v2 en 1897 (voir p. 180)] Remarques)  : à partir de cet adj. bien attesté dans l'usage populaire au XIXe siècle, on a pu former ce nom, parfois recensé dans des dict. d'argot de cette époque (Delesalle, Vocabulaire de la langue verte d'Hector France, puis Bruant, qui cite ce passage des éd. de 1897 des Soliloques avant que Jehan
251
Rictus ne supprime cette occurrence en modifiant le vers à partir de l'éd. de
1903).
frusqué [participe employé comme adj.]
mal frusqué
mal habillé [P3v99]
Remarques)  : le verbe frusquer est recensé dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, Delesalle) peu avant 1897, puis dans Bruant ; quant à l'emploi du participe comme adjectif, il est donné à cette époque dans le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France avec citation de vers de Bruant, puis repris dans le dict. de ce dernier avec une autre citation de Séverine.
f saut [voir faisant] ; f s +terminaison verbale [voir faire]
fuit-de-partout [n. composé]
[individu] incontinent [Fv14]
Remarques)  : l'association avec pisse-au pieu (voir ce mot) de ce nom composé forgé par l'auteur oriente vers l'interprétation retenue ci-dessus.
fumelle [n. f.]
femelle [P1v205]
Remarques)  :mot ancien (Marot, 1530) conservé dans des usages régionaux ; il est recensé dans des dict. d'argot (Vocabulaire de la langue verte d'Hector France) quand il est appliqué à des femmes, ce qui n'est pas le cas ici.
Furtif [adj. employé comme n. propre m.]
Crépuscule (du soir) [P2v1]
Remarques)  : interprétation donnée dans le quatrain pour cet adjectif substantivé en nom propre qualifiant par Jehan Rictus.
fusil [n. m.]
1 ° se mettre ggch dans le fusil manger [Ev55]
Remarques)  :voir 2°.
2° ne rien avoir dans le fusil
n'avoir rien mangé [P1v18]
Remarques)  : l'acception métaphorique "gosier" de fusil («  les fusils se chargeaient par la gueule  », in Trésor de la langue française) est recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
—G—

gaffer [v.]
surveiller [Epv22]
Remarques)  : verbe dérivé de gaffe "guet" et recensé sous différentes variantes (on trouve aussi gafer, gâfer, gâffer, gaffrer) dans des dict. d'argot
252
(Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
galette [n. f. ]
argent [Ev27, P1v121, Epv13]
Remarques)  : substitut expressif recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
galipette [n. f.]
faire des galipettes
se livrer à des ébats amoureux [MMv70]
Remarques)  : le sens "cabriole" de ce mot sans doute régional est recensé dans Delesalle, puis dans Bruant avant 1903, mais sans allusion à l'application aux ébats amoureux, notée fam. dans le Trésor de la langue française, qui ne fournit pour elle ni citation ni datation.
gambiller [v.]
danser [Hv32]
Remarques)  :verbe ancien dans cette acception (1623 selon Esnault 1965 ; Le Roux 1718), recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
garce de... [n. f. employé en construction dite a qualitative  »]
salope, putain [P3v13 («  garce de République  »)]
Remarques)  : ce nom ancien, ayant pris depuis longtemps une valeur péjora- tive (Oudin 1640, Le Roux 1718) et encore recensé pour cette raison dans des dict. d'argot (partie français-argot du Delesalle, puis Bruant), est ici employé comme terme servant à qualifier défavorablement son complément ; ce type d'emploi est relevé, après Littré 1865, dans le Trésor de la langue française qui donne une citation de Courteline (1888 : « garce de pluie  »), mais, dans ce passage des Soliloques, garce joue en outre un rôle de personnification injurieuse de la République.
gas [n. m. ]
1° homme [Hv112, SMv2 et v5, SMv45, Ev2, Ev121, Dv150, etc.] Remarques)  : variante graphique de gars pris dans une acception large d'individu masculin (sans valeur négative ni positive intrinsèque), ce mot ancien souvent employé dans les Soliloques (une vingtaine de fois) est recensé dans Delesalle, puis dans Bruant, qui cite le sixième passage du recueil.
2° gas de la haute [voir haute (la)]
gavé [participe-adj. employé comme n.]
individu des classes aisées (repu) [MMv52]
Remarques)  :cet emploi nominal s'inscrivant dans le vocabulaire politique progressiste est recensé dans le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France et dans Bruant avant 1903.
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gaver [v.]
nourrir à satiété [R1v72]
Remarques)  :cet élargissement par analogie (ici aux « ouailles  » du Christ  !), bien attesté au XIXe siècle, sera recensé dans Bruant avec citation de ce passage des Soliloques.
gaviot [n. m.]
gosier [P3v66]
Remarques)  : mot ancien pop. conservé dans certaines régions et recensé dans des dict. d'argot (Delvau 1866, Rigaud, Richepin, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
genss' [n. m. pl.]  :transcription graphique de la prononciation pop. de gens [SMv30, R2v221, P1v42, P1v161] (Jehan Rictus emploie aussi « gens  »).
gerce [n. f.]
femme [Ev173]
Remarques)  :mot régional [Esnault 1965 : « brebis qui n'a pas encore porté (Bayeux, Granville, Laval)] dont l'acception dérivée est recensée dans des dict. d'argot (gerce "maîtresse" dans Delvau 1866, gerce "maîtresse" dans Rigaud, "fille" dans Supplément de Larchey, "garce" et "maîtresse" dans Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage pour illustrer l'emploi du mot carme.
gésier [n. m.]
estomac d'une personne [Epv97]
Remarques)  :acception dérivée pop. ou fam., maintes fois attestée au XIXe siècle et parfois recensée dans des dict. d'argot (termina & Lévêque, puis Bruant).
gibier [n. m.]
1 ° gibier de joie
femme que l'on cherche à conquérir [P 1 v150]
Remarques)  :avec cette expression, Jehan Rictus revigore par des allusions sous-jacentes à gibier de choix et à fille de joie l'acception "proie sexuelle", attestée antérieurement avec valeur péjorative pour le nom ("putain" dans Oudin 1640 et Le Roux 1718).
2° gibier de Poissy
individu destiné à la prison de Poissy [Ev207 (voir note 3 p. 60)]
Remarques)  : outre gibier de potence attesté depuis longtemps (1668 dans L'Avare de Molière), Delesalle recense gibier de Cayenne.
gicler [v.]
jaillir en éclaboussant [Fv72]
Remarques)  : verbe expressif ancien conservé dans certaines régions et considéré comme pop. au XIXe siècle ;pour cette raison, ce sens, appliqué ici
254
aux enfants maltraités, est recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
gifle [n. f.]  : corruption populaire de gifle [R2v260, Fv64], recensée dans Delesalle avant 1897, puis dans Bruant.
gigolette [n. f.]
grisette (souvent avec idée de fille facile) [P3v96]
Remarques)  :mot recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
girie [n. f. ]
jérémiade [Dv5]
Remarques)  : Jehan Rictus ne semble pas retenir ici la composante d'hypo- crisie liée à cette acception attestée depuis longtemps dans l'usage populaire (d'Hautel 1807) pour ce mot parfois recensé dans des dict. d'argot, mais toujours au pluriel  :Rigaud donne giries "manières", à quoi Delesalle ajoute "jérémiades, doléances hypocrites".
girond, gironde [adj.]
joli, jolie [Dv145, variante c de CCv90 éd. de 1900 (voir p. 186), MPv75] Remarques)  :adjectif attesté surtout au fém. et souvent recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
Glorieux [adj. employé comme n. m.]
Soleil [P1v85]
Remarques)  :nom qualifiant forgé par Jehan Rictus.
gn'a [présentatif (avec diverses formes conjuguées de l'élément verbal avoir)] [voir aussi gn'en a, gn'y a, y a et y gn'a]
1° a) gn'a
(il) y a [Hv41 («  gn'a du bon  »), Hv81 («  gn'a z'un troupeau  »), Hv116 («  gn'a des moyens  »), Hv117 («  gn'a trop longtemps que  »), etc.] Remarques)  : Jehan Rictus transcrit souvent ainsi, pour le présentatif il y a, la prononciation populaire qui résulte soit d'une déformation phonétique antérieure à la suppression de l'élément pronominal il («  quoi qu'i' n'y a » est une forme connue) soit d'une adjonction postérieure à la suppression de l'élément pronominal (voir « avec  » > «  n'avec  » à l'article n'), sans négliger l'influence possible du premier élément de la négation n' (voir 1° b).
b) gn'a pas (ou autre élément inclus dans la négation)
(il n')y a pas (ou autre élément) [IPv60 («  Gn'a rien à fair', gn'a qu'à pleurer  »), Ev213 («  si gn'a pas moyen  »), Dv158 («  Gn'aura qu'Ell'  »), etc.] Remarques)  :voir 1° a), mais en notant que, cette fois, le premier élément n' de la négation suffit à expliquer la présence du trait de nasalité dans la transcription par gn (avec palatalisation).
255
2° gn'a de quoi (gn'a pas de quoi) +infinitif
il y a des raisons (il n'y a pas de raisons) pour +infinitif [Hv108 («  gn'a pas d' quoi faire la dans' du ventre  »), Hv123 («  gn'a d' quoi claquer  »), IPvl («  gn'a d' quoi rire  »), etc.]
Remarques)  : voiry a de quoi à y a.
3° gn'a pas [formule en prop. indépendante] [voir aussi y a pas à y a] il n'y a rien (d'autre) à faire (ou à dire) [IPv13, Ev65]
Remarques)  : à partir de tournures comme (il n ~y a pas à +infinitif (dire, s ÿ méprendre, tortiller, etc.) ou (il n ~y a pas de +nom (doute, échappatoire, erreur, etc.) ou (il n ~y a pas + N ou GN (le choix, moyen, etc.), s'est développée dans les usages pop. et fam. cette formule réduite qui exprime l'absence d'issue ou de solution alternative et qui est rarement décrite dans les dictionnaires.
gn'en a [présentatif (avec formes conjuguées de l'élément verbal avoir)] 1° a) gn' en a
(il) y en a [SMv22 («  Gn'en a déjà qu' ont leur muffée  »), Ev4 («  Gn'en a pus d'un »  ;comprendre « plus d'un  »), Ev42 («  Gn'en a qu'espèr'nt  »), etc.] Remarques)  :pour gn', voir gn'a, 1° a)  ;quant au pronom en, dans tous les passages des Soliloques où il se greffe au présentatif (une douzaine), il sert à découper une partie d'un ensemble ou d'un tout assez bien délimité par le contexte.
b) gn'en a pas (ou autre particule incluse dans la négation)
(il) n'y en a pas (ou autre particule) [Hv99 («  gn'en aurait pus  »), R2v146 («  Gn'en a pas d' pareil  »)]
Remarques)  : pour gn', voir gn'a, 1° b)  ; pour en (trois occurrences en tournure négative, dont celle dans l'expression suivante), voir 1° a) ci-dessus.
2° quand gn'en a pus, gn'en a encore
quand il n'y en a plus, il y en a encore [SMv53 («  Quand gn'en a pus... gn'en a encore  »)]
Remarques)  :formule fam. courante, mal recensée dans les dict. et dont ce passage des Soliloques fournit une attestation littéraire intéressante.
gniasse (mon, ton, son) [loc. n. (substitut de pronoms personnels)]
son gniasse
il, lui [Ev36]
Remarques)  :composé d'un adjectif possessif et d'un nom comme d'autres substituts de même type (mon guère, mon orgue, etc.), ce substitut est recensé dans des dict. d'argot (Rigaud qui donne nias, Richepin, Supplément de Larchey qui donne niasse, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
gnognotte [n. f.]
(c )est de la gnognotte
c'est de peu d'intérêt [Dv68]
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Remarques)  : ce nom à morphologie expressive, bien attesté au XIXe siècle et la plupart du temps dans cette tournure, est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
gnon [n. m.]
coup, meurtrissure [P1v163]
Remarques)  :mot déjà ancien (XVIIe siècle), recensé dans des dict. d'argot (Delvau 1866, Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
gn'y a [présentatif (avec formes conjuguées de l'élément verbal avoir)] [voir aussi gn'a, y a et y gn'a]
a) gn ÿ a
(il) y a [CCv15 («  Gn'y avait eun' tablée  »), MMv53 («  Doit gn'y avoir  »)] Remarques)  :voir gn'a, 1° a)  ; la conservation orthographique de l'élément adverbial y ne répond pas à un besoin métrique, mais renforce la prononciation populaire dite « mouillée  ».
b) gn ÿ a pas
(il n')y a pas [Hv77 («  gn'y a pas qu' lui  »), CCv109 («  Gn'y a pas d' pet qu'y vienn'nt  »)]
Remarques)  :voir gn'a, 1° b).
gober [v.]
1° aimer [Dv89 («  on n' te gob'  »), R1v60 («  qu'était gobé par les femmes  »)]
Remarques)  : sens métaphorique recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
2° se gober dans
se plaire dans [P1v210]
Remarques)  :tournure un peu artificielle qui mêle gober "aimer" et se gober "se montrer satisfait, se trouver bien".
godillot [n. m.]
soulier en mauvais état [P1v32]
Remarques)  : antonomase faite à partir du nom propre d'un fabricant de brodequins militaires entre 1816 et 1893 (selon Esnault) et recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
goguette [n. f.]
être en goguette
être en joie, en quête de plaisir
Remarques)  : expression ancienne appliquée ici, par métonymie, aux «  sorlots  » du Pauvre, émoustillé par le printemps.
goigt [n. m.]  :prononciation pop. palatalisée de doigt [Epv36].
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goncier [n. m.]
individu (mâle) [Dv149, variante a de P3v120 (voir p. 184)]
Remarques)  : ce dérivé de gonce (ou gonze) "homme" est recensé dans des dict. d'argot (Richepin, Supplément de Larchey qui donne gonzier, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
gondoler (se) [v.]
se tordre [R2v272]
Remarques)  : on peut penser que, dans ce passage des Soliloques, le Pauvre se moque du Revenant en ricanant, ce qui le fait se tordre et se dandiner ; le sens métonymique "se tordre de rire" est recensé dans des dict. d'argot (Delesalle après Fustier 1889 dans Supplément au Dictionnaire de la langue verte de Delvau) avant 1897, puis dans Bruant.
gonzesse [n. f.]
femme [SMv82, Dv93, P1v149]
Remarques)  : ce dérivé féminin de gonze (ou gonce) "individu" est recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Riche- pin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
gosse [n.]
enfant [Dv109, Fv75]
Remarques)  : mot pop. attesté depuis fin XVIIIe — déb. XIXe siècles (notamment dans d'Hautel 1807-1808) et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite le premier passage des Soliloques.
gothon [n. f.]
fille des rues (prostituée) [SMv38]
Remarques)  : ce dérivé de margoton (diminutif de Margot, lui-même dimi- nutif de Marguerite) par aphérèse, qui est attesté depuis longtemps sous la forme goton (Richelet, 1680) et qui a pris, comme Margot, le sens de "fille de ferme" et de "fille facile", est recensé avec cette acception dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud dans l'article goteur, Delesalle, puis Bruant).
goualant [participe-adj. pris comme n. m.]
chanteur [Dv131]
Remarques)  : à partir du verbe goualer "chanter", recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, Jehan Rictus forge un dérivé plus expressif que goualeur / goualeuse, ce dernier se trouvant souvent lui-même dans les dict. d'argot.
gouapeur [n.]
vaurien (souvent avec idées de vagabondage, de débauche et/ou de fainéan- tise) [R2v22]
Remarques)  : ce dérivé de goiper (ou gouaper) "être sans gîte" est recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37 qui donne gouêpeur "vagabond, vaurien", Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
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goujat [n. m.]
individu grossier [Dv107, CCv89]
Remarques)  : à partir du sens de départ ("valet d'armée"), s'est développée cette acception péjorative attestée au XVIIIe siècle (Le Roux 1718) et encore recensée dans des dict. d'argot de l'époque des Soliloques (Delesalle, Vocabulaire de la langue verte d'Hector France, puis Bruant).
gourer (se) [v.]
se garer de, se protéger de [CCvS]
Remarques)  : à partir du sens "tromper" de ce verbe bien attesté depuis le moyen français se serait développé d'abord un sens dérivé "se méfier" (recensé dans Bruant en 1901), qui aurait lui-même donné naissance à deux autres acceptions, l'une "se caner, se redresser" recensée dans Richepin (1881) et Delesalle (1896), l'autre "se garer de", décrite dans Bruant qui cite ce passage des Doléances de 1900, repris dans l'éd. de 1903 des Soliloques.
graine [n. f.]
graine de +groupe du nom renvoyant à ce à quoi qqn est destiné [MMv114 («  graine de faits divers  »)]
(formule péjorative ayant une valeur plus évolutive que espèce de) Remarques)  : expression forgée par l'auteur à partir d'autres expressions figurées, les unes anciennes comme mauvaise graine (Furetière 1690), les autres plus récentes comme graine de potence (donnée dans le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France).
Grandmachin [n. pr. m.]
(probable surnom générique péjoratif de tout dignitaire) [R1v27]
Remarques)  : l'emploi du nom machin, précédé d'une majuscule, pour désigner un individu sans donner son nom est bien attesté au XIXe siècle et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle)  ; à partir de là, on a pu former, pour désigner tout dignitaire sans le nommer, le composé Grandmachin, absent des dict. et dont ce passage des Soliloques fournit une attestation littéraire intéressante.
grapeau [n. m.]  :prononciation populaire et enfantine palatalisée de drapeau [Epv9, Epv148, Fv24].
gratin [n. m.]
vieux gratin
vieil individu décrépit (vieille croûte)  ? [Dv153]
Remarques)  :plutôt que le sens fig. à la mode à cette époque ("élite de la société"), recensé dans des dict. d'argot (Delesalle, puis Bruant), mais ne s'appliquant pas à tel ou tel individu et s'employant rarement au pluriel, il faudrait voir ici, même si l'auteur joue peut-être sur l'équivoque avec le sens précédent, une association entre croûte et gratin, tous deux pris dans un sens figuré s'appliquant à des personnes masquant mal leur décrépitude, mais sans négliger leur nuance picturale commune (croûte et gratin des... vieux
259
tableaux  !) amenée par le nom chiqué "faux-semblant" et sa base chic "habileté manuelle en dessin".
gratter
se gratter les flancs
ne rien avoir [Epv65]
Remarques)  :Jehan Rictus renouvelle, en l'amplifiant, l'expression pop. se gratter (synonyme de se fouiller ou de se brosser), elle-même non recensée dans les dict. d'argot avant 1897, mais qui le sera dans Bruant.
grelotteux [n.]
individu qui grelotte de froid [Dv42]
Remarques)  : en employant ce dérivé que l'on trouve à la même époque dans le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France avec le sens "misérable", Jehan Rictus joue peut-être ici, par contraste, avec grelotteux "jeune élégant ridicule", recensé dans plusieurs dict. d'argot.
grimpant [participe-adj. employé comme n. m.]
pantalon [Dv33]
Remarques)  :nom qualifiant recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
g~PPe [n f ]
prendre en grippe qqn
éprouver de l'aversion pour qqn [IPv12]
Remarques)  :expression familière ancienne (XVIIIe siècle).
groïn [voir grouin]
grouin [n. m.][variante graphique de groin]
1° visage (dans sa partie inférieure expressive) [CCv20]
Remarques)  : cet emploi figuré ancien, souvent péjoratif (Oudin 1640) en raison de son transfert des suidés (porcs,...) et autres animaux aux êtres humains, est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
2° ne savoir où donner du groïn
ne pas savoir où chercher [Dv80]
Remarques)  : ce passage des Soliloques fournit une attestation littéraire intéressante pour cet emploi figuré qui joue sur l'image des porcs fouissant avec leur museau et qui revigore l'expression ne savoir où donner de la tête.
grue [n. f.]
1° prostituée [R2v30]
Remarques)  :plutôt que des sens plus larges comme "femme aux moeurs légères" et même "femme (avec valeur péjorative)", le contexte du pavé incite à voir ici l'acception plus restreinte retenue dans des dict. d'argot de l'époque (Delesalle, Vocabulaire de la langue verte d'Hector France, puis Bruant).
260
2° faire le pied de grue [voir pied]
gueltre [n. f.]
bénéfice (remise, prime) sur vente d'articles [SMv49]
Remarques)  :formé par emprunt à l'allemand Geld "argent", le mot guelte parfois gueltre) est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
guerlotter [v.]  :prononciation pop. de grelotter avec métathèse [R2v50].
gueulard [adj.]
braillard (qui parle haut et fort, qui crie) [Ev92]
Remarques)  : acception déjà ancienne dans l'usage pop. (XVIIe siècle), rarement recensée dans les dict. d'argot (Larchey).
gueule [n. f.]
I. 1° a) bouche [SMv91, MPv117, Epv116]
Remarques)  : le sens associé aux animaux (MMv44 parle de «  gargouill's à gueul's de chien  ») a depuis très longtemps été appliqué à des êtres humains, ce qui est encore recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
b) gueule en tirelire [voir tirelire]
2° gueule d'alligator
ouverture béante [P1v74]
Remarques)  :métaphore très précise (les dents de l'animal figurant les restes des liens de couture des souliers), qui n'a pas à être lexicographiée.
3° gueule de l'enfer [MMv95]
ouverture (bouche) de l'enfer
Remarques)  : cette application très ancienne du mot à des représentations allégoriques est trop banale pour être relevée dans les dict. d'argot.
II. 1° figure, visage [R1v95 («  de Désolé  »), R2v278 («  si retournée  »), P3v33 («  flétrie  »), MNv83 (« pâle  »)]
Remarques)  :cet élargissement ancien (attesté au XVIIe siècle, par exemple dans gueule enfarinée) de la bouche au visage et aux expressions qu'il prend est recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
2° petite gueule
visage mignon [CCv32]
Remarques)  :emploi hypocoristique ancien de l'adj. petit, fréquent avec ce nom.
3° expressions diverses du visage
a) gueule de cochon
visage mauvais [CCv100 («  de cochon malhonnête  »)]
261
Remarques)  : Jehan Rictus part de l'expression ancienne tête de cochon "mauvais caractère", mais la revigore en substituant gueule à tête, ce qui était peut-être déjà dans l'usage, mais surtout en ajoutant l'épithète « malhonnête » à cochon.
b) faire sa gueule
faire la moue [Dv86]
Remarques)  : expression pop. recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
c) se faire une gueule
se regarder les uns les autres en manifestant son ressentiment [Epv98] Remarques)  : variante de faire sa gueule avec article indéfini à valeur intensive et construction pronominale amenée par la situation, mais jouant peut-être aussi par antiphrase sur la valeur de composition du visage (maquillage, masque aux sens propre et figuré) de l'expression se faire une gueule.
d) gueule tirée
tête fatiguée [MNv24]
Remarques)  : on pense aux traits tirés du visage, mais aussi aux expressions comme tirer une gueule "avoir une tête déconfite", du reste absentes de la plupart des dict.
4° a) tête [SMv15 («  penchée  »), P1v127 («  su' la gueule  »)] Remarques)  :l'élargissement du visage à tout le devant de la tête ou à la tête, notamment vue de face, est courant.
b) foutre ggch sur la gueule à qqn [voir foutre, II. 5° c)]
gueuler [v.]
brailler, crier [SMv21, P1v52 (association avec putois), P1v187 (il s'agit de chiens), CCv58 (c'est-à-dire ici « chanter àtue-tête  »), CCv106, Epv89 («  en choeur  »), Epv146]
Remarques)  : verbe expressif ancien, appliqué depuis longtemps aux vociférations des humains dans les usages pop. et fam., parfois recensé dans des dict. d'argot (Vocabulaire de la langue verte d'Hector France, Dictionnaire thématique de Lermina & Lévêque).
gueuleton [n. m.]
festin [CCv18, SCAv10, Epv12, Epv130]
Remarques)  :mot expressif fam. attesté au XVIIIe siècle et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
gueulette [n. f.]
petite gueule mignonne [SMv106]
Remarques)  : attestation littéraire intéressante pour le sens hypocoristique (chargé d'affectivité) de ce dérivé, en outre appliqué ici à des seins que Jehan Rictus imagine avenants.
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guieu ou Guieu [n. m.]
I. 1° dieu ou Dieu [R2v5 («  un Dieu  »), R2v260 («  un Dieu  »), P3v1, v69, v105, v145, v161, v205 («  mon Dieu  », en prière)]
Remarques)  :palatalisation de Dieu en Guieu attestée depuis longtemps dans l'usage pop. de la région parisienne et autour.
2° (le, un) Bon Guieu
(le, un) Bon Dieu [P1v35, P2v96, P3v180 («  mon Bon Guieu  »)] Remarques)  :voir 1°.
3° demi-Guieu
demi-Dieu [Epv160 (à propos du tsar)]
Remarques)  : voir 1°, mais attestation intéressante pour cette variante de demi-dieu.
II. Exclamations et jurons renforçant l'expression de l'affectivité  : mon Guieu  ! [Dv21, Dv168, P1v215] et bon guieu de bois  ! [Epv68]
Remarques)  : jurons traditionnels avec palatalisation ancienne de Dieu en région parisienne, ce qui rend intéressante cette attestation littéraire du second.
guigne [n. f. ]
1° malchance [Hv13 (avoir de la guigne), R2v111 (avoir la guigne)] Remarques)  : ce mot, variante du nom masc. plus ancien guignon (même sens) bien attestée au XIXe siècle, est recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
2° bouffe-la-guigne [R2v149] [voir bouffe-la-guigne]
guigner [v.]
1° regarder du coin de l'aeil [R2v47 («  gign'nt de travers  »)] Remarques)  :verbe expressif ancien dans cette acception (XVie siècle).
2° se guigner
se regarder avec convoitise [CCv70]
Remarques)  :verbe expressif ancien dans cette acception (XVIIe siècle).
Guignol [n. pr. m.]
objet de Guignol
sujet comique, voire prêtant à rire (objet de risée), de pièces de théâtre de marionnettes [R2v110]
Remarques)  : ce genre, dont le nom vient de celui du personnage principal (Lyon), était très populaire à la fin du XIXe siècle et considéré comme manquant de sérieux.
guimauve [n. f.]
à la guimauve
à l'eau de rose, douceâtre [R3v64]
263
Remarques)  :dérivée du nom renvoyant à cette pâtisserie douceâtre [Ev61], l'expression figurée permet de prendre du recul par rapport à la mollesse sucrée des « bons sentiments  ».
guincher [v.]
danser (avec idée de faire la Pète) [SMv100 (sujet  : « poux  »), P1v14 (sujet « palpitants  »), P 1 v109]
Remarques)  :verbe pop. recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Richepin, Supplément de Larchey, Delesalle), puis dans Bruant, qui cite le deuxième passage des Soliloques.
—HIJK-

