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Classiques Garnier

Comptes rendus

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Les Cahiers du dictionnaire
    2009, n° 1
    . varia
  • Auteurs : Giaufret (Anna), Pofi (Sarah), Larocca (Lucia Cristina), David (Maria Rosaria), Guario (Maria Giovanna), Boccuzzi (Celeste), Ostuni (Donatella)
  • Pages : 133 à 146
  • Revue : Les Cahiers du dictionnaire
  • Thème CLIL : 3147 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Linguistique, Sciences du langage
  • EAN : 9782812439810
  • ISBN : 978-2-8124-3981-0
  • ISSN : 2262-0419
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-8124-3981-0.p.0135
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 22/11/2011
  • Périodicité : Annuelle
  • Langue : Français
135 PIERLUIGI Liens, Dictionnaire alphabétique et analogique du français des activités physiques et sportives, Verona, Qui Edit, 2008, 2 vol.
Après les dictionnaires de Petiot (Le Robert des sports. Dictionnaire de la langue des sports, Paris, Le Robert, 1982) et de Doillon (Le Dico du sport, Paris, Fayard, 2002), voici un nouvel ouvrage qui se propose de faire état du lexique des activités physiques et sportives tel qu'il se présente aujourd'hui dans la langue fran- çaise. Ce dictionnaire, qui s'adresse aussi bien aux spécialistes qu'au grand public, s'appuie sur un corpus textuel important et fait une large place aux unités lexicales, aux locutions ou encore aux expressions métaphoriques relevant du registre fami- lier, ou du niveau de langue populaire, désormais universellement acceptées et em- ployées. Il s'agit donc bel et bien de fournir à l'utilisateur les outils pour une com- préhension fine du lexique sportif et pour son réemploi en contexte, à l'aide notam- ment de nombreux exemples, sans oublier cette part importante de lexique qui se trouve à la frontière entre discours spécialisé et langue commune (phénomène d'au- tant plus important dans le domaine du sport que celui-ci investit le quotidien de nombreux locuteurs).
Le corpus textuel, à partir duquel s'est faite l'extraction terminologique, se com- pose d'ouvrages techniques consacrés aux activités physiques et sportives, à la condition physique, à la médecine du sport, au sport scolaire, au sport loisir, aux jeux olympiques. S'y ajoutent la presse sportive —quotidiens et magazines tous sup- ports —les sources encyclopédiques et dictionnairiques papier et en ligne, la trans- cription d'enregistrements audio et vidéo de commentaires d'événements sportifs, cassettes vidéo, interviews sur le terrain, sites Internet à vocation sportive.
La nomenclature du dictionnaire se compose d'environ 13.000 entrées, 30.000 acceptions et définitions, 50.000 emplois en contexte, 10.000 synonymes, anto- nymes et autres analogies, 10.000 expressions et locutions diverses correspondant aux différentes définitions et aux exemples apportés. Ces mots-vedettes, relevant d'environ 200 disciplines sportives et activités physiques, comprennent des termes d'anatomie, de médecine du sport, etc. On y trouvera un vocabulaire actuel, des mots étrangers d'usage courant, des expressions familières, populaires ou argo- tiques, des sigles etc. Les lexèmes retenus appartiennent aux catégories du nom (65%), du verbe (20%), de l'adjectif (13%), de l'adverbe (2%), outre quelques pré- positions. Sont prises également en compte les abréviations courantes (ex. athlé pour athlétisme, Fédé pour Fédération, etc.), les sigles et les acronymes.
Le dictionnaire fait état de la polysémie qui caractérise certaines unités lexi- cales, du fait de leur appartenance à différents sous-domaines de spécialité (diffé- rents sports, signalés à la fin des exemples d'emploi) ou bien à différents niveaux de spécialisation, ainsi que de phénomènes de synonymie qui affectent certains lexèmes. Les termes complexes sont également rèpertoriés, parfois en tant qu'entrée autonome, parfois dans la section `expressions, locutions, combinaison de mots'. Du point de vue du paradigme dérivationnel, les unités lexicales ayant le même ra- dical sont dégroupées  : en témoigne, par exemple, l'ensemble formé par talon, ta- lonnade, talonnage, talonner, talonneur, talonnière.
136 S'agissant s'un dictionnaire analogique, l'ouvrage présente un système de ren- vois, sous forme d'astérisque, qui permettent au lecteur de reconstruire la terminolo- gie du sous-domaine et qui ne concerne pas uniquement les unités terminologiques qui se trouvent dans la rubrique phraséologique, mais également les termes conte- nus dans les définitions et dans les exemples.
La rédaction de l'article rappelle le traitement polysémique propre aux diction- naires de langue, plutôt que la pratique proprement terminologique.
L'entrée est suivie de différentes rubriques : 1) catégorie grammaticale et do- maine ; 2) définitions) ; 3) exemples (cités pour la plupart, et forgés) ; 4) syno- nymes, antonymes, mots de sens voisin (Cf.) ; 5) expressions, locutions (nomi- nales, verbales, adjectivales...), collocations et combinaisons de mots constituant la phraséologie.
Placées après les indications de la catégorie grammaticale (entre crochets) et du domaine d'emploi du mot-vedette (en petites majuscules), les définitions sont construites sur la base d'un découpage fonctionnel par rapport au domaine de spé- cialité. Si elles concernent des néologismes, elles sont suivies de la date de l'arrêté de la Commission Générale de Terminologie et de Néologie concernant le terme en question. Les définitions peuvent être classées par ordre de fréquence dans les caté- gories suivantes  : 1) définition par genre prochain et différence spécifique ; 2) défi- nitionpartitive ; 3) définition synonymique ; 4) définition par description ; 5) défini- tion mixte par synonymie et par description ; 6) définition opératoire ou définition par fonction. Les définitions contiennent aussi parfois des indications métalinguis- tiques signalant des restrictions (par ex. marques diatopiques).
