Résumés
- Publication type: Article from a collective work
- Collective work: Le Poète et la Cité
- Pages: 343 to 348
- Collection: Encounters, n° 563
- Series: Convergences in literature, n° 6
- CLIL theme: 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- EAN: 9782406143376
- ISBN: 978-2-406-14337-6
- ISSN: 2261-1851
- DOI: 10.48611/isbn.978-2-406-14337-6.p.0343
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 03-08-2023
- Language: French
Résumés
Alain Génetiot et Aude Préta-de Beaufort, « Quels poètes pour quelle cité ? »
En reposant la question platonicienne du rôle du poète dans la Cité, ce recueil examine, dans la littérature française du xvie siècle à nos jours, aussi bien les poétiques de la ville que la manière de faire société. La poésie porteuse d’une éthique du lien, du fait même de son travail sur la langue commune, opère ainsi une fonction régulatrice qui rassemble les hommes et une démarche politique qui témoigne de la responsabilité sociale du poète au sein d’une éthique de la vie en commun.
Emmanuelle Jouët-Pastré, « Platon et la puissance de la poésie dans la vie »
Platon pose la question de la réception de la poésie et de ses effets dans la vie humaine. Il nous fait réfléchir sur le lien entre la fiction poétique et la vie. Car la poésie exerce selon lui une pleine puissance sur l’âme humaine. Platon invite à un bon usage de la poésie, bénéfique à l’homme et à son bonheur. Loin d’être l’ennemi des poètes, il nous invite à nous laisser transporter par la belle poésie.
Jean Balsamo, « Poésie et célébration urbaine au xvie siècle »
Les humanistes et leurs héritiers ont cultivé une poésie de la ville, point de rencontre d’une ancienne tradition d’éloge des cités illustres et de la littérature de voyage, en cours de codification au xvie siècle. La Lutetiae descriptio (1543) d’Eustache von Knobelsdorf et l’Hymne de Bordeaux (1576) de Pierre de Brach illustrent ce genre savant, qui sous les conventions oratoires, se révèle porteur d’une idéologie urbaine et d’un enjeu politique.
344François Rouget, « La chaire et le masque. Jean Passerat, poète engagé »
Jean Passerat (1534-1602), régent de collège devenu Lecteur royal, a produit une œuvre poétique qui témoigne de son implication dans les affaires contemporaines. Polémiste anti-jésuite, courtisan tantôt enthousiaste, tantôt sceptique, citoyen loyaliste opposé à la Ligue, il a légué un corpus de poèmes qui éclairent l’Histoire et documentent sa vision de la Cité. Chez lui, l’activité littéraire est indissociable de la vie politique et sociale dont elle constitue une réponse.
Cécile Huchard, « Origines du pouvoir et pouvoirs de la poésie dans la Seconde Semaine de Du Bartas »
Dans la Seconde Semaine (1584), Du Bartas, évoquant les commencements de l’humanité et de la civilisation à partir des récits bibliques, montre les origines ambivalentes de la Cité et du pouvoir politique, nés des désordres du péché et marqués par la tyrannie. Des figures royales plus positives viennent nuancer cette vision, tandis que le poète apparaît comme celui qui pourrait, par le pouvoir du langage et du chant, apaiser les âmes et ainsi remédier aux divisions du corps de la Cité.
Philippe Chométy, « Aux origines de la cité. La représentation des premiers poètes dans la littérature du xviie siècle »
Dans les temps reculés, la poésie et la politique, au lieu de s’opposer, se complétaient mutuellement. C’est du moins l’idée de la poésie et de ses origines que se sont forgée les auteurs du xviie siècle. Le but de la présente étude est d’identifier, par le passage en revue de plusieurs cas spécifiques, les représentations qui structurent cette vision de la poésie, dans son rapport originaire à la religion, au système social de la célébration, au processus de civilisation et au droit.
Sandrine Berrégard, « Tristan L’Hermite et la cité. Du poète-courtisan au poète mondain »
Le présent article retrace l’itinéraire à la fois social et esthétique de Tristan L’Hermite en examinant le rapport du poète à l’espace mondain et à ses valeurs d’urbanité. Il est exemplaire dans la mesure où il est représentatif 345de ce qu’est un poète-courtisan dans la France du xviie siècle, mais singulier par le désir d’indépendance qu’il manifeste à plusieurs reprises au cours de sa carrière. C’est donc la paradoxale conciliation d’exigences contradictoires que nous nous attachons à étudier.
Lucien Wagner, « La Couronne et les Lys. La pensée politique du poème héroïque des années 1650 »
Les poèmes héroïques français des années 1650, tels Clovis ou Saint Louis, paraissent au premier abord de simples textes de propagande. Replacés dans le contexte de l’émergence de l’État royal moderne et du modèle du « Prince absolu », ils se présentent bien plutôt comme laboratoires d’expérimentations politico-culturelles. Le poète chante le roi de France en héros épique chrétien pour penser la politique par ses moyens propres : la fiction narrative et la parole inspirée.
Juliette Fabre, « Regards sur la cité. Le poète promeneur au tournant des xviie et xviiie siècles »
Le regard du poète sur la cité au tournant des xviie et xviiie siècles peut s’exercer par l’écriture de textes satiriques relatant un itinéraire à la promenade, lieu de rencontre, à la croisée de l’urbanisme et de l’urbanité, de la civilité. La Satyre nouvelle sur les promenades du Cours de la Reine, des Thuilleries et de la porte S. Bernard propose un parcours exemplaire, associant la dimension anthropologique de la promenade comme activité à l’hybridité de la promenade en tant que forme.