Haute (la) [adj. employé comme n. pr. fém.]
gas de la Haute
gens de la haute société, du « grand monde » [P1v101]
Remarques)  : cette acception du nom fém. dans l'usage pop. est recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
hure [n. f.]
tête [P 1 v46]
Remarques)  :substitut pop. au milieu du XIXe siècle, tirant son expressivité de son transfert ancien (ancien français et Oudin 1640) des animaux (sanglier, porc et autres animaux sauvages) aux humains et recensé dans des dict. d'argot (Delesalle, Vocabulaire de la langue verte d'Hector France, puis Bruant).
idéalisse [adj. employé comme n.]  :corruption populaire du suff. savant —iste d'idéaliste (au sens large) [Ev89, R2v266].
itou [adv.]
aussi [P2v87]
Remarques)  : adverbe ancien conservé dans des chansons et tournures populaires et parfois recensé dans des dict. d'argot (Delesalle, Vocabulaire de la langue verte d'Hector France avec citation de Richepin, repris dans Bruant).
jacque [n. m.]
faire le jacque
faire l'imbécile ou faire ggch d'humiliant, de pénible [SMv69, MMv79] Remarques)  : expression populaire (plus souvent avec Jacques) parfois recensée dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
jacqueter I. [v.]
parler [Ev180 («  en parigot  »)]
264
Remarques)  : variante de jacter, verbe expressif (métaphore de cris d'oiseaux) recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
jacqueter II. [n. m.]
discours [R1v28, P3v67]
Remarques)  : attestation littéraire intéressante pour cet infinitif substantivé (voir jacqueter L) qui sert d'alternative à des noms déverbaux comme factage ou jactance et qui n'est recensé dans aucun dictionnaire.
jambon [n. m.]
guitare [SCAv12 (éclairé par v46)]
Remarques)  :substitut expressif (métaphore de forme) recensé dans des dict. d'argot (Larchey et Rigaud donnent "violon", Delesalle "guitare") avant 1897, puis dans Bruant.
jambonner [v.]
meurtrir [Fvl l]
Remarques)  :verbe expressif mal recensé dans les dict., mais qui se trouve dans Delesalle («  battre à coups de pied  », mais la précision fait sans doute erreur sur l'explication de la métaphore  : il s'agit plutôt de couleur violacée que de jeu de jambes) avant 1897, puis dans Bruant.
jarnacquer [v.]
porter un coup imprévu [Dv188]
Remarques)  : ce verbe dérivé par l'auteur de l'expression coup de Jarnac "coup imprévu" n'est pas recensé dans les dict.
jaser [v.]
babiller [P1v54, CCv75]
Remarques)  :verbe expressif dont l'acception pertinente dans ces passages est plus courante que celles recensées dans des dict. d'argot comme "prier" ou "faire des révélations".
jaspin [n. m.]
bavardage [Ev194]
Remarques)  : ce dérivé déverbal de jaspiner "caqueter" est recensé dans des dict. d'argot (Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
jean jean [adj. et n.]
naïf, bête [R2v117]
Remarques)  : mot expressif pop. recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
jeter [v.]
s'en jeter
s'empiffrer [P2v37]
265
Remarques)  : construction mal recensée dans les dict. qui retiennent plus souvent s'en jeter un "boire un verre"  ; Rigaud, mal repris par Delesalle, donnait s'en être jeté "être soûl".
jeunesse [n. f.]
jeune fille [CCv9]
Remarques)  : à côté des différentes acceptions courantes du mot, Jehan Rictus utilise cet emploi ancien pop. recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1900.
ji [interjection]
oui [R1v70]
Remarques)  :variante graphique du vieux mot d'argot gis ou gy (fin XVIe- déb. XVIIe siècles), recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836- 37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
joint [n. m.]
trouver des joints
trouver moyen de résoudre des difficultés (ici de joindre les deux bouts) [MNv43]
Remarques)  :expression métaphorique courante.
joli [adj. employé comme n. m.]
en faire du joli
commettre des actes provoquant du scandale [R1v46]
Remarques)  :attestation littéraire intéressante pour cette antiphrase courante.

jonquille [n. f. employé comme adj.]
jaune clair [Dv102]
Remarques)  : le jaune, symbole de déshonneur, est la couleur des cocus.
jornal [n. m.]  :prononciation pop. de journal (jornaux dans les trois passages) [Hv13, R2v19, R2v165].
jornée [n. f.]  :prononciation pop. de journée [SCAv7].
jour [n. m.]
à jour
au grand j our [Dv31, R2v61 ]
Remarques)  :locution courante rendue expressive par son application à des os que la maigreur rend visibles (Dv31) et à des pieds de va-nu-pied (R2v61).
Juge [n. m.]
tête [Dv79]
Remarques)  :métaphore faiblarde remplacée par le mot d'argot Sorbonne à partir de l'éd. de 1921.
Julliet [n. m.]  :prononciation pop. de juillet [P1v57].
266
jus [n. m.]
jus de trique
sang coulant sous les coups de trique [Fv7]
Remarques)  : Jehan Rictus part d'expressions attestées plus anciennement comme jus de cotret (1718 selon Esnault) ou jus de bâton (1813 selon Esnault) et recensées dans des dict. d'argot (jus de bâton dans Larchey, Rigaud et Delesalle) avant 1897.
juter [v.]
rendre du jus [Fv72]
Remarques)  : Jehan Rictus applique métaphoriquement ce verbe, de même que le verbe gicler, aux enfants maltraités.
ldlog [n. m.]
kilog de fer
kilogramme) de fer [IPv48]
Remarques)  :métaphore exprimant la dureté du coeur, avec orthographe de l'abréviation graphique appliquée à la réduction orale par apocope qui est attestée dès la première moitié du XIXe siècle.
ldlomète [n. m.]  :déformation phonétique pop. de kilomètre [MNv44]. — L —
l' [prou. pers. ou impers. sujet troisième pers. sg. ]
1° il [Hv89 («  L'en faut  »), Ev45 («  l'est comm' mézigue  »), Ev76 («  L'aurait pu faire  »), Ev120 («  L'est cor pus carra'  »), R1v81 («  L'aurait envie  »), R3v76 («  l'a passé d' l'eau  »), P1v21 («  L'est fini l' temps  »), P3v26 («  L'est donc venu l' tour  »)]
Remarques)  :forme réduite pop. du pronom il, courante devant voyelle dans les textes populaires.
2° l' entre il ou y et verbe conjugué [SMv8 («  s'il liait  »), variante e (p. 182) de P1v89 en 1897 («  y l'est bath  », corrigé ensuite en « il est frais  »), CCv3-4 («  Il liait Menait  » ; voir tait), EpvS («  y l' en fiait  »)
Remarques)  :curieusement, Jehan Rictus fait de la forme réduite du pronom il une consonne d'appui entre ce pronom et ce qui suit.
là n' dans [loc. adv.]  :déformation phonétique pop. de là-dedans [MMv108].

lance [n. f.]
pluie [SMv89, CCvS, variante f de CCv39-42 en 1897 (voir p. 185)] Remarques)  :mot d'argot ancien (fin XVIe-déb. XVIIe siècles  : "eau") dont l'acception "pluie" n'est formulée que peu avant 1897 (Delesalle), puis dans Bruant.
langue [n. f. ]
se passer des langues
s'embrasser sur la bouche en introduisant la langue [SMv61]
267
Remarques)  : Jehan Rictus semble employer ici une variante d'expressions comme (se) faire des langues ou (se) faire langue fourrée, recensées dans le Dictionnaire érotique moderne de Delvau (1864) et reprises dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant qui recensera aussi se filer des langues et se passer des langues avec le même sens.
lansquiner [v.]
pleuvoir [Dv167, MNv30]
Remarques)  : substitut expressif recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite le premier passage des Soliloques.
lapin [n. m. ]
poser un lapin
ne pas rétribuer les faveurs d'une fille [SMv76]
Remarques)  :expression recensée avec cette acception dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897 et que Jehan Rictus disloque («  quant au lapin... c'est tout posé  ») tout en l'employant par dérision à l'égard du Pauvre qui ne jouira même pas de telles faveurs.
lappe-la-boue [n. comp. m.]
soulier percé [Dv34]
Remarques)  : Jehan Rictus est sans doute l'auteur de ce nom composé expressif qui n'est recensé dans aucun dictionnaire, même si le Bruant le donnera dans une citation de ce passage utilisée pour illustrer requimpette.
larbin [n. m. ]
valet, domestique [Ev119]
Remarques)  :mot recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle), puis dans Bruant.
lardon [n. m.]
bambin, enfant [Rlvl l]
Remarques)  : substitut expressif succédant à des expressions comme morceau de salé (Larchey, Rigaud) et recensé dans Delesalle avant 1897, puis dans Bruant.
lieur
au lieur de
au lieu de [R3v64, CCv97, MMv121]
Remarques)  : déformation très fréquente à l'époque dans l'usage pop. en région parisienne et autour (on la trouve une demi-douzaine de fois dans des citations ou exemples du Bruant), mais rarement relevée dans les dict.
limace [n. f.]
chemise [R3v23]
Remarques)  :mot d'argot ancien (Vice puni ou Cartouche en 1725), toujours recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
268
limandin [n. m.]
petite limande [SMv92 («  Mes limandins vont aboyer  »)]
Remarques)  : peut-être Jehan Rictus est-il parti de l'idée de maigreur exprimée dans l'expression plate) comme une limande (limande "femme maigre" est recensé dans des dict. d'argot) et l'a-t-il encore accentuée avec le diminutif masculin limandin qu'il a employé métaphoriquement en le substi- tuant à « mamelles » (du Pauvre) de l'édition de 1897a dans celle de 1897b  ? en tout cas, je n'ai trouvé limandin, même comme diminutif bien attesté de limande, dans aucun des dictionnaires consultés.
lingue [n. m.]
couteau [R2v56]
Remarques)  : mot d'argot ancien (lingre(s) dans Vie genereuse 1603 qui rectifie Ingres de 1596, puis dans le .jargon ou Langage de l'Argot reformé 1629-1630 et dans Voleurs de Vidocq 1836-37), recensé sous la forme lingue dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
liquette [n. f.]
chemise [Dv33, P1v70, P2v93, MPv40]
Remarques)  : mot fin-de-siècle recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui le cite dans le premier passage à propos du mot requimpette.
lolotte [voir charlotte]
longe-ruisseaux [n.]
vagabond [MNv23]
Remarques)  :mot composé formé par l'auteur avec le mot ruisseau évoquant la misère des vagabonds marchant au bord des eaux sales des rues.
lopette [n. f.]
pédéraste [P2v43]
Remarques)  : en 1901, Bruant donnera lope comme dérivé par largonji de copaille "pédéraste", citant à propos de ce dernier mot Jean Lorrain qui avait qualifié ainsi les cyclistes en raison de leurs maillots de soie ; mot fin-de- siècle comme lope, le diminutif lopette, lui, ne sera recensé dans le Bruant qu'en 1905  ; en voici donc une attestation littéraire intéressante.
loquetaillon [adj. et n.]
loqueteux [Ev153]
Remarques)  :dérivé expressif de loqueteux (voir ce mot) formé avec deux suffixes sur le modèle de écrivaillon, noblaillon, fumaillon, etc., mais en jouant ici sur le rapprochement avec haillon ; il s'agit probablement d'une création d'auteur.
loqueteux [adj.]
vêtu de loques, miséreux [Dv44]
269
Remarques)  :mot ancien fréquent dans la littérature sur les miséreux au XIXe siècle (Richepin par exemple) ; Jehan Rictus l'applique ici au coeur du Pauvre.
lorss [adv.]  :prononciation pop. de lors dans dès lors [Dv171], comme dans alorss pour alors.
loufoque [adj.]
fou [SMv57, CCv85, MPv23]
Remarques)  : dérivé par largonji de fou, le mot est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
loufoquerie [n. f.]
folie [Ev78]
Remarques)  :mot fin-de-siècle déjà attesté en 1878-1879 dans La petite Lune et qui sera recensé dans le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France, puis dans Bruant.
loupiot [n.]
enfant [P3v6]
Remarques)  :mot pop. recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
luisants [participe-adj. employé comme n. m. pl.]
gens du monde  ? [R2v190]
Remarques)  :l'argot connaît différentes acceptions anciennes pour luisant ("jour", "soleil", "oeil"), mais Jehan Rictus, qui remplace ici, dans l'éd. de 1903, « les Brillants  »des éd. de 1897 par « les luisants  », associés aux Rois dans les deux cas, pourrait bien avoir en tête une acception recensée plus récemment, celle qui renvoie aux gens du monde (Delesalle, France dans le Vocabulaire de la langue verte et Bruant donnent "élégant" avant 1903) et qui dérive par métonymie de l'acception "souliers vernis" (Rigaud, Delesalle).
—M—
M'sieu [voir ordre alphabétique sans prise en compte de l'apostrophe]
maam' ou ma'am' [n. f.]  : réduction pop. courante de madame [Hv19, Fv21 ] ;voir aussi mam'.
mac [n. m.]
maquereau (souteneur) [P3v107, MNv73]
Remarques)  : ce dérivé par apocope du vieux mot maquereau est recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
mâche-angoisse [n.]
désespéré ruminant son malheur [Ev205, MNv25]
Remarques)  :nom composé forgé par l'auteur avec le verbe mâcher souvent employé dans ce sens figuré s'appliquant à des pensers négatifs.
270
magasin [n. m.]
magasin de giffes
réceptacle à gifles [R2v260]
Remarques)  :métaphore d'auteur jouant sur l'idée d'emmagasiner, c'est-à- dire de recevoir.
magnère [n. f.]  :prononciation pop. palatalisée de manière [Hv46, P2v35, CCv29].
magnes [n. f. pl.]
faire des magnes
faire des manières (ou des manies), c'est-à-dire se donner un air important ou distingué [Ev189, Dv92, CCv14]
Remarques)  :expression recensée dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
mam' [n. f.]  : réduction phonétique pop. courante de madame [Dv155 («  Mam' Poignet  »), P1v224 («  M'am' Pudeur  »), Fv68]  ;voir aussi maam'.
enamourer [v.]
faire des mamours, caresser [SMv103]
Remarques)  : ce verbe expressif, dérivé du nom expressif pop. et fam. mamours et attesté à la fin du XIXe siècle (voir Trésor de la langue française intransitif dans Huysmans 1879, transitif dans citation des Soliloques 1897), sera recensé immédiatement dans Bruant, qui cite ce passage.
mandale [n. f.]
claque, gifle [SMv126]
Remarques)  :variante du nom mandole (même sens), lequel est recensé dans des dict. d'argot (Delvau, Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui sera l'un des tout premiers à donner mandale (avec citations de vers de Bruant et de Paillette) ;malgré sa vitalité constante depuis la seconde moitié du XIXe siècle, le mot est absent du Trésor de la langue française.
manège [n. m.]
manière d'agir adroite [MNv29]
Remarques)  :sens figuré bien attesté dans l'usage courant au XIXe siècle.
manque [n. f. dans loc. adj.]
à la manque
qui ne vaut rien [MPv12, Epv93]
Remarques)  :expression recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
maquereau [n. m.]
proxénète, souteneur [SMv25, R2v160 (appliqué aux Catholiques vis-à-vis de leur Dieu), P1v184]
271
Remarques)  : ce mot pop. d'ancien français, qui n'est plus recensé dans de nombreux dict. d'argot au XIXe siècle, y sera réintégré au XXe.
marcher [v.]
ne pas (ne plus) marcher
ne pas (ne plus) être d'accord [Ev93]
Remarques)  :emploi de l'usage fam., que ce soit en tournure affirmative ou négative, parfois recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
mariner [v.]
rester plongé (dans une mauvaise situation) [Ev35]
Remarques)  : ce sens figuré expressif (péjoratif), parfois recensé dans des dict. d'argot (Delesalle avant 1897, puis Bruant), ne semble pas avoir été repéré avant la fm du XIXe siècle (absent de Littré) ; en voici donc une attestation littéraire intéressante.
mariolle [adj. et n.]
[individu] malin [Dv115, R1v84, CCv61, MNv74]
Remarques)  : mot expressif attesté en moyen français et toujours recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
marle [n. m.]
proxénète, souteneur [Dv23]
Remarques)  :cette variante fin-de-siècle de marlou(x), sans doute dérivée de ce dernier par apocope et qui en a les mêmes acceptions (voir marlou), sera recensée après 1897 dans Bruant.
marlou [n. m.]
proxénète, souteneur [SMv98 («  frimer le marlou  »), P1v144 («  de la République  »)]
Remarques)  : alors que l'acception "souteneur" dérivée du sens premier "[individu] malin" est bien recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle avant 1897, puis Bruant), son emploi métaphorique dans le second passage constitue une attestation littéraire intéressante ;pour le premier, voir frimer  :l'idée semble être que le marlou, lui, n'a pas besoin de payer.
marloupin [n. m.]
proxénète, souteneur [Ev196]
Remarques)  : ce dérivé de marlou est recensé dans des dict. d'argot (Richepin, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, mais oublié dans le Trésor de la langue française avant d'être cité à l'article youpin.
marmelade [n. f.]
misère [Hv119, SCAv4]
Remarques)  : ce substitut de misère, qui, comme d'autres, repose sur le sens figuré d'un mot comportant l'idée de bouillie, sera recensé avec cette
272
acception dans le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France, puis dans le Bruant.
marmot [n. m.]
enfant [SMv106]
Remarques)  : ce mot expressif, attesté au XVIIe siècle avec cette acception dérivée, est ici employé dans une métaphore à propos de seins pour se blottir.
marner [v.]
s'échiner, travailler dur [SMv95, P3v171, MMv34]
Remarques)  : ce verbe expressif pop. est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant qui cite le second passage des Soliloques.
marque-mal [n. comp.]
[individu] suspect d'allure [MNv24]
Remarques)  : nom composé formé sur l'expression marquer mal "avoir mauvaise allure" (Larchey, Delesalle) et recensé dans des dict. d'argot (Delesalle, Vocabulaire de la langue verte d'Hector France, Bruant) avant
1903.
marrognier [n. m.]  :prononciation pop. palatalisée de marronnier [P1v49].
marron [adj. invar. attribut]
être fait marron
être pris en flagrant délit [MNv63]
Remarques)  :expression recensée dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle, puis Bruant) avant 1903.
marteau [n. m. employé comme adj. attribut invar.]
être marteau
avoir l'esprit dérangé [R2v73]
Remarques)  : ce mot fin-de-siècle, dérivé d'expressions métaphoriques anciennes comme avoir (reçu) un coup de marteau (Larchey), sera recensé dans Bruant avec citation de ce passage des Soliloques.
mason [n. f.]  :prononciation pop. en région parisienne et autour (è ouvert > a comme dans elle > a) de maison [Dv2, Dv162, R2v217, R3v68 et tout le poème « Les Masons  »].
masque [n. m.]
visage aux traits marqués [MPv42]
Remarques)  :sens figuré bien attesté au XIXe siècle (notamment dans l'usage médical à propos de la grossesse) et qui n'est pas argotique.
masser [v.] travailler [P3v16]
273
Remarques)  : verbe expressif employé par Richepin dans la Chanson des Gueux en 1876 et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
mastar [adj.]
lourd [Dv20]
Remarques)  : comme pour massif dans le même vers, Jehan Rictus retient dans ce dérivé parallèle à mastoc l'idée de lourdeur de la peine dans laquelle le Pauvre se traîne ;Esnault 1965 vise sans doute ce passage des Soliloques quand il date de 1896 et marque « pop.  » ce terme ignoré des dict. d'argot du XIXe et du début du XXe siècles.
maternelle [adj. employé comme n. f.]
mère [Fv35]
Remarques)  : ce substitut expressif pop. et fam., formé comme paternel, est recensé dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey avec mention « argot des écoles  », Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
mec [n. m.]
gars [SMv34, R1v60, Epv96]
Remarques)  : Jehan Rictus emploie comme synonyme de gars ce mot recensé avec des acceptions variées dans des dict. d'argot avant 1897 : "chef' (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Delesalle, puis Bruant), "souteneur" (Richepin, Delesalle, puis Bruant), "individu" (Delesalle, puis Bruant).
mecton [n. m. ]
1 ° gars [MMv72]
Remarques)  :diminutif expressif de mec sans valeur péjorative, recensé dans Bruant avec une acception spécialisée "maquereau jeune", mais les Soliloques offrent avec ce passage une attestation littéraire intéressante de 1903.
2° mecton de la rousse
policier [P3v120]
Remarques)  : si mec de la rousse désignait le préfet de police dans les Voleurs de Vidocq 1836-37, on comprend pourquoi Jehan Rictus emploie le diminutif pour désigner ses subordonnés ; attestation non mentionnée par Esnault 1965 qui donne pourtant mecton de la rousse quand il date mecton de 1896 et l'affecte à l'argot des voyous.
mégot [n. m.]
reste non fumé d'un cigare ou d'une cigarette [SCAv25]
Remarques)  :mot employé par Richepin dans la Chanson des Gueux en 1876 et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
oreillon [n. m.]  :déformation de million dans la prononciation pop. [Hv70, P3v152, Epv35, Epv118].
274
mendigot [n.]
mendiant [Hv67, SCAv28]
Remarques)  : ce mot, créé par déformation comme Parigot, est attesté dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
gifque [adj.]  : déform. de magnifique dans la prononciation pop.[P3v116].

