Résumés/abstracts

Matthieu Vernet, « Le Massif Central de la critique française (1900-1930) »

Cet article revient sur l’héritage problématique que constitue le romantisme dans la critique française du début du xxe siècle. Le romantisme apparaît comme un objet de débats à la fois décrié et central dans la presse littéraire et les ouvrages critiques, car sa définition et ses enjeux touchent à des questions très sensibles en ce début de siècle : le régime politique et la République, le statut de l’individu et une dimension morale, qui implique un certain rapport au monde.

This essay offers a rereading of the problematic heritage of Romanticism in early 20th century French criticism. It stands as an object of debate, at the same time castigated and central in the literary press as well as critical texts, since its definition and the stakes it triggers are related to questions highly sensitive at the beginning of the century : the political regime and the Republic, the status of the individual and a moral dimension, implying a certain relationship towards the world.

Victoire Feuillebois, « Le romantisme des comparatistes (1900-1960) »

Cet article propose de remonter aux sources du « mythe romantique » (Antoine Berman) en littérature comparée depuis 1900. Il s’agit pour nous de mettre en valeur le fait que, si le romantisme n’était pas à l’origine le modèle le plus évident pour les comparatistes, il a été amené à constituer un paradigme méthodologique, de même qu’un réservoir d’objets d’étude, pour penser les rapports des littératures étrangères entre elles.

This paper offers to go back to the sources of the “Romantic myth” (Antoine Berman) in comparative literature from 1900. We would like to emphasize that, though Romanticism was not at the beginning the most obvious model for the new discipline, it progressively became a methodological paradigm, as well as a set of case studies, to think how foreign literatures interact.

Patrick Marot, « Romantisme allemand et négativité »

Cet article revient sur la réception du romantisme allemand dans la critique française du xxe siècle : il souligne que, de manière paradoxale, la lecture proposée par les critiques français repose dans une large mesure sur une appréhension très partielle du phénomène romantique allemand ; mais parallèlement ce dernier apparaît comme un véritable modèle permettant de dépasser les critiques adressées au romantisme français et d’inscrire le courant dans une forme de modernité littéraire.

This essay offers a overview of the reception of German Romanticism in 20th century French criticism: it underlines that, in a paradoxical manner, the reading offered by French criticism rests widely on an incomplete apprehension of the phenomenon of German Romanticism; but at the same time it serves as a true model allowing to go beyond the critics addressed to French Romanticism and to enroll Romanticism in a form of literary.

Éric Lecler, « “Échapper à la tutelle du temps”. Le romantisme révolutionnaire des essais de Lukács, Bloch et Benjamin »

Ernst Bloch a caractérisé la renaissance du romantisme au xxe siècle comme un « romantisme révolutionnaire ». Elle se manifeste en particulier dans le genre nouveau de l’essai. Il ne s’agit pas ici seulement d’une affiliation historique au premier romantisme de Friedrich Schlegel ou d’un intérêt particulier pour un corpus romantique du siècle passé, mais d’une double recherche, dans le contenu des œuvres comme dans la forme de l’essai, d’une nouvelle articulation du temps.

Ernst Bloch famously caracterised the revival of Romanticism in the 20th century as a “revolutionary Romanticism”. It is mostly apparent in the new genre of the essay. It is not a matter of historical affiliation to Friedrich Schlegel’s early Romanticism or of a particular interest in a Romantic, past set of texts, but of a double research, in the works themselves as well as in the form of the essay, for a new articulation of time.

Philippe Forget, « Remisant le texte. Schleiermacher – Gadamer – Rombach – Hölderlin »

Cet article revient sur la lecture que fait Hans Georg Gadamer de l’herméneutique de Friedrich Schleiermacher dans Vérité et Méthode (1960), 251qui aura une influence très durable sur la réception de Schleiermacher au xxe siècle : il s’agit de montrer le caractère paradoxal de cette lecture, qui a été fondamentale pour la constitution de l’herméneutique comme domaine philosophique à part entière, mais qui repose sur une torsion réelle de la pensée du philosophe allemand.

This essay investigates the reading of Friedrich Schleiermacher’s hermeneutics which Hans Georg Gadamer offers in Truth and Method (1960) and which will have a lasting influence on Schleiermacher’s reception in the 20th century: it aims to show how paradoxical such a reading appears, since it worked as a ground stone for establishing hermeneutics as a philosophical area of its own right, but it rests on an equivocate reading of the German philosopher’s thought.

