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Classiques Garnier

Proposition de chronologie

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Le Réel invisible
    2022 – 12
    . Le magnétisme dans la littérature (1780-1914)
  • Auteur : Feuillebois (Victoire)
  • Pages : 41 à 49
  • Revue : La Revue des lettres modernes
  • Série : Écritures XIX, n° 8
  • Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN : 9782406145370
  • ISBN : 978-2-406-14537-0
  • ISSN : 0035-2136
  • DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-14537-0.p.0041
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 07/12/2022
  • Périodicité : Mensuelle
  • Langue : Français
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Proposition de chronologie

La mode du mesmérisme, de Vienne à Paris

1766 : Franz Mesmer obtient son diplôme de médecin à la Faculté de Vienne et exerce la médecine traditionnelle dans la capitale autrichienne. Il épouse en 1768 la riche Maria Anna von Posch, ce qui lui donne une réelle indépendance financière. Sa thèse de médecine, intitulée Dissertatio physico-medica de planetarum influxu, évoque lidée quil existe une force, que Mesmer nomme la « gravitation animale », qui commande la gravitation universelle et agit sur tous les corps animés et inanimés. Il pense que cette force, qui relie lorganique et le cosmique, joue un rôle fondamental dans la santé des corps vivants : elle est donc un objet médical, quil faut apprendre à réguler et à utiliser, à la manière dun instrument de musique.

1773 : Mesmer continue de sintéresser aux forces invisibles qui sont censées conditionner la santé humaine. Sétant aperçu quil parvenait à calmer les douleurs et les crises de ses patients par limposition des mains et par lutilisation daimants, Mesmer passe à une pratique alternative de la médecine qui suscite un certain nombre de craintes et de polémiques. Alors même quil reçoit chez lui la bonne société et lélite artistique de Vienne, Mesmer est attaqué par Maximilian Hell, qui utilise déjà des plaques aimantées pour guérir ses patients et crie au plagiat. Cest le début dune longue série de contestations de loriginalité du « mesmérisme » : Mesmer sera régulièrement accusé davoir tout emprunté à dautres, ainsi que le rappelle Henri Ellenberger1. Mesmer abandonne progressivement les aimants dans sa pratique thérapeutique, préférant considérer que le magnétiseur lui-même joue ce rôle.

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1777 : Un scandale éclate alors quil traite depuis la fin de 1776 Maria Theresa von Paradis (ou von Paradies), une musicienne aveugle de dix-huit ans : la vue de la jeune fille se rétablit, mais son père, désireux de conserver la pension dinvalidité et inquiet pour la réputation de sa fille, refuse que le traitement se poursuive. Mesmer prend la décision de quitter Vienne.

1778 : Franz Mesmer sinstalle à Paris pour promouvoir une nouvelle médecine fondée sur le « magnétisme animal », qui a remplacé la « gravitation animale ». Il sagit dune vision holistique des rapports entre lhomme et lunivers : tous les êtres baignent dans un fluide vital invisible et cest la mauvaise circulation de ce fluide qui cause toutes les maladies. Daprès Mesmer, certaines personnes ont le pouvoir de mobiliser ce fluide par imposition des mains ou à laide dautres ressources afin de le réorienter vers les « magnétisés » : sous leffet de ce choc magnétique, les patients sont saisis de violentes convulsions qui sont supposées débloquer la circulation du fluide vital. La pratique de Mesmer est à lorigine de plusieurs guérisons spectaculaires, dont celle du médecin du roi.

1779 : Franz Anton Mesmer, Mémoire de lAn VII : lauteur soutient en vingt-sept propositions que la plupart des maladies nerveuses relèvent dun somnambulisme imparfait et que le magnétisme peut être employé pour rétablir une harmonie dans ces phénomènes naturels. Mesmer y déclare notamment :

1º. Il existe une influence mutuelle entre les Corps Célestes, la Terre & les Corps Animés.

2º. Un fluide universellement répandu, [] qui, de sa nature, est susceptible de recevoir, propager & communiquer toutes les impressions du mouvement, est le moyen de cette influence.