ménisse [n. f.]
femme [Rl v71 ]
Remarques)  :variante rare du nom ménesse (même sens), seul recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
menterie [n. f.]
mensonge [Dv105]
Remarques)  : Jehan Rictus emploie comme substitut de mensonge ce dérivé attesté en ancien français et conservé dans le parler pop. de plusieurs régions.
menuit [n. m. (autrefois f.)]  :déformation de minuit dans la prononciation pop. [R2v2, CCv3-4].
méquier [n. m.]  :prononciation pop. et enfantine (palatalisation) de métier [Hv24, Dv24, P3v29, Fv85]
merde  ! [interjection]
(juron servant à exprimer l'intensité d'un (res)sentiment) [Hvl, Hv17-19] Remarques)  :l'un des jurons les plus fréquents dans l'usage pop., parfois recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle).
merle  ! [interjection]
(juron servant à exprimer l'intensité d'un sentiment) [Plvl (à partir de l'éd. de 1921, en remplacement de « Bon  !  »)]
Remarques)  : à-peu-près humoristique dans lequel Jehan Rictus joue à remplacer merde  ! du début de « L'Hiver  »par un mot plus en rapport avec le début du « Printemps  ».
mettons... [voir mettre]
mettre [v.]
I. mettons...
supposons [MNv30]
Remarques)  :tournure familière bien attestée au XIXe siècle dans les usages pop. et fam.
II. 1 ° le mettre (à qqn) tromper qqn, en faire accroire à qqn [MNv42]
275
Remarques)  : ce sens figuré pop., dérivé du sens obscène ("foutre"), est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant (1901), où il figure dans plusieurs exemples et citations.
2° se le laisser mettre
se laisser avoir (tromper) [Ev117]
Remarques)  :cette inversion passive de la tournure précédente est recensée dans le Trésor de la langue française, avec citation fort infidèle de ce passage des Soliloques («  On n' donn' pus dans la Politique, Nous on veut pus se l' laisser mettre  »  !), et dans le Dictionnaire du français non conventionnel de Cellard & Rey (éd. revue et augmentée de 1991) avec citation plus fidèle (malgré « pas  » au lieu de « pus  »).
III. mis [voir mis]
IV. Pour diverses tournures avec le verbe mettre, voir le mot principal contenu dans le complément, par exemple battant pour se mettre dans le battant, fusil pour se mettre dans le fusil, vert pour se mettre au vert, etc.
meule [adj.]
démuni d'argent [Dv88, P1v126]
Remarques)  :cet adj., que l'on peut rapprocher de meulard "rien" et de meulé "usé à la meule", est recensé dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant qui l'utilise plusieurs fois dans ses vers ;bien que souvent attesté, il est ignoré du Trésor de la langue française.
mézig ou mézigue [prou. pers.]
moi [Ev45, P2v50, MNv2]
Remarques)  : ce substitut pop. du prou. pers. de première pers. du sg, attesté dès le début du XIXe siècle, est recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant ; il appartient à une série (tézigue, sézigue, nouzigue, vouzigue et leurs variantes) dont des formes ressemblantes (mezingand, sezingand, tezingancl) sont attestées au début du XVIIe siècle (.jargon ou Langage de l'Argot reformé 1629-1630).
miauler [v. ]
1° chanter (des complaintes) [SCAv35-36]
Remarques)  :acception figurée (métaphore) péjorative, bien attestée au XIXe siècle.
2° se plaindre [R2v122]
Remarques)  :acception figurée (métaphore) courante au XIXe siècle.
michet [n. m.]
client de prostituée [SMv25, Ev23, R1v59]
Remarques)  :cette variante de miché (d'abord "dupe", puis "client de fille" dès le XVIIIe siècle) est recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
276
mignonne [n. f.]
homosexuel masculin [P3v107]
Remarques)  : c'est plutôt le nom masculin qui sert à désigner, depuis le moyen français, de jeunes hommes efféminés ;Bruant recensera cet emploi féminin en l'illustrant par ce passage des Soliloques.
Milord [n. m.]
homme riche [Ev70]
Remarques)  : ce mot, emprunté depuis longtemps (fin XVe siècle) à l'anglais pour désigner des hommes riches (et bien vêtus), est toujours recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
muni [n. m. ]
enfant [Fv52]
Remarques)  : cette transposition métaphorique à des enfants du terme hypocoristique utilisé d'abord pour des chatons et chats (minou, minette), avec influence possible de muni, substitut de mignon formé par redoublement (repéré dans Courteline, 1890, par le Trésor de la langue française), est sans doute antérieure aux Soliloques, mais ce passage offre une attestation littéraire intéressante.
mince de...  ! [tournure exclamative]
quel, quelle... [DvS, P1v176, variante b de P2v28 (voir p. 183)]
Remarques)  : cette tournure exclamative, reposant sur une antiphrase dans laquelle mince signifie "beaucoup" (de même, rien signifie "fort, très" dans une tournure comme «  F'ra rien chaud  »  ;voir rien), ne marque pas d'ironie amère dans ces trois passages, contrairement à ce qui se produit dans d'autres cas («  mince d'horizon  !  »rimant avec « prison » dans une cit. de Ponchon donnée par le Bruant) ; elle est recensée dans des dict. d'argot (Rigaud, Richepin, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
mine [n. f.]
filon [Hv58 («  mine à boulots  »), Ev206 («  mine à croquis  »)]
Remarques)  :cette acception figurée (métaphore à partir des mines d'où l'on extrait des matières utiles, voire précieuses), courante au XIXe siècle, s'applique parfois à des situations (l'hiver dans le premier passage) et même à des personnes (mine à croquis, avec triple jeu sur mine "apparence" et mine "matière servant à dessiner, d'où dessin fait à la mine").
Minoche [n. m. (autrefois f.)]
minuit [MNv15]
Remarques)  : Jehan Rictus, en apocopant minuit pour adjoindre le suffixe pop. et argotique —oche, joue aussi sur l'association avec l'héritage du latin dans les langues romanes (voir en français médianoche) ; cette création d'auteur semble toutefois être restée un hapax.
mioche [n.] enfant [SCAv41]
277
Remarques)  : ce substitut expressif, attesté au XVIIIe siècle ("jeune garçon" dans comédie de Legrand 1721, d'après Sainéan 1912) et au début du XIXe (d'Hautel 1807-1808), est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
mirettes) [n. f. (souventpl.)]
oeil (yeux) [R2v279, CCv30]
Remarques)  :substitut expressif de forme diminutive recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
miroitant [participe-adj employé comme n. m.]
1 ° vitrine [R2v284]
Remarques)  : Jehan Rictus semble avoir créé (à partir de miroiter) ce substitut de miroir, qui sera recensé dans Bruant avec citation de ce passage des Soliloques, mais ne se répandra pas dans l'usage.
2° au pl. : yeux [Dv96]
Remarques)  : Jehan Rictus semble avoir créé ce substitut de mirettes qui ne se répandra pas dans l'usage et ne figure dans aucun dictionnaire  ; il se pourrait qu'à partir de cette création le Bruant ait recensé à tort miroiter "regarder" (sans autre indication).
mis [participe-adj. (avec complément de manière et/ou de comparaison)] vêtu [P 1 v72]
Remarques)  :emploi particulier bien attesté dans l'usage déjà au XVIIe siècle pour le participe du verbe mettre, sans que cette synonymie avec vêtu soit porteuse d'une expressivité discernable.
mistoufe ou mistoufle [n. f.]
misère [Hv115 («  mistoufle  »), SMv95 («  mistoufe  »)]
Remarques)  : ce substitut expressif, dont mistoufe est une variante dans la prononc. pop., est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite le second passage des Soliloques.
mochard [adj. et n.]
[individu] laid [P1v100]
Remarques)  : ce dérivé suffixé de moche reçoit ici une première attestation littéraire (1897), relevée dans le Trésor de la langue française (mais dans l'éd. de 1919, sans que l'on sache pourquoi)  ;daté de 1898 dans Esnault 1965, il sera recensé dans le Bruant.
moche [adj.]
laid [Dv27, P3v143]
Remarques)  : ce substitut expressif qui a succédé à mouche (même sens ; lui- même dérivé de mouchique, même sens), est recensé dans des dict. d'argot (article mouche dans Rigaud, repris dans Supplément de Larehey et dans Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant ; le Trésor de la langue française fait venir le mot du verbe amocher, mais Esnault 1965 n'avait pas retenu cette
278
hypothèse contraire à la morphologie et contredite par les datations (amocher "meurtrir à coups de taloches" est recensé dans Delvau en 1867).
moelle [n. m.]
1° énergie, vigueur physique [P3v162 («  donnez-nous la moelle de...  »)] Remarques)  :sens figuré bien attesté au XIXe siècle et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
2° ne plus rien avoir dans les moelles
manquer d'énergie au plus profond de soi [R3v111]
Remarques)  : cette expression formée sur l'acception figurée courante de moelles n'est pas recensée dans les dict.
moignieau [n. m.]  : déformation hypocoristique de moineau dans la prononciation pop. [Dv144].
moisir [v. ]
1° rester (souvent avec idée de dégradation en phrase affirmative) [CCv50 («  dans la purée  »)]
Remarques)  :sens figuré courant parfois recensé, surtout avec négation (ne pas moisir), dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
2° ne pas avoir le temps de moisir
rester peu de temps [P2v86 («  [mes désirs] n'ont pas eu le temps de moisir  »)] Remarques)  :cette variante non lexicographiée de l'expression ne pas moisir (voir 1 °) reçoit dans ce passage une attestation littéraire intéressante.
Morvan [n. f.]
maman [Dv130, CCv77, MMv127-128, MPv77]
Remarques)  :prononciation hypocoristique dans les usages fam. et pop., qui sera signalée dans Bruant avec citation de vers de cet auteur.
môme [n.]
1° masc. : enfant (en général ou par rapport aux parents ou jeune garçon) [Dv116, P2v55, P3v5, Fv50, Fv85]
Remarques)  :mot pop. attesté au début du XIXe siècle et recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37 qui donne « adolescent  », Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
2° fém. : fille jeune [SMv39, P1v214]
Remarques)  :les emplois féminins sont attestés au milieu du XIXe siècle et recensés dans des dict. d'argot (Delvau, Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
Montmertre [n. pr. m.]  : prononciation pop. parisienne de Montmartre [P1v15], qui sera signalée dans Bruant.
279
Montreuil [n. f.]
pêche (de Montreuil) [CCv28]
Remarques)  : cette antonomase métonymique (procédé fréquent pour les produits de terroirs), qui n'est pas en soi expressive (même si elle est relevée dans Delesalle), le devient un peu dans ce passage en raison de son insertion dans une comparaison.
morue [n. f.]
prostituée, femme débauchée [SMv114, R2v22]
Remarques)  :terme plutôt injurieux recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite le premier passage des Soliloques où Jehan Rictus semble employer le mot avec un sens plus large que celui de départ.
mossieu [n. m.]
monsieur [Dv39-40, Dv133, P2v2]
Remarques)  :prononciation ironique dans les usages pop. et fam., souvent utilisée dans des citations et exemples du Bruant sans y être recensée.
mouïse [n. f.]
misère [P3v43]
Remarques)  : l'acception figurée de ce mot généralement écrit sans tréma (mouise "soupe") n'est pas, contrairement à son sens de départ, recensée dans des dict. d'argot avant 1897, mais elle le sera dans le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France, puis dans Bruant.
mouquette [n. f.]
derrière [Fv46, association avec le verbe barytonner (voir ce mot)] Remarques)  :acception relevée d'abord dans le Dictionnaire français-argot de Lermina & Lévêque et reprise dans le Bruant, qui l'illustre par ce passage des Soliloques ; ce sens dériverait-il du nom propre du personnage féminin (Mouquette) montrant son derrière dans Germinal de Zola  ?
moutard [n. m.]
enfant [Dv130]
Remarques)  : substitut pop. attesté au début du XIXe siècle et devenu si commun (il figure dans le Littré) qu'il est rarement recensé dans les dict. d'argot (Études de philologie comparée sur l'argot de Michel 1856, puis Delesalle).
moyen [n. m.]
tâcher moyen de +inf.
essayer de +inf. [MPv91 ]
Remarques)
1) tournure recensée comme pop. dans le Trésor de la langue française (articles moyen et tâcher, ce dernier avec une citation de Léon Bloy, Femme pauvre, 1897) ;celle des Soliloques, à l'impératif, est également intéressante  ;
2) on trouve dans le recueil plusieurs autres tournures contenant le nom moyen, les unes impersonnelles, affirmatives (y a des moyens de +inf. "il
280
existe des possibilités de +inf." [Hv116]) ou négatives (y a pus moyen de + inf. "il n'y a plus de possibilité de +inf " [SCAvS]  ; y a pas moyen "il n'y a pas de solution" [Ev213, sans complément]), les autres avec sujet (ne pas avoir le moyen de +inf. "ne pas avoir la possibilité de" [R2v150 avec complément « d'avoir d' moyens  »  ! ]  ; ne pas avoir d'autre moyen que de + inf. "ne pas avoir d'autre possibilité que de" [R3v47])  ;elles sont toutes si courantes (et à peine expressives) qu'elles n'ont pas à être relevées dans les dict. d'argot.
M'sieu [n. m.]  : réduction phonétique courante de monsieur dans la prononciation pop. et fam., surtout en apostrophe [P1v226, Fv2].
muff [n. m.]
individu sans délicatesse, con [Hv25, IPv43, SMv131, Dv90, R1v47, R2v30, P3v10, CCv20]
Remarques)  : ce mot de prédilection de Jehan Rictus (voir note 3 p. 26), qui est employé par Jean Richepin dans l'éd. de 1881 de la Chanson des Gueux, est recensé, sous la forme mufle ou sous sa forme pop. muffe, dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
muffeton [n. m.]
individu sans délicatesse, con [SCAv21]
Remarques)  : ce dérivé du précédent, dans lequel la valeur diminutive s'efface souvent au profit de la péjoration, est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
muffée [n. f.]
ivresse [SMv22]
Remarques)  :cette variante pop. de muflée est recensée dans des dict. d'argot (Supplément de 1883 par Fustier au Dictionnaire de la langue verte de Delvau, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
mufle [voir muffJ
muflerie [n. f.]
manque de délicatesse [Hv142]
Remarques)  : ce dérivé fin-de-siècle de mufle (voir muffe) est recensé dans Delesalle, puis dans Bruant.
museau [n. m.]
figure [MPv125]
Remarques)  : avec cette acception figurée attestée anciennement dans les usages pop. et fam. mais absente des dict. d'argot, le mot figure dans plusieurs citations ou exemples du Bruant, mais n'y est pas recensé.
Mystérieux [adj. employé comme n. m.]
soir [titre de P2 et P2v54]
Remarques)  :nom qualifiant (métonymique) forgé par l'auteur.
281
— N —

n, i, ni [voir dans l'ordre alphabétique sans prise en compte de la virgule]
n' I. [reste de l'altération du prou. pers. il (sujet troisième pers. du sg) en l' devant voyelle]
il [SMv36 («  n'a fallu s' cotiser  »), P1v125 («  n'en rest' des rigoleurs  »), P3v130 («  N'y vient des voix d' musiciennes  »)]
Remarques)  :prononciation pop. postériorisée  : on pourrait rattacher ces cas àn'II.
n' lI. [consonne d'appui ou de liaison devant voyelle en contexte non négatif) 1° devant avec [R1v73, CCv9, MPv50, Fv30]
Remarques)  : cette consonne de prosthèse s'observe dans la prononciation pop., notamment dans n'en v'là (voir 2°).
2° devant en v'là [IPvl l («  n'en v'là un  »), R2v9 («  n'en v'là d'eun' chance  »), R2v16 («  n'en v'là d'eun' tuile  »), R2v84 («  n'en v'là des temps  »)]
Remarques)  :voir 1°.
3° liaison devant en [SCAv7 («  y n'en f'saient des jornées  »)]
Remarques)  :cette consonne de liaison s'observe dans la prononciation pop., mais rarement dans cette configuration au pluriel en raison de la liaison obligatoire par [z].
4° appui ou liaison devant avoir [Dv45 («  t'as dû n'avoir l'âme azurée  »), R2v132 («  a n'avait un pépin  »), P1v54 («  les pus vioqu's n'ont quét' chose  »), CCv52 («  Doiv'nt comm' ça n'avoir des rêv'ries  »)] Remarques)  :voir 1° et 3° ; on peut aussi penser à une postériorisation de l dans R2v132  : elle avait > a n'avait.
5° autres cas  : P1v219 («  qui n'amerait ben d'en faire autant  »), MMv61 («  ça doit n'en cacher  »)]
Remarques)  :voir 1°.
nasse [n. f.]
dans la nasse
piégé dans une mauvaise situation [Ev148]
Remarques)  :sens figuré bien attesté au XIXe siècle, recensé dans Delesalle avec définition « dans la misère  ».
natté [participe-adj.]
c'est natté
c'est bloqué [Dv58]
Remarques)  :expression non lexicographiée, mais avoir les pieds nattés "être forcé à l'immobilité" est recensé dans Delesalle avant 1897, puis dans le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France et dans Bruant («  Supplé- ment » de l'éd. de 1905).
282
nèfe [n. f.]
c'est comme des nèfes
c'est vain [SMv75]
Remarques)  :l'expression des nèfles (nèfes dans la prononciation pop.) pour exprimer des idées de vide et d'inutilité, déjà relevée dans Oudin 1640, est recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant qui donnera comme des nèfles.
Négresse [n. f.]
nuit [P2v65]
Remarques)  : ce nom qualifiant n'est pas attesté avec cette acception en argot, mais on trouve nègre "minuit" dans la partie français-argot du Delesalle et le Bruant recensera il fait nègre "il fait noir, il fait nuit".
n'empêche [loc. adv. et interjective]
1° n'empêche que
et pourtant [SMv77 et 81]
Remarques)  :tournure courante sous cette forme réduite (forme pleine  :cela n'empêche pas que) dans les usages pop. et fam.
2° n'empêche  !
et pourtant  ! [P1v93, MPvl]
Remarques)  :formule interjective courante dans les usages pop. et fam., mal recensée dans les dict.
nénés) [n. m. souventpl.]
seins) [R2v121, P3v140]
Remarques)  : ce substitut expressif (hypocoristique) pop. et fam. est recensé sous diverses variantes dans des dict. d'argot (nénais ou nénet dans Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
neuf [adj. employé comme n. m.]
il fait neuf
c'est le renouveau [P1v10]
Remarques)  :cette tournure impersonnelle calquée sur les tournures météoro- logiques et temporelles (il fait beau, il fait nuit, etc.) a sans doute été créée par Jehan Rictus, car je ne l'ai pas encore trouvée ailleurs que dans les Soliloques.
nez [n. m. ]
avoir dans le nez
détester [P3v9]
Remarques)  :expression pop. et fam. bien attestée au XIXe siècle et recensée dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897.
nib  !
non  ! [Dv106]
283
Remarques)  : cet emploi en formule interjective de la négation nib, forme apocopée du mot nibergue "rien, non" (relevé dans Voleurs de Vidocq 1836- 37), est recensé (mais souvent avec le sens "silence  !") dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle), puis dans Bruant.
nichons) [n. m. souventpl.]
seins) [variante o de Hv80 (voir p. 170  : nichons de Zola  !), Dv6, CCv33] Remarques)  :substitut expressif pop. recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
nihilisse [n.]
nihiliste [Epv29]
Remarques)  :sous une variante de prononciation pop., Jehan Rictus fait du terme, dans la pensée du préfet de police interprétée par le Pauvre, un synonyme d'anarchiste terroriste, ce qui est conforme aux représentations de cette époque fertile en attentats.
n, i, ni [voir fini]
nippes) [n. f. souventpl.]
vêtements) en mauvais état [P1v87]
Remarques)  :mot ancien de sens plus large au départ ("tout objet de toilette ou de parure"), mais attesté au XVIIe siècle dans cette acception pop. courante relevée dans Littré (« Nippes se dit populairement, au pluriel, pour des vêtements en mauvais état, du vieux linge usé  »).
noce [n. f.]
partie de plaisir [SMv32]
Remarques)  : cette acception figurée (métaphore) fam. et pop. du mot au singulier est attestée anciennement et recensée dans les dict. généraux au XIXe siècle.
nom de... [début de jurons]
1° nom de Dieu [R2v271, P1v65, CCv41, MNv52]
Remarques)  : dans le contexte du premier passage («  Le Revenant  »), on attendait l'humour de ce juron courant, plus sacrilège que les suivants.
2° nom de d'là  ! [Ev123, Dv157, variante de R2v143 (voir p. 178), P1v129] Remarques)  : juron euphémique courant dans la seconde moitié du XIXe siècle.
3° nom d'un nom [R1v86]
Remarques)  :cette variante autrefois courante du juron euphémique nom de nom est considérée comme vieillie par P. Enckell (Dictionnaire des jurons,
2004).
nombril [n. m.]
s'user le nombril
ramper, être ventre à terre en se prosternant [Epv53]
284
Remarques)  : avec cette trouvaille, Jehan Rictus marque l'absence d'ego républicain de tous ceux qui rendent hommage au tsar.
non mais des fois [voir des fois  ! à l'article fois]
nouné [n. m.]
enfant [variante a en 1897 (chouné à partir de 1903) de Dv110 (voir p. 176)] Remarques)  : Jehan Rictus a d'abord utilisé cette forme hypocoristique, qui sera recensée dans Bruant avec citation de ce passage, puis il l'a remplacée par chouné à partir de l'éd. de 1903, la rendant caduque.
nounou [n. f.]
nourrice [MPv105 et v116]
Remarques)  :substitut expressif (redoublement hypocoristique) bien attesté au XIXe siècle et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
— O —

oeil [n. m. ]
1° faire de l'ceil
adresser des regards amoureux [CCv29]
Remarques)  : expression fam. bien attestée au XIXe siècle dans cette acception et recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1900, puis dans Bruant.
2° tourner de l'ceil
mourir [MPv110]
Remarques)  : expression fam. bien attestée au XIXe siècle dans cette acception et recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle, Lermina & Lévêque, France, Bruant) avant 1903.
ognon [n. m.]
c'est mes ognons
c'est mes affaires, ça ne regarde que moi [Dv67]
Remarques)  : ce passage des Soliloques offre une attestation littéraire intéressante pour cette expression c'est (pas) mon (ou ton, etc.) oignon ou c'est (pas) mes (ou tes, etc.) oignons (ou ognons) qui, curieusement, ne semble pas avoir été lexicographiée avant Bruant.
oignon [voir ognon]
oneiller [n. m.]
oreiller [SMv102, MPv69]
Remarques)  : Jehan Rictus emploie par deux fois cette déformation pop. et enfantine qui n'est signalée dans aucun dict., même si le premier passage est cité dans Bruant pour illustrer mamourer.
285
opoponasque [n. m]  :déformation phonétique (métathèse) pop. et enfantine d'opoponax (gomme-résine pour parfum, tirée de l'arbre du même nom) [MPv43].
ormoire [n. f.]
armoire [MMv125]
Remarques)  : prononciation régionale et populaire, déjà repérée dans le « petit peuple de Paris  »par Richelet (1680), qui la condamne.
ousque [adv. interrogatif ou prou. relatif renforcé] [voir aussi yousque]
1° où est-ce-que  ? [Ev210 («  Ousqu'alle est ta Blanch', ta Radieuse  »), R2v112 («  Ousqu'il est ton ami Lazare  ?  »), R2v119 («  Et Mad'leine... ousqu'alle est passée  ?  »), P1v136 («  Ousqu'alle est la Justice  ?  »), etc.] Remarques)  : là où l'on trouve aussi les graphies où c' que et oùs' que (cette dernière recensée dans Delesalle) pour ces réductions phonétiques pop., Jehan Rictus a choisi ousque comme dans de nombreux textes de son époque (forme employée dans Bruant, notamment pour jeanjean avec citation des Soliloques, mais qui n'y est pas recensée).
2° où [Hv5 et v9 (après « temps  »), SMv100 (après « guipure  »), Ev49 (après « endroit  »), Ev200 (après « tombe  »), CCv53 (après «  rêv'ries  »), etc.] Remarques)  : dans l'usage pop., la forme phonétiquement réduite de renforcement de l'interrogatif est étendue au relatif qui se trouve ainsi renforcé et dédoublé dans son rôle de subordonnant.
ovréier [n.]  : variante d'ouvrier dans la prononciation pop. [MMv141] (Bruant avait recensé ouverrier, ouverrerier et overrier).
ozeaux
oiseaux [P1v58]
Remarques)  :précédée de z', cette variante d'oiseaux dans la prononciation pop. (où l'on ajoute parfois [j] comme dans zoziaux) forme un redoublement hypocoristique ironique.
—P—

