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Classiques Garnier

Comptes rendus

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Les Cahiers du dictionnaire
    2010, n° 2
    . varia
  • Auteurs : Lo Nostro (Mariadomenica), Racanelli (Antonella)
  • Pages : 143 à 146
  • Revue : Les Cahiers du dictionnaire
  • Thème CLIL : 3147 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Linguistique, Sciences du langage
  • EAN : 9782812439827
  • ISBN : 978-2-8124-3982-7
  • ISSN : 2262-0419
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-8124-3982-7.p.0145
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 22/11/2011
  • Périodicité : Annuelle
  • Langue : Français
145 LiGin STELA FLOREA, CATHERINE FUCxs avec la collaboration de FxÉnÉx~QUE MÉLA- xiE-BECQUET, Dictionnaire des verbes du français actuel, constructions, em- plois, synonymes, Paris, Éditions Ophrys, 2010, 270 p.
Un outil de consultation ou un livre de chevet  ?Son titre, loin d'évoquer, une lecture plaisante, caractériserait plutôt un livre de consultation, un volume de réfé- rences où, s'il en était besoin, la valeur scientifique est aussi renforcée par la pré- sence d'une bibliographie raisonnée (pp. XXII-XXIII) très approfondie et rare dans ce genre d'aeuvre. D'autant plus que la structure et l'organisation qui le gèrent parle non seulement de la compétence des trois auteurs mais de la réponse à une exigence qui touche tout apprenant, natif ou étranger qu'il soit.
Tout formateur de français langue maternelle ou seconde sait bien que les déjà grandes difficultés liées à la multitude de règles et exceptions de la belle langue de Molière et de Sartre deviennent parfois insurmontables face aux pièges des va- riantes des verbes français.
Fidèle à la tradition dictionnairique, les articles des 2500 verbes traités sont pré- cédés par un guide graphique « Comment consulter le dictionnaire  »pour aider le lecteur à se familiariser avec les symboles et localiser rapidement les signes qui in- diquent la présence d'exemples typiques, de synonymes ou de paraphrases, ou enco- re si les prépositions, les structures syntaxiques et sémantiques ou les registres de langue sont assujettis à des variables (suppression, changement, ajout).
Une liste alphabétique des abréviations et des symboles facilite leur repérage en cas de doute ou de rappel au cours de la consultation. Alors que le « Tableau phoné- tique  »guide le lecteur moins expert à l'interprétation de la transcription phonétique qui accompagne les entrées.
Comme les auteurs le déclarent dans l'exhaustive introduction, l'aeuvre se veut «  un répertoire des structures de base du français actuel  »pour permette « non seu- lement de se renseigner sur telle ou telle particularité phonétique ou syntaxique des verbes français, mais aussi et surtout de produire des énoncés [auxiliaires] précieux pour l'apprentissage et l'enseignement du français  »ainsi que pour la traduction «  et servir de modèle pour les dictionnaires bilingues  » (p. XI).
Ce dictionnaire se préfixant donc un triple but en tant qu'outil « de constructions verbales, de contextes témoins  » et « explicatif des sens des verbes recensés  », à tra- vers les aspects morphologiques et syntaxiques, renseigne le lecteur sur la combina- toire du verbe et en retrace le sens.
En même temps aisément accessible au lecteur non spécialiste, il ne se veut pas exhaustif de données ou de descriptions syntaxiques, mais de l'ensemble des verbes les plus représentatifs de l'usage actuel du français et des structures fondamentales.
À l'aide des symboles de la grammaire structurale, les articles présentent une forme familière aux experts et cohérente pour tous lecteurs.
L'étroit rapport entre syntaxe et sémantique est fort évident grâce aux exemples de plusieurs réalisations de différentes structures syntaxiques.
La capacité de lister les possibles collocations, d'examiner les variations de sens
146 selon la forme du verbe, de fusionner dans le même article les homonymes tout en distinguant les différentes acceptions, d'attribuer « une interprétation correcte et univoque du sens  » (p. XX) se manifestent à travers la présentation de synonymes, paraphrases, changements de régime et de l'ordre des compléments. La limite frag- mentaire, propre à un dictionnaire, est déplacée par la richesse des exemples et la contextualisation permettant une lecture fluide et fructueuse. Le lecteur ne pourra pas fermer son dictionnaire sans avoir retenu l'association d'une telle structure syn- taxique àune telle forme sémantique ou avoir dissipé tout doute.
