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Classiques Garnier

Introduction à la deuxième partie

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Introduction
à la deuxième partie

Après avoir pu cerner les enjeux symboliques et esthétiques des œuvres littéraires résidentielles, lobjectif de cette deuxième partie est de saisir le jeu dinteractions qui se noue, en fonction des échelles choisies (strate étatique, territoriale…) et de léventail des acteurs (auteurs, opérateurs culturels…), entre la résidence et les divers cadrages impulsés par les politiques culturelles en vigueur. Comment le dispositif résidentiel est-il lié, dune manière systémique, à un système politique soumis à des objectifs axés sur une dynamisation territoriale souvent affichée (plus-value économique, touristique, communicationnelle…). La question est notamment de savoir comment les différentes institutions dominantes en charge de penser la résidence dauteurs cherchent à formaliser les pratiques résidentielles. Dès lors, faut-il considérer la résidence comme une réinscription territoriale et culturelle de lacte littéraire ? Une forme de territorialisation de la littérature ou encore un dispositif politique et territorial ? Dans le contexte de la recherche que nous menons, il sagit dentrevoir la résidence comme une zone de confluence, entre délimitation et appropriation, à la jonction de divers espaces et de mettre en perspective la plurialité des récits portés par les différents acteurs du territoire qui sexpriment à travers la parole des écrivains, des institutions, des élus. Fort de ces dynamiques sociales multiples, lenjeu relève bien de létude de cette articulation entre le dispositif culturel, les acteurs et les instances de régulation. Nous allons tout dabord nous pencher sur le cadre des politiques culturelles afin dévaluer, entre décentralisation et démocratisation, commande et injonction, cette volonté dinstitutionnalisation de la résidence qui prend appui sur un processus efficient de formalisation et de pérennisation de la part des pouvoirs publics, en sachant, comme a pu le rappeler Philippe Urfalino que cette visée politique ne se limite pas aux seules actions du ministère de la 160culture, mais doit intégrer lensemble composite des mesures prises par toutes les autorités dans le champ culturel :

Notre conception de la politique culturelle ne se réduit pas à un ensemble de mesures, envisagées comme le résultat de larticulation entre le travail gouvernemental et différents groupes sociaux. Les enjeux sociaux et politiques attachés au sort de lart ou de la culture, la définition de mandats politiques et de segments administratifs spécialisés, au niveau des États comme des collectivités locales, prêtent une globalité non strictement additive à ce que lon nomme politique culturelle. Les politiques publiques de la culture ne constituent donc quune composante de la politique culturelle1.

Lanalyse des politiques culturelles nous amènera ensuite à appréhender la question prégnante du statut de lauteur en contexte résidentiel, en observant certaines tensions autour de lauctorialité et de la professionalisation des écrivains qui mettent à jour des divergences, des dissensus forts selon la perspective multi-scalaire déployée (niveau conceptuel, juridique, politique, axiologique). Enfin, outre la nécessité de clarifier le concept de dispositif à partir de lapproche de Michel Foucault et de son usage en sciences de linformation et de la communication, lultime chapitre sera loccasion de revenir de manière plus précise sur la définition même du dispositif résidentiel, à partir de la construction dune typologie des formes et contraintes permettant une compréhension nouvelle ou en tout cas plus approfondie de lobjet étudié.

1 Philippe Urfalino, « Lhistoire de la politique culturelle », in Jean-Pierre Rioux, Jean-François Sirinelli (dir.), Pour une histoire culturelle, Paris, Seuil, 1997, p. 311.