p'têt' [voir dans l'ordre alphabétique (sans prise en compte de l'apostrophe)] p'tiot [voir petiot], p'tit [voir petit]
pagnier [n. m.]
1 ° mettre dans le même pagnier
traiter de la même manière [R2v102 (foutre dans le même pagnier)] Remarques)  :employée avec la variante palatalisée de la prononciation pop. parisienne qui apparaît également dans Bruant, l'expression figurée mettre (différentes personnes ou tout le monde) dans le même panier est bien attestée au XIXe siècle ;Jehan Rictus joue sans doute aussi en même temps sur panier (à salade) "voiture servant à transporter les prisonniers" et sur mettre au panier "se débarrasser de".
286
II. être au pagnier
être couché [P2v66 (à propos des oiseaux)]
Remarques)  :cette expression figurée fam. formée sur panier "endroit où se couchent des animaux domestiques" est recensée dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
paille [n. f. ]
être sur la paille
être dans un dénuement extrême [P1v107]
Remarques)  :expression figurée bien attestée depuis l'ancien français.
pain [n. m. ]
I. a) nourriture matérielle [P3v167] ou spirituelle [IPv42 (pain de l'esprit)] Remarques)  :extension de sens symbolique ancienne et commune à partir du nom de cet aliment de base, mais le Pauvre prend aussi le mot au pied de la lettre.
b) moyen de subsistance, gain résultant d'une activité [Hv97, SMv12] Remarques)  : extension de sens symbolique ancienne et commune (métonymique) à partir du nom de ce aliment de base, mais le Pauvre prend aussi le mot au pied de la lettre (P3v8 : « Pour eune apparent' de bout d' pain  »).
II. expressions
1 ° bouffer du pain de qqn, bouffer le pain de qqn
être invité à la table de quelqu'un (avec valeur possible de parasitisme) [Hv79, R2v114]
Remarques)  :expression courante avec manger, plus mordante avec bouffer.
2° retirer le pain de la bouche [SCAv33]
Remarques)  :avec cette expression bien attestée, Jehan Rictus exprime non seulement la perte d'emploi (Rigaud et Delesalle recensent ôter à qqn le pain de la bouche "faire perdre son emploi à qqn") du chanteur ambulant à cause de la concurrence déloyale qui le condamne au silence (le sens figuré de retirer le pain de la bouche "dire ggch avant qqn" est mal décrit dans les dict.), mais aussi et en même temps la famine à laquelle il est réduit.
paix [n. f. ]
foutre la paix
laisser tranquille [Epv126]
Remarques)  :expression pop. et fam. parfois recensée, plus souvent sous sa variante un peu moins brutale ficher) la paix, dans des dict. d'argot (Larchey, partie français-argot du Delesalle) avant 1897.
Paladis [n. m.]  :prononciation déformée de paradis [Fv49].
palpitant [participe-adj. employé comme n. m.] coeur [Dv100, P1v14]
287
Remarques)  :substitut expressif ancien recensé dans des dict. d'argot (Vice puni ou Cartouche de Grandval 1725, Voleurs de Vidocq 1836-37, Larehey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
panier [voir pagnier]
panné [participe-adj. employé aussi comme n.]
misérable [R3v62]
Remarques)  : ce mot attesté au début du XIXe siècle est recensé, parfois aussi sous la forme pané, dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
panse [n. f.]
ventre [P1v68]
Remarques)  : quand il s'applique à des êtres humains, ce mot d'ancien français est considéré comme expressif et marqué comme fam., mais il n'est pas recensé dans les dict. d'argot (le Bruant, par exemple, le cite dans ce passage pour illustrer sorlot).
pantin I. [n. m.]
1° [individu] changeant d'opinion en fonction des circonstances [Ev67] Remarques)  :emploi figuré bien attesté depuis la Révolution de 1789.
2° en pantin
inconstant [P1v14]
Remarques)  : comparaison courante (passage cité dans Bruant pour guincher).
Pantin II. [n. pr. m.]
Paris [P1v16]
Remarques)  : ce surnom attesté au début du XIXe siècle est recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey avec citation de Gérard de Nerval, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
pantoufe [n. f.]  :prononciation pop. relâchée de pantoufle [SMv94].
pantoufle [n. employé comme adj.]
sot (avec valeur de manque d'énergie) [Hv114]
Remarques)  : emploi figuré ancien qui n'est pas recensé dans les dict. d'argot.
Pantruche [n. pr. m.]
Paris [MNv49]
Remarques)  : ce surnom, attesté au début du XIXe siècle (Raspail, 1835), est recensé dans des dict. d'argot (Larchey avec citation de Gérard de Nerval, Rigaud, Delesalle, Vocabulaire de la langue verte d'Hector France, Bruant) avant 1903.
288
Parigot [n. pr.] et parigot [n. m.]
1° n. pr. : Parisien [P1v19]
Remarques)  : ce dérivé fin-de-siècle formé par substitution de finale est recensé dans des dict. d'argot (Supplément de 1889 par Fustier au Diction- naire de la langue verte de Delvau, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
2° n. commun m. : parler des Parigots [Ev180 (jacter en parigot)] Remarques)  :emploi rarement recensé dans les dict., mais Esnault le repère comme pop. en 1896 (ce qui correspond à la date qu'il a retenue pour les Soliloques).
pass' que [conj. de sub.]  :prononciation relâchée courante de parce que [Ev180, Dv18, R2v96, P1v20, P1v35, CCv102, Epv95, Epv160].
passe [n. f.]
étreinte sexuelle rapide (avec valeur fréquente de prostitution) [P1v221] Remarques)  : acception bien attestée au début du XIXe siècle et recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
passer [v.]
1 ° se passer des langues [voir langue]
2° passer à tabac [voir tabac]
patafioler [v. ]
que Satan me patafiole si...
que le diable m'emporte si... [Epv106]
Remarques)  :variation sur des expressions anciennes (que Dieu me (te, le,...) patafiole apparaît dans d'Hautel 1808), qui marquent généralement une idée propitiatoire de châtiment promis ou accepté, notamment si la condition exprimée ensuite se réalise ; l'expression que le diable vous patafiole est recensée dans des dict. d'argot (Larchey qui donne patafioler "écraser" comme mot provençal, Rigaud, Delesalle qui donne patafioler "confondre, mettre dedans, enfoncer") avant 1897, puis dans le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France, qui évoque patafioler "ennuyer" en Bourgogne, et dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
patalons [n. m. pl.]  :déformation de la prononciation de pantalons [R2v212 (l'emploi au pluriel étant fréquent dans l'usage pop.)].
patelin [n. m. ]
pays [Dv102 («  pat'lin jonquille  »)  ; R3v16 («  pat'lin bleu »  ; comprendre « paradis  »), R3v59 (même sens), Fv55 (même sens)]
Remarques)  :mot de l'argot ancien (pasquelin dans Jargon ou Langage de l'Argot reformé 1629-1630), recensé sous la forme patelin dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
289
patte [n. f.]
jambe [SMv8, R3v106]
Remarques)  : cette application pop. et fam. ancienne du mot aux êtres humains dans cette acception ou dans celle de « pied  »est recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
paturons) [n. m. souventpl.]
pieds) [P2v62, MNv62 (voir tricoter)]
Remarques)  : mot déjà recensé dans le Jargon ou Langage de l'Argot reformé 1629-30 et dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite le premier passage des Soliloques.
pavé [n. m.]
sur le pavé
sans domicile (dans la misère) [Ev4 («  su' l' pavé d' bois  »), R2v29] Remarques)  : à partir de l'expression sur le pavé attestée anciennement et encore recensée dans Delesalle («  être misérable  »), Jehan Rictus fait de son Pauvre sans domicile « l'Empereur du pavé  » [MNv17].
payer [v.]
I. payer la casse
donner de soi en réparation [Ev83]
Remarques)  : expression figurée fam. courante dont ce passage des Soliloques offre une attestation littéraire intéressante.
II. payer de sa peau [voir peau]
III. 1 ° a) se payer ggch
s'offrir (même si le complément ne s'achète pas), se passer la fantaisie de [R2v5 («  eun' fugue  »)]
Remarques)  :expression figurée pop. et fam. recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
b) s'en payer une tranche
s'offrir une partie de plaisir [P1v177]
Remarques)  : expression pop. et fam. recensée dans des dict. d'argot de l'époque (Dictionnaire thématique de Lermina & Lévêque, Vocabulaire de la langue verte d'Hector France), puis dans Bruant  ; ce passage des Soliloques en donne une attestation littéraire intéressante non relevée dans le Trésor de la langue française.
IV. se payer la tête de qqn
se moquer de [R2v107]
Remarques)  : expression fam. recensée dans la partie français-argot du Delesalle avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
290 peau [n. f.]
I. 1 ° ma peau, ta peau,... ou la peau de qqn
moi, toi, lui ou ma, ta, sa personne ou ma, ta, sa vie [Ev150 («  j' donn'rais pas deux ronds d' ma peau  »), R2v263 («  gare à ta peau  !  »)]
Remarques)  :Jehan Rictus joue aussi sur le sens propre du mot peau quand il recourt à cet emploi métonymique fam. très ancien de peau pour renvoyer à l'individu entier et notamment à sa vie.
2° vivre de la peau de qqn
parasiter qqn [Hv84 (au sens propre pour les poux de cette comparaison)] Remarques)  :Jehan Rictus joue aussi sur l'expression figurée vivre (ou autre verbe) sur la peau de qqn où peau renvoie par métonymie à l'individu entier (dépouillé).
3° payer de sa peau
se dévouer en donnant beaucoup de sa personne [Hv128, R2v173] Remarques)  : là encore, dans cette expression figurée rarement décrite dans les dict., peau renvoie par métonymie à l'individu entier, mais Jehan Rictus joue en même temps sur le fait que le Pauvre n'a plus que sa peau.
4° a) se faire crever la peau
se faire tuer [Ev131]
Remarques)  : forme passive de l'expression métonymique crever la peau "tuer" (voir aussi crever), bien attestée au XIXe siècle et recensée dans Delesalle avant 1897, puis dans Bruant.
b) truffer la peau
bourrer de coups [Fv22]
Remarques)  :Jehan Rictus offre une attestation littéraire intéressante pour cette acception figurée particulière du verbe truffer, bien attestée ensuite.
II. la peau  !
rien [Ev24]
Remarques)  : avec cette expression recensée dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, Jehan Rictus joue en même temps sur le sens propre du mot (caresses sur la peau).
pègre [n. m.]
voleur [Hv17, SMv86, Dv23]
Remarques)  :mot recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
peine [loc. adv.]  :réduction syntaxique pop. de la loc. adv. à peine [MPv39].

peloter [v. ]
caresser (souvent avec valeur érotique) [P1v191]
Remarques)  : mot expressif fam. recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
291
pelure (p'lur') [n. f.]
manteau, redingote (vêtement de dessus) [Dv42, P1v22, P1v69]
Remarques)  :mot recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle), puis dans Bruant.
pénars [adj. et n.]
en pénars
tranquillement [R1v84]
Remarques)  :pénard (ou peinard ; pénars est très inhabituel) est recensé avec l'acception "tranquille" dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui donnera aussi en pénard ou en peinard "clandestinement, discrètement, prudemment" et "doucement".
pense-à-rien [n. comp.]
[individu] insouciant [P2v5]
Remarques)  :mot composé sans doute forgé par Jehan Rictus.
pépin [n. m.]
1° passion (au sens large) [MNv9]
Remarques)  :cette acception élargie par rapport à la valeur amoureuse est recensée en même temps que la seconde dans Supplément de Larchey, puis, moins distinctement, dans Delesalle et dans Bruant.
2° avoir un pépin
être amoureux (ou amoureuse) [Dv113, R2v132]
Remarques)  :expression fam. recensée dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, Delesalle) peu avant 1897, puis dans Bruant.
périr (se) [v. pron.]
se suicider [SMv116]
Remarques)  : construction pronominale pop. et déjà plutôt vieillie (ou du moins régionale) à la fin du XIXe siècle.
perlo [n. m.]
tabac [Dv152, P2v13]
Remarques)  : substitut pop. recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite le premier passage des Soliloques.
perrugue [n. f.]  :prononciation pop. relâchée de perruque [R2v4].
persécussion [n. f.]
percussion/persécution [Ev98]
Remarques)  :cet à-peu-près d'humour noir formant mot-valise est peut-être une trouvaille de Jehan Rictus, bien dans la veine de l'époque.
pet [n. m.]
1 ° gn'a pas de pet, y a pas de pet
il n'y a pas de danger (que) ("cela ne se produira pas") [CCv109, Epv124]
292
Remarques)  :l'expression pop. (il) y a du pet est recensée comme substitut de l'expression il y a du danger au sens propre dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant ; la tournure négative apparaît dans Delesalle et dans un exemple du Bruant sans qu'y soit précisé l'élargissement de sens constatable dans les Soliloques.
2° pet  !
attention  ! [R2v34]
Remarques)  : la tournure interjective, évoquée peu clairement comme substitut de vesse  !par Larchey dans le langage écolier, apparaîtra dans les dictionnaires d'argot de la fin du siècle (Dictionnaire thématique de Lermina & Lévêque, Vocabulaire de la langue verte d'Hector France, puis Bruant).
pétant [participe employé comme adj.]
pétant (de +nom)
éclatant (de +nom) [CCv37 («  d' jeunesse  »)]
Remarques)  :emploi figuré pop. et fam. bien attesté au XIXe siècle et dont ce passage offre une attestation littéraire intéressante.
pétarader [v. ]
émettre une série de pets [Epv19]
Remarques)  : Jehan Rictus applique au cavalier ce qui est l'apanage de l'animal.
pétard [n. m. ]
1° bruit, tapage [MNv47]
Remarques)  : substitut expressif recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Richepin, Delesalle, Bruant) avant 1903.
2° faire du pétard
faire un éclat [Epv112]
Remarques)  : cette expression recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897 sera reprise dans le Bruant, qui illustre l'acception "bruit" avec cet extrait politique des Soliloques où Jaurès est mis en scène.
pétardier [adj.]
bruyant, tapageur [MNv14]
Remarques)  :mot recensé dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, Delesalle, Bruant) avant 1903.
péter [v.]
1° éclater [R3v3]
Remarques)  :acception attestée anciennement (XVie siècle), jugée plus ou moins fam. selon ses emplois.
2° s'en faire péter
manger jusqu'à risquer de se faire éclater le ventre [MPv51]
293
Remarques)  : l'expression figurée (hyperbole et métonymie) est recensée sous des formes plus complètes avec divers compléments (cylindre, sous- ventrière, ventre) dans des dict. d'argot (Dictionnaire de la langue verte de Delvau 1866, Vocabulaire thématique de Lermina & Lévêque, Vocabulaire de la langue verte d'Hector France, Bruant) avant 1903.
petiot (petiot) [adj. et n.]
petit [MMv90 («  p'tiot's  » à propos de maisons), MPv72 («  s' fair' petiots  »), SCAv42 («  mes p'tiots  »)]
Remarques)  :dérivé diminutif ancien avec forte valeur hypocoristique.
petit (p'tit) [adj. et n.]  : Jehan Rictus, qui donne souvent le mot dans sa graphie p'tit représentant sa prononciation courante (mais voir aussi 'tit), utilise celui-ci dans ses emplois courants, y compris avec ses valeurs modalisatrices affectives, par exemple dans « Mon p'tit " Mané, Thécel, Pharès " » (Hv148) ou dans « mon p'tit Pèr' (ça c'est très russe)  » à propos du tsar (Epv163).
petsouille [n.]
imbécile, badaud [Epv35]
Remarques)  :plutôt que dans l'acception "paysan, campagnard" relevée dans Larchey et Rigaud, puis dans Bruant, Jehan Rictus emploie cette variante de pedzouille dans le sens péjoratif élargi "badaud (imbécile)" recensé dans Delesalle (signalé dans Dictionnaire d'argot fin-de-siècle 1894 de Virmaître).
peupe [n. m.]  :prononciation pop. de peuple [EpvS].
pèze [n. m.]
argent [R2v95, P3v100, Epv94]
Remarques)  : substitut expressif recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
phalzar [n. m.]
pantalon [P1v76]
Remarques)  :variante graphique de falzar, substitut expressif recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
phizolof [n.]  : déformation (métathèse) de philosophe (pris au sens large "individu qui ne s'en fait pas") [P1v208], prêtée par l'auteur au langage pop.
phizolofie [n. f.]  : déformation (métathèse) de philosophie [E86, Epv157], prêtée par l'auteur au langage populaire.
piailler [v. ]
criailler [SMv54, IPv31]
Remarques)  : application courante du verbe à des êtres humains et comparaison explicite avec des porcs dans le premier passage.
294
piaule [n. f.]
chambre [R2v220]
Remarques)  :mot expressif attesté depuis le XVIIe siècle (piolle dans .jargon ou Langage de l'Argot reformé de 1629-1630) avec le sens "cabaret" et recensé aussi avec l'acception "chambre" dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
pied [n. m.]
I. 1 ° avoir les pieds en dentelles
ne pas s'engager [R2v179]
Remarques)  : l'expression figurée, qui repose sur le sens métaphorique "délicat" de la locution en dentelles, sera recensée dans le Bruant, avec citation de ce passage des Soliloques.
2° avoir les pieds nickelés
ne pas s'engager [R2v178]
Remarques)  : l'expression figurée (où nickelé serait, selon Esnault, une réinterprétation erronée de niclé "noué") sera recensée dans le Dictionnaire thématique de Lermina & Lévêque (1897), puis dans Bruant avec citation de ce passage des Soliloques.
II. faire le pied de grue
attendre [MMv79]
Remarques)  :expression métaphorique attestée anciennement (déb. XVIIe) et devenue courante.
pied de grue [voir faire le pied de grue à pied]
Pierrot [n. m.]
moineau [Fv12]
Remarques)  :peut-être faut-il percevoir aussi, par métaphore, le sens "bleu (petit soldat débutant)" derrière l'acception courante ancienne renvoyant à ces petits oiseaux fragilisés par le froid, auxquels Richepin avait déjà comparé les enfants de miséreux dans sa « Ballade pour les pauvres petits Pierrots  ».
pieu [n. m.]
lit [R2v28, R2v220, MPv68]
Remarques)  :cette forme moderne pop. de pian "lit" (.jargon ou Langage de l'Argot reformé 1629-1630) est recensée dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant ; Jehan Rictus forge aussi, avec ce mot, la périphrase marquis Dolent de Cherche-Pieu [MNv19].
pige [n. f.]
faire la pige à
se montrer supérieur à [P1v197]
Remarques)  :expression pop. et fam. recensée dans Delesalle avant 1897, puis dans Bruant (Supplément de 1905).
295