Le manque des tables de verbes modèles (pour éviter de faire recours à tout autre outil, mais bien loin de tout objectif préfixé par les auteurs de cette oeuvre) et d'un support électronique (pour accélérer la recherche, toutefois prévisible pour une toute méritée deuxième édition) pourraient être sans doute les seuls reproches à im- puter à ce travail à double portée scientifique et didactique.
MARICA LO NOSTRO
Université de Salerne - LaBLex


La Traduction dans les dictionnaires bilingues, Lynne Franjié, Paris, Éditions Le Manuscrit, 2009, 322 p.
La traduction est au coeur du dictionnaire bilingue, dont la vocation est justement celle de mettre en contact deux langues et de les faire dialoguer entre elles. Il s'agit d'une tâche bien compliquée et certainement ingrate. La plupart des traducteurs décri- rait probablement les dictionnaires bilingues en termes de « mal nécessaire  ». Comme le souligne l'auteur dans l'introduction à son volume, le dictionnaire bilingue est « ju- gé comme étant "mauvais ", "peu utile ", "lacunaire " » (p. 21) par rapport au dio- tionnaire monolingue « considéré comme un objet de culture, la véritable autorité lin- guistique, l'ouvrage de référence par excellence  » (p. 21). Et pourtant, personne ne peut s'en passer  : ni les étudiants, ni les enseignants, ni les traducteurs.
Le rapport entre traduction et dictionnaire bilingue est une question essentielle, tant du point de vue lexicographique que traductologique, mais Lynne Franjié re- marque le fait qu'«  il est étonnant de constater que celui-ci [le dictionnaire bilingue] retient peu l'attention des traductologues et qu'il fait l'objet de si peu d'études en traductologie  » (p. 19). Ce manque d'intérêt n'est pas en réalité tellement étonnant, parce qu'il est une conséquence logique de la situation que l'on a esquissée au début  : le traducteur emploie le dictionnaire bilingue, mais toujours un peu à contre- coeur, avec une certaine méfiance à l'égard d'un instrument qui pour remplir sa fonction doit sortir du flux incessant du discours pour cristalliser des unités de sens. Le contexte représente le grand abîme qui sépare le traducteur du dictionnaire  : «  la traduction dans le dictionnaire pose la question de la traduction " décontextualisée " » (p. 25), qui ne représente pas —aux yeux des traducteurs —une vraie forme de tra- duction. Or, l'ouvrage de Lynne Franjié ouvre une nouvelle piste de recherche, en proposant une approche traductologique dans l'étude des dictionnaires bilingues, dans la convinction que « tant qu'il n'existera pas de critique des dictionnaires bi- lingues d'un point de vue traductologique continueront à paraître des dictionnaires bilingues qui sont peu utiles au traducteur » (p. 26).