Suivent les exemples qui, pour la plupart des cas, sont issus d'un corpus cou- vrant les 15 dernières années. Rares sont les exemples forgés. Tout en éclairant les définitions, et tout en fournissant, dans certains cas, des renseignement de type en- cyclopédique, les exemples assument la fonction de guider le lecteur dans l'inter- prétation et l'emploi corrects du mot-vedette qui y est indiqué en italique, le cas échéant même à l'intérieur de nombreuses locutions figées et collocations. Les sources sont toujours citées, à l'exception des informations prises sur le terrain, de brochures ou de plaquettes. Les références complètes se trouvent à la fin de l'ouvra- ge, dans la section bibliographie.
La microstructure poursuit avec la zone paradigmatique, qui comprend les syno- nymes, les antonymes et les mots de sens voisin (même si la synonymie est rare- ment exacte pour les termes les plus spécialisés et l'antonymie encore plus rare car le dictionnaire privilégie les termes de nature nominale) et la rubrique expressions et locutions, ou `zone phraséologique', qui tient compte de la phraséologie propre au domaine. Ici, tout comme dans les exemples, le mot-vedette est indiqué en ita- lique, et l'on y trouve de nombreuses expressions figées et collocations, ou `fonc- tions syntagmatiques', ainsi que de nombreux exemples. Cette rubrique obéit à une démarche lexico-sémantique s'intéressant à une multitude de relations lexicales (outres les relations signalées pour l'optique conceptuelle, on tient compte de rela- tions actancielles, collocationnelles, etc.) car elle présente les liens paradigmatiques et syntagmatiques que le terme-vedette entretient avec d'autres unités lexicales.
A la fin de chaque article, une section est réservée aux renvois à d'autres entrées pouvant fournir des informations supplémentaires (analogie d'ordre morphologique et sémantique).
137 La dernière partie de l'ouvrage est consacrée aux index et aux annexes : a) un in- dex des entrées ; b) un index des activités physiques et sportives traitées ; c) une an- nexe où sont rèpertoriés les principaux sigles et abréviations français et internatio- naux.
Ce dictionnaire comporte une riche bibliographie ainsi qu'une sitographie thé- matique.
Il s'agit donc d'un ouvrage qui peut constituer aussi bien un instrument utile et pratique pour ceux qui s'intéressent à la terminologie sportive, qu'une tentative de réflexion sur les pratiques lexicographique et terminologique.
ANNA GIAUFRET Université de Gênes


Arany REY, L'Esprit des mots, Mont-Saint-Aignan, Universités de Rouen et du Havre, 2009, 48 p.
L'Esprit des Mots, édité aux Publications des université de Rouen et du Havre et pa- ru en avri12009, nous entraîne dans les coulisses des chroniques matinales d'Alain Rey, dans son émission sur France-Inter (diffusée régulièrement de 1993 jusqu'en 2006), où il y décortiquait chaque jour un mot, normalement un de ces mots piégés, galvaudés, ma- laxés, qui ont envahi l'actualité française dans les médias.
Son domaine de prédilection de ce détournement de la langue est sans doute la poli- tique, où les opinions et les jugements passent par la maîtrise du langage et des signes, soumises à la manipulation des « langues de bois  »qui modèlent les expressions pour es- sayer de manipuler aussi les opinions et les pensées.
Au fil des pages, sur un ton libre et personnel, Alain Rey nous décrit ce qu'il appelle le « miracle radiophonique  »qui, au contraire de la télévision qui ruine la matière langa- gière et littéraire de tout récit, est lui-même un véhicule qui enrichit les contenus de lan- gage àtravers la matérialité acoustique des voix et qui suscite aussi l'élaboration d'évo- cations humaines aussi variée qu'il y a d'auditeurs.
Cette chronique radiophonique est née en 1993, grâce à Ivan Levaïi, comme une sor- te de réaction au manque des règles énoncées de bon usage de la langue qui, autrefois, surtout à l'école mais aussi en famille, dénonçait même dans la vie de tous les jours la rectitude du langage. Malheureusement la diffusion du langage de la télévision encoura- ge dans la parole publique « les prononciations calamiteuses, les à peu près, les cuirs et les pataquès, les fausses conjugaisons, constructions et les vraies incohérences  » (p. 13). L'auteur, dépistant les abus et les tromperies du mauvais usage fait de cela la matière de ses chroniques de langue, offrant à ses lecteurs et à ses auditeurs les outils pour une nou- velle émancipation lexicale, avec la finalité aussi de dénoncer « les glissements, abus, transferts, déformations que des ignorants, des distraits ou des malins (parfois les trois) faisaient subir à nos pauvres vocables pour nous influencer, nous séduire, et souvent nous tromper  » (p. 18).
Alain Rey, figure emblématique de la rédaction des Dictionnaires Le Robert, est le spécialiste incontesté de la langue française. Linguiste, lexicologue, philosophe du lan- gage, il a publié de nombreux ouvrages sur la langue, la sémiotique et la littérature. Ob-
138 servateur iconoclaste de l'évolution de la langue française qu'il traduit dans les diction- naires qu'il dirige, dans cette ceuvre qu'on va définir « petite  »juste par ses dimensions physique, on s'étonne par contre de la grandeur de l'esprit et du savoir faire de l'auteur, qui, avec un langage pur mais sur un ton qui nous donne l'apparence d'une conversation amicale, nous entraîne avec passion dans l'univers du langage et son rapport avec les medias et la liberté parfois abusée des mots qui les habitent. Une lecture riche d'intérêt et très stimulante pour tous les experts et le néophytes du secteur.
SARA POFI Université de Bari



FRnrrçois COCHET - R~Ivw PORTE, Dictionnaire de la Grande Guerre  : 1914-1918, Paris, Robert Laffont, 2008, XL, + 1120 p.