piler [v.]
écraser [MMv110 (« pilés  »), Epv36 (« piler les goigts d' pieds  »)] Remarques)  :dans le premier passage, l'élargissement de sens est associé à une comparaison explicite et marque l'exploitation des ouvriers  ; dans le second, bien que la tournure soit plus courante, l'élargissement est toutefois senti comme figuré à tel point que l'acception sera recensée dans le Dictionnaire thématique de Lermina & Lévêque (1897), puis dans Bruant, qui l'illustrera en citant ces vers des éditions de 1897 des Soliloques.
pilonner [v.]
piétiner, fouler [Ev175 («  la boue  »)]
Remarques)  :Jehan Rictus associe cet emploi transitif figuré à l'acception, figurée elle aussi, du verbe intransitif ("mendier, vagabonder"), recensée dans Delesalle avant 1897, puis dans Bruant.
pioncer [v.]
dormir [Ev133, R3v109, CCv4, MMv67, Fv29]
Remarques)  : peut-être variante nasalisée (sous l'influence de ronfler) du verbe plus ancien piausser (.jargon ou Langage de l'Argot reformé 1629- 1630), ce substitut expressif pop. est bien attesté au XIXe siècle et recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
pipelet [n. m.]
concierge [MNv67, MPv22, SCAv13]
Remarques)  : ce substitut pop. dérivé par antonomase du nom d'un concierge dans les Mystères de Paris d'Eugène Sue est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite le troisième passage, seul présent dans les éditions de 1897 des Soliloques.
piper [v.]
parler, dire ggch [R2v242]
Remarques)  :cette acception ancienne prise par le verbe piper "pousser de petits cris" (notamment dans des expressions comme sans piper mot) est encore recensée dans Delesalle avant 1897 («  Il n'a pas pipé, il n'a pas soufflé mot, il n'a pas bronché  ») et dans Bruant.
pipi [n. m.]
1 ° faire pipi
uriner [Fv18]
Remarques)  :mot familier enfantin ancien et courant.
2° a) faire pipi sur
marquer son mépris ou son dédain en urinant (par la parole) sur [Dv99, Fv45] Remarques)  :Jehan Rictus transpose ici dans le vocabulaire enfantin le même emploi, trivial et grossier, du verbe pisser.
296
pis [adv.]  : prononciation pop. et fam. de puis [Hv53 («  Et pis  »), IPv59, SMv73, SMv133, etc.], qui sera recensée dans le Bruant (à ne pas confondre avec pis "pire" [Hv129]).
pisque, pisqu' [conj. de sub.]  :prononciation pop. et fam. de puisque [Dv63, R3v66, Fv67].
pisse-au-pieu [n. comp.]
enfant qui pisse au lit [Fv14]
Remarques)  :mot composé expressif forgé par Jehan Rictus selon les règles et modèles de la composition populaire.
plan [n. m. ]
laisser en plan
abandonner [Epv62]
Remarques)  : en lui donnant comme sujet des « semelles  » qui «  se trott[e]nt  », Jehan Rictus revigore cette expression pop. et fam. bien attestée au XIXe siècle et recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
planque [n. f.]
abri, logement (souvent avec valeur d'asile, de lieu protecteur) [MPv10, Epv94]
Remarques)  :cette acception du mot planque, qui est lui-même relevé dans les Voleurs de Vidocq 1836-37 avec le sens "cachette", est peu à peu identifiée dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
planquer [v.]
1° mettre [R3v6]
Remarques)  : ce substitut expressif résultant probablement d'une fusion de plaquer et planter est recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836- 37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans le Bruant, la plupart du temps en lui associant systématiquement la valeur de cachette, Delesalle étant le seul à identifier séparément le sens élargi.
2° se planquer
se placer [P2v67 («  sur le bitume  »)]
Remarques)  : ce second passage prouve que Jehan Rictus n'associe pas nécessairement au verbe l'idée de cachette, comme le font la plupart des dict. d'argot avant 1897, mais en fait comme une variante de (se) planter.
3° être planqué à la dure
se trouver dans une situation misérable [SMv97]
Remarques)  : là encore, Jehan Rictus privilégie la valeur de fixation sur celle de cachette.
297
planter [v.]
arrive qui plante
advienne que pourra [MNv9]
Remarques)  :expression ancienne recensée dans Oudin 1640, Le Roux 1718 et reprise dans Littré, qui l'associe à l'idée de planter des choux.
plaquer [v.]
abandonner (laisser sur place) [Hv121]
Remarques)  : outre l'emploi du verbe avec son sens courant ("appliquer" IPv15), on le trouve dans les Soliloques avec l'acception expressive "abandonner" recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, mais que le Trésor de la langue française repère dès 1544 dans Calvin.
plat [n. m. ]
(se) faire du plat
(se) courtiser [P1v187]
Remarques)  :peut-être dérivée de tournures anciennes comme donner du plat de la langue "cajoler, flatter" (d'Hautel 1808), l'expression est recensée dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
plâtre [n. m. ]
faire son plâtre
gagner de l'argent [MNv70]
Remarques)  :peut-être dérivé du sens "argent (métal)" mais attesté avant ce dernier, le sens "argent (monnaie)" est recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle, Bruant) avant 1903.
plein [adj. et adv. (avec valeur de prép.)]
I. 1 ° en plein + N
au coeur de, au beau milieu de + GN [Ev38 («  en plein jour  »), Dv6 («  en pleins nichons  »), R1v22 («  en pleine jeunesse  »)]
Remarques)  :tournure expressive ancienne courante.
2° à plein + N
avec tout + GN [R3v65 («  à plein gosier  »)]
Remarques)  :tournure expressive ancienne courante.
II. plein + GN avec déterminant
en plein dans/sur (avec valeur d'abondance) [Dv124 («  plein mes yeux  »), P3v91 (« plein les gencives  »)]
Remarques)  :tournure expressive fam. bien attestée au XIXe siècle.
ployants) [participe-adj. employé comme n. m.]
genoux) [Dv26]
Remarques)  : nom qualifiant forgé par l'auteur comme substitut expressif (inconnu des dict. d'argot avant et après 1897).
298 plumard [n. m.]
lit [Dv122, CCv65, MMv53, MPv73, MPv112]
Remarques)  :substitut expressif pop. recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
plumer (se) [v.]
se mettre au lit [Dv164, P2v57, MMv36]
Remarques)  :substitut expressif pop. recensé dans Delesalle avant 1897, puis dans Bruant.
pognon [n. m.]
1° argent (monnaie) [R1v56, P1v123]
Remarques)  :substitut pop. recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, qui donne poignon, et Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
2° sans pognon [voir sans-pognon]
poignet [n. m. converti en faux nom propre]
Mame (= Madame) Poignet
main (quand elle sert à la masturbation) [Dv155]
Remarques)  : périphrase plaisante antonomastique recensée dans des dict. d'argot (Larchey qui donne Mme veuve Poignet, Rigaud, Delesalle qui donne épouser la veuve Poignet) avant 1897, puis dans Bruant (veuve Poignet).
poil [n. m. ]
I. à poils
1° nu [R2v188, variante c de CCv90 (voir p. 186)]
Remarques)  : expression pop. recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant (voir 2°).
2° se mettre à poils
se déshabiller [Hv2]
Remarques)  : expression pop. recensée dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
II. le (ou du) poil (de)
le (ou du) courage (pour) [EvS, R3v140]
Remarques)  :tournure pop. recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
poilu [adj. employé comme n.]
[individu] courageux [R1v56]
Remarques)  : à côté du sens propre [Ev92], on trouve dans les Soliloques ce sens figuré (métonymie du poil comme marque de courage viril), bien attesté au XIXe siècle (le Trésor de la langue française cite Balzac 1835 pour l'adj. et ce passage de Jehan Rictus pour le nom) et qui sera recensé dans Bruant.
299
poire [n. f.]
I. 1 ° tête, figure [Epv58] (voir aussi se téter la poire à téter) Remarques)  :acception figurée ( !) bien attestée au XIXe siècle (caricature de Louis-Philippe) et recensée dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
2° faire sa poire
se donner de grands airs [Dv92, Plv7, Epv159]
Remarques)  :expression recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite le troisième passage (éd. de 1897) des Soliloques (article bégueule).
II. imbécile [IPv55, Ev113]
Remarques)  :acception figurée attestée à la fin du XIXe siècle (notamment dans l'expression bonne poire) et recensée dans Delesalle avant 1897, puis dans Bruant.
poireau [n. m.]
I. 1 ° faire le poireau
(rester planté à) attendre [SMv70]
Remarques)  : en ajoutant le complément « d'amour » et en jouant sans doute en même temps sur l'acception poireau "membre viril" (également soupçonnable dans P1v55-56 où les becs de gaz, au printemps, « ont envie d' finir poireaux  »), Jehan Rictus revigore cette expression recensée dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
2° individu naïf (qui attend ggch) [R2v45, CCv70]
Remarques)  :dans le premier passage où l'on relève cette acception figurée sans doute dérivée de l'expression précédente et qui sera recensée dans Bruant, Jehan Rictus joue sur l'association équivoque (les vers du poireau /les vers du poète).
poireauter [v.]
(rester planté à) attendre [R2v157, MNv67, MMv39]
Remarques)  : dérivé pop. recensé, parfois sous les variantes poiroter et poirotter, dans des dict. d'argot (Supplément de Larehey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
poisser [v.]
arrêter [Ev207]
Remarques)  : acception recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques rendu plus expressif par l'association avec Poissy (nom de prison).
poivrot [n.]
ivrogne [SMv28, CCv95, MNv73]
300
Remarques)  :mot pop. recensé, après poivrier (même sens) donné par Les Voleurs de Vidocq 1836-37, dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
Polichinelle (Porchinelle dans le texte, par déformation pop.) [n. m.] avoir un Polichinelle dans le tiroir
être enceinte [Fv36]
Remarques)  :dans ce passage, Jehan Rictus revigore avec un humour noir morbide l'expression figurée avoir un Polichinelle dans le tiroir (voir aussi tiroir), recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
Polonais [n.]
être Polonais pour la cuite
se soûler comme un Polonais [Epv24]
Remarques)  : la réputation des Polonais en matière d'excès de boisson est une représentation bien attestée au XIXe siècle et qui a donné lieu à diverses expressions telles que plein comme un Polonais, recensée dans la partie français-argot du Delesalle avant 1897, puis dans Bruant.
pomme [n. f.]
des pommes  !
rien  ! [R2v175]
Remarques)  : l'expression c'est comme des pommes est donnée comme synonyme de Il n ÿ a rien de fait dans Delesalle avant d'être reprise dans Bruant.
pompon [n. m.]
à lui le pompon  !
à lui l'honneur (le premier rang) [Hv69]
Remarques)  :expression recensée dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
pondre [v.]
mettre au monde [R1v15]
Remarques)  :substitut expressif pop. lié à pondeuse "femme qui a souvent des enfants" (Larchey, Rigaud, Delesalle, Bruant) et recensé dans Delesalle avant 1897, puis dans Bruant.
poperiétaire [n.]  :déformation amusée de propriétaire [variante b de 1897 pour P1v203 (voir p. 183) ;voir autre variante dans l'article suivant].
popiétaire [n.]  :déformation amusée de propriétaire [P1v203].
populo [n. m.]
peuple [P2v11-16, MMv102, Epv110]
Remarques)  : ce substitut expressif pop., formé sur populaire (n. m., même sens) avec apocope et resuffixation, est recensé dans des dict. d'argot
301
(Dictionnaire de la langue verte de Delvau 1866, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
Porchinelle [voir Polichinelle]
porquoi [adv. interrogatif et n.]  :prononciation pop. de pourquoi (souvent renforcé par que) [Ev83, Ev97, P3v103, P3v126-127, P3v150].
poser un lapin [voir lapin]
poteau [n. m.]
camarade [P3v41]
Remarques)  : cette métaphore, déjà attestée en ancien français, a repris vigueur à la fin du XIXe siècle, où elle est recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant qui l'utilise en outre souvent dans ses exemples et citations.
poubelle [n. f.]
boîte à ordures [P1v116]
Remarques)  : ce néologisme, formé par antonomase à partir du nom du préfet qui a imposé l'utilisation de cet ustensile (1883), a vite perdu toute valeur expressive, mais est recensé dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
pouce [n. m.]
se tourner les pouces en rond
ne rien faire [Ev118]
Remarques)  : expression figurée bien attestée et répandue dans l'usage courant au XIXe siècle.
pouf  ! [interjection]
(exprimant la soudaineté de l'action) [P1v200]
Remarques)  : onomatopée ancienne relevée dans le Dictionnaire des onomatopées de Enckell et Rézeau (2003), qui illustre cet emploi par ce passage des Soliloques.
pouffiasse [n. f.]
femme de mauvaise vie [Ev195]
Remarques)  :mot expressif pop. bien attesté au XIXe siècle et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
Poyésie [n. f.]  :déformation ironique de la prononciation de poésie [Epv49].
pratique [n. f.]
agissement douteux [Ev68]
Remarques)  : le contexte laisse à penser qu'il s'agit de cet emploi péjoratif courant au XIXe siècle plutôt que de pratique "vaurien" recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle, Bruant).
302
prendre [v.]
I. être frappé, recevoir des coups (même au sens figuré) [Dv81] Remarques)  :emploi fam. courant.
II. si je n'ai pas le droit, je le prends [voir droit]
preumier [adj. et n.]  : transcription de la prononciation pop. allongée de premier [SMv123, Ev84, P1v158, P2v58, MMv22].
probloque [n.]
propriétaire [CCv95, Epv136]
Remarques)  : ce substitut expressif fm-de-siècle, dérivé par déformation avec apocope et adjonction d'un appendice expressif, est recensé dans des dict. d'argot (Dictionnaire d'argot fin-de-siècle 1894 de Virmaître, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
proprio [n.]
propriétaire [MMv116, MPv22]
Remarques)  : ce substitut expressif, dérivé par déformation avec apocope et suffixation en ~, est recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
p'têt' [adv.]  :déformation pop. et fam. de peut-être [Hv61, SMvl, v7, v13 («  p'têt' ben  »), Ev32 («  à la p'têt'-bien  »  ;voir à), Ev169, etc.].
p'tiot [voir petiot], p'tit [voir petit]
puer [v.]
puer bon
sentir bon [P1v145]
Remarques)  :expressif en soi, le verbe puer "sentir mauvais" [MMv86] est parfois employé avec l'adverbe bon par oxymore (emploi signalé dans Larchey et Delesalle avant 1897).
puïe [n. f.]  :prononciation pop. relâchée de pluie [SMv77, P1v30].
punaise [n. f.]
femme mal considérée (avec valeur possible de prostitution) [SMv50] Remarques)  :acception figurée recensée dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
pupart (la) [prou. indéfini]  : sur le modèle de plus > pus (voir pus lL), réduction phonétique de plupart en prononciation pop. fort marquée [MNv85].
pure [n. f.] misère [R2v93]
303
Remarques)  :dérivé par apocope de purée (même sens ;voir ce mot) avec équivoque antiphrastique (pur signifiait "élégant" à cette époque), ce mot fen- de-siècle sera recensé dans Bruant.
purée [n. f.]
misère [Hv12, Hv100, Dv48, P3v6, CCv50]
Remarques)  :substitut expressif (métaphore) recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
purin [n. m.]
liquide s'écoulant du fumier [Ev133]
Remarques)  :sens figuré (métaphorique) bien attesté à la fin du XIXe siècle et dont ce passage des Soliloques offre une attestation littéraire intéressante.
purotain [n.]
miséreux [Hv12, Hv133, Ev34, R1v14, MMv80]
Remarques)  : ce dérivé de purot "fosse à purin" jouant sur l'association avec purée "misère" est recensé, également sous la forme purotin, dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
pus I. [adv. dans négation]
1° a) plus (sans [s] final) dans ne... plus avec ne exprimé [Hv2 («  n' pus s'mettre  »), Hv91 («  y gn'aurait pus d' misère  »), etc.]
Remarques)  :réduction phonétique en prononciation pop.
b) plus (sans [s] final) dans ne... plus avec ne supprimé [Hv141 («  Je veux pus êt' des Écrasés  »), SMv2 («  qui croit pus à grand' chose  »), etc.] Remarques)  : la suppression de ne entraîne rarement une confusion avec pus lI.
pus lI. [adv. intensif ou quantitatif non négatif]
plus (avec [s] final non prononcé dans de nombreux contextes) [Hv39 («  le pus pratique  »), Hv83 («  pus tocs que nous sommes  »), Hv95 («  Ça rapport' pus qu' la Poésie  »), Hv104 («  Qu'un jour la Vie a soye pus gaie  »), SMv10- 12 («  pus...pus  » en corrélation), etc.]
Remarques)  :réduction phonétique en prononciation pop. fort marquée.
putain [n. f.]
1 ° femme de moeurs faciles (et, en particulier, femme se livrant à la prostitution) [Hv10, Dv142]
Remarques)  :pour ce mot d'ancien français si répandu dans l'usage qu'il est rarement recensé dans les dict. d'argot, il n'est pas toujours facile de distinguer si Jehan Rictus lui donne une valeur plus restreinte de prostitution.
2° putain de... (+nom)
(formule stigmatisant le référent du complément) [SMv83, Plv3]
304
Remarques)  :attestations littéraires intéressantes ignorées des dictionnaires pour cette construction dite « qualitative  » dont le Trésor de la langue française ne relève pas de citations antérieures à 1863.
putôt [adv.]  :sur le modèle de plus > pus (voir pus II.), réduction phonétique de plutôt en prononciation pop. fort marquée [R1v41, R2v192, P3v133].
Q —

qu' I.  :élision régulière devant voyelle et réduction fréquente devant consonne de que (voir plus particulièrement que I. et que II.).
qu' II. [prou. relat. sujet]  :réduction courante du pronom relatif sujet qui devant voyelle dans l'usage oral relâché [Hv13 («  ceuss' qu'a d' la guigne  »), Hv103 («  y a quèt' chos' qu'empêche  »), IPvl l («  un qu'a pas bouffé  »), etc.].
quand [conj. de sub.]
1° quand que [voir que I.]
2° quand gn'en a pus... gn'en a encore [voir gn'en a]
que I. [second élément formant loc. conj. de sub. ou subordonnant remplaçant le prou. relatif]
I. 1 ° quand que
quand [MNv74, MNv86, MMv4, MMv130, MPv27, MPv52, MPv99] Remarques)  :extension du second élément des loc. conj. de sub. (avant que, après que, depuis que, etc.) derrière quand ; Jehan Rictus n'exploite pas ce trait populaire derrière quand avant le poème « Les Masons  » (éd. de 1903).
2° a) si que
si [Rlv7, v19-20, v37, v69, v74, v82 («  si qu'y r'viendrait  »), R2v52 («  si qu'on s'rait amis  »), R3v1 et v6, P1v71 («  Si qu'a fait peau neuv' la Nature  »), P1v170, Epv3 et v6, Epv154]
Remarques)  :extension du second élément des loc. conj. de sub. (pourvu que, à condition que, etc.) derrière si, dont les emplois ne sont pas toujours ceux d'une simple conj. de sub. (à «  si qu'y r'viendrait  » ne correspond pas toujours de « principale  » ; «  si qu'on s'rait amis  »est une... « proposition  »  ; etc.).
b) comme si que
comme si [Ev188 («  Comm' si qu' j'aye épousé un flic  »), P3v122 («  Comm' si qu'y s'rait près d' son trépas  »)]
Remarques)  :voir 2° a).
c) même si +que
même si [P3v37 («  Mêm' si qu'un jour j' tournais au riche  »)] Remarques)  :voir 2° a).
305
II. moi que je
moi qui [CCv35 («  moi que j'ai l'air  »), CCvl l l («  Et moi qu' j'allais p'têt' arr'sauter  »)]
Remarques)  : le dédoublement, après un premier pronom personnel accentué, du pronom relatif en que +pronom personnel clitique (ici sujet, mais complément est possible) est une caractéristique courante dans l'usage pop., mais rare dans les Soliloques.
que II. [particule de détachement (hormis cas (plus) réguliers avec présentatifs dans c'est...que, voilà... que, etc.)]
I. devant incise (avec suppression de l'inversion du sujet)
qu ÿ disent
disent-ils [P1v113]
Remarques)  :tournure narrative courante dans l'usage oral pop.
II. en interrogative (ou exclamative) derrière pronoms ou adverbes non renforcés par est-ce-que  :comment +que [Evl («  Comment qu' ça s' fait qu' les taciturnes...  »), etc.] ; où +que [SCAv34 («  Où qu' tu veux que j' pouss' mes faux airs  ?  »)] ; porquoi +que [Ev83 («  Porquoi qu'y faut payer la casse  »), etc.] ;quoi +que [IPv47 («  quoi donc qu'y z'ont fait  »), R2v201 («  quoi qu' tu vas foutre  ?  »), etc.], etc.
Remarques)  : tournure de détachement courante dans l'usage oral pop.  ; Jehan Rictus emploie aussi parfois le renforcement avec présentatif c'est que (sans l'inversion est-ce-que)  : quand c'est que [Ev96 («  Quand c'est qu'on s'ra vengés  ?  »), d'où c'est que [Dv16 («  D'où c'est qu' tu viens  ?  »)], quoi c'est que [P2v53 («  quoi c'est qu'embaume  ?  »)], etc. (voir aussi ousque).
III. en relative, derrière pronom relatif, que jouant alors aussi un rôle de renforcement du subordonnant  : où +que [SMv60-61 («  l'Époque // Où qu' les z'Homm's y s'ront tous frangins, // Où qu' les Nations s' pass'ront des langues  »), etc.] ; à qui +que [MPv7-8 («  Pour les Pâles, les Désolés, // A qui qu'on a toujours menti  »), MPv76-77 (« Des rouquins, des brun's et des blondes // À qui qu'on pourrait dir' — « Moman  !  »), Fv2-3 («  Les p'tits flaupés... les p'tits foutus // A qui qu'on flanqu' sur le tu-tu  »)].
Remarques)  :tournure de détachement courante dans l'usage oral pop.
qué [adj. exclam.]  :réduction phonétique expressive de quel /quelle devant consonne dans la prononciation pop. [Dv94 («  Qué Sologne  »), Dv139 («  qué coup d' traversin  »), R1v86 («  Qué coup d' Trafalgar  »), R2v17-18 («  Qué chahut  » et «  qué bouzin  »), R2v145 («  qué désastre  »), P1v215 («  Qué moeurs étranges  »), etc.].
quéqu' I. [adj. indéfini]  :réduction phonétique courante de quelques) dans l'usage oral pop. [Ev203 («  quéqu' soir  »), R1v83 («  quéqu' jour  »), R3v2 et v7 («  quéqu' nuit  »), P1v33 («  quéqu's z'années  »), etc.] (voir aussi quéqu' chose et quéqu' part).
quéqu' II. [prou. interrogatif renforcé]  :réduction phonétique courante de qu'est-ce que dans l'usage oral pop. [R2v73].
306
quéqu' chose (ou quèqu' chose) [prou. indéfini]  : réduction phonétique courante de quelque chose dans l'usage pop. [Ev55, R3v51, R3v115, P1v154] (voir aussi quét' chose).
quéqu' part [loc. adv.]  :réduction phonétique courante de quelque part dans l'usage pop. [Ev46].
quéqu'un, quéqu's-uns [prou. indéfini]  :réduction phonétique pop. courante de quelqu'un [R2v247, Epv30] et de quelques-uns [Ev125, P3v42].
quét' chose (ou quèt' chose) [prou. indéfinz~  : réduction et déformation phonétiques courantes de quelque chose dans l'usage pop. [Hv103, P1v54, MNv89].
queue [n. f.]
1° faire des queues
faire des infidélités, tromper [Ev184]
Remarques)  :expression ancienne recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
2° tenir la queue de la poêle
commander, gouverner [Hv3]
Remarques)  : expression métaphorique familière ancienne, attestée dans Balzac en 1837 (voir Trésor de la langue française).
quiens  ! [interjection]  :déformation phonétique pop. (palatalisation) de tiens  ! (marquant diverses réactions de l'énonciateur par rapport à une situation) [Hv41, Dv13, Dv93, R2v254, R3v91].
quient [forme pop. du verbe tenir]  :extension de la déformation précédente à la forme tient de 3e pers. du sg du présent du verbe à l'indicatif [Dv130].
qui-qui [n. m. ]
gorge, gosier [variante b de P3v66 (voir p. 184)]
Remarques)  : Jehan Rictus a remplacé par gaviot à partir de 1903 ce nom pop. expressif recensé dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui préfère la forme kiki (on trouve aussi quiqui sans trait d'union).
— R —

râbe [n. m.]  :déformation dans la prononciation pop. de râble [Ev90 (pour des humains ;voir râble), P1v213 (pour des chiens)].
râble [n. m. ] dos [Ev90]
307
Remarques)  : l'emploi fam. du mot comme substitut expressif de dos est attesté anciennement (Le Roux 1718) et relevé dans Delesalle avant 1897, puis dans Bruant (sous les formes râbe et râpe) ;les Soliloques offrent ici, qui plus est, une attestation littéraire intéressante de la substitution de râble à dos dans l'expression figurée sur le dos de qqn "aux dépens de qqn".
raccourci [participe-adj. employé comme n.]
guillotiné [R3v24]
Remarques)  : à partir du verbe raccourcir "guillotiner" qui est bien attesté après la Révolution de 1789 et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, le nom n'a sans doute pas été créé par Jehan Rictus, mais les Soliloques en fournissent une attestation littéraire intéressante.
radiner [v.]
arriver, revenir [P 1 v64]
Remarques)  : substitut expressif recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Richepin, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant qui cite ce passage des Soliloques.
radis [n. m.]
sou [SCAv44]
Remarques)  :substitut expressif pop. bien attesté à partir du milieu du XIXe siècle, notamment dans l'expression (n'avoir) pas (ou plus) un radis, et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
raffût [n. m.]
tapage [Ev191]
Remarques)  :mot pop. expressif recensé sans accent circonflexe (raffut) dans des dict. d'argot (Dictionnaire de la langue verte de Delvau 1866, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
râfler [v.]
tout emporter (valeur fréquente de vol) [SCAv18]
Remarques)  : verbe pop. et fam. attesté sans accent circonflexe (rafler) depuis 1573 (selon le Trésor de la langue française) et recensé dans Le Roux 1718 avant d'être repris dans Delesalle avant 1897, puis dans Bruant.
rampe [n. f.]
lâcher la rampe
mourir [P2v82]
Remarques)  :expression métaphorique recensée, souvent à l'article lâcher, dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
rapin [n. m.]
apprenti peintre ou peintre sans talent [SMv26]
308
Remarques)  : ce mot, qui a désigné d'abord les apprentis peintres et a pris ensuite un sens péjoratif plus large, est bien attesté depuis le début du XIXe siècle et parfois recensé dans des dict. d'argot (Larchey, partie français-argot du Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
rappliquer [v.]
arriver, revenir [R2v26 (suivi de chaud employé adverbialement), P2v1] Remarques)  :substitut expressif recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larehey, Rigaud, Richepin, Delesalle), puis dans Bruant, qui cite le premier passage des Soliloques.
rapport à [loc. prép.]
à cause de [P1v31, P3v120]
Remarques)  :tournure syntaxique pop. et fam. bien attestée au XIXe siècle, mais qui est passée inaperçue des dict. d'argot, même si le Bruant l'emploie dans une citation et recense rapport que dans le Supplément de 1905.
rasta [n. ]
aventurier douteux qui se donne de grands airs [SMv26, Epv93]
Remarques)  : ce mot fin-de-siècle (Jehan Rictus le donne entre guillemets, puis en italiques), dérivé par apocope de rastaquouère (même sens, voir article suivant), est recensé dans Delesalle avant 1897, puis dans le Dictionnaire thématique de Lennina & Lévêque (1897), dans Bruant et dans le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France.
rastagoère [n.]
aventurier douteux qui se donne de grands airs [Hv35]
Remarques)  : ce mot, bien attesté à la fin du XIXe siècle sous diverses formes (rastacouère, rastaquère, rastaquouère, etc.), est recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
raté [participe-adj. et n.]
1° en échec [P3v14]
Remarques)  : à partir du verbe rater bien attesté au XVIIIe siècle dans l'acception "échouer" (dérivée de l'acception "ne pas partir" à propos d'armes à feu), l'emploi du participe comme adj. est devenu si courant dans l'usage fam. au XIXe siècle qu'il n'est pas recensé dans les dict. d'argot.
2° individu qui a échoué dans l'existence [R2v138]
Remarques)  :l'emploi de l'adj. comme nom s'appliquant à des personnes est bien attesté au XIXe siècle et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
ratiboiser [v.]
dépouiller [CCv108]
Remarques)  : ce substitut expressif à large spectre sémantique est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle, puis Bruant) avant 1900.
309
re- [préfixe]
de nouveau
Remarques)  :dans cette acception courante majoritaire, Jehan Rictus emploie très librement le préfixe, ce qui donne des verbes rarement recensés dans des dict. : rebouffer [Epv59], se recavaller [P1v201], rerire [Epv7], retricoter des paturons [MNv62 (voir tricoter)], retéter [Epv58 (voir téter)] etc.
rebiffe [n. f.]
la faire à la reb~e
se révolter [Fv65]
Remarques)  : ce substitut expressif, qui résulte de la conversion du verbe (se) rebiffer "se révolter" (voir article suivant) en nom féminin complément du verbe faire dans une tournure syntaxique elle-même très marquée (voir faire
2°), est recensé dans des dict. d'argot (rebif "vengeance" dans Voleurs de