Stéphanie Loubère, « Poète et citoyen. André Chénier et “la Muse des cités” »
La cité est pour André Chénier un lieu mental autant que réel, qui nourrit ses rêveries poétiques mais qui est également inséparable de la révolte et des prises de position d’un citoyen passionnément engagé dans les débats politiques de son temps. Elle permet de saisir les ambitions et les paradoxes du poète, attiré par les jouissances bruyantes et tenté par l’ataraxie, partagé entre le monde des hommes et celui des muses, rêvant de solitude champêtre et se jetant dans la mêlée révolutionnaire.
346Pierre Loubier, « Alors tout se leva. Le poète et la cité en 1830 »
Paris inquiète et fascine. Dans les principaux poèmes parus au moment de la révolution de Juillet 1830 (Hugo, Vigny, Barbier), le poète définit un nouveau mode de représentation de la Révolution et du Peuple, ce « personnage nouveau et imprévu » : élévation, dégagement, conquête d’une centralité de parole, définition d’une figure et d’une fonction du poète. Les Trois Journées ont généré une poésie qui, au-delà de la pure circonstance politique, est sommée de se faire voix dans l’espace public.
Aurélie Foglia, « “Le souvenir de ce monde mortel”. Raison du politique dans la poétique lamartinienne »
Lamartine représente un hapax, en ce qu’il est à la fois poète et homme politique, inséparablement, ce qui lui permet de proposer en son temps (et à son temps) à la fois une politique du poème et une poétique de sa politique. Il reste le nom d’une implication viscérale du poète dans la vie de la cité. L’éthique gouverne l’esthétique. Pris par le souci du monde, il se sent requis par un lyrisme humain, joue de la musique sur les cordes du cœur et tente d’inventer un avenir qui chante davantage.
Henri Scepi, « Mallarmé futur »
Cet article examine comment Mallarmé, loin de toute utopie et de tout messianisme, pense la possibilité même de la poésie et son avenir dans un contexte où dominent la presse moderne et l’édition à grand tirage. L’auteur de Divagations s’ingénie à postuler, avec l’attente d’un futur conçu comme une puissance du poème, un temps de l’écrit susceptible de rénover les rapports du poète et de la cité et d’inventer, en une politique de la fiction, un sens commun qui ne soit pas un sens unique.
Christian Doumet, « Poésie en réserve »
À partir du récit de la mort de Mandelstam dans les Récits de la Kolyma de Varlam Chalamov, cet article explore la défiance de la poésie à l’égard de l’écrit et de sa diffusion dans la cité. À la lumière de quelques références majeures (Platon, Mallarmé, Valéry), il veut éclairer l’idée d’une réserve poétique, au sens d’une puissance auto-prophétique du poème inconciliable avec 347ses manifestations publiques. L’apparent oubli actuel de la poésie trouve dans cette réserve une résonance inattendue.
Jean-Claude Pinson, « Intranquillité de la poésie »
De plus en plus désocialisée, la poésie, sauf à s’« engager », paraît n’être plus que jeu avec le langage. Elle ne se résout pourtant ni au gnosticisme ni à l’illisibilité. Délaissant le ressassement du « négatif », elle affirme une forme de gratitude à l’égard du simple fait d’exister. En vertu du « pacte pastoral » qui la lie à la Nature, elle peut se faire l’écho de l’« écoanxiété » actuelle. Mais, liée à l’intranquillité inhérente à la langue, elle reste loin des voies de la transitivité.
Béatrice Bonhomme, « Poètes dans la cité »
La poésie constitue le discours alternatif, le « discours de résistance ». On tente de la chasser de la cité car elle fait peur en tant que résistance tenace contre une forme de pensée dominante qui a fait la démonstration de son danger foncier pour le monde et par contrecoup pour l’homme. Pourtant, dans un feuilletage mémoriel, des poètes reprennent le flambeau au cœur de la communauté, en recentrant le langage sur l’essentiel, c’est-à-dire le rapport de l’homme au monde.
Claude Ber, « Portrait du poète en revenant »
Quelle relation entre le poète et la Cité alors que la place de la poésie paraît marginale ? Le poète est indissociable de la Cité, mais à parcourir les rôles qu’on lui prête, on ne peut l’assigner à aucun dans l’historicité de la poésie. Plus que par l’engagement, sans pour autant l’exclure, c’est à travers son usage spécifique de la langue et par la réactivation de cette dernière que le poète agit dans la Cité, revenant de son profond et la hantant de l’utopie d’une hospitalité au tout vivant.
Olivier Belin, « Poésies de rue. D’Isidore Ducasse aux Gilets jaunes, et retour »
Promue par les avant-gardes du xxe siècle à partir d’Isidore Ducasse, l’idée de « poésie faite par tous » invite à penser une poésie de la rue, au double sens 348de l’expression : une poésie qui prend la rue pour objet, ou qui fait de la rue son arène. De l’esthétique moderniste aux graffiti qui ont illustré Mai 68 ou le mouvement des Gilets jaunes, cet article examine l’utopie d’une démocratie poétique inscrite au cœur de l’espace urbain.
Olivier Barbarant, « “Car les lavoirs sont loin de la ville…”. Orphée et Nausicaa »
Que peut, que devrait la poésie en matière de politique, quand la Cité s’indéfinit ? Un itinéraire de lecteur et d’auteur propose quelques pistes : distinction entre poésie militante et pertinence politique ; possibilité de parler de tout, y compris de l’Histoire ; rôle déterminant de l’expérience sensible seule à même de fonder une juste parole. Nausicaa plutôt qu’Orphée, le poète lave le langage : dès lors, toute beauté fait résistance – à l’état du monde comme à l’ordre du discours.