En ce temps de bilan du XXe siècle, sous la direction de François Cochet et Rémy Porte, ce dictionnaire collectif a la tâche de renvoyer d'entrée à la réalité historique du premier conflit mondial. On notera que le choix de la période pour la sortie de l'ouvrage n'est que le plus convenable  : la célébration du 90e anniversaire de l'armistice de 1918. D'ailleurs, cette commémoration autour de la Première Guerre Mondiale a été tristement «  silencieuse  », parce qu'elle a été d'emblée la première sans la présence d'un seul an- cien combattant et donc sans la voix vigoureuse des « poilus  ». Le livre tombe donc a pic pour combler ce vide, symbole de la disparition inexorable de la mémoire directe histo- rique, mais aussi linguistique.
A partir du début de la guene de 1914, un répertoire d'entrées lexicographiques hété- roclite se dégage  : au fil des mots, on découvre 2.500 termes touchant les domaines les plus variés de la réalité des tranchées. Le choix du "dictionnaire "devient alors légitime  : il permet a plusieurs disciplines (science militaire, artillerie, histoire, politique, technologie, etc.) de se côtoyer dans un seul ouvrage, dans une véritable entente et al- liance de mots. ouvre passionnante, elle nous présente, parfois amèrement, un ample lexique de « mots-échos sortis du silence des tranchées  ». Dans cette perspective il constitue, sans aucun doute, une inépuisable zone d'exploration culturelle.
On y trouve d'abord les protagonistes des interminables combats (les célèbres poilus de 14-18), assauts et sièges, hommes de plume et politiques, lieux et théâtres de guerre, de plus on donne un relief particulier aux aspects militaires, comme stratégies et tac- tiques, aunes et armements, offensives et défensives. Soulignons aussi les faits guerriers et les images belliqueuses exposées relatives aux enjeux des différentes puissances inter- nationales de cette époque-là, les causes du conflit, ou encore le rôle des hommes au pouvoir et les conséquences que tout cela a apporté dans notre société actuelle.
11 est d'ailleurs piquant de noter qu'on a répertorié beaucoup de termes de 1"` argot des tranchées ", comme  :barda, bleus, boche, cagna, crapouillot, diables bleus, dough- boys, feldgrau, gnôle (pinard), gourbi, grosse Bertha, Marie-Louise, marmite, perlot, poilus, Tommies, Sammies, saucisse, etc. Non seulement les définitions données résultent exhaustives, mais encore assez riches en références bibliographiques.
Ainsi, on remarque qu'il y a beaucoup d'expressions devenues célèbres et mises en exergue par plusieurs journaux anciens et modernes  : « der des der  », « debout les
139 morts  », « gueules cassées  », «  je les grignote  », « tranchées des baïonnettes  », ne sont que des exemples. A ce propos, même les anglicismes comme «  live and let live  », «  no man's land  » or «  pill boxes  », ne manquent pas d'être sagement contemplés.
Loin d'être un simple enchaînement de définitions, ce dictionnaire nous plonge dans la mémoire nationale de la France. Ce qui fait la valeur ajoutée de cet ouvrage, c'est donc moins son caractère plénier que l'originalité de son regard bigarré sur les événe- ments. De même, l'ampleur sémantique des termes se multiplie à partir du contexte his- torique donné pour dévoiler l'aspect « total  » de la « der des der  ». Témoin de la grande guene, ce vocabulaire est là pour vivifier la mémoire historique, guider le lecteur et lui expliquer les pièges de ces quatre années de feu.
En guise de conclusion, le dernier mot de l'ceuvre donne un mémorable aboutisse- ment à sanomenclature  : le nom de Stefan Zweig conclut avec une suggestive note paci- fiste cet extraordinaire travail lexicographique, historique et culturel à la fois.
LUCIA CRISTINA LAROCCA Université de Bari


JnNn ALTMANOVA, Néologismes et créativité lexicale du français contemporain dans les dictionnaires bilingues français-italien, Fasano, Schena Editore, 2008, 254 p.
Jana Altmanova est Docteur de Recherche en Linguistique française à l'Université de Bari. Elle a été titulaire d'un contrat de Langue française à la Faculté de Droit de l'Université de Naples «  Parthenope  » et à la Faculté des Langues et Littératures étran- gères de l'Université de Bologne. Elle est rédacteur du Nouveau Dictionnaire Général Bilingue italien-français/français-italien (NDGB) dirigé par Giovanni Dotoli, et membre de plusieurs associations scientifiques.
Dans son livre intitulé Néologismes et créativité lexicale du français contempo- rain dans les dictionnaires bilingue italien-français/français italien, elle nous présen- te, d'une façon originale et aiguë, un nouveau concept de néologisme et de créativité lexicale.
Altmanova pose donc son attention sur les néologismes et sur le rôle qu'ils jouent dans la langue française contemporaine et dans les dictionnaires, en analysant les dic- tionnaires bilingues généraux les plus répandus  : le Boch-Zanichelli (2000-2007), le Grande Dizionario Garzanti di francese (2003-2006), et le Paravia (2003-2007).
Le phénomène de la néologie et l'élaboration des dictionnaires bilingues est le thème pivot de son étude. On remarque que la langue, en tant qu'instrument de communication, est toujours en mouvement, change toujours son rythme, s'adapte spontanément aux mu- tations de la société et aux nouvelles exigences expressives des parlants qui produisent, pourtant, des unités lexicales nouvelles.
Le but de ce travail est celui d'analyser le traitement de la néologie dans les dictionnaires bilingues français-italien, afin de mesurer leur actualité et les procèdes de leur mise à jour.
Dans quelle manière alors ces nouveaux mots entrent dans les dictionnaires  ?Quels critères adoptent les lexicographes pour construire un nomenclature cohérente par rap- port aux destinataires et aux objectifs d'un dictionnaire  ?Quelles catégories de mots pri- vilégient-ils  ?