Vidocq 1836-37 et Larchey, rebiffe "révolte" dans Rigaud, Supplément de Larchey et Delesalle) avant 1897.
rebiffer (se) [v.]
se révolter, regimber [Hv116, P3v84]
Remarques)  : ce verbe expressif très ancien est recensé avec cette acception dans Le Roux 1718 et ensuite, souvent avec le sens "se redresser", dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis comme argotisme dans Bruant, qui le donne aussi comme mot d'entrée du français  !
rebiffer lI. [v.] rebiffer au truc
recommencer, récidiver [variante b de Plv4 (voir p. 181)]
Remarques)  : Jehan Rictus substitue au verbe se renouveler, à partir de
l'édition de 1921, cette expression argotique recensée bien avant dans des

dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle), mais oubliée dans Bruant.
rebouffer [voir re- et bouffer] recavaller (se) [voir re- et cavaler]
redorer [v.]
redorer son blason
relever sa fortune (avec valeur de souci de réputation) [Hv36] Remarques)  :expression figurée (métonymie dans métaphore) courante.
ret'iler [v.]
refiler la comète
être sans domicile fixe, vagabonder [SMv17, Dv53]
Remarques)  :sur l'expression figurée filer la comète (où comète désignait au départ une sorte de ruban), recensée dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, s'est greffé le verbe refiler "suivre", également recensé dans des dict. d'argot (Larchey,
310
Rigaud, Delesalle) ; le Bruant recensera la nouvelle expression, en citant le premier passage des Soliloques.
reguingote [n. f.]
redingote [P1v75]
Remarques)  :cette déformation pop. du nom redingote, lui-même résultant d'une adaptation avec consonance bien française du mot anglais riding-coat, sera recensée dans Bruant (redingote [...] reguingotte) sans aucune remarque (voir aussi requimpette ci-dessous).
réjouissance [n. f.] [voir note 1 p. 66 pour cet emploi dans Dv32]
reluquer [v.]
regarder (avec valeur ajoutée d'un sentiment) [IPvS, CCv103, Epv99] Remarques)  : substitut expressif attesté au XVIIIe siècle et encore recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
repasser [v.]
repasser aux poings
battre[P3v27]
Remarques)  : avant 1897, on trouve avec cette acception ce verbe seul (Supplément de Larchey) ou dans différentes expressions (repasser le buffle dans Le Roux 1718 ; repasser la chemise de sa femme dans Rigaud et Delesalle ; repasser le cuir dans le Dictionnaire thématique de Lermina & Lévêque ;etc.).
repiquer (à) [v.]
se remettre (à), recommencer [Epv6]
Remarques)  : ce verbe expressif ainsi construit ou inclus dans l'expression repiquer au truc se trouve recensé avec cette acception dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
repousser [v.] [voir repousser du flingot à flingot]
repu [participe-adj. employé comme n.]
privilégié [MMv88]
Remarques)  : ce mot est recensé dans l'argot politique par le Bruant avant
1903.
requimpette [n. f.]
redingote [Ev212, Dv35]
Remarques)  : ce substitut expressif de redingote, qui est peut-être d'origine régionale et qui reçoit ici une attestation littéraire intéressante (relevée dans le Trésor de la langue française), sera recensé dans Bruant sous la forme requimpette, avec citation du second passage des Soliloques.
rerire [voir re-]
311
Ressautant [participe-adj. employé comme n. m.]
coeur [Dv79]
Remarques)  : nom qualifiant forgé par Jehan Rictus à partir du verbe ressauter ("sursauter" en région lyonnaise) sur le modèle de mots comme battant, palpitant, etc, recensés dans des dict. d'argot avant 1897.
retapé [participe-adj.]
rénové [MMv23]
Remarques)  :acception fam. du verbe retaper, bien attestée au XIXe siècle dans le domaine du bâtiment et parfois recensée dans des dict. d'argot (retapé "remis à neuf' dans Delesalle) avant 1903.
retricoter [voir re- et tricoter]
revoyure [n. f.]
à la revoyure
au revoir [R2v177]
Remarques)  :substitut expressif pop. bien attesté au XIXe siècle et parfois recensé dans des dict. d'argot (Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
rhumatisse [n. m.]  :déformation de rhumatisme dans la prou. pop. [Ev59].
ribouis [n. m.]
soulier, chaussure (avec valeur d'usure suivie de réparation) [variante b de Ev108 en 1897 (voir p. 174), R2v194, MNv18]
Remarques)  :substitut expressif recensé avec cette acception dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
rien [prou. indéfini employé comme adv. intensif]
vraiment (devant adj.) [Hv79 («  rien chaud  »)]
Remarques)  :emploi antiphrastique pop. bien attesté à la fin du XIXe siècle et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
rif [n. m. ]
feu [Dv151, R2v95]
Remarques)  : substitut attesté en jargon ancien sous les formes rufe (Vie genereuse 1596) et rifle (Vie genereuse 1603, Jargon ou Langage de l'Argot reformé 1629-163) et recensé sous la forme rif dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
rigolade [n. f.]
divertissement [P1v176]
Remarques)  : ce nom dérivé de rigoler (voir ce verbe) est bien attesté avec cette acception au milieu du XIXe siècle et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
312
rigolard [adj.]
qui s'amuse [P1v208]
Remarques)  : ce dérivé expressif de rigoler (voir ce verbe) est recensé dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, mais avec le sens "qui prête à rire, qui déclenche le rire" (synonyme de rigolo) plutôt que le sens "qui s'amuse" (synonyme de rigoleur), dont cette occurrence dans les Soliloques offre une attestation littéraire intéressante.
rigoler [v.]
s'amuser [Hv34, Ev69 (rigoler de)]
Remarques)  : ce verbe pop. et fam. attesté en ancien français est recensé dans Le Roux 1718, puis dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
rigoleur [adj. employé comme n.]
fètard [P1v125]
Remarques)  :cet emploi du dérivé comme substantif avec cette acception est bien attesté au XIXe siècle et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897 (non repris dans Bruant).
rigolo [adj. employé comme n.]
[individu] qui s'amuse, boute-en-train [Hv86, SMv20, SMv115]
Remarques)  : il ne semble pas que Jehan Rictus ajoute, dans aucun passage, la nuance dépréciative forte de dérision ("qui ne peut être pris au sérieux") parfois prise ensuite par ce mot bien attesté au XIXe siècle avec l'acception "personne qui aime s'amuser", recensée dans Larchey avant 1897 (de façon moins évidente dans Rigaud et Delesalle), puis dans Bruant.
rincer [v.]
battre [R2v263]
Remarques)  :acception figurée (métaphore lingère) attestée anciennement et recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
ripaton [n. m.]
pied [MNv39]
Remarques)  : ce mot expressif, qui a d'abord signifié "soulier" (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle, Bruant), a également été recensé avec son acception dérivée dans Rigaud dès 1878.
Robert-Macaire [n. pr.]  :voir note 1 p. 108 pour P1v147 à propos de ce mot formé par anotonomase et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897 (Bruant donne Macaire).
rôdailler [v.]
traîner, rôder çà et là [MMv27]
Remarques)  :dérivé expressif fam. dont ce passage de l'éd. de 1903 fournit une attestation littéraire intéressante.
313
rôde-la-nuit [n.]
vagabond noctambule [MNv23]
Remarques)  :nom composé expressif créé par Jehan Rictus conformément aux règles de la composition dite populaire.
rognon [n. m.]
1° rein [Hv71, MNv6]
Remarques)  : ce mot s'appliquait dès l'ancien français aux êtres humains et aux animaux dans cette acception qui est la plus probable pour ces deux passages.
2° testicule [P1v153, P3v92]
Remarques)  : cette acception figurée (métaphore de forme) est plus probable pour ces deux passages et surtout pour le second, ce qui offre des attestations littéraires intéressantes, alors que le Trésor de la langue française cite un exemple du dictionnaire d'argot de Le Breton 1960.
rond [n. m.]
1° sou [SMv101 («  deux ronds d' tendresse  »), Ev150 (ne pas donner deux ronds de...), P2v13 («  deux ronds d' perlo  ») et v15 («  Deux ronds d' musique  »)]
Remarques)  : ce substitut figuré (métonymie de forme) pop., déjà attesté en jargon ancien (Vie genereuse 1596, puis .jargon ou Langage de l'Argot reformé 1629-1630), est recensé ensuite dans tous les dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
2° ne pas (ou ne plus) avoir le rond
être sans argent [P3v112, MMv136, MPv99]
Remarques)  :cette expression pop. courante, qui a contribué à élargir le sens du mot rond ("argent"), est mal décrite dans les dict. d'argot avant 1897, Rigaud donnant pas le rond « pas le sou » ; les Soliloques offrent ici des attestations littéraires intéressantes, alors que le Trésor de la langue française cite seulement Léon Bloy 1897 employant la même formule que Rigaud.
rond-de-cuir [n. m.]
employé de bureau (avec valeur péjorative de fainéantise) [MPv16, Epv119] Remarques)  : acception figurée (métonymie donnant le nom de l'objet à l'individu qui l'utilise) péjorative, recensée dans des dict. d'argot (Supplément de 1883 par Fustier au Dictionnaire de la langue verte de Delvau, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897.
Ronde [adj. employé comme n. f.]
Terre [variante e de R2v236 dans l'éd. de 1897 (voir p. 179)]
Remarques)  : à partir de l'édition de 1903, Jehan Rictus a renoncé à ce nom qualifiant non recensé dans les dict. d'argot.
ronfler [v.] dormir [SMvS]
314
Remarques)  :cette acception figurée (métonymie) ancienne, qui fait du verbe un substitut expressif pop. de dormir (sans valeur d'intensité du sommeil dans ce passage), est trop courante dans les usages pop. et fam. pour être recensée dans les dict. d'argot.
roter [v.]
en roter
être ébahi [Hv47 («  y a d' quoi en roter  »)]
Remarques)  : expression figurée recensée dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
roublard [adj. employé comme n.]
[individu] rusé (avec valeur de rouerie allant jusqu'à l'escroquerie) [MPv9] Remarques)  :mot expressif recensé dans des dict. d'argot (Dictionnaire de la langue verte de Delvau 1866, Larchey, Rigaud, Delesalle, Bruant) avant 1903.
rouchie [n. f.]
femme que l'on méprise [SMv28]
Remarques)  : le masc. rouchi, attesté dans les Mémoires de Vidocq 1828-29 et recensé dans des dict. d'argot (Larchey qui cite le Catéchisme poissard de 1844, Delesalle) avec l'acception "individu répugnant", aurait semblé mieux convenir dans ce quatrain où ce sont principalement des hommes qui sont visés ;s'il s'agit de femmes (la graphie oblige à le penser), il faudrait plutôt y voir des femmes de mauvaise vie, comme cela est souvent relevé aussi dans des dict. d'argot (dans Larchey qui cite A. Pothey et, après L'Assommoir de Zola, dans Rigaud, dans Richepin et dans la partie français-argot du Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
roue [n. f.]
à la roue
à la mode  ? [Ev173, R2v108]
Remarques)  : cette expression, absente de la plupart des dict. consultés à l'exception du Bruant qui la donne avec les acceptions "malin" et "mauvais" peu pertinentes ici, pourrait-elle s'interpréter ici à partir de faire la roue "parader" ou de roue (de la fortune), symbole de chance  ?
rouler [v.]
1° se les rouler (dans)
s'envelopper avec plaisir (dans) [SMv99, R1v12, CCv24]
Remarques)  :les Soliloques offrent des attestations littéraires intéressantes pour ce renforcement de l'expression se rouler dans, revigorée par le pronom les à référents sous-entendus  :les membres et/ou les attributs virils dans le premier passage (avec valeur de débauche), les membres dans le second (avec valeur niée de luxe), les membres ou les formes féminines dans le troisième (avec mise en valeur de celles-ci) ;dans le premier se surajoute peut-être la valeur d'insouciance et de paresse de l'expression se les rouler "fainéanter" recensée peu après dans Bruant, mais où le référent sous-entendu n'est pas le même (les pouces).
315
2° tromper [MPv9]
Remarques)  :cette acception, bien attestée au XIXe siècle et que l'on peut associer à rouler dans la farine, est recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
roupiller [v.]
dormir [SMv103, Dv72, R1v5, R2v218, CCv97, MPv13]
Remarques)  : verbe expressif déjà recensé en jargon ancien (Jargon ou Langage de l'Argot reformé 1629-1630) et repris dans la plupart des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
rouquin, rouquine [adj. employé comme n.]
[individu] roux [R1v10 (le Christ), MPv76 (des femmes)]
Remarques)  :dérivé expressif pop. recensé dans Delesalle avant 1897, puis dans le Dictionnaire thématique de Lermina & Lévêque (1896-97), dans Bruant et dans le Vocabulaire de la langue verte d'H. France.
rouspéter [v.]
protester bruyamment [SMv54, MNv66]
Remarques)  : verbe expressif pop. recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
Rousse (la) [n. f.]
Police [P3v120]
Remarques)  : ce substitut expressif, associable à roussin "policier" et reposant peut-être sur la représentation ancienne associant rousseur et traîtrise, est recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
Royalisse [adj. et n.]  :déformation de royaliste dans la prou. pop. [Hv43].
ruer [v.]
ruer dans les brancards
se rebeller [Ev157]
Remarques)  : expression figurée (métaphore) courante, sans doute déjà ancienne mais dont les Soliloques offrent une attestation littéraire intéressante.
ruminer [v.]
remâcher des idées ou des sentiments [P2v6]
Remarques)  : expression figurée (métaphore) ancienne et courante, mais revigorée ici par le contexte de Parisiens qui, comme des veaux, « ruxnin'nt par tas noirs aux terrasses  ».
rupin [n. et adj.]
n. : [individu] riche, privilégié [Hv136, Ev22, Ev59, Dv114, P1v45, CCv21, SCAv28]
Remarques)  : ce mot expressif, recensé avec l'acception "gentilhomme" dans le Jargon ou Langage de l'Argot reformé 1629-1630, puis dans les Voleurs de
316
Vidocq (1836-37), est repris ensuite avec l'acception "riche" dans la plupart des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
2° adj. : luxueux [MMv33 (maison)], cossu et agréable [MPv55 (jardin)] Remarques)  :emploi adjectival bien attesté au XIXe siècle et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
—S—

sac [n. m.]
1° sac à schnick
ivrognesse) [Ev185 (il s'agit ici d'une femme)]
Remarques)  : conformément au procédé de dérivation synonymique des usages pop. et argotique, Jehan Rictus revigore, en substituant schnick (voir ce mot) à vin dans le complément, le composé fam. ancien sac à vin "ivrogne(sse)", recensé par exemple dans Oudin 1640 et toujours dans certains dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897.
2° au sac
riche [P3v106]
Remarques)  : l'expression être au sac est recensée, après avoir le sac (Larchey), dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
sacquer [v.]
chasser (renvoyer) [P3v136]
Remarques)  : substitut expressif recensé dans des dict. d'argot (Larchey à partir de 1878 d'après Poulot 1872, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
sagouin [n.]
individu qui choque par son comportement jugé grossier [Dv91]
Remarques)  :l'emploi du mot dans cette acception élargie et comme terme injurieux est ancien et tellement courant qu'il n'est pas relevé dans les dict. d'argot.
salaud [n.]
I. 1° individu manquant de propreté [P1v72 («  mis comme un salaud  »)] Remarques)  :acception première et ancienne du mot.
2° individu au comportement jugé immoral [Ev128, P1v223, Epv30] Remarques)  : ce sens moral ( !) courant dans les usages pop. et fam. est bien attesté au XIXe siècle, mais demanderait à être daté plus précisément.
II. mon salaud
mon vieux [MPv88]
Remarques)  :terme affectueux par antiphrase, déjà recensé dans Bruant avec citation de Courteline (contenant aussi mon cochon, voir cochon), avant cette
317
occurrence dans l'éd. de 1903 des Soliloques (le Trésor de la langue française cite ce passage avec référence erronée en le datant de 1897).
III. salaud de... (+ 1~
(formule stigmatisant le référent du complément) [P1v31 (il s'agit de nuages)] Remarques)  : ce passage des Soliloques offre une attestation littéraire intéressante pour cet emploi de la construction dite « qualitative  » avec un nom renvoyant à un « inanimé  » (le Trésor de la langue française la relève seulement dans Barbusse 1916).
saloperie [n. f. employé comme interjection]
(juron exprimant un fort ressentiment) [Plvl]
Remarques)  : ce passage, où cet emploi du mot résonne comme un coup de tonnerre dans un contexte d'arrivée du printemps, est relevé comme première attestation par P. Enckell dans son Dictionnaire des jurons (2004).
salopiot [n.]
petit salaud [SMv57]
Remarques)  : ce dérivé, formé sur salope comme substitut expressif de salaud et employé ici avec une valeur plus affective (dépréciative) que diminutive, est recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897.
sans- [préfixe ou premier élément de composition]
dénué de [Ev24 (sans pognon), Dv184-186 («  La Sans-Remords... la Sans- Mamelles // ... // La Sans-Pitié, la Sans-Prunelles  » à propos de la mort), R2v251 («  des sans-courage  »), CCv95 («  l' sans probloque  »), MPv4 («  Les sans-espoir... les sans-baisers  »), Fv13 («  Les p'tits sans-coeur, les p'tits sans- dieu  »)]
Remarques)  :des noms composés expressifs formés selon ce procédé pop. repris par Jehan Rictus sont souvent recensés dans des dict. d'argot (par exemple sans-chasses "aveugle" dans Voleurs de Vidocq 1836-37, Larehey,
Rigaud, Delesalle ou sans le sou "pauvre" dans Larchey, Delesalle) avant

1897, puis dans Bruant qui indiquera  : « Le nombre de noms composés qui désignent les misérables est considérable et la littérature se joint aux argotiers pour en forger chaque jour de nouveaux. En voici quelques-uns  :bot-la-dèche, bat-le pavé-sans-bouffer, bouffe-la-guigne, crève-la faim, fout-la-dèche, fout- la faim, gratte pavé, sans-canijatte, sans gîte, sans-le-rond, sans-maison, sans pain, sans pognon, sans-sorlots, traîne-cul-les-houlettes, traîne-guenille, traîne-misère, ventre-creux, ventre plat, etc.  » (article misérable).
sans-pognon [n.]
miséreux [Ev24]
Remarques)  :pour ce composé qui sera recensé dans Bruant peut-être à partir des Soliloques sans le dire, voir sans-.
sargé [participe-adj.]  : déformation de chargé dans la prononciation pop. [MPv79].
318
schloff [n. m.]
lit [P1v211]
Remarques)  : ce substitut expressif pop., créé par emprunt (selon Esnault, yiddisch et alsacien, dérivé de l'allemand schlafen), est bien attesté depuis le début du XIXe siècle, mais c'est le verbe schloffen qui est plus souvent recensé dans des dict. d'argot (Larchey à partir de 1878, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
schnick [n. m.]
eau-de-vie [Ev185]
Remarques)  : ce mot d'emprunt au lorrain ou à l'alsacien, courant dans l'usage pop., est bien attesté depuis la révolution de 1789 sous différentes variantes graphiques et encore recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
schnocke [adj.]
en piteux état [Dv66]
Remarques)  : ce mot courant dans l'usage pop., d'origine obscure (germanique  ?), est recensé, sous différentes variantes graphiques, dans des dict. d'argot (chenoc « avarié  » et « vieil infirme  » dans Larchey, chenoc « mauvais, usé  » dans Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant (« bête  », « mauvais  »), mais il a été oublié dans le Trésor de la langue française, alors que le Dictionnaire du français non-conventionnel de Cellard & Rey (1991) cite ce passage des Soliloques mais en ne retenant que l'acception "imbécile" qui ne convient pas ici.
scier [v.]
1° ennuyer, tourmenter [Epv116]
Remarques)  :cette acception bien attestée dès le XVIIIe siècle est recensée dans des dict. d'argot avant 1897 (Larchey, Rigaud, Delesalle, qui donnent aussi l'expression scier le dos, seule retenue dans Bruant).
2° se faire scier
se donner de la peine [Ev121]
Remarques)  : à-peu-près euphémique et expressif dans lequel Jean Rictus substitue au verbe chier (se faire chier "se donner de la peine") le verbe scier exprimant lui aussi l'idée de souffrance dans son acception "tourmenter" (voir en 1 °).
scionnée [n. f.]
coups de scion donnés jusqu'à la mort [P3v52]
Remarques)  : Jehan Rictus a sans doute voulu jouer sur le double sens de scion ("verge pour fouetter" et, en argot, "couteau") quand il a formé ce dérivé se rapprochant du verbe scionner "tuer à coups de scion (couteau)" qui est lui-même recensé, ainsi que scion "couteau", dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant ; ces trois mots sont absents du Trésor de la langue française qui ne donne scion que dans ses sens non argotiques.
319
semaine des quatre Jeudi [lot. n. f.]
espace temporel inexistant [R3v21 ]
Remarques)  :expression pop. et fam. dont le prototype est déjà attesté dans Oudin 1640 (semaine des trois jeudis) et qui est encore recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897.
Sensible [adj. employé comme n. m.]
coeur [Dv59, P3v131]
Remarques)  : ce substitut expressif a été formé par Jehan Rictus comme d'autres noms propres qualifiants (voir par exemple Furtif, Ressautant, Souriant) par conversion d'adjectifs en noms, procédé de formation prisé dans les usages pop. et argotique (voir par exemple palpitant).
sercher [v.]  :forme ancienne de chercher que l'on trouve par exemple dans Villon et qui s'est conservée dans la prononciation pop. [R2v77, P3v49].
si (s' en élision) [conj. de sub.]
1° si +tond. [Hv91 («  si y gn' aurait pus d' misère  »), SMv9 («  s'y n'saurait pas  »), R1v74 («  Si qu'y r'viendrait juste ed' not' temps // Quoi donc qu'y s' mettrait dans l' battant  ?  »)]
Remarques)  :l'usage pop. peut employer le conditionnel dans la subordonnée là où cela est interdit dans l'usage normé.
2° si que [voir que L]
3° si you plaît [voir dans l'ordre alphabétique]
siau [n. m. ]
à sioux
en abondance (à propos de la pluie) [P1v30]
Remarques)  :formule expressive courante, que Jehan Rictus revigore en la patoisant (prononciation archaïsante de seau).
siffler [v.]
boire [SCAv9]
Remarques)  :substitut expressif pop. ancien (Oudin 1640, Le Roux 1718), encore recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897.
sifflet (de crasse) [n. m.]
habit à queue noir (de crasse) [Dv39]
Remarques)  : Jehan Rictus a substitué par dérision de crasse à d'ébène dans l'expression sifflet d'ébène "habit noir à queue" (acception figurée métaphorique), recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
simili-troufion [n. m.]
faux soldat [P2v23]
Remarques)  :avec le premier élément simili- marquant l'imitation et le nom fin-de-siècle troufion "soldat (troupier)" recensé dans le Dictionnaire d'argot
320
fin-de-siècle 1894 de Virmaître et repris dans Bruant et dans le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France, Jehan Rictus a forgé ce composé expressif désignant sans doute ici les employés des transports dans leur uniforme.
sirop de gomme [n. m.]
médicament apaisant [Ev61, Fv7]
Remarques)  : dans ces deux passages, Jehan Rictus donne un sens métaphorique élargi à ce nom composé (la gomme arabique étant utilisée pour calmer les irritations de la gorge).
si you plait [formule]  :déformation de s'il vous plaît dans la prononciation pop. [MPv30], mais la diérèse pour la métrique semble artificielle.
soce [n. f.]
société (réunion de personnes) [CCv19]
Remarques)  : ce substitut plaisant fin-de-siècle, dérivé par apocope de société, est recensé dans Delesalle avant 1900, puis dans Bruant.
socialisse [adj. et n.]  :corruption populaire (déjà dans Richepin et fréquente dans les chansons de l'époque) du suffixe savant —iste du mot socialiste [Hv42 (nom), Ev91 (adj.)].
Sologne [voir Dv94 et note 2 p. 68]
sophie [n. pr. f. converti en n. commun par antonomase]
faire sa sophie
faire sa mijaurée [Epv159]
Remarques)  :expression recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, mais absente du Trésor de la langue française comme beaucoup de noms formés par antonomase.
sorbonne [n. f.]
tête (qui pense) [variante de Dv79 à partir de l'éd. de 1921 (voir p. 176)] Remarques)  : Jehan Rictus a remplacé Juge qu'il employait dans ce sens figuré artificiel par le nom sorbonne, donné avec cette précision contestable («  qui pense  ») par Victor Hugo dans Le Dernier Jour d'un Condamné 1829, mais déjà recensé dans d'Hautel (1808) et qui le sera après Hugo dans la plupart des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle, etc.) avant 1897, puis dans Bruant.
sorlot [n. m.]
soulier [Ev108, P1v70, P3v79]
Remarques)  : ce substitut expressif pop., peut-être emprunté à des parlers du Nord et/ ou de l'Est, est recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite le deuxième passage des Soliloques (mot absent du Trésor de la langue française).
souler [n. m.]  :déformation de soulier dans la prononciation pop. et enfantine [Epv156].
321

