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Classiques Garnier

Résumés

  • Type de publication : Article de collectif
  • Collectif : La Science des mœurs au siècle des Lumières. Conception et expérimentations
  • Pages : 361 à 364
  • Collection : Rencontres, n° 518
  • Série : Le dix-huitième siècle, n° 37
  • Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN : 9782406119029
  • ISBN : 978-2-406-11902-9
  • ISSN : 2261-1851
  • DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-11902-9.p.0361
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 06/10/2021
  • Langue : Français
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Résumés

« Introduction »

Il nest pas aisé aujourdhui de cerner la science des mœurs. Outre labsence douvrages de référence, lhistorien de la pensée se heurte à sa nature interdisciplinaire, qui contraste avec le cloisonnement disciplinaire actuel, et à la démarche quelle revendique, supposée analogue aux sciences de la nature. À cela sajoute la question de la neutralité dun projet ambitieux et délicat. Un discours scientifique sur les mœurs peut-il être anodin et exempt de tout jugement de valeur ?

Jean-Marc Mandosio, « Quentendait-on par anthropologie avant lépoque contemporaine ? »

Longtemps, le mot anthropologie a désigné autre chose que létude des mœurs, de la culture et des institutions. Dans lItalie du xvie siècle, il désigne lénumération de personnages célèbres ou une discussion sur la dignité et les travers humains. En Allemagne, il désigne un ouvrage décrivant le corps et lâme ; lEncyclopédie de Diderot le réduit à lanatomie. Ce nest que dans la seconde moitié du xviiie siècle que lon envisage une « science de lhomme » examinant tous les aspects de lhumanité.

André Lapidus, « Le prêt à intérêt face à la religion et au droit. Imbrication et séparation aux premiers moments dune histoire longue »

Ce texte sattache à repérer la manière dont les questions économiques se sont articulées à celles relatives aux mœurs en privilégiant deux étapes anciennes marquées par les contributions de Thomas dAquin et de Hugo Grotius. Chacune montre, à partir de la question du prêt à intérêt, comment un savoir économique a émergé de la perspective normative (théologique ou juridique) à laquelle elle était subordonnée : sur le mode de limbrication chez Thomas dAquin puis de la séparation chez Grotius.

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Sandrine Leloup, « De La Bruyère à Adam Smith. Vers la naissance dune science des mœurs ? »

Lhomme prudent et le fils de lhomme pauvre dépeints dans la Théorie des sentiments moraux et la Richesse des Nations dAdam Smith ressemblent aux ambitieux des Caractères de La Bruyère. Or, Smith sinscrit dans une tradition intellectuelle autre que celle du moraliste : dans la lignée des Lumières écossaises et de Hume, il envisage une science morale fondée sur lempirisme, compatible avec sa théorie économique. Vertu et richesse lui semblent alors conciliables, contrairement à La Bruyère.

Céline Spector, « LEsprit des lois de Montesquieu. Une science des mœurs ? »

On tient Montesquieu pour le fondateur dune science politique nouvelle. Mais en quel sens ? LEsprit des lois propose une philosophie qui porte sur lhistoire, le champ contingent et singulier toujours exclu de la science et cantonné au domaine de la prudence. Montesquieu entend rationaliser les lois et rendre raison des mœurs. Cette contribution se propose de mettre en regard les interprétations positivistes et anti-positivistes de celui qui fut nommé le « Newton du monde moral ».

Jean Dellemotte, « La figure du sauvage dans la science des mœurs des xviie et xviiie siècles, du racisme au relativisme »

Lélaboration de la science des mœurs coïncide avec lapparition dans la littérature savante de la figure du sauvage, dont lexamen a donné lieu à de nombreux débats et débouché sur un héritage ambivalent mais fécond. Aux discours soupçonnables de rationaliser lidée dune supériorité des mœurs occidentales qui perdurera dans les siècles suivants, sopposent des approches soulignant linfluence des circonstances exogènes anticipant les pratiques ethnologiques et anthropologiques modernes.