140 Ce livre est reparti en trois chapitres. Dans le premier, Altmanova explique, notam- ment, la notion et la fonction des néologismes dans la lexicographie bilingue, puis elle observe le marquage des néologismes et leur distribution dans les dictionnaires.
Tout au long du deuxième chapitre, elle pose l'attention surtout sur le renouvelle- ment de la nomenclature dans les dictionnaires bilingues. Apres une claire et précise des- cription du corpus lexicographique, toujours tenant en considération les trois diction- naires de référence, elle passe à l'analyse de la macrostructure, du niveau de la langue des nouvelles entrées et au marquage métalinguistique.
Les procédés de formation des mots, les troncations, les mots composés, les mots- valises, la distribution des mots abrégés, la variation de registre, le marquage, les néolo- gismes créés par dérivation, les sigles et les acronymes dans la langue courante n'échap- pent pas à son regard attentif et précis et ils sont largement analysés dans cette partie centrale du texte.
Dans le dernier chapitre, l'attention porte sur le repérage et sur la sélection des néolo- gismespour l'élaboration d'un corpus de vérification. En autre ce chapitre nous permet d'en- tamer une réflexion sur les néologismes et leur monitorage dans la lexicographie bilingue.
Jans Altmanova a constaté qu'un monitorage très attentif des nouvelles lexies et des nouvelles expressions est indispensable, pour une meilleure description lexicographique des nouveaux faits de langue. Elle analyse aussi le critère de sélection des néologismes pour une nomenclature bilingue, qui n'est pas toujours cohérent, et les facteurs favo- rables àl'intégration des néologismes, comme par exemple la fréquence d'usage, la sus- ceptibilité de connaître un développement dans la langue, le degré de spécialité différent dans les deux langues, la différence culturelle et l'opacité élevée.
Seulement certains mots auront le privilège d'entrer dans le dictionnaire, d'autres ne seront plus réemployés (les hapax) et finiront, pourtant, dans l'oubli, observe l'auteur.
Jans Altmanova élabore ses théories d'une façon approfondie et précise, en employant, bien sûr, un langage technique et scientifique, mais donnant au lecteur la possibilité de fai- re une large réflexion dans le cadre de la métalexicographie et surtout de lui donner le plai- sir de découvrir un univers nouveau, toujours en mouvement et extrêmement fascinant.
MARIA ROSARIA DAVID Université de Bari


Néologie et terminologie dans les dictionnaires, sous la direction de JEAN-FRnrrçois SABLAYROLLES, Paris, Honoré Champion, 2008, 242 p.
Le volume Néologie et terminologie dans les dictionnaires, sous la direction de Jean- François Sablayrolles, rassemble les articles des dix communications présentées au col- loque «  La douzième Journée des Dictionnaires  », consacrée à la « Néologie et termino- logie dans la lexicographie francophone  », organisée par Jean Pruvost à l'Université de Cergy-Pontoise le 17 mars 2004, ainsi que des articles correspondant à des travaux pré- sentés dans l'exposition organisée en complément du colloque lui-même.
Le sujet de la néologie a d'abord été traité par Jean Pruvost dans sa préface où, dans une perspective historique, il trace le voyage du mot `terme' à travers les dictionnaires au cours des siècles en partant par le dictionnaire de Maurice de La Porte jusqu'au Petit La- rousse illustré.
141 Jean François Sablayrolles introduit sa thèse sur les néologismes servant de base de repère pour les communications successives du fait de l'importance que son ouvrage re- couvre dans le domaine de la néologie et de ses relations étroites et plus complexes avec la lexicographie, par rapport à la définition traditionnelle du mot néologique comme un mot qui n'est pas dans les dictionnaires généraux ou bien n'y entrant que parce qu'il n'est plus néologique. Jean François Sablayrolles examine le premier mode de relation avec la lexicographie, et notamment la néologie comme corpus d'exclusion dans le dic- tionnaire, en remarquant comment le recours aux dictionnaires pour les néologismes outre que formels est source de nombreuses difficultés. La méthode d'extraction du dic- tionnaire et notamment de recours aux outils extra-linguistiques pour définir le concept de néologie, s'avère ainsi incomplète du fait de l'analyse d'un seul dictionnaire pour considérer qu'un mot constitue une acception ou un néologisme, des absences lexicogra- phiques dont il faut se méfier, et de la présence de différents types de néologismes (néo- logismes homonymiques formels, les re-créations fortuites, la néologie sémantique, « grammaticale  » et combinatoire).
L'objet de la communication de John Humbley, « Les dictionnaires de néologismes et leur évolution depuis 1945  », montre qu'il s'agit d'une catégorie lexicographique très peu explorée par le métalexicographes. Ce type de dictionnaires se répartissent en trois grandes catégories. La première comprend les suppléments de grands dictionnaires de langue. La se- conde est constituée d'ouvrages élaborés par des équipes de recherche de type universitaire, la troisième regroupe les dictionnaires de néologismes officiels avec une fonction prescripti- ve. L'auteur s'intéresse ensuite à des dictionnaires de néologismes particuliers, en traçant un bref parcours parmi le dictionnaires de différents pays  :ceux qui puisent à une seule source, ceux qui relèvent les mots témoins de l'évolution de la société, ceux qui sont consacrés à des domaines délimités, en particulier technologiques, enfin les dictionnaires de néolo- gismes bilingues qui restent une singularité. En conclusion, John Humbley examine ce que peut être l'avenir de ces types de dictionnaires en fonction du développement de l'informa- tique, des traditions nationales et des objectifs des centres de recherches universitaires.
Dans une perspective sociolinguistique, l'importance de la société, du contexte dans lequel la langue évolue, et surtout du consensus d'une communauté riche et va- riée dont le néologisme est un produit, constitue le noyeau des autres communications.