3º. Cette action réciproque est soumise à des lois mécaniques, inconnues jusquà présent. []

8º. Le corps animal éprouve les effets alternatifs de cet agent ; & cest en sinsinuant dans la substance des nerfs, quil les affecte immédiatement.

9º. Il se manifeste particulièrement dans le corps humain, des propriétés analogues à celles de lAimant []

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10º. La propriété du corps animal, qui le rend susceptible de linfluence des corps célestes, & de laction réciproque de ceux qui lenvironnent, manifestée par son analogie avec lAimant, ma déterminé à la nommer Magnétisme animal. []

23º. On reconnaîtra par les faits, daprès les règles pratiques que jétablirai, que ce principe peut guérir immédiatement les maladies des nerfs, & médiatement les autres. 

Mesmer résume ces propositions dans un aphorisme célèbre : « Il ny a quune maladie, quun remède, quune guérison2 ».

1780 : Les patients se pressent dans le cabinet de Mesmer place Vendôme ou dans son luxueux hôtel particulier de Créteil pour subir les « passes magnétiques » par lesquelles le médecin prétend rediriger le fluide magnétique vers les parties à traiter chez le malade. Pour répondre à cette demande, le médecin introduit la méthode des baquets, qui permet de traiter plusieurs patients à la fois. Il sagit de réunir les patients autour dun récipient rond percé de trous doù sortent des tiges métalliques recourbées, dont la taille sadapte à la partie du corps à traiter. Le cabinet de Mesmer comporte quatre baquets, dont lun est réservé aux pauvres (il subsiste une réplique des baquets de Mesmer au Musée de la médecine de Lyon). Cette méthode spectaculaire contribue à rendre sa médecine populaire et à en faire un objet de débat, non seulement dans les milieux savants (Mesmer emprunte pour décrire le fonctionnement du baquet le vocabulaire de lélectricité, sujet qui fascine les scientifiques à lépoque), mais aussi dans diverses couches de la société française. Les patients se pressent dans le cabinet richement décoré de Mesmer, qui ne ressemble en rien aux cliniques de lépoque, et il est de bon ton davoir une crise durant la cure magnétique. Devant un tel succès financier et populaire et pour faire face aux critiques de plus en plus nombreuses de ses pairs, Mesmer se met à former des assistants et des disciples et à magnétiser un arbre de la rue de Bondy pour permettre au plus grand nombre de bénéficier des bienfaits de la cure. Un vocabulaire mesmérique spécifique se développe, que lon commence à retrouver dans la littérature de lépoque : « valet toucheur », « salle des crises », « enfer des convulsions » renvoient tous à cette mesméromanie croissante.

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1784 : Création de la Société de lharmonie universelle de Paris, structure qui est destinée à former des disciples et des praticiens du magnétisme animal, mais qui se révèle aussi un énorme succès financier : il faut désormais payer cent louis pour assister aux conférences de Mesmer et pouvoir se former à ses techniques. Plusieurs dizaines de Sociétés identiques sont créées en province.

Mesmer tente en parallèle de faire reconnaître ses théories par ses pairs, mais pour la plupart, les médecins sinquiètent de la popularité croissante du Viennois. Alors que jusque-là la question du magnétisme avait surtout été débattue dans des pamphlets en soutien à Mesmer (Charles dEslon, médecin du comte dArtois qui meurt au baquet en 1786, publie la même année son Discours prononcé en lassemblée de la Faculté de Médecine de Paris le 18 septembre 1780, puis ses Observations sur le magnétisme animal) ou au contraire pour lattaquer (Jean Jacques Paulet, Les Miracles de Mesmer ; De Horne, Réponse dun médecin de Paris à un médecin de province, sur le prétendu magnétisme animal de M. Mesmer, pour la seule année 1780), en 1784, le mesmérisme devient lobjet dune investigation scientifique à travers deux rapports, le Rapport des Commissaires chargés par le roi, de lexamen du magnétisme animal et le Rapport des Commissaires de la Société royale de Médecine nommés par le Roi pour faire lexamen du magnétisme animal, imprimé par ordre du Roi.