Sonia Boussange-Andrei, « La science des mœurs chez Adam Ferguson. Une approche globale du problème de lordre social »

Cette contribution propose de montrer que létude scientifique des mœurs menée par Adam Ferguson doit être saisie comme une approche globale du problème de lordre social. Sa réflexion sur les mœurs entend, en effet, non seulement offrir une analyse des variations des manières dêtre et de leur 363évolution, mais également développer des considérations normatives lorsque les changements sociaux menacent le lien social, la justice et la liberté civile.

Laurent Jaffro et Vinícius França Freitas, « Thomas Reid épistémologue des sciences sociales »

Larticle étudie la méthodologie des sciences sociales élaborée par le philosophe écossais Thomas Reid. Notre objectif est de reconstruire et dévaluer lépistémologie reidienne des sciences de laction et de la société et de déterminer comment elle se rattache aux principes fondamentaux de sa théorie générale de la connaissance.

Jean-Claude Bourdin, « Que sont les mœurs devenues ? Étude sur leffacement du concept politique des mœurs »

Le concept politique des mœurs a disparu aujourdhui après avoir été surdéterminé au xviiie. Après avoir pris Balzac comme témoin de la Société et de la « sociologisation » des mœurs, on suit linterprétation par Arendt de lapparition du « Social » et du retrait des mœurs devant le « comportement ». Mais De la démocratie en Amérique leur confère une fonction politique. Il y a un « paradoxe Tocqueville » car les mœurs, soutiens et garants de la démocratie, sont fondamentalement apolitiques.

Fabrice Moulin, « Larchitecture sous le rapport des mœurs. Conception artistique et science des mœurs chez Claude-Nicolas Ledoux »

LArchitecture sous le rapport de lart, des mœurs et de la législation de Ledoux est un texte fascinant parce que la figure de larchitecte y atteint une telle universalité quelle embrasse la totalité des sphères de lexistence humaine, à commencer par les mœurs. On cherchera ici à mettre en évidence la nature et les différents types de savoir et de discours sur les mœurs que larchitecte des Lumières convoque, par la vocation sociale de son art mais aussi par lambition littéraire de sa plume.

Jean-Luc Chappey, « De la science des mœurs à la lutte contre la dégénération. Les combats de Lafont-Gouzi dans la première moitié du xixe siècle »

Létude des prises de position du médecin Lafont-Gouzi, permet de mesurer les déplacements de la science des mœurs vers une pensée réactionnaire dans 364les premières décennies du xixe siècle. Tournant le dos à lidéal de régénération collective et républicaine porté par les Idéologues et leurs héritiers, il choisit de mobiliser les fondements de la médecine néo-hippocratique pour stigmatiser les effets de la Révolution française et dénoncer la dégénération des populations françaises.

Nathalie Sigot, « Économie et morale. Lanalyse des économistes libéraux français du xixe siècle »

Ce chapitre examine les relations que léconomie entretient avec la morale chez les économistes libéraux français du xixe siècle. En opposition avec la nouvelle approche de léconomie initiée par « la révolution marginaliste », ces auteurs admettent une conception de léconomie qui se situe dans la continuité des Lumières et des physiocrates. Pourtant, la manière dont ils analysent les relations entre morale et économie soulève de nombreuses difficultés quils sont impuissants à résoudre.

Audrey Mirlo, « Une science des mœurs est-elle possible ? Ce quen écrivent quelques héroïnes trahies des Lettres portugaises aux Liaisons dangereuses »

Les Lettres portugaises, Le Spectateur français, les Lettres dune Péruvienne et les Liaisons dangereuses renouvellent le genre des Héroïdes et linfléchissent dans le sens de létude morale. Une approche comparative montre que les héroïnes du xviiie siècle nen savent pas nécessairement plus que celles qui les ont précédées sur la voie des amours malheureuses. Les fictions considérées questionnent ainsi la possibilité dun progrès moral.

Christophe Reffait, « Larithmétique morale stendhalienne et ses limites »

Larticle revient dabord sur la formation, chez le jeune Stendhal, dune science morale fondée sur les Idéologues et les sensualistes. Constatant laporie critique qui consisterait à rechercher chez le romancier de lâge mûr des manifestations de cette formation intellectuelle, larticle imagine plutôt le commentaire par Helvétius, Tracy ou Bentham des deux pages célèbres dans lesquelles Julien se rend pour la première fois dans la chambre de Mme de Rênal (Le Rouge et le Noir, I, chap. xv).