A ce propos, dans le but de l'intégration de néologismes dans les dictionnaires pour rendre compte de l'évolution de la langue et des activités humaines, la communication de Khalid Alaoui, qui a effectué un stage aux éditions Larousse, se base sur une ap- proche méthodologique visant à « alimenter  » la base de données néologiques, à intégrer les grilles d'analyse des néologismes et le type de corpus choisi pour une classification onomasiologique du corpus dans la base informatique et à analyser l'ensemble des mots recensés dans la presse.
Les communication suivantes abordent des problèmes relevant de la terminographie ou s'intéressant à des domaines spécialisés et à leur rapport avec les dictionnaires
Elisabeth Blanchon expose les relations de la normalisation et de la lexicographie, puisqu'une extension récente des projets englobe la lexicographie pour tenir compte du développement des NTIC (Comité Technique Joint) et de la diversité des supports lexico- graphiques. L'exposé des structures nationales et internationales de normalisation ainsi que des procédures suivies constitue un préalable à l'examen détaillé du TC 37 de l'1S0
" Terminologie et autres ressoursec linguistiques ".
La presence de néonymes dans des dictionaries de langue générale ainsi que l'exa- men du sentiment néologique et de ses rapports avec les dictionnaires de spécialité
142
constitue l'objet de la réflexion de Danielle Candel et Virginie Tourbeux qui se concen- trent notamment sur les termes du domaine du nucléaire, en montrant comment le do- maine de spécialité est en quelque sorte à lui seul signe de néologisme.
Les rapports des discours publicitaires et des noms de marque avec la langue et les dictionnaires sont examinés par Karine Berthelot-Guiet, qui montre comment ces do- maines sont par essence néologiques.
Les quatre dernières contributions abordent des questions relatives à des langues étrangères, soit dans leurs apports à la langue française (arabismes et italianismes dans les dicionnaires français), soit dans des études métalexicographiques.
Françoise Quinsat étudie " Le traitement lexicographique des arabismes dans les dic- tionnaires du français ", en particulier les dictionnaires du XXe siècle. Les arabismes presentet plusieures spécificités résidant d'abord dans la translittération des caractères et dans la diversité des formes d'arabe d'où sont issus les empruns français.
Mariagrazia Margarito s'intéresse aux "Italianismes de la langue française dans les dictionnaires monolingues contemporains ", dans une optique quantitative de catalogage comptable et de champs sémantiques de pertinence, où l'on remarque une unanimité des domaines de predilection  : la musique, la cuisine, la politique, le sport et le cinema. Une optique culturelle est adoptée par l'examen des contextes où figure l'image de l'Italie dans trois dictionnaires (Le Petit Robert des enfants, Le Robert pour tous, Dictionnaire du français. Référence, apprentissage).
Michela Murano étudie " Le mot neologia dans les dictionnaires monolingues ita- liens ", à travers l'analyse des articles consacrés à ce mot dans les dictionnaires du XVIIIe s. au XXe s., avec au début les alternaces de positions puristes et de positions plus accueillantes et après la guene la naissance du néo-italien, pour aboutir à l'état actuel des mots de cette famille à travers une comparaison des dictionnaires contemporains.
En conclusion de ce volume, Jeanne Martinet étudie "Les dictionnaires d'interlingua " présentant d'abord cette langue auxiliaire par rapport à d'autres dictionnaires et à leur histoire. Puis c'est enfin le tour de l'exposé des méthodes et des principes d'éligibilité des mots d'interlingua et du protocol de leurs descriptions. L'auteur passe ensuite en re- vue les caractéristiques des principaux dictionnaires interlingua.
MARIA GIOVANNA GUARIO Université de Bari


Dictionnaires bilingues. Méthodes et contenus, sous la direction de TxoMas SZENDE, Paris, Honoré Champion, 2000, 158 p.
Ce volume nous ofl're les douze communications présentées à la première Journée d'étude sur la lexicographie bilingue, organisée le 26 mars 1998, sous la direction de Thomas Szende, professeur de hongrois à l'Institut National des Langues et Civilisations Orientales (INALCO), où il dirige la section de langue et littérature hongroises.11 est codi- recteur du Centre de recherche, « Lexique-Cultures-Traductions  » et directeur du departe- ment Europe Centrale et Orientale. Il intervient également dans le cadre du master Didac- tique dans une perspective plurilingue et pluriculturelle et il a été attaché de coopération universitaire à l'ambassade de France en Syrie de 2004 à 2006.
143 Les auteurs des communications sont tous enseignants et chercheurs de l'INALCO, pour la plupart auteurs de dictionnaires, actuellement engagés dans la réalisation d'un dictionnaire bilingue. Près de 90 langues, parmi lesquelles beaucoup sont peu ou mal connues en France, sont enseignées à l'INALCO de Paris, qui ceuvre depuis plus deux siècles dans ce secteur et joue aujourd'hui un rôle important dans les rapports entre les langues les plus variées et dans le renouveau de la réflexion linguistique.
Dans l'avant-propos de Jean Pruvost et dans l'introduction de Thomas Szende on po- se déjà le problème de l'autonomie du dictionnaire bilingue en tant qu'unité lexicale et donnée lexicographique. On reprend ici l'importance méthodologique de la distinction établie par Bernard Quemada entre la lexicographie et la dictionnairique, et leur succes- sive harmonisation.
L'importance de la diversité, non seulement dans la conception des dictionnaires bi- lingues eux-mêmes mais aussi dans les traditions culturelles, est ici soulignée à travers la variété lexicographique qui nous est proposée au fil des textes des différents auteurs qui nous témoignent la vitalité de la lexicographie bilingue. Ce livre souligne avec vigueur que des langues différentes ont la nécessité d'une approche différente, dans leurs spécifi- cités.