Les deux rapports commandés par Louis XVI à la Faculté de Médecine de Paris et à lAcadémie Royale des Sciences dune part et à la Société Royale de Médecine de lautre déclarent que lexistence du fluide vital na pas pu être observée, mais que certaines guérisons sont réelles et quil faut les attribuer à des causes physiologiques diverses (la suggestion, lespoir, le changement de mode de vie) ainsi quau pouvoir de limaginaire.

Un troisième rapport, destiné au roi et tenu secret jusquen 1800, évoque la question de la séduction sexuelle du magnétiseur sur ses patientes femmes (J-S. Bailly, Rapport Secret sur le Mesmérisme, in Le Conservateur ou Recueil de Morceaux Inédits dHistoire, de Politique, de Littérature et de Philosophie, tirés des portefeuilles de Nicolas Louis François de Neufchâteau, t. 1, p. 146-155). On peut y lire : « Lhomme qui magnétise a ordinairement les genoux de la femme renfermés dans les siens ; les genoux et toutes les parties inférieures du corps, sont par conséquent en contact. La main est appliquée sur les hypocondres et 45quelquefois plus bas sur les ovaires. [] La plupart des femmes qui vont au traitement du Magnétisme ne sont pas réellement malades. Beaucoup y viennent par oisiveté et par amusement ; dautres qui ont quelques incommodités, nen conservent pas moins leur fraîcheur et leur force ; leurs sens sont tous entiers ; leur jeunesse a toute sa sensibilité. Elles ont assez de charmes pour agir sur le médecin ; elles ont assez de santé pour que le médecin agisse sur elles : alors le danger est réciproque. »

La publication des deux rapports est loccasion dune violente campagne anti-Mesmer : le rapport de la commission royale est imprimé à 12 000 exemplaires et distribué largement. Mesmer soigne le philosophe occultiste Court de Gébelin : ce dernier écrit à Mesmer une lettre de félicitations que le médecin fait paraître dans les gazettes le jour même où son patient décède dune crise cardiaque. On lit dans Le Mercure : « M. Court de Gébelin vient de mourir, guéri par le magnétisme animal ». La pièce de Jean-Baptiste Radet, Les Docteurs modernes, qui contribue à nuire à la réputation de Mesmer triomphe aux Italiens. Mesmer séloigne progressivement de Paris et devient de moins en moins actif : la mode du mesmérisme sérode après 1790. Mesmer meurt en 1815, un an après avoir publié son traité final, Mesmerismus. Oder System der Wechselwirkungen, écrit avec la collaboration de Karl Christian Wolfart qui, envoyé par lAcadémie des Sciences de Berlin, reste deux ans auprès du médecin pour laider à rédiger son ultime texte.

De Mesmer à Puységur, du magnétisme à l hypnose

Printemps 1784 : Le marquis Armand Jacques Marie de Chastenet de Puységur ouvre à nouveau la querelle du mesmérisme : il magnétise le fils de son régisseur atteint dune fluxion de poitrine, ce qui suscite chez ce dernier un état psychique particulier que Puységur appelle « le somnambulisme artificiel » ou « sommeil magnétique ». Puységur observe que, dans cet état, les patients développent des capacités sensorielles inédites, qui les rendent capables de percevoir 46les causes de leur maladie et la possible évolution du mal et même, pour certains dentre eux, deffectuer ce type de diagnostic sur une tierce personne. Une telle perspective relance lidée dune médecine magnétique, que chaque sujet peut sadministrer ou peut administrer à des proches. Elle déplace laccent de lomniprésence du fluide vital à la puissance que certains sujets conquièrent dans le maniement de ce fluide ; de plus, là où Mesmer évoquait laction physique du fluide, Puységur se consacre davantage à analyser ses effets psychologiques. Les observations de Puységur servent de laboratoire à deux grandes notions de la psychologie du xixe siècle : dune part, en développant un protocole thérapeutique dinvestigation de la conscience somnambulique, Puységur anticipe le principe de lhypnose ; dautre part, il insiste sur le fait que létat de veille et ce que révèle le sujet durant sa transe constituent « deux existences différentes », lune consciente et lautre inconsciente.

