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Classiques Garnier

Résumés

  • Type de publication : Article de collectif
  • Collectif : Le Passé composé. La mise en œuvre du passé dans la littérature factuelle (xvie-xixe siècles)
  • Pages : 321 à 326
  • Collection : Rencontres, n° 430
  • Série : Le Siècle classique, n° 14
  • Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN : 9782406097211
  • ISBN : 978-2-406-09721-1
  • ISSN : 2261-1851
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-09721-1.p.0321
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 13/01/2020
  • Langue : Français
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Résumés

Frédéric Charbonneau et Marie-Paule de Weerdt-Pilorge, « Introduction »

Dune écriture de lhistoire qui fasse autorité à lélaboration dune méthode critique en passant par les inflexions de la mémoire personnelle, ce sont les différentes modalités de la composition ou de la recomposition du passé, proche ou lointain, revécu ou refondé par lécriture, qui sont explorées, engageant un dialogue entre les différentes formes de narrations mémorielles et factuelles dans une période de profondes mutations historiographiques.

Bertrand Binoche, « Les historicités des Lumières »

Il faut en finir avec lidée que les Lumières auraient construit de lhistoire un concept homogène : aucun « régime dhistoricité » ne leur est imputable en propre. En fait, sous le nom vague d« histoire philosophique » ou « raisonnée », elles ont essayé de recomposer le passé contre la superstition : cela sest joué sur plusieurs terrains – histoires hypothétiques, universelles, régionales – et cest pourquoi, des historicités mises en œuvre par les Lumières, on ne peut parler quau pluriel.

Béatrice Guion, « Le sens du passé à lâge classique »

Une enquête sur le sens du passé dans les Histoires et les Mémoires dAncien Régime (xvie-xviiie siècles) engage deux questions, difficilement dissociables : celle de la valeur qui lui est conférée et celle du sentiment de la temporalité. Le passé, investi de fonctions diverses – de norme (morale, religieuse, politique), de légitimation, de critique –, apparaît rarement appréhendé pour lui-même, et souvent sollicité dans des combats qui sont ceux du présent de lécrivain.

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Philippe Hourcade, « Les Mœurs des Israélites. Une lecture ethnographique de lAncien Testament par Claude Fleury en 1681 »

Il est question ici dexaminer le propos et la démarche de Claude Fleury dans ses Mœurs des Israélites à partir de lAncien Testament. Faisant fi du récit, il expose la courbe évolutive de lhistoire des juifs anciens, le détail de leurs us et coutumes, les compare avec dautres civilisations. Sa démarche est ethnologique avant la lettre, voisine de celle de la littérature de voyage, et peu religieuse.

Alicia Viaud, « La mort du prince de Condé dans La Vraye et entiere histoire des troubles de La Popelinière. Composer les passés pour penser la guerre »

Le récit de la mort du prince de Condé, abattu au terme de la bataille de Jarnac (1569), permet dappréhender la conception de lhistoire de La Popelinière. Celui-ci identifie le meurtrier, sans entrer dans la polémique. Le destin de Condé est ensuite intégré à la chaîne paradigmatique de ses précédents historiques. La complexité de lanalyse suggère deux régimes complémentaires décriture, au service des particularités de lépisode et de la vocation didactique dune histoire exemplaire.

Pierre Bonnet, « De lécriture et de létude de lhistoire comme préalables à la philosophie politique de Mably (1709-1785) »

À travers De la manière décrire de lhistoire, lon montre que le travail de lhistorien, dans sa manière, sa matière, ses modalités et ses finalités, relève déjà pour Mably dune intention philosophique. Puis, on voit comment cette histoire philosophique lui inspire, dans De létude de lhistoire, les principes de gouvernement quil inculque au jeune duc de Parme, mais surtout informe toute son anthropologie politique et morale. Par là, Mably échappe en partie à limputation dutopisme.

Marc André Bernier, « De lanecdote historique à lécriture biographique chez Madame dArconville »

Le recours à lanecdote historique exprime un souci du vrai, dans la mesure où la valeur que revendique ce bref récit tient dabord à sa véridicité. Les rapports quentretient lanecdote avec la recherche de la vérité historique sont 323toutefois complexes, comme le montre lun des grands textes que Madame dArconville a consacrés à la Révolution française et dont le titre annonce le programme : « Parallèle entre Charles ier, roi dAngleterre, et Louis xvi, roi de France ».

Lucie Desjardins, « De la croyance à la littérature. La réappropriation du passé chez Nicolas Lenglet Dufresnoy »

À partir du Recueil de dissertations, anciennes et nouvelles (1751) de Nicolas Lenglet Dufresnoy, il sagit dexaminer le rôle du passé au sein du processus de marginalisation des croyances superstitieuses. En effet, cette compilation de textes publiés à lorigine entre 1526 et 1748 présente bon nombre dhistoires répétées à lenvi au fil du temps. Il sagit donc dinterroger le statut de ces reprises et dexaminer le rôle danecdotes qui appartiennent résolument au passé que celui-ci soit ancien ou récent.

Bruno Morgant Tolaïni, « Recomposer le passé ? La question de la Saint-Barthélemy dans les Mémoires de Jean Choisnin »

Jean Choisnin est un émissaire envoyé en Pologne pour préparer les esprits à la candidature de Henri dAnjou comme roi. Lorsque la nouvelle de la Saint-Barthélemy est annoncée, elle fragilise le travail entrepris jusque-là. Après dâpres tractations, la couronne est obtenue le 9 mai 1573. Les Mémoires de Choisnin font état de cette négociation. Ils soulignent les grandes qualités des ambassadeurs, capables de parvenir à leurs fins et soucieux dêtre justement récompensés.