Une des filières de lecture des douze articles de cet ouvrage, pourrait être le repérage de diflicultés similaires bilingues qui concernent des langues très différentes entre elles. Les études ici réunies se situent dans la lignée des recherches qui depuis quelques années se penchent sur la bidirectionnalité, comme dans le texte de Georgios Galanes et Henry Tonnet, Problèmes de lexicographie gréco-française, dans lequel ils donnent des indica- tions ponctuelles pour un bon dictionnaire pédagogique français-grec. On voit que l'op- tique qui concerne les usagers des dictionnaires et leur possibilité d'utiliser les réper- toires lexicographiques pour la version et pour le thème, est souvent encore un but loin à atteindre.
Un autre aspect très intéressant présente l'essai d'André Fabre sur le lexique du Co- réen et son évolution dans la création des néologismes (Le Lexique du coréen et les défis du monde moderne). L'auteur nous montre comment les choix linguistiques sont condi- tionnés par des raisons politiques, surtout dans la situation toute particulière des " sceurs ennemies "Corée du Nord et Corée du Sud.
L'essai de Thomas Szende, qui présente des exemples empruntés à la langue hon- groise en rapport avec le français, nous indique clairement les procédés sémantiques que tout concepteur d'un dictionnaire bilingue devrait observer, et cela est valable, d'un point de vue plus général, pour toute langue. On voit ici soulignée la nécessité d'une op- tique contrastive des termes dans les dictionnaires bilingues, surtout si on décide d'adop- ter une subdivision sémantique.
Dans plusieurs articles, on énonce l'exigence de création des dictionnaires électro- niques. On trouve des exemples dans les communications de Sharareh Maljaei (Perspec- tive d'une nouvelle lexicographie bilingue s'appuyant sur l'analyse automatique de corpus) et dans celui d'Emmanuel Cartier (Éléments pour une modélisation des diction- naires électroniques), qui souligne la praticité de l'utilisation de la modalité visuelle dans les dictionnaires électroniques et nous ouvre des horizons riches en promesses lexi- cales.
La lecture de ce volume est très captivante pour tous ceux qui sont intéressés aux dictionnaires, les spécialistes et les lecteurs curieux  : la multiplicité des langues mention- nées et leur entrecroisement, l'explicitation des démarches qui surgissent de la mise en contact de ces langues avec le français, le tout traité avec la richesse du savoir-faire des
144 auteurs et une compétence très professionelle, révèlent des optiques souvent surpre- nantes et font émerger les difficultés opératoires fondamentales dans les activités lexico-
graphiques.
SARA POFI Université de Bari


Arnv~ MOLLnRn-DESFOUR, Le Rouge. Dictionnaire de la couleur. Mots et expres- sions d'aujourd'hui. XXe-XXIe siècles, préface de Soxin RYKIEL, Paris, CNRS
Editions, 2009, 452 p.
Spécialiste reconnue du lexique des couleurs français contemporain et présiden- te du Centre français de la couleur, Annie Mollard-Desfour est linguiste au CNRS. Elle a aussi collaboré à la rédaction du Trésor de la langue Française.
Marie Mollard-Desfour a inventé le dictionnaire des couleurs. Le Bleu, Le Rose, Le Noir, et Le Blanc, sont les premiers dictionnaires qui ont fait d'elle la spécialiste incontestée dans ce domaine. Dans sa préface au dictionnaire Le Rouge, Sonia Ry- kiel affirme que «  la valeur d'une couleur est essentielle parce qu'elle n'est jamais seule mais est reliée aux autres, se porte avec une autre, ou se raye, ou se plisse, ou se glisse. Il faut donc saisir l'instant où cette valeur entre dans l'autre, ne la détruit pas, l'éclair qui ne lui fait pas d'ombre, ne la salit pas, ne lui ressemble pas  » (p. XII). Annie Mollard-Desfour a bien saisi cet instant et c'est pour cette raison qu'elle réussit à parler et à passer d'une couleur à l'autre sans la détruire.
On pourrait définir Marie Mollard-Desfour comme une sorte de fée des cou- leurs. Cette passion pour l'histoire et l'étymologie du lexique des couleurs et des nuances nous a fait connaître une lexicographie différente, coloriée, nuancée.
Le Rouge. Dictionnaire de la Couleur. Mots et expressions d'aujourd'hui, est la nouvelle édition de l'aeuvre Le Rouge. Dictionnaire des mots et expressions de couleur
paru en 2000, deuxième volume d'une série de onze volumes correspondant aux onze champs des couleurs du lexique français. On entend, par « champ de couleur ou champ chromatique, un rayon sémantique de couleurs ressenti comme unité dans une langue  » (p. XVI). La deuxième édition est une version de l'édition originale qui a été entière- ment revue, complétée et modernisée. Ce nouveau dictionnaire présente des ajouts de termes et sens récents, de nouvelles citations et une bibliographie refondue et actuali- sée. Au fil des pages, on peut observer la créativité et l'extrême vitalité de la langue fiançalse à travers ses différents registres  :courant, littéraire et argotique. Annie Mol- lard-Desfour essaie de répondre aux nombreuses questions autour de la couleur rouge, à travers le lexique des « rouges  ». Elle analyse en détail l'étymologie et l'histoire du rou- ge au XXe siècle et en ce début du XXIe. L'intérêt porté à cette couleur et à ses nuances est considérable dès l'aube de la civilisation. « Couleur de référence dans toutes les ci- vilisations, qui conjugue en lui beauté et horreur, cette couleur ambiguë, a au cours des siècles effrayé et fasciné les hommes  » (p. XVIII). La langue du XXe siècle reprend les symboles de l'histoire de l'homme et les renouvelle, en les adaptant aux réalités de notre époque. Une foule de dénominations du sens apparaît. Ces dénominations clas- sent et associent choses et êtres. C'est dans les pages de ce dictionnaire, grâce aux mots peints de rouge, que le XXe siècle dessine  :rouge ancien et rouge nouveau ;rouge vio-
145 lente, rouge danger, interdit et sanction, rouge amour passion et plaisir, rouge de la Révolution, rouge de l'égalité, etc. (p. XXII). En feuilletant ces pages consacrées au Rouge, une question nous vient à l'esprit  : de quels rouges sera l'avenir  ? On ne peut pas donner une réponse exhaustive, mais on peut espérer que Madame Mollard- Desfour nous parlera, dans la troisième édition du Rouge, des « rouges du futur  ».