1811 : C.A.F. Kluge, Versuch einer Darstellung des Animalischen Magnetismus als Heilmittel, Berlin, C. Salfeld, 1811. Dans ce texte qui participe de la diffusion européenne du modèle originel promu par Mesmer, lauteur fait une description précise des effets du choc magnétique sur le patient et y dresse le portrait-type du magnétiseur : celui-ci doit être grand et fort, confiant, entre 25 et 50 ans et se révéler capable de faire des « passes » avec le plat de ses mains, de la tête vers le bas du corps.

1812 : Armand Jacques Marie de Chastenet de Puységur, Les Fous, les insensés, les maniaques et les frénétiques ne seraient-ils que des somnambules désordonnés ? : lauteur sinterroge sur létat de transe magnétique qui élargit les capacités intellectuelles et sensorielles du sujet et propose pour la première fois que le magnétisme soit utilisé pour traiter les maladies mentales et non plus seulement les affections organiques. Le « somnambule désordonné » quest le fou pourrait ainsi être ramené par le magnétiseur à un état de conscience antérieur au délire. Il soppose ainsi à laliénisme des années 1780, pour qui le somnambulisme dérive des maladies mentales : pour Puységur, il est au contraire la preuve que lon peut traiter le somnambulisme désordonné des aliénés.

1813 : Expériences à Paris de labbé Faria (1755-1819), qui produit les mêmes phénomènes que les magnétiseurs, sans faire de passes, en 47donnant seulement lordre de dormir. Faria récuse lhypothèse du fluide et préfère au magnétisme animal lexpression de « sommeil lucide » (titre de son livre en 1819).

1826 : Exposé par ordre alphabétique des cures opérées en France par le magnétisme animal, par Simon Mialle. Lauteur y répertorie les cas de guérison dans le cadre de cures magnétiques opérées entre 1774 et 1826, en spécifiant précisément le protocole suivi. Louvrage perpétue les ambitions directement physiologiques du magnétisme, à une époque où laspect psychologique de la cure commence à être davantage mis en valeur.

1829 : Le 16 avril, la première opération chirurgicale dans un état de somnambulisme magnétique, effectuée par le magnétiseur Pierre Jean Chapelain et le chirugien Jules Cloquet (1790-1883). Il sagit de lablation dune tumeur au sein sur une certaine Madame Plantin. Bien que lon répertorie de telles opérations tout au long du xixe siècle, lintroduction de léther en 1847 tend à marginaliser ce protocole. Néanmoins, celui-ci contribue à améliorer la réputation scientifique du magnétisme.

1837 : John Elliotson, professeur de médecine à lUniversité de Londres, est convaincu par des démonstrations de cure magnétique ouvertes au grand public et payantes qui se déroulent à Londres. Celui-ci emploie le magnétisme sur deux sœurs souffrant dépilepsie, Elizabeth et Jane OKey, qui décident dutiliser à leur tour les pouvoirs du magnétisme à des fins denrichissement : elles prétendent être capables de lire avec dautres parties de leur corps que les yeux et de voir la mort au-dessus de certains patients de lhôpital universitaire où exerce Elliotson. Remercié en 1840, Elliotson fonde le journal The Zoist, où il défend pendant dix ans une application du magnétisme à la neurologie, quil appelle le phrénomesmérisme. Cet épisode est entouré dun parfum sulfureux et dun soupçon de scandale sexuel, liés à la personnalité trouble des sœurs OKey.

1837 : Un rapport de lAcadémie de médecine discrédite le magnétisme animal et le somnambulisme provoqué.

1840 : Cours de magnétisme en sept leçons et Le Magnétisme opposé à la médecine du baron Du Potet (Dupotet de Sennevoy, 1796-1881) : lauteur y réconcilie la tradition ésotérique et les travaux sur le magnétisme. La « magie magnétique » de Du Potet rejoint la sphère des phénomènes 48paranormaux : elle devient la manifestation mystérieuse de lunion de lâme et du corps, de lesprit et de la matière.