Isabelle Trivisani-Moreau, « Mémoires partisans. Regards contrastés sur les troubles des Cévennes »

Les Mémoires de trois acteurs de la guerre des camisards, le maréchal de Villars et deux chefs camisards, Cavalier et Marion offrent des divergences qui tiennent aux intérêts que chacun a à défendre. Mais ces intérêts se combinent avec un regard singulier sur le passé, accéléré pour lun, étiré pour lautre, inversé par lenjeu prophétique pour le dernier. Lextension du corpus de trois à cinq textes des mêmes auteurs montre en outre limportance des contextes de rédaction et de diffusion.

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Hélène Michon, « Le statut de lhistoire dans la controverse des vertus des païens »

Lobjet de cette contribution est une querelle de nature théologico-philosophique qui oppose lacadémicien François de la Mothe le Vayer au théologien de Port-Royal, Antoine Arnauld, dans les années 1640. Si le conflit porte sur la nature des vertus des païens, il met en cause également deux perceptions de lhistoire – substitution dune histoire de sens à une histoire savante, pour reprendre les mots de Bernard Chédozeau se réclamant toutes deux de saint Augustin, dont nous voudrions mesurer ici les enjeux.

Marc Hersant, « Des Mémoires pour servir à la vie de M. de Voltaire au Commentaire historique sur les œuvres de lauteur de la Henriade. Déconstruction et reconstruction du passé »

Lopposition nietzschéenne entre histoire-monument et histoire critique éclaire les deux « autobiographies » de Voltaire : le Commentaire tente de transformer sa vie en monument, les Mémoires règlent des comptes avec Frédéric II et affrontent dautres versions possibles des relations entre les deux hommes. La biographie sculpte dans le marbre une version apaisée dévénements que les Mémoires traduisent avec une violence traumatique. Dune œuvre à lautre, le passé est ainsi composé et recomposé.

François Raviez, « Recomposer le passé dans le Mémorial de Sainte-Hélène »

Dans le Mémorial de Sainte-Hélène, Napoléon lègue un héritage de parole à son fils unique, hypothétique Napoléon II. En évoquant son règne au gré des conversations, en expliquant ses desseins en de longs monologues, lEmpereur dicte un testament composite, fait de récits de batailles, danalyses géopolitiques et de rêveries prédictives. Le Mémorial, journal du comte de Las Cases, est à la fois la recomposition de son règne et lappel dramatique dun père au fils désormais inaccessible.

Annabelle Bolot, « Écriture du passé et silences du présent. La pensée religieuse face aux leçons de lhistoire dans les Mémoires de Saint-Simon »

Cet article sinterroge sur les contradictions qui séparent les convictions religieuses du Saint-Simon des Mémoires de celui du passé, pour y voir le signe 325de la rencontre de plusieurs temporalités. Le rejet de la persécution protestante ne serait-il alors que le fruit dune lecture rétrospective de lhistoire, lié au devenir de la question janséniste ? Les Mémoires viennent ainsi interroger lunité du sujet dans le temps et toute possible restitution du passé dans le témoignage historique.

Anne-Sophie Fournier-Plamondon, « Trois passés en un. LHistoire de lÉglise dAntoine Godeau »

Écrire le passé constitue un geste politique, ancré dans des enjeux présents. Que se produit-il quand le présent de lécriture rattrape lhistoire ancienne ? Cette question est appréhendée à partir dun ouvrage dAntoine Godeau (1605-1672), où se trouvent trois temporalités distinctes : un passé ancien et sacré ; le passé récent de lauteur ; le temps de lécriture. Cet entrelacs de temporalités conduit à sinterroger sur les articulations de ces différents passés et leurs usages sociopolitiques.

Malina Stefanovska, « Le passé composé dans lHistoire de ma vie de Casanova »

Cet article étudie la recomposition du passé dans lHistoire de ma vie de Jacques Casanova, connu pour son « présentisme » voulu, à rattacher à son statut daventurier créant lui-même son destin, ainsi quà sa volonté, typique des mémorialistes, de mettre son lecteur au milieu des événements racontés. La contribution montre comment dans son célèbre récit dévasion de prison Casanova parvient à créer le sentiment dimmédiateté, utilisant divers segments du passé, antérieur ou postérieur à celui de lévénement.

Delphine Mouquin, « “Je vois encore”. Un passé toujours présent chez plusieurs femmes mémorialistes de la Révolution, de Mme Campan à Mme de Chastenay »

Dans certains mémoires féminins relatant la Révolution française, on rencontre une formule frappante pour évoquer un souvenir particulièrement vicace : « Je vois [jentends, je frémis, je sens] encore ». Elle participe de la mise en scène du je de la mémorialiste dans une continuité historique et narrative troublée. Elle sinscrit dans une démarche dhommage aux souverains, au passé ou à la famille. Elle cristallise enfin la dimension pathétique de ces œuvres placées sous lemprise du passé.

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Damien Zanone, « Art de la mémoire et sens du passé. Dun usage des jardins chez Rousseau et Chateaubriand »

Le legs rhétorique des « arts de la mémoire » (se laisser guider par la représentation dun lieu pour avancer dans son discours) est-il devenu, dans les Confessions de Rousseau et les Mémoires doutre-tombe de Chateaubriand, un procédé spécifique de la poétique de lécriture autobiographique ? Larticle explore cette hypothèse en envisageant les descriptions de jardins proposées dans ces deux ouvrages comme autant doccasions de surprendre le passé et de lui faire rendre sens.