José-Luis Diaz, « Penser le romantisme français en 1970 »

Dans cette tentative d’historisation des lectures critiques du romantisme au xxe siècle, on observe un faisceau d’essais qui ne se proposent pas de raconter le romantisme, d’en rappeler les principaux auteurs et les principaux épisodes, mais bien de le structurer et de le penser : le penser dans l’histoire, dans l’histoire sociale en particulier ; le penser aussi dans une chronologie historique précise, soit donc, comme on dit, le périodiser ; le penser enfin dans son essence, le conceptualiser.

In this attempt to cast an historical gaze on the critical responses to Romanticism in the 20th century, several critical essays published around 1970 share an ambition of going beyond just telling Romanticism’s story, reminding of its main authors and periods and of trying to structure and conceptualize it – in history, and in particular in social history; in a precise historical chronology; and in its essence.

Yvon Le Scanff, « Le romantisme et le paradigme du sublime. Modernité, anti-modernité, postmodernité »

Cet article se penche sur le paradoxe de l’association entre romantisme et sublime à partir des années 1980 : emblème d’une modernité qui rompt avec une poétique classique fondée sur le faire et non sur l’effet, sur la production plutôt que la réception, sur un goût élitiste plutôt que sur un jugement universel ; mais également marque d’une réaction et d’une révolution qui fait retour vers l’originaire, d’une régénération qui renie la marche du progrès linéaire de la modernité.

This essay investigates the paradoxical association between Romanticism and the sublime from the 1980’s: it stands for a modernity which has broken up with classical poetics based on the artefact and not on the poetic process, on production rather than on reception, on an elitist taste rather than on universal judgement, but it is also the mark of a revolution heading back to an origin, of a regeneration negating the linear progress of modernity.

Mark Sandy, « Constructions et concepts du romantisme. Quelques réflexions sur les perspectives anglo-saxonnes »

L’article propose quelques réflexions sur les définitions, les courants critiques et les constructions majeures dont le romantisme a été l’objet ou le laboratoire dans la critique anglo-saxonne des xxe et xxie siècles. Ces remarques ne prétendent en aucun cas à l’exhaustivité, mais elles illustrent les différentes approches, préoccupations et questions qui ont informé et renouvelé la perception du romantisme dans la tradition critique anglo-saxonne de ce siècle et du précédent.

This chapter reflects on major definitions, trends, and constructions of Romanticism in twentieth- and twenty-first century Anglo-American criticism. The reflections offered here are by no means intended to be comprehensive, but to illustrate those approaches, preoccupations, and issues that have shaped and renewed our sense of Romanticism in the Anglo-American critical tradition in the twentieth- and twenty-first centuries.

Serge Zenkine, « L’amour romantique. Quelques échos théoriques au xxe siècle »

L’interprétation et l’évaluation de l’amour romantique au xxe siècle prennent elles aussi une dimension collective et relèvent d’une pensée historico-culturelle autant que morale. La réflexion sur l’amour déborde donc le cadre éthique et psychologique vers ce qu’on appelle aujourd’hui la « théorie » au sens interdisciplinaire – théorie de la culture, de la littérature, de l’existence humaine, ainsi que le montre la lecture de Denis de Rougemont, René Girard et Roland Barthes.

Interpretation and evaluation of romantic love in the 20th century have a collective dimension and are related to a historical and cultural, as well as moral, thought. Reflections on love thus outgrow the ethical and psychological frame to expand towards what we call today “theory” in an interdisciplinary meaning – theory of culture, theory 253of literature, theory of human existence, as is well shown by the works of Denis de Rougemont, René Girard and Roland Barthes.

Michael Löwy et Robert Sayre, « Le romantisme révolutionnaire au xxe siècle »

Ce texte propose une définition de « romantisme » et de « romantisme révolutionnaire » qui n’est pas celle habituellement utilisée par les dix-neuviémistes, et qui aspire à rendre compte de phénomènes culturels non seulement du xixe mais aussi du xxe siècle. L’article illustre ensuite cette hypothèse avec quelques exemples du siècle dernier : le surréalisme, le situationnisme, et une variante de la critique littéraire marxiste, représentée notamment par Raymond Williams.

This paper offers a definition of “Romanticism” and “revolutionary Romanticism” which differs from the one in common use among 19th century scholars and whose aim is to highlight a set of cultural phenomena from the 19th as well as the 20th century. The paper then illustrates this hypothesis thanks to a few examples from the past century: surrealism, “situationnisme” and a variant of Marxist literary criticism, most notably represented by Raymond Williams.