1842 : Après avoir assisté aux démonstrations de Charles Lafontaine et avoir été en contact intellectuel avec Elliotson, le médecin écossais James Braid (1795-1860) propose le terme « hypnotisme » : « lhypnose » est un sommeil nerveux déclenché, non plus par des passes, mais par le regard. Le mot désigne lensemble des transes induites artificiellement à des fins thérapeutiques (issues du magnétisme, par lintermédiaire de Puységur). Par rapport au magnétisme animal, la notion a le mérite selon Braid dévacuer toute référence à un fluide magnétique qui passerait effectivement du magnétiseur au magnétisé. Au contraire, pour Braid, lhypnose est un état qui peut être provoqué par lhypnotisé lui-même et na pas besoin dun agent extérieur : celle-ci procède par suggestion. Bien quil souligne les bénéfices thérapeutiques de lhypnose, il met laccent sur ses effets psychologiques plus que physiologiques. Les travaux de Braid, qui sinscrivent dans la droite ligne de ceux de Puységur, ont une influence décisive sur les psychologues Charles Richet (1850-1935), Henry Beaunis (1830-1921) et Joseph Delbœuf (1831-1896), qui travaillent spécifiquement sur lhypnose.

Années 1860 : Ambroise Liébeault (1823-1901) se met à utiliser couramment lhypnose pour guérir ses patients : il considère que le pouvoir de la suggestion joue un rôle décisif dans le processus curatif. Avec Hippolyte Bernheim (1840-1919), professeur de médecine à Nancy, il fonde lécole de Nancy, qui travaille spécifiquement sur ce phénomène.

Au même moment, le neurologue Jean-Martin Charcot (1825-1893) utilise lui aussi lhypnose pour traiter ses patients à la Salpêtrière. Mais Charcot considère que lhypnose est un phénomène physiologique objectif, qui se déroule toujours selon les mêmes étapes, et quil utilise dans le cadre dune investigation des mécanismes hystériques : selon lui, lhypnose est une « névrose expérimentale », qui déclenche les mêmes phénomènes que lhystérie. Lécole de Nancy et lécole de la Salpêtrière entrent en conflit à la fin des années 1870 et au début des années 1880 pour savoir si seuls certains sujets prédisposés peuvent être hypnotisés (Charcot) ou si le pouvoir dhypnose est plus puissant et peut sappliquer à tout sujet (école de Nancy, 49Liébeault et Bernheim). Pour lécole de Nancy, il faut distinguer hystérie et hypnose : il serait faux de dire que seuls les hystériques sont hypnotisables (même sil existe effectivement des patients qui ne peuvent pas lêtre). Bernheim soutient que lhypnose est un cas particulier de la suggestion, qui appartient de manière beaucoup plus large à la vie quotidienne : lhypnose nest quun contexte très particulier où on fait opérer ce mécanisme de la suggestion, il ne peut donc sagir dun phénomène objectivable – puisque lon peut suggérer nimporte quoi, le sujet va se trouver forcé de répondre à la suggestion, donc les résultats de Charcot sont en réalité biaisés par le fait quils sont demblée suggérés aux patients sur lesquels est faite lexpérience.

Charcot contribue à remettre lhypnose au centre du débat scientifique et à la faire reconnaître en tant que dispositif médical pour linvestigation des désordres psychologiques. Par rapport à lécole de Nancy, il forme aussi plus de disciples et multiplie les travaux et les expérimentations sur la question. Parmi les scientifiques formés par Charcot, on trouve notamment Pierre Janet (1859-1947), qui développe, à partir de létude des personnalités multiples, la notion de « subconscient », désignant une sphère de lactivité mentale doù proviennent tous les troubles psychologiques. Cette théorie a un fort retentissement sur les psychologues de la fin du siècle et sur le jeune Sigmund Freud.

Victoire Feuillebois

1 Discovery of the unconscious. The History and Evolution of Dynamic Psychiatry, New York, Basic, 1970, p. 3-52.

2 Mesmer, Le Magnétisme animal, Payot, 1971, Observations, p. 33, p. 150.