CELESTE BOCCUZZI Université de Bari


Giovannni DOTOLI, La construction du sens dans le dictionnaire, préface d'HExxi MESCHOWTIIC, Fasano -Paris, Schena -Hermann Editeurs, 2008, 208 p.
Depuis quelques années, Giovanni Dotoli s'occupe brillamment de linguistique française et de lexicographie monolingue et bilingue. Sur ces sujets, il a publié les
monographies  :Dictionnaire et littérature. Défense et illustration de la langue fran- çaise du XVIe au XXIe siècle, avant-propos d'Alain Rey, Fasano, Schena Editore, 2007 ; La construction du sens dans le dictionnaire, préface d'Henri Meschonnic, Fasano -Paris, Schena -Hermann Editeurs, 2008, et Parole et liberté. Langue et écriture de Mai 68, Paris, Hermann Editeurs, 2008. Dotoli est directeur du Nouveau Dictionnaire Général Bilingue français-italien /italien français (NDGB), rédigé par l'équipe LaBLex qu'il a fondée et qu'il dirige. C'est à la suite de ce grand projet lexicographique qu'il a créé les Journées italiennes des dictionnaires et la revue Les Cahiers des dictionnaires.
Henri Meschomûc, grand linguiste et théoricien de la traduction qui vient de dis- paraître au mois d'avril de cette année, affirme dans sa préface (p. 12) que ce livre est un travail précieux sur la manière dont s'organise le sens dans le dictionnaire. En effet, Dotoli considère le dictionnaire comme «  un formidable organisateur du sens  » (p. 23). Le dictionnaire —dit-il —est «  un livre de mots  » et «  un livre de sens  ». Le sens est donc l'axe central du dictionnaire.
Est-ce que le dictionnaire est un système complexe d'unité du sens  ?Oui, Dotoli le considère comme «  un système complexe et clair d'unité de sens et une réalité observable de relations d'un mot à l'autre où le système alphabétique est une liste mystérieuse de sens après sens, d'ensemble et sous-ensembles, d'unités, de constructions, d'énoncés et de textes  » (p. 37).
Dotoli soutient que le sens possède un ordre, et que le dictionnaire est une «  structure organisationnelle de mouvement sémiotique [...] qui offre un sens à la dispersion  » (p. 86). Il affirme que si le «  lexique a un sens de totalité, d'ensemble de choses, d'homogénéité structurale, le dictionnaire est contraire à tout élément dispersif du sens  » (p. 86). D'après lui, «  le but du dictionnaire est celui de distri- buer pour réunir et donner une perspective généreuse de vision totale en laissant plaine liberté aux usagers  » (p. 86). Ce Professeur de Langue et Littérature Fran- çaises, qui a fait sienne la matière lexicographique, considère «  le dictionnaire une gigantesque phrase exprimant le sens du sens. Le dictionnaire, dit-il, exprime le sens de l'univers  ». D'après Dotoli, le sens du mot vit dans l'exemple. Le diction- naire l'a compris « dès l'aube de sa vie » (p. 114).
146 « Nous lirons donc le dictionnaire comme une histoire du sens, affirme Dotoli, sur l'axe de l'enchaînement informationnel des différents éléments de la nomenclature. Le dictionnaire n'agit pas uniquement sur le temps réel, mais aussi sur le temps qui avance [...]. Tout message nécessite du sens de la connaissance » (p. 141).
Dotoli dit que dans le dictionnaire « les entrées sont interconnectées par signes de mémoire, selon des rituels d'éternel retour, toujours en devenir. Le dictionnaire parle, sait, génère un dialogue, trace la ligne historique de la langue. La persistance de mots séculaires, si ce n'est millénaires, côtoie les néologismes les plus récents  » (p. 142).
Josette Rey-Debove définit le dictionnaire comme une sorte de « quantificateur uni- versel  » de l'usage. Dotoli affirme que la généricité du dictionnaire est le signe de son voyage par l'usage commun, le bon. Le pronom indéfini on n'est pas un élément de la grammaire, mais de la société. On représente l'axe central de la définition du sens dans le dictionnaire. Ce pronom dérive du latin homo, être humain, c'est-à-dire toute la com- munauté linguistique, et fixe le sens d'après le bon usage (p. 150-151). Alors, quel est le rôle du dictionnaire, face au sens  ? Il est le coffret de la doxa sur le sens de tel ou tel mot Dotoli affirme qu'en tant que constructeur de sens, le dictionnaire doit répondre à un double besoin, celui de la langue et celui de la culture, fréquemment à la hauteur de l'usage, du On et de la doxa (p. 161). Aujourd'hui, le dictionnaire suit l'évolution et le mouvement du sens. Le dictionnaire est un acte de désambiguïsation de la langue qui transforme le sens en système. La pratique culturelle du dictionnaire se construit et se déhuit continuellement. C'est pourquoi ce catalogue de la nomenclature variable, qui contient tous les mots de la langue française, est toujours à refaire. Dans ce livre, Dotoli nous lance un appel. Aujourd'hui, dit-il, l'émergence de la langue et du sens qui se mul- tiplie àl'infini nous pousse à travailler en équipe, parce que le dictionnaire, véritable cartographie du sens des mots, est un chantier permanent de la langue. A la question, «  où va le dictionnaire aujourd'hui  ?  », Dotoli répond que le dictionnaire suit les routes des progrès de la métalexicographie, de l'informatique et du Nouveau, par le retour massif du sens. Dans ce livre, Dotoli effectue une excellente analyse du sens, dans une optique linguistique, lexicographique et metalexicographique, qui mérite l'attention des spécialistes et de tous ce qui s'intéressent à ces sujets.
