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Classiques Garnier

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  • Publication type: Book chapter
  • Book: Le Philologue et son double. Études de réception médiévale
  • Pages: 7 to 9
  • Collection: Medieval Literary Research, n° 17
  • CLIL theme: 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN: 9782812430855
  • ISBN: 978-2-8124-3085-5
  • ISSN: 2261-0367
  • DOI: 10.48611/isbn.978-2-8124-3085-5.p.0007
  • Publisher: Classiques Garnier
  • Online publication: 04-09-2015
  • Language: French
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Avertissement

À lexception des deux premiers, tous les articles repris ici ont paru postérieurement à mon Joseph Bédier écrivain et philologue. Chacun traite dun thème que mon livre navait fait queffleurer, et là où il suggérait la possibilité de développer tel aspect particulier de lœuvre de Bédier, du contexte intellectuel dans lequel elle sinscrivait, de celui quelle a contribué à modeler, ou de la réception de lœuvre bédiérienne et, en particulier du Roman de Tristan et Iseut, les présents articles se sont donné pour tâche de proposer quelques réponses à des interrogations restées en suspens ; ces solutions restent partielles, sans doute, car ce nest pas vers une, mais bien vers des synthèses quelles tendent. La question de la traduction et de ses modes, en particulier, devrait, pour être traitée vraiment sérieusement, prendre en compte les innombrables tentatives proposées depuis bientôt trois siècles pour adapter la littérature française médiévale à la langue moderne ; plusieurs thèses, sinon plusieurs vies, y suffiraient à peine. En outre, pour ne pas faire de ce volume un recueil exclusif détudes bédiériennes, on y a inclus des travaux consacrés à des figures plus anciennes (Le Grand dAussy, Quinet, Renan) ou plus modernes (Cingria, Aebischer, Zumthor), auteurs qui, tous, mettent en cause, de manière plus ou moins aiguë, les rapports de lérudition et de la littérature. Cet angle dapproche peut sembler relativement restreint face à limmensité des possibles ouverts par la question de la « réception » du Moyen Âge. Jy vois pour ma part loccasion daffirmer une idée qui mest chère, à savoir que la réception profane du passé est inséparable de sa réception savante. Trop de chercheurs ont restreint la question du « retour » du Moyen Âge à létude de ce quen ont dit les artistes ; il nétait que justice que lon privilégie, pour une fois, la parole des érudits, non que ceux-ci aient eu plus dimportance, dans ce processus, que les auteurs, mais parce que la collaboration des savants et des écrivains (des « clercs » et des « jongleurs », disait déjà Bédier) a toujours été à lorigine de lévolution de notre culture, comme ces pages aimeraient le montrer. Dans quelques rares cas (Ferré, Updike, certains adaptateurs modernes de la matière tristanienne), je me suis permis délargir le champ des 8auteurs concernés et de sortir fugitivement de la sphère de lérudition, mais on constatera que cest presque toujours pour mieux y revenir, les allusions à des auteurs « profanes » témoignant, en loccurrence, plutôt dun élargissement que dune éviction du rayonnement érudit.

Je nai pas cherché à donner à ces études beaucoup plus dunité quelles nen ont eu au gré varié de leurs publications respectives. Tout au plus ai-je tenté de les classer dans un ordre à la fois historique et logique, en allant de lhistoire de la philologie aux érudits modernes en revisitant au passage quelques grands massifs de lœuvre bédiérienne, ainsi que les derniers avatars du Roman de Tristan et Iseut. Mais toutes ont été révisées afin que les redites apparaissent le moins nombreuses possible, certaines restant néanmoins nécessaires pour ne pas rendre incompréhensibles certains développements : on narrive pas au but par un seul chemin et les croisements de problématiques sont inévitables dès lors que lon prétend cerner les divers aspects dune question complexe aux innombrables ramifications. Je nai pas non plus cherché à réduire certains écarts stylistiques : on constatera en particulier que laspect un peu plus technique de « Traduire ou ne pas traduire » tranche avec lesprit plus franchement littéraire des autres textes. Certaines études ont toutefois été passablement modifiées ; écourtées là où elles ne faisaient que répéter ce qui avait déjà été dit ailleurs, fondues parfois les unes dans les autres, augmentées enfin lorsque de précédentes contraintes éditoriales navaient pas permis de donner leur plein développement à certaines idées qui y étaient exprimées, corrigées et recontextualisées partout où cela sest trouvé nécessaire, toutes tentent de répondre à une question particulière, et jai essayé de faire une force de ce qui pourrait, de prime abord, sembler une absence de direction générale. Selon langle adopté, en effet, des questions apparentées se trouvent abordées de différentes manières, et ce qui aurait été un casse-tête structurel dans le cas dune monographie ciblée apparaît plutôt ici comme une réflexion plurielle qui tente de concilier histoire littéraire, sociologie de la littérature et histoire des formes.

En tête figure le plus ancien article de ce recueil, texte programmatique dont jai légèrement atténué le caractère à lorigine un peu abrupt (il avait, dans un contexte épistémologique plus tendu quaujourdhui, valeur de manifeste), mais qui me semble, quant au fond, navoir pas tout à fait perdu de son actualité. Le dernier article, enfin, qui est aussi le deuxième plus récent, est un essai de synthèse sur la première moitié du xxe siècle, en même temps quune interrogation sur l« avenir » du Moyen Âge.

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Dans tous les cas, la bibliographie a été complétée et mise à jour : on trouvera en fin de volume tous les travaux explicitement cités dans les divers articles. Je nai pas voulu compartimenter cette bibliographie : la distinction entre littératures primaire et secondaire aurait en effet été bien souvent fallacieuse, car les éditions des textes médiévaux sont, dans ce volume, plus souvent citées pour ce quen disent leurs éditeurs que pour ce que les textes eux-mêmes nous racontent, raison pour laquelle ceux-ci ont été classés sous le nom des éditeurs modernes et non des auteurs anciens, que lon retrouvera néanmoins facilement grâce à lindex des noms propres.

Lhistoire des études médiévales et de la réception du Moyen Âge dans la modernité sont des domaines encore jeunes de notre discipline, et la multiplication des colloques et des publications consacrés à ces sujets prouve la vitalité et la fécondité de nouveaux champs de recherches. Pour ma part lédition de ce volume mest loccasion de mettre un point dorgue (mais certainement pas un point final) à des travaux qui, trop obstinément poursuivis, menaceraient de faire oublier que le premier amour du critique doit rester létude des textes de ceux qui nont eu dautre possibilité que dêtre des créateurs ; si tant est du moins – et lon comprendra que ce soupçon lancinant hante les présentes pages – que ceux-ci puissent être fondamentalement distingués de ceux qui les glosent1

1 Les références précises des premières publications des articles repris et adaptés ici sont indiquées en note au début de chaque article. Quil me soit permis de remercier au passage les revues et éditeurs divers qui mont autorisé à reprendre mes textes sous cette nouvelle couverture. Je remercie ici Olivier Wicky de sa relecture attentive de ces pages.