soulever [v.]
voler (à propos d'une femme prise à celui avec qui elle est) [SMv66] Remarques)  : si le verbe soulever est bien attesté avec l'acception "dérober" à partir de la révolution de 1789 (par exemple dans les Mémoires de Vidocq 1828-29) et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, son emploi dans un contexte de séduction de la femme d'un autre, en prolongement de celui du verbe lever dans un contexte de séduction avec métaphore de chasse, reçoit ici une attestation littéraire plus intéressante que l'exemple du Bruant relevé et mal expliqué dans le Trésor de la langue française (dans « ferrer pour la soulever à son homme  », c'est ferrer qui est donné comme substitut à l'article courtiser du Bruant et non soulever comme substitut de séduire).
souper [v.]
1 ° avoir soupé (de), en avoir soupé (de)
avoir assez (de) [Ev85, R2v265], en avoir assez (de) [Hv113 («  de n' pas briller »  !), MPvS, SCAv24]
Remarques)  :expressions recensées dans des dict. d'argot (avoir soupé de ta tranche ou de ta fiole dans Rigaud ;avoir soupé dans Supplément de Larchey, qui donne en avoir soupé de dans une citation, puis avoir soupé de ta tranche ou de ta fiole ;j'en ai soupé et j'ai soupé de ta fiole ou de ta tronche dans Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant (avoir soupé ou en avoir soupé).
soupé (de...)  !
assez (de...)  ! [P3v189-199]
Remarques)  : formule recensée dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
Souriant [participe-adj. employé comme n. m.]
matin [R3v91]
Remarques)  : Jehan Rictus a créé ce mot par conversion d'un adjectif en nom qualifiant, procédé fréquent dans les usages pop. et argotique (voir palpitant avec participe-adj., sensible avec adjectif).
soye (ou soy'), soyent (ou soy'nt) [formes verbales au subjonctif (verbe être)]  : graphies de la prononciation pop. renforcée l'une de soit [Hv104, SMv125, Ev170, Dv142, etc.] ou de sois [Dv66 (2e pers.), R2v13 (le pers.)], l'autre de soient [SMv18, P3v170, MPv107].
su' [prép.]  :prononciation pop. de sur [Hv28, 40, 63, 99, IPv18].
suri, surie (sûrie dans le texte) [participe-adj. employé comme n. f.] faire sa sûrie
se montrer aigre, désagréable [Ev179]
Remarques)  : le sens figuré du participe-adj., repéré dans la seconde moitié du XIXe siècle, reçoit ici, avec cette expression, une attestation littéraire intéressante.
322
—T—

tabac [n. m.]
I. passer à tabac
1° frapper [Ev187]
Remarques)  : plusieurs expressions de même genre avec sens actif sont recensées dans des dict. d'argot (donner du tabac dans Larchey  ;passer au tabac dans Rigaud et Supplément de Larchey ; passer à tabac dans Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
2° être frappé [Fv8 («  qui passent de beigne à tabac  »)]
Remarques)  : le sens passif («  être roué de coups  ») est recensé dans des dict. d'argot (Rigaud et Delesalle, s. v. passer) avant 1897, puis dans le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France (qui cite ce passage des Soliloques) et dans Bruant.
II. même tabac
même chose [R2v38 («  ça s'rait l' mêm' tabac, // Autrement dit, la même histoire  »)]
Remarques)  :expression fin-de-siècle qui sera recensée dans le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France (avec citation de La Sociale d'Émile Pouget 1895-96) et dans Bruant.
tâcher [v.]
1° travailler durement [Ev16]
Remarques)  :emploi intransitif donné comme littéraire par le Trésor de la langue française.
2° tâcher moyen [MPv91 ] [voir moyen]
taf [n. m.]
1° peur [Epv137]
Remarques)  : substitut expressif reposant sur une onomatopée ancienne (XVIe siècle) et recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle), puis dans Bruant ; pour ce mot, le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France (après 1900) citera des vers de Richepin en les attribuant aux Soliloques de Jehan Rictus  !
2° avoir le taf
avoir peur [Ev207]
Remarques)  : la substitution de le taf à peur s'est faite dès le début du XIXe siècle.
tafeur [adj. et n.]
peureux [CCv85]
Remarques)  :mot expressif recensé, plutôt sous la forme taffeur, dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1900, puis dans Bruant.
323
'tait [forme réduite de l'imparfait du verbe être [Ev79 («  c'tait  »), R1v48 («  N'tait  »), P3v24 («  c'tait  »)] [voir aussi l' 2° pour SMv8, CCv3-4]
tambouille [n. f.]
ragoût, préparation culinaire [MPv51 ]
Remarques)  :substitut expressif recensé dans des dict. d'argot (Dictionnaire de la langue verte de Delvau 1866, Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle, Bruant) avant 1903.
tampon [n. m.]
coup de tampon
coup de poing (violent) [R3v77]
Remarques)  : expression recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques.
tante [n. f. ]
chez ma tante
(en gage) au mont-de-piété [SCAv46]
Remarques)  :substitut expressif recensé dans des dict. d'argot (Dictionnaire d'argot de 1827, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
taper [v.]
1 ° taper qqn (de + N renvoyant à une somme d'argent)
emprunter, quémander (de l'argent) à qqn [Hv80 («  taper d'eun' thune  »)] Remarques)  : acception expressive recensée dans des dict. d'argot (Dictionnaire de la langue verte de Delvau 1866, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1896, puis dans Bruant.
2° se taper
ne rien avoir [SMv42]
Remarques)  : en employant la tournure pronominale recensée avec cette acception dans Delesalle avant 1897 puis dans Bruant, Jehan Rictus joue sans doute aussi sur un réseau d'expressions comme taper une femme "baiser une femme avec vigueur" (Le Roux 1718), se taper qqn "avoir des rapports sexuels avec qqn" (expression recensée seulement en 1928 par Lacassagne mais probablement antérieure) et se taper sur la colonne "se masturber" (Delesalle).
tarter [v.]
faire tarter
importuner, ennuyer [P 1 v8]
Remarques)  : à partir du verbe tartir "déféquer, chier" (enregistré dès le Dictionnaire d argot de 1827, puis dans Larchey, Rigaud, etc.), certains dictionnaires d'argot (Richepin, Supplément de Larchey, Delesalle, Bruant) ont enregistré aussi le verbe tarter et l'expression factitive, très vite devenue substitut de faire chier "ennuyer", a été consignée comme telle dans Delesalle, qui cite la Chanson des Gueux de Richepin, puis dans le Vocabulaire de la langue verte et dans Bruant, qui citent tous deux ce passage des Soliloques.
324
tas [n. m. ]
I. 1 ° grande quantité [P 1 v140 («  su' tout c' tas  »)]
Remarques)  :emploi figuré fam. reposant sur des formules anciennes comme un tas de gens (Oudin 1640).
2° des tas
beaucoup [Epv168]
Remarques)  : emploi figuré fam. ancien, parfois recensé dans des dict. d'argot (Dictionnaire thématique de Lermina & Lévêque 1897, Vocabulaire de la langue verte d'Hector France après 1900).
II. tas de + N
bande de (formule injurieuse fam. courante réunissant en une masse indistincte ceux qui sont ainsi apostrophés) [R2v22, SCAv21]
Remarques)  : emploi relevé, mais non daté, dans le Trésor de la langue française.
III. mon tas
mon corps ramassé sur lui-même [P2v61]
Remarques)  : attestation littéraire intéressante pour cet emploi du mot légèrement différent de celui ("individu sans énergie") parfois recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897.
IV. être dans le tas
être au rebut ( ?) [Epv129]
Remarques)  : s'agit-il, dans ce contexte d'expulsion, d'une variante de l'expression au tas "au rebut", recensée dans le Trésor de la langue française avec une citation de 1909  ? en tout cas, le Pauvre n'a pas encore été mis «  au bloc  », ce qui pouvait se dire « dans le tas  ».
tepêt [n. m.]
poser tepêt
poser culotte (pour déféquer) [Epv40]
Remarques)  :expression aisément interprétable, mais absente des dict., sinon que le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France la donnera avec citation de ce passage des éditions de 1897 des Soliloques et le Bruant recensera poser potet "faire ses besoins, chier".
terribe [adj.]  :déformation de terrible dans la prononciation pop. [MMv62].

téter [v.]
se téter la poire
s'embrasser la figure [Epv58 («  se retéter encor' la poire  »)]
Remarques)  : le Bruant recensera toute une série d'expressions (dont celle-ci) sur le même modèle  : téter le citron, la couenne, la couetche, la morve, le morviau, la pêche, la pomme, la poire, la tarte, la trogne, le trognon.
325 téton [n. m.]
sein [SMv39, SMv102-105, Ev167, Dv147, R1v41 (à propos de Jésus-Christ), R2v123, P1v60, CCv82, MPv103 et sq (cinq occurrences)]
Remarques)  : ce mot ancien, marqué fam. dans le Trésor de la langue française et parfois recensé dans des dict. d'argot (Vocabulaire de la langue verte d'Hector France après 1900), revient souvent dans les Soliloques.
thune [n. f.]
pièce de monnaie [Hv80, SMv37]
Remarques)  : ce substitut expressif, attesté anciennement en jargon avec forme et sens différents (tune "aumône" dans Jargon ou Langage de l'Argot reformé 1629-1630, puis Voleurs de Vidocq 1836-37), est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
tif [n. m. ]
cheveu[R2v4]
Remarques)  : substitut expressif recensé, plus souvent sous la forme tiffes, dans des dict. d'argot (Supplément de 1889 par Fustier au Dictionnaire de la langue verte de Delvau, Delesalle), puis dans Bruant.
tiré, tirée [participe-adj.]
amaigri [MNv24]
Remarques)  : en associant au nom gueule ce participe dont cet emploi adjectival est courant et non marqué, Jehan Rictus joue peut-être aussi sur l'expression tirer la gueule "avoir un visage triste, renfrogné".
tirelire [n. f.]
1 ° en faire une tirelire
faire une tête exprimant un sentiment (déception, mécontentement ou, comme ici, surprise) [EpvS]
Remarques)  : expression formée sur une acception pop. ancienne "tête, visage" encore relevée dans Delesalle avant 1897, puis dans Bruant et dans le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France.
2° gueule en tirelire
bouche dont les lèvres grimacent [IPv3]
Remarques)  : métaphore fam. bien attestée au XIXe siècle avec des expressions comme bouche en tirelire, mais Jehan Rictus semble jouer ici en même temps sur l'acception pop. et argotique "expression particulière du visage" de tirelire.
tiroir [n. m.]
ventre [Fv35]
Remarques)  : acception le plus souvent liée à l'expression avoir un polichinelle dans le tiroir (voir polichinelle) et qui sera réinterprétée en « parties sexuelles de la femme » dans le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France citant ce passage (après 1900).
326
'tit ('tit', 'tits, 'tit's, etc.) [adj.]  : réduction de petit (petite [Ev19, Ev54, MMv39, MMv127, Fv22], petits [P2v55, Fvl, Fv32, Fv48, Fv53, Fv82] et petites [Fv10, Fv12]).
toc [adj. ]
faux [Hv83]
Remarques)  : plutôt que "laid" ou "mauvais", qui sont des acceptions également attestées (Larchey, Rigaud, Delesalle, Bruant), il faut peut-être comprendre ici que la représentation des humains par les peintres est fausse, acception également recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques, mais à l'article laid.
tocard, tocarde [adj.]
laid, laide [MMv16]
Remarques)  : mot expressif recensé avec cette acception dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle, Bruant) avant 1903.
tocasse [n. f.]
femme laide [MNv70]
Remarques)  : mot expressif recensé avec cette acception dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle, Bruant) avant 1903.
torchon [n. m.]
mouchoir ( ?) [R3v28]
Remarques)  :prolongeant "drap de lit", qui est une acception bien attestée dans des dict. d'argot (Delesalle, Bruant), on pourrait penser ici à une hyperbole évoquant des mouchoirs insuffisants pour une telle peine («  sortez les grands mouchoirs  !  »), en tout cas pas aux grands journaux (sens figuré péjoratif recensé dans Rigaud avant 1897) auxquels se confierait le Revenant.
torgnole [n. f.]
coup [P3v110]
Remarques)  :mot expressif pop. bien attesté depuis le XVIIIe siècle et encore recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
tortorer [v.]
manger [SMv78 (avec «  la brume  »comme complément)]
Remarques)  : substitut expressif recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle, qui cite la Chanson des Gueux de Richepin avec l'expression tortorer du vent) avant 1897, puis dans Bruant.
tourner [v.]
1° devenir (changer de condition) [CCv21 («  tourné rupin  »)]
Remarques)  :construction expressive pop. sans prép. dans une tournure en quelque sorte attributive, rarement recensée dans les dict. et dont ce passage offre une attestation littéraire intéressante.
327
2° se tourner les pouces en rond [voir pouce]
tourte [n. f.]
faire sa tourte
faire sa mijaurée [Ev179]
Remarques)  : acception attestée dans des dict. d'argot («  vieille femme ridicule  »dans Rigaud puis dans Supplément de Larchey ; « vieille coquette  » dans Delesalle) avant 1897.
Trafalgar [n. pr.] [voir coup de Trafalgar à coup]
traînailler [v.]
traîner avec peine [MNv88]
Remarques)  : dérivé expressif de traîner (voir aussi rôdailler) dont les Soliloques offrent une attestation littéraire intéressante pour la construction transitive («  traînailler du noir  »).
traîner [v.]
se les traîner
se trimballer [P3v109]
Remarques)  : Jehan Rictus accroît l'expressivité du verbe dans cette construction pronominale transitive avec le pronom personnel complément les au référent pluriel non explicite (grolles, guêtres, semelles ou autres  ?).
tram [n. m.]
tramway [P2v26 et P2v41 ]
Remarques)  : ce dérivé fam. de tramway par apocope est recensé dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897.
tranche [n. f.] [voir s'en payer une tranche à payer]
traversin [n. m.]
coup de traversin
sommeil [Dv139]
Remarques)  : expression recensée dans Delesalle (se fiche un coup de traversin "dormir") avec citation d'un vers de la Muse à Bibi d'A. Gill (1879- 1882) ; dans le Vocabulaire de la langue verte et dans Bruant, on trouvera aussi partie de traversin.
treffe [n. m.]  : déformation de trèfle (voir article suivant) dans la prononciation pop.
trèfle [n. m.]
tabac [SMv73]
Remarques)  :substitut expressif recensé dans des dict. d'argot (Dictionnaire d'argot de 1827 repris dans éd. tardive du Vice puni 1827 et non dès 1725 comme donné par erreur dans le Trésor de la langue française ; Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des Soliloques avec la forme trèfle, tandis que le
328
Vocabulaire de la langue verte d'Hector France (lettre T pas avant 1900) le citera également, mais en conservant treffe.
tricoter [v.]
tricoter des paturons
marcher en hâte (avec idée de fuite) [MNv62 (en fait «  r'tricoter  »)] Remarques)  :expression recensée, avec variation du complément de moyen (flûtes, gambettes, guibolles, jambes, pincettes, quilles, etc.), dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle, Bruant, etc.) avant 1903.
trimarder [v.]
vagabonder [MNv2]
Remarques)  :substitut expressif attesté en jargon ancien (.jargon ou Langage de l'Argot reformé 1629-1630) et repris dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle, Bruant, etc.) avant 1903 ; Esnault 1965 distingue entre le sens ancien ("cheminer") se rattachant à trimard "route" et le sens moderne élargi ("vagabonder") qu'il donne comme « pop., 1903  », ce qui correspond sans aucun doute à ce passage de l'éd. de 1903 des Soliloques.
trimardeur [n.]
vagabond, nomade [Rlv9]
Remarques)  :cette acception, différente de celle, plus ancienne, de "voleur des grands chemins" et de celle, plus récente, d"`ouvrier itinérant", est recensée dans Delesalle avant 1897, puis dans Bruant.
trimballer [v.]
porter partout avec soi [Ev143]
Remarques)  : ce verbe pop. et fam., dérivé de trinqueballer "remuer" (Le Roux 1718) par réduction et bien attesté depuis la révolution de 1789, est recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
trimer [v.]
travailler (avec idée de pénibilité) [P3v7]
Remarques)  :cette acception, bien attestée au XVIIIe siècle pour ce verbe ancien ("cheminer" dans le .jargon ou Langage de l'Argot reformé 1629- 1630), est recensée dans des dict. d'argot (Rigaud qui donne "marcher pour placer de la marchandise", Delesalle) avant 1897.
trinquer [v.]
subir un préjudice, souffrir (avec idée de payer pour d'autres) [Ev80] Remarques)  :cette acception pop. dérivée par ironie du sens "choquer son verre" est recensée dans des dict. d'argot (d'abord faire trinquer "faire battre" dans Larchey et Rigaud, ensuite "recevoir des coups" et "partager la mauvaise fortune" dans Supplément de Larchey, le premier sens étant repris dans Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
329
tripes) [n. f. (généralement au pl.)]
intestins) [Hv88 («  lyre [...] Faite ed' nos trip's  »), IPv9 («  Tu t' soign's les trip's  »), SMv117 («  j' vas m' sortir les tripes  »)]
Remarques)  :cette application ancienne (Rabelais) et pop. du mot aux êtres humains s'inclut souvent dans des emplois figurés expressifs.
tronche [n. f.]
1° tête (entière ou visage) [Ev114, Dv6, Dv190, R2v261]
Remarques)  : substitut expressif du jargon ancien (Vie genereuse 1596 et Jargon ou Langage de l'argot reformé 1629-1630), devenu pop. et repris dans les dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
2° tronche de veau
visage inexpressif (bovin et indifférent) [P2v8]
Remarques)  : il faut voir là l'accusation de badauderie idiote telle qu'on peut l'interpréter dans le dicton injurieux « Parigots, têtes de veaux  ».
trottailler [v.]
flâner [SMv82]
Remarques)  :dérivé expressif de trotter absent des dict. et dont ce passage des Soliloques offre une attestation littéraire intéressante.
trotter [v.]
1° venir au trot (à petits pas rapides) [P1v62]
Remarques)  :cette acception figurée courante est ici appliquée au printemps.
2° se trotter
se sauver [Hv120 (sens propre, mais à propos d'un ange gardien  !), Epv62 (sens figuré  : « mes s'mell's à fort' d'usure // Se trottaient et m' laissaient en plan »  !)]
Remarques)  : avec cette acception du verbe dans la tournure pronominale, recensée dans des dict. d'argot (Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, l'emploi dans le second passage offre une attestation littéraire intéressante (humour de dérision) pour cet emploi figuré.
trottin [n. m.]
jeune apprentie modiste (qui fait les courses et livraisons) [P1v207] Remarques)  :acception bien attestée au XIXe siècle et recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
trou [n. m.]
1 ° trous à voir
yeux [R3v36]
Remarques)  :périphrase d'humour noir appliquée au Revenant.
2° trou de bombe anus [Epv32]
330
Remarques)  : Jehan Rictus élargit pour la circonstance le nom composé trou de balle, d'origine soldatesque, recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
troufignon [n. m. ]
que qqn se l'enfonce dans le troufignon
que qqn aille se faire voir (avec l'objet désigné par le pronom) [P1v122] Remarques)  :variation surexpressive de verbe (mettre, fiche, foutre, etc.) et de complément (cul, fion, où je pense, etc.) à partir de l'expression obscène utilisée couramment dans l'usage pop. pour manifester un sentiment profond de rejet, mais pour laquelle je n'ai pas trouvé de datation précise.
troufion [voir simili-troufion]
trouille [n. f.]
foutre la trouille
faire peur [MNv59]
Remarques)  :cette acception du nom dans l'usage pop., avec métonymie de l'effet (trouille "colique") pour la cause, est recensée dans des dict. d'argot (Delesalle, Bruant, Vocabulaire de la langue verte d'Hector France) avant
1903.
trouilloter [v.]
puer [Dv66, P1v16 (trouillotter)]
Remarques)  :substitut expressif recensé dans des dict. d'argot (Larchey, qui donne trouilloter du goulot, repris à goulot dans le Trésor de la langue française, où le verbe n'est pas traité  ;Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite le second passage des Soliloques.
troupier [n. m.]
soldat [Epv33]
Remarques)  : le nom, marqué comme pop. dans le Trésor de la langue française, est bien attesté depuis le début du XIXe siècle (Petit Dictionnaire du Peuple de Desgranges 1821).
truc [n. m.]
1° moyen astucieux [MNv42]
Remarques)  :mot ancien dont cette acception, courante dans l'usage fam., est bien attestée depuis la révolution de 1789 et recensée plus ou moins nettement dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle, Bruant) avant 1903.
2° rebiffer au truc [voir rebiffer] truffer [v.] [voir truffer la peau à peau]
truqueur [n. m.]
[individu] qui trompe, qui triche [SCAv21]
331
Remarques)  :mot recensé avec des acceptions plus ou moins approchantes dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, qui cite ce passage des éditions de 1897 des Soliloques.
tube [n. m.]
chapeau haut-de-forme [P1v70]
Remarques)  :acception figurée (métonymie) recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
tuile [n. f. ]
événement imprévu [R2v16]
Remarques)  :l'acception figurée du nom est bien attestée à cette époque et recensée, le plus souvent avec une valeur négative, dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant, mais cette valeur, comme c'est sans doute le cas dans ce passage, n'était pas toujours négative au XIXe siècle (le Trésor de la langue française cite Zola 1876 pour un emploi en circonstance heureuse), ce que le Bruant relève ("aubaine") en y voyant de l'ironie.
turbiner [v.]
travailler dur [P3v188]
Remarques)  :substitut expressif bien attesté au XIXe siècle et recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
turne [n. f.]
logement inconfortable [R2v33, MPv12, MPv99]
Remarques)  : ce mot ancien, attesté plus souvent à partir du XIXe siècle, est recensé, généralement avec une valeur péjorative, dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Richepin, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
turquois [n. m.]
ciel [P1v98]
Remarques)  : ce nom qualifiant, créé par Jehan Rictus par dérivation régressive à partir de turquoise "bleu pâle (tirant légèrement sur le vert)", sera recensé dans le Bruant avec citation de ce passage des Soliloques.
tu-tu (tutu) [n. m. ]
derrière [Fv3]
Remarques)  :mot fam. bien attesté dans la seconde moitié du XIXe siècle et recensé dans des dict. d'argot (Supplément de 1883 par Fustier au Diction- naire de la langue verte de Delvau, Supplément de Larchey) avant 1897.
type [n. m.]
1 ° individu pas comme les autres [Ev141 ]
Remarques)  : acception figurée bien attestée au XIXe siècle et parfois recensée dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, Delesalle) avant
1897.
332
2° bon type
bon garçon [Hv86, SMv120]
Remarques)  : par les associations syntaxiques («  rigolos  » en Hv86, « carn's » en SMv120), Jehan Rictus démasque l'ironie des emplois de cette expression pop. recensée dans Delesalle et formée à partir de l'acception "individu quelconque" du nom, bien attestée dans la seconde moitié du XIXe siècle et recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
— V —
v'là [voir dans l'ordre alphabétique (sans tenir compte de l'apostrophe)]
vache [n. f. (ou m. dans certains cas) ou adj. employé comme n.]
1° [individu] déloyal [P1v81(«  c'te vach'-là » à propos d'un chapeau censé protéger)]
Remarques)  : attestation littéraire intéressante pour cette application à un objet, ainsi personnifié, de l'emploi figuré du mot utilisé comme nom ou comme adjectif pour qualifier différents types d'individus au comportement jugé méchant et/ou déloyal, cet emploi n'étant pas recensé de façon nette dans les dict. d'argot avant Bruant où le mot est donné pour coquin, cruel, déloyal, dur et méchant, même si Esnault 1965 date de 1880 l'acception "méchant et sournois" de l'adjectif.
2° vache de (+ nom)
(formule stigmatisant comme dur et insensible le référent du « complément  ») [R3v43 («  c'te vach' de Réalité  »), [P1v51 («  Ces vach's de bécans  »)] Remarques)  :attestations littéraires intéressantes pour cette construction dite « qualitative  » (le Trésor de la langue française parle de « valeur d'épith[ète]  ; suivi d'un subst[antifJ apposé  », illustrant cet emploi par des citations d'auteurs uniquement du XXe siècle).
vacherie [n. f.]
faire des vacheries (à qqn)
commettre des actes méchants et/ou déloyaux (à l'égard de qqn) [Ev28] Remarques)  : expression fin-de-siècle recensée dans des dict. d'argot («  saletés, cochonneries faites à quelqu'un  »dans Dictionnaire d'argot fin-de- siècle 1894 de Virmaître, « lâcheté  » dans Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant (pour affront, dureté, indélicatesse, méchanceté).
vadrouille [n. f.]
I. 1 ° en vadrouille
en balade (sans but précis) [MNv61 ]
Remarques)  :expression recensée, souvent avec valeur de quête de débauche, dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, avec citation de Méténier 87  ; Bruant, qui donne le mot pour noctambulisme) avant 1903 ; ce passage offre une attestation littéraire intéressante pour la transition vers l'idée de « prome- nade faite sans but précis  » datée de 1908 dans le Trésor de la langue française.
333
2° errance, vagabondage [Epv34]
Remarques)  : attestation littéraire intéressante pour cette acception figurée pop. et fam., sans l'idée de débauche associée au mot dans des dict. d'argot (Dictionnaire d'argot fin-de-siècle 1894 de Virmaître, Delesalle) avant 1897 et reprise dans Bruant (pour débauche, dévergondage, noctambulisme).
II. [individu] qui traîne les rues [Dv50, R2v258]
Remarques)  : à partir du sens premier du nom ("balai de vieux cordages utilisé pour nettoyer le pont d'un navire") s'est développée l'acception "prostituée (qui traîne la rue)", recensée dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897 ; Jehan Rictus, natif de Boulogne-sur-Mer, a pu ne retenir de l'idée de va-et-vient dans l'ordure, liée à l'instrument des marins, que la valeur de déambulation dans la misère, sans que les valeurs de prostitution ni de débauche (Bruant donnera vadrouille « débauché  ») ne se surajoutent nécessairement dans son esprit.
vagin [n. m.] [SMv57]
Remarques)  :cette métaphore pour le moins surprenante, utilisée par Jehan Rictus pour qualifier les noceurs minables, « veaux  » à peine nés, avec le nom désignant le canal féminin servant à l'accouchement et au coït, apeut-être pour antécédent celle où Léon Bloy décrit, en 1886, la bouche d'un personnage («  C'est un rictus, c'est un vagin, c'est une gueule, c'est un suçoir, c'est un hiatus immonde  », cité dans le Trésor de la langue française).
valoir [v.] (vaurait [MMv122] résulte de la déformation, dans la pronon- ciationpop. relâchée, de vaudrait, forme du conditionnel présent)
ne pas valoir le coup
ne pas valoir la peine, ne rien valoir [Ev123 (à propos de personnes)] Remarques)  :cette expression fam. courante, mal repérée et mal décrite en lexicographie, est recensée sous sa forme affirmative dans Delesalle (ça vaut le coup à coup) avant 1897, puis dans Bruant.
vanné [participe-adj. employé comme n.]
abattu, épuisé [Fv9]
Remarques)  :acception figurée fam. courante, parfois recensée dans des dict. d'argot (Rigaud, Supplément de Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans le « Supplément  » de Bruant en 1905.
vas [déformation populaire de vais ;voir aller] vaurait [voir valoir]
vautrer (se)
se coucher en se roulant complaisamment [Epv71] Remarques)  :verbe ancien, toujours expressif en lui-même.
veau [n. m. ]
1° [individu] nonchalant et stupide [SMv57]
334
Remarques)  :acception figurée ancienne et donc rarement recensée dans des dict. d'argot ("imbécile" dans l'argot de Saint-Cyr selon Delesalle).
2° tronche de veau [voir tronche]
veine [n. f.]
avoir de la veine
avoir de la chance, être chanceux [R2v78, P3v21, Fv26]
Remarques)  :expression figurée fam. bien attestée au XIXe siècle, parfois recensée dans des dict. d'argot (Supplément de Larchey, qui recense seulement veine de cocu ;Delesalle, repris dans Bruant).
venir [v.]
devenir [MPvl]
Remarques)  :emploi populaire absent des dictionnaires consultés.
vent [n. m.]
du vent
rien [P1v116]
Remarques)  :acception figurée ancienne et courante, parfois recensée dans des dict. d'argot (Delesalle, puis Bruant).
ventrée [n. f.]
nourriture avalée à profusion [Epv66] Remarques)  :mot expressif en lui-même.
vermine [n. f.]
petit animal parasite (dont on cherche à se débarrasser) [Fv12]
Remarques)  :emploi figuré ancien et courant, qui sera recensé dans Bruant (pour enfant).
vert [n.]
se mettre au vert
aller à la campagne pour s'y délasser [P1v103]
Remarques)  : dérivée de l'expression ancienne mettre au vert "mettre à brouter en liberté", celle ici employée, bien attestée dans la seconde moitié du XIXe siècle à propos de citadins se reposant loin des villes, est recensée dans des dict. d'argot (Larchey, Delesalle) avant 1897, puis dans le « Supplément » de Bruant (1905).
viande [n. f. ]
chair [SMv90 (désir sexuel), Ev13 (besoins matériels), Ev97 («  viande à mitraille  », chair des insurgés victimes des forces de l'ordre)]
Remarques)  : outre un emploi métaphorique [SMv18 («  Malgré qu' mes pieds soyent en viand' crue  »)], Jehan Rictus applique le mot à la chair des être humains dans trois emplois où celui-ci a en outre, comme le mot chair, une valeur figurée (métonymique) ; ce procédé est bien attesté au XIXe siècle et recensé dans des dict. d'argot (Rigaud et Delesalle, qui donnent aussi
335
viande à canon "soldat") avant 1897, puis dans le « Supplément  » du Bruant
(1905).
vidé [participe-adj. et n.]
1 ° épuisé [Dv27]
Remarques)  :acception figurée bien attestée au XIXe siècle et recensée dans des dict. d'argot («  ne plus produire rien qui vaille » en tant qu'homme de lettres dans Rigaud, « affaibli  »dans Delesalle) avant 1897.
2° [individu] usé par les abus de toutes sortes [Hv137]
Remarques)  : attesté en 1888 par une citation d'A. Daudet donnée par le Trésor de la langue française, cet emploi figuré plus restreint sera recensé après 1900 dans le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France.
vieille [adj. fém. (vieux) employé comme n f.]
ma vieille
mon ami [Dv164 (adressé par le Pauvre àsoi-même), R3v29 («  ma pauv' vieille  », adressé au Revenant pourtant mâle)
Remarques)  :mot amical bien attesté au XIXe siècle et recensé dans des dict. d'argot (Larehey, Rigaud, Delesalle) avant 1897.
vinasse [n. f.]
vin [Epv66 («  D' la bonn' vinasse, pas d' la bibine  »)]
Remarques)  :l'emploi de ce dérivé comme substitut expressif sans valeur dépréciative est recensé dans Delesalle avant 1897, puis dans Bruant.
vioque [adj.]
vieux [P1v54 (à propos d'objets)]
Remarques)  : substitut expressif bien attesté au début du XIXe siècle et recensé dans des dict. d'argot (Voleurs de Vidocq 1836-37, Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
virago [n. f.]
femme dominante insupportable [Ev185]
Remarques)  :acception péjorative courante, bien attestée au XIXe siècle.
vitreux [adj. employé comme n. m. pl.]
oeil (yeux) dont l'éclat est terni [Ev107]
Remarques)  : Jehan Rictus a sans doute lui-même forgé ce nom qualifiant expressif, non retenu dans Bruant ni dans Esnault 1965, mais recensé dans le Trésor de la langue française avec citation de ce passage, où il faut comprendre qu'il s'agit des yeux des cadavres des Communards martyrisés.
viveur [n. m.]
noceur [SMv47]
Remarques)  : mot expressif à la mode pendant une bonne partie du XIXe siècle.
336
v'là (suivi ou non de que) [présentatif]
1° voilà [Hvl à Hv17, IPvl l («  n'en v'là un  »), SMv38 («  les v'là quatre  », SMv77 («  v'là la puïe  », Ev63 («  v'là l' chiendent, v'là l' singulier  »), etc.] Remarques)  :forme ancienne de voilà (velà), conservée dans les usages pop. et fam. ; on trouve aussi « les r'v'là » («  les revoilà  ») dans P1v200.
2° v'là-typas (que) [v'là t ÿ pas et v'là-t ÿ pas dans les Soliloques] ne voilà-t-il pas [Plv3, P3v87-88]
Remarques)  : tournure présentative interro-négative courante dans l'usage pop. ; les graphies v'là-typas et v'là-t-i' pas seraient moins éloignées de l'orthographe, qui exclut t'.
voir
1° voir à voir
penser à penser [Dv64]
Remarques)  : expression fam. mal repérée dans les dict. (le Trésor de la langue française donne faudrait voir à voir avec une citation de 1985) et dont ce passage offre une attestation littéraire intéressante.
2° voir comment qqn s'appelle
se rendre compte de ce dont qqn est capable, savoir à qui on a affaire [Epv113]
Remarques)  : expression fam. généralement absente des dict. et dont ce passage offre une attestation littéraire intéressante.
vomir [v.]
faire vomir
provoquer l'écaeurement [Ev112-113]
Remarques)  :acception figurée (métonymie) courante.
vomitatoire [adj.]
qui fait vomir, dégoûtant [variante e de P1v40 (voir p. 181)]
Remarques)  : Jehan Rictus s'est amusé à forger ce dérivé médical, immédiatement recensé dans Bruant et dans le Vocabulaire de la langue verte d'Hector France, qui citent tous deux ce passage des éd. de 1897 des Soliloques.
vouate [n. f.]  :déformation de ouate dans la prononciation pop. [MPv69] avec prosthèse semblable à celle de voui.
voui [adv. (interj.)]
oui (renforcement d'affirmation) [SMv105, Ev61, Ev133, Ev141, Ev157, variante de P1v40 (voir p. 181), Dv169, R2v106, R2v231, P1v61, CCv7, MMv132, MPv73, Epv142]
Remarques)  :cette déformation de oui dans la prononciation populaire (plus fréquente régionalement) et enfantine, qui peut parfois être interprétée comme un renforcement expressif, est rarement recensée dans les dict. (pas d'article dans le Trésor de la langue française, malgré quatre occurrences dans des citations).
337