CELESTE BOCCUZZI Université de Bari


Le vocabulaire de la francophonie, le dictionnaire du français à travers le monde,
direction éditoriale de CLAUDE BLUM, Paris, Editions Garnier, 2008, 384 p.

Comme le signale le sous-titre de l'ouvrage, il s'agit d'un dictionnaire qui re- cense la variation du français en francophonie. Publié aux éditions Garnier en 2008, sous la direction générale de Claude Blum, spécialiste de l'histoire de la langue et
auteur du Corpus de la littérature francophone d'Afrique noire, des origines aux in-
dépendances, ce « supplément  » a paru dans la collection « Les thématiques Lit- tré  ». Cet ouvrage s'adresse à tout public qui souhaite découvrir l'hétérogénéité du français et partager un voyage à l'itinéraire intercontinental. De fait, l'illustration de couverture de Valérie Gutton — un arbre aux branches « francophones  » —est le signe tangible de la géographie variable de la francophonie.
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Ce vocabulaire comporte une préface soulignant le dynamisme des faits linguis- tiques propres à l'Afrique, à l'Amérique, à l'Europe, au Moyen Orient, à l'Océan Indien, etc ..., une table des abréviations, le tableau des signes phonétiques, une sec- tion des notations et symboles utilisés, le corpus et, en dernier, les références biblio- graphiques des sources auxquelles on a puisé. Entre autres, les travaux de Claudine Bavoux, Ambroise Quéffelec, Michel Beniamino, Claude Frey et les dictionnaires
Le Nouveau Petit Robert et Le Petit Larousse Illustré 2006 ou la BDLP Base de données lexicographiques panfrancophones.
C'est un lexique d'environ 6300 entrées — y compris des sigles —répertoriées se- lon l'usage courant (aérogard Nouvelle-Calédonie, chipping Île Maurice, band-aid Québec), les domaines techniques (bord] Maghreb, coagulat Côte d'Ivoire, culpeux Belgique) et les sens vieillis et littéraires (autosuffisant Tchad, clerc Burundi, jouali- sant Québec).
La microstructure du corpus, constituée de particularismes phonétiques, sé- mantiques et morphosyntaxiques, reste fidèle à la « lexicographie commune  ». Les articles présentent parfois des graphies et des prononciations différentes selon la réalité géographique concernée  :une remarque en fin d'article en précise l'or- thographe ou la morphologie. La notice étymologique, mentionnée entre paren- thèses, réside dans la presque totalité des entrées, de même que la dimension dia- chronique se combine avec la dimension géographique. A reconnaître des lexèmes du français « standard  »aux sens francophones précédés d'une marque diatopique servant à les localiser (ambiance Afrique, acre Québec, laverie Belgique), ainsi que des néologismes lexématiques signalés en début d'article par une marque géo- graphique en petites capitales (acériculture QuESEC, gosette sELGiQuE, lampe- torche cExTxnFx~QuE). Un exemple d'emploi dans le pays impliqué, est donné après l'équivalent traductionnel « standard  » ou la paraphrase définitionnelle. Un symbole permet de distinguer les unités de sens qui peuvent concerner plusieurs aires francophones. Les marques de style, de registre et de fréquence, en spéci- fient les niveaux de langue. En ce qui concerne le niveau temporel, on y trouve des mots vieillis (abîmage Québec, dérape Suisse, inkpot Belgique) ou courants (accroires Canada, apatam Afrique noire, empété Nouvelle Calédonie et Polynésie). Pour le « registre expressif  » on distingue des mots d'usage familier, ou du ton vulgaire, péjoratif, ironique, etc... (abiye Belgique, accotage Québec, bacus Centrafrique, rabotson Suisse, sonderfall Suisse romande). Pour la fréquen- ce d'emploi, on relève par exemple des mots rares (ammi Réunion, fanafoude Ma- dagascar, grulette Suisse). De plus, les rédacteurs ont essayé d'améliorer la quali- té des informations en enrichissant les articles par des citations tirées de la presse francophone ou des auteurs de la littérature francophone. Malgré cette ouverture, loin de viser l'exhaustivité, comme dans tout dictionnaire, quelques éléments peu- ventparfois résulter lacunaires
Il faut noter que, dans cette représentation globale du français, les spécificités linguistiques de la Belgique, du Québec, de la Suisse, de l'Afrique, restent large- ment représentées, au détriment d'autres spécificités, soit celle des Antilles ou de l'Asie, encore marginales. On regrette que les éléments paratextuels ne fassent pas référence aux critères de choix de telle ou telle autre marque diatopique, notamment ce qu'il faut entendre par la marque Canada ou la marque Québec. La typographie choisie résulte aussi ne pas être très claire, car l'utilisateur ne repère pas immédiate- ment les marqueurs recherchés.
148 Par cette lecture, le public participe de la créativité lexicale du français. A l'aide des références géographiques, la langue en mouvement témoigne de l'existence de plusieurs « bons usages  ». L'équipe de rédaction a donné visibilité à ce métissage linguistique, cet apprivoisement qui pourrait faire du Vocabulaire de la francopho- nie un instrument précieux pour le processus d'intégration de nouveaux mots fran- cophones pas encore englobés dans les dictionnaires de référence. De fait, à ce jour, les 40000 exemplaires vendus, font preuve de l'intérêt croissant pour cette produc- tion lexicographique francophone.
DONATELLA OSTUNI
Université de Bari