147 L'auteur mène sa réflexion à partir de l'analyse de deux dictionnaires bilingues le dictionnaire Larousse arabe-français de Daniel Reig et le dictionnaire arabe-an- glals Dictionary of Modern Written Arabic de Milton Cowan. Après une réflexion générale sur le dictionnaire bilingue —nature, typologie, fonction — Lynne Franjié aborde la question de l'équivalence et de la polysémie dans le dictionnaire bilingue, en illustrant à l'aide d'exemples les différentes stratégies lexicographiques adoptées par les dictionnaires pour résoudre les difficultés rencontrées. «  Le problème posé dans le dictionnaire bilingue  »remarque l'auteur « paraît alors double  : le problème de la correspondance des mots, dans leur dénotation et leur connotation, mais aussi le problème de l'équivalence des réalités, qui soulève la question du contexte et de la référentialité  » (p. 68). Correspondance et équivalence représentent les deux mots-clés qui doivent retenir notre attention, parce qu'ils sont à la base du change- ment méthodologique que Lynne Franjié considère comme indispensable pour arri- ver à la réalisation d'un vrai dictionnaire pour traducteurs. Elle l'explique assez clairement dans le paragraphe Des correspondances aux équivalences (p. 85) du premier chapitre  :selon la perspective traditionnelle, le dictionnaire bilingue ne fait que mettre en correspondance deux langues, où par « correspondants  » il faut en- tendre « des éléments isolés de la langue et non pas du discours  » (p. 85). Dans la pratique, cela conduit à un type de dictionnaire bilingue conçu comme « outil de dé- codage ou d'encodage d'une langue et non pas de traduction  » (p. 89), dont les équi- valences « demeurent dépendantes de la nomenclature de la langue source, voire sont conçues comme sa traduction » (p. 88). Il s'agit en réalité d'un faux dictionnai- re bilingue, puisque cette démarche « est davantage une approche de lexicographie monolingue que bilingue. Preuve en est, il est souvent proposé que les traductions soient basées sur l'analyse des signifiés faite dans le dictionnaire monolingue  » (p. 88). Le défi qui se pose maintenant au dictionnaire bilingue est celui de dépasser la dimension de la langue pour plonger dans le discours, de gagner une dimension dynamique qui le transformerait ainsi dans «  un lieu de "passage "qui consigne non pas deux langues mais le processus de "passage " de l'une à l'autre  » (p. 90). Un vrai dictionnaire de traduction.
Le premier pas à franchir est celui de reconnaître la spécificité de la traduction lexicographique comme objet d'étude autonome se situant au croisement de la lexi- cographie et de la traductologie. Le deuxième et le troisième chapitre du volume sont entièrement consacrés à ce sujet  :après avoir donné une définition de traduc- tion lexicographique, l'auteur illustre ses caractéristiques et les enjeux qui y sont liés, en proposant à la fin une classification sur la base d'une approche traductolo- gique. Elle distingue ainsi cinq types de traduction  : la traduction-information (T-I), la traduction-explication (T-E), la traduction-allusion (T-Al), la traduction-approxi- mation (T-Ap) et la traduction-recréation (T-R).
À partir de ses analyses, l'auteur arrive à la conclusion que « les dictionnaires bilingues "papier " [...] présentent un intérêt limité pour le traducteur  » (p. 297), parce que ceux-ci travaillent dans une perspective exclusivement lexicographique dans laquelle le point de vue du traducteur n'est pas pris en compte. C'est pour cette raison que Lynne Franjié invite les traducteurs à « prendre activement part à l'élabo- ration des dictionnaires bilingues  » (p. 300) et à jouer un rôle de protagonistes dans le processus de transformation que les dictionnaires sont en train de vivre sous la pression de la révolution technologique. Les nouvelles technologies représentent en effet un potentiel qui n'a pas encore été suffisamment exploité par la lexicographie
148 bilingue. Elles représentent la clé pour la réalisation d'une approche vraiment tex- tuelle de la lexicographie, par le biais des corpus et tout spécialement de l'Internet, «  un hyper-corpus riche et incommensurable  » (p. 269). Le dernier chapitre est consacré aux dictionnaires en ligne et aux autres instruments de traduction que l'In- ternet met aujourd'hui à disposition des traducteurs. Malgré leurs lacunes, c'est bien là, selon l'auteur, qu'il faut chercher le dictionnaire bilingue pour traducteurs du fu- tur  : un dictionnaire « qui serait un " hyper-dictionnaire ", en ligne, mettable à jour et où l'espace de stockage est illimité  » (p. 295), « une sorte de "mémoire de tra- duction "générique qui contiendrait les traductions les plus stables et les plus usi- tées pour certains types de textes ou genres de discours  » (p. 296).
Le débat sur le futur du dictionnaire papier est bien évidemment tout à fait ou- vert, mais c'est sûr que les réflexions proposées par Lynne Franjié — grâce à sa for- mation d'interprète et traducteur —aideront les lexicographes à réfléchir sur leurs méthodes de travail, en améliorant ainsi la qualité des dictionnaires bilingues actuel- lement sur le marché ou en cours de réalisation.
ANTONELLA RACANELLI Université de Ban Aldo Moro - LaBLex