vouloir [v.]  :vourais [première personne  : Ev152, P1v44, P3v139, P3v170] et vourait [IPv56, Ev64, Ev79-80, R2v222, R3v132, P3v101, MMv38, MPv27] résultent de la déformation, dans la prononciation pop. relâchée, de voudrais et de voudrait (formes du conditionnel présent).
vourais, vourait [voir vouloir]
—WYZ-
wouater-clozettes [n. m. pl.]
lieux d'aisances, cabinets [Ev124 («  aux wouater-clozettes  »), Epv42] Remarques)
Jehan Rictus joue sur la graphie francisée humoristique de cet anglicisme (water-closet) importé au XIXe siècle et recensé dans la partie français-argot du Delesalle avant 1897, puis dans Bruant ;dans le premier passage, il joue aussi sur une association sous jacente avec des expressions comme aux chiottes servant à exprimer un rejet dégoûté à l'égard de certaines personnes.
y [prou. pers. ]
I. 1 ° forme fam. ou pop. du pronom sujet masculin
a) singulier devant consonne  : il [Hv32 («  y gambille  »), Hv71 («  Y s' fit ballader les rognons  »), Hv76 («  y s'a foutu d' nous  »), etc.]
Remarques)  : graphie souvent adoptée dans les écrits reproduisant l'usage populaire, parallèlement à la graphie i' ,moins éloignée de la forme du pronom.
b) pluriel sans liaison devant consonne ou devant marque [z] de liaison (transcrite z' dans les Soliloques)  :ils [Hv35-36-38 («  y viv'nt [...] y r'dor'nt [...] y s' gagn'nt  »), Hv98 («  y n'ont qu'à s' taire  »), etc.  ; IPv6 («  y z'ont  »), IPv19 («  y z'ameut'nt  »), etc.]
Remarques)  : graphie souvent adoptée dans les écrits populaires parallèle- ment à la graphie i's moins éloignée de la forme du pronom (ou i â quand il s'agit de transcrire la liaison)  ; « y » pour ils est très fréquent dans le recueil (ils n'apparaît que trois fois, dont « ils z'  »dans Epv74) et « y z'  » s'y trouve une douzaine de fois (voir aussi y n' pour ils à l'article n' I.)
c) pronom postposé de reprise, singulier ou pluriel, en tournure interro- gative ou exclamative  : il, ils [Dv114 («  Son mâl' s'rait-y l' roi des Rupins  », valeur modalisatrice oppositive), MMv64 (« pens'nt-t-y » pour « pensent- ils  »), Epv60 et v63 («  S'en sont-y collé des voitures [...] S'en sont-y foutu des bitures  »)]
Remarques)  :voir 2° c) ci-dessous.
2° forme fam. ou pop. du pronom impersonnel il
a) avec verbes impersonnels devant consonne [SMv78 («  y m' faut  »), Ev83 («  y faut  »), etc.]
Remarques)  :voir 1° a) ci-dessus ;pas d'exemple devant voyelle (y a fallu), mais peut-être, à la rigueur, devant serai-consonne en cas de diérèse sur des
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formes réduites du présentatif il y a (voir y a), comme dans Dv194 («  Et faire enfin qu'y ait du bon  ») ou dans MNv32 («  Malgré qu'y ait des vents- coulis  »), à moins que la diérèse ne se soit appliquée au pronom adverbial y.
b) dans le présentatif il y a devant la déformation transcrite gn de la semi- consonne [j] de l'élément adverbial y [Hv91 («  si y gn'aurait pus  »), R1v52 («  à c' qu'y gn'ait pus  »), R2v200 («  y gn'a jamais, jamais rien eu  »), P2v71 («  y gn'a pas [...]  »), MPv68 («  y gn'aurait  »), Epv135 («  y gn'en a  »), Fv36
Remarques)  : le maintien de y pour il est souvent dû avant tout à la métrique  !

c) pronom de reprise postposé en tournures interrogatives (ou exclamatives ou modalisatrices) fam ou pop. [Ev («  c'est-y que...  »pour « est-ce que...  »), Dv177 («  ça s'rait-y pas...  » pour « cela ne serait-il pas...  »), R1v66 («  ça s'rait-y...  »pour « cela serait-il...  »), R2v76 («  c'est-y que tu...  »pour « est-ce que tu...  »), R3v118 et sq («  c'est y qu'on pourrait pas s'entendre  »pour «  est- ce qu'on...  »), P1v104 («  c'est-y d' leur faute » pour « est-ce de...  »), P1v225 («  Ç' s'rait-y qu' des mots  »pour « cela ne serait-il que...  »), P3v72 et v75 («  faut-y...  » pour « faut-il...  »), P3v87 et v88 («  V'là-t-y pas que...  » pour « Ne voilà-t-il pas que...  »), P3v142 («  ça n' s'rait-y que » pour « ne serait-ce que  »), Epv122 («  Ça rendra-fy l'Alsac'-Lorraine » pour « Cela rendra-t- il...  », Epv125 («  faut-y  »pour « faut-il  »)]
Remarques)  : ces attestations illustrent le développement, souvent noté à cette époque, de la tournure interrogative avec t ÿ, mais, dans aucune, t ÿ n'est devenu une particule pouvant reprendre un sujet féminin.
II. forme fam. ou pop. du pronom personnel conjoint complément indirect lui [Hv124 («  faut pas y en vouloir  »), SMv66 («  D'y soul'ver eun' de ses bergères  »), SMv74 («  J'os'rais seul'ment pas y causer  »), R2v7]  ; Jehan Rictus transcrit lui par «  yi  »après qui en R3v8.
Remarques)  :l'usage populaire substitue le pronom adverbial y au pronom lui, même quand le référent du pronom est une personne ; il utilise même parfois z ÿ pour renforcer leur (voir z'y).
y a [présentatif (avec diverses formes conjuguées de l'élément verbal avoir)] [voir aussi gn'a (forme plus fréquente dans les Soliloques), gn'y a et y gn'a] 1° a) ya
il y a [Hv102 et v103 («  y aura toujours  » et « y a quèf chos'  »), SMv114 («  y a trop d' joie  »), SMv126 («  Y aurait des chanc's  »), Dv194 («  Et faire enfin qu'y ait du bon  »)]
Remarques)  : la suppression totale du pronom impersonnel dans le présentatif est ancienne et courante dans les usages fam. et pop. ; il arrive rarement dans les Soliloques, toujours après qu', que l'auteur fasse diérèse sur y a (avec dédoublement de y en voyelle [i] et semi-consonne [j]) et cela pour des raisons métriques, mais en conformité avec ce qui s'observe parfois dans l'usage populaire [Dv194 («  qu'y //y ait du bon  »), P1v164 («  C' qu'y //y a cor' dans la Capitale  »)].
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b) y a pas (ou autre élément inclus dans la négation)
il n'y a pas (ou autre élément) [R2v273 («  y aura pas d' débâcle  »), P1v133 («  Y aurait pas d' police  »), SCAv48 («  Y a rien à dire, y a qu'à crever  »)] Remarques)  : la suppression du premier élément de la négation dans le présentatif est ancienne et courante dans les usages fam. et pop.
2° y a de quoi (+ infinitif) [voir aussi gn'a de quoi à gn'a, 2°]
il y a des raisons (pour +infinitif) [Hv47 («  y a d' quoi en roter  »)] Remarques)  : expression fam. courante qui s'est développée à partir de formules dans lesquelles de quoi renvoie à quelque chose de plus précis dont on est muni (argent, nourriture) ou qui est offert par la situation (comme dans le passage «  Gn'a d' quoi faire un Pari Mutuel  » de P1v195).
y gn'a [variante de gn'a (voir gn'a et y, L 2° b)] yi [variante de y pour lui après qui ; voir y, IL]
youpin [n.]
juif [SMv27, R2v138]
Remarques)  : ce mot méprisant, dérivé de youdi (yaoudi, forme algérienne de même sens) par la même déformation péjorative qu'Auverpin pour Auvergnat, est recensé dans des dict. d'argot (Dictionnaire d'argot fin-de-siècle 1894 de Virmaître, partie français-argot du Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
yousque [adv. interrogatif]
où est-ce que  ? [Fv51 («  yousqu'il est le Royaume // Des mimis morts, des p'tits moutons  »)]
Remarques)  : cette variante de ousque (voir ousque) commençant comme l'interjection enfantine de moquerie you est une trouvaille de Jehan Rictus.
youtre [n.]
juif [R2v205]
Remarques)  : ce mot méprisant, dérivé de l'allemand Jude par déformation avec finale outre de foutre, est recensé dans des dict. d'argot (Larchey, Rigaud, Delesalle) avant 1897, puis dans Bruant.
z' [marque de liaison (y compris ce que l'on appelle velours)]
I. marque de pluriel [voir aussi z'y]
1° transcription de ils (ou de alles pour elles) devant voyelle [IPv6 («  y z'ont peur  »), IPv19 («  y z'ameut'nt  »), etc.  ; P1v60 («  A z'ont mal  »), MMv43 («  A z'ont des tourell's  »), etc.]
Remarques)  : voir y, I. 1° b).
2° liaison entre qui (pr. relatif sujet au pl.) et ont [IPv46 («  Qui z'ont cherché  »), P1v175 («  Qui z'ont l' mépris  »), P2v24 («  Qu'y z'ont des galons  », avec confusion entre qui et qu'ils), etc.]
Remarques)  : la marque surajoutée de pluriel évite certains hiatus (voir III. ci-dessous).
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3° redondance graphique par rapport à la prononciation [Hv43 («  Avec leurs z'amis  »), SMv60 («  les z'Homm's  »), Ev91 («  des z'avocats  »), Ev95 («  les z'oss'ments  »), Dv31 («  tes z'os  »), Dv67 («  mes z'ognons  »), Dv152 («  les z'amis  »), Plv2 («  aux z'abois  »), P1v21 («  des z'engelures  »), P1v29 («  Pis v'là des z'éclairs, des z'orages  »), etc.]
Remarques)  : cette redondance renforce graphiquement le style populaire, quitte à forcer parfois les choses [P1v142 («  des concours z'hippiques  »)].
II. marque de seconde personne du singulier [Dv24 («  Sûr que t'as z'un foutu méquier  »), Dv50 («  t' es z'eun' vadrouille  »), SCAv30 («  t'as z'eun' belle âme  »)]
Remarques)  : effet de style populaire pour ces liaisons qui n'ont rien d'obligatoire.
III. ajout d'un z' non grammatical pour éviter certains hiatus [Hv81 («  gn'a z'un troupeau  »), 1t2v148 («  toi z'et moi  »), P1v45 («  L' rupin qu'a z'eu des aventures  »), Epv76 («  — A toi — Z'à moi  »), Fv50 («  Si gn'en avait z'un  »)] Remarques)  : les velours font partie des incorrections relevées dans le langage populaire par les dictionnaires de fautes du XIXe siècle.
zyeuter [voir ordre alphabétique, sans prise en compte de l'apostrophe]
zigouiller [v.]
tuer (au couteau) [MMv69 (tournure pronominale à sens sans doute réciproque)]
Remarques)  : ce verbe expressif d'origine régionale et dont les Soliloques offre une attestation littéraire intéressante en tournure pronominale (relevée dans le Trésor de la langue française) est absent des dict. d'argot avant 1903.
z'y [particule]
particule de renforcement du pronom personnel conjoint complément indirect leur [1Pv14 («  Ça leur z'y donn'  »), SMv122 («  J' m'en vas leur z'y mett'  »)] Remarques)  :dans l'usage pop., le pronom leur est allongé d'une marque de pluriel transcrite z' en liaison et parfois même renforcée pary (issu du pronom lui) devant consonne pour maintenir la marque de pluriel là où, sans cela, il n'y aurait pas de liaison.
zyeuter (zyeuter) [v.]
regarder [MMv57, MMv76]
Remarques)  : ce substitut expressif dérivé de z yeux (liaison agglutinée), attesté dans des parlers régionaux, est recensé dans des dict. d'argot (zioter dans le Dictionnaire d'argot fin-de-siècle 1894 de Virmaître, zieuter dans Bruant) avant 1903.