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Classiques Garnier

Avant-propos

  • Type de publication : Article de collectif
  • Collectif : La Poésie de la Pléiade. Héritage, influences, transmission
  • Pages : 7 à 9
  • Collection : Rencontres, n° 1
  • Thème CLIL : 3633 -- LITTÉRATURE GÉNÉRALE -- Poésie
  • EAN : 9782812439698
  • ISBN : 978-2-8124-3969-8
  • ISSN : 2261-1851
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-8124-3969-8.p.0007
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 15/12/2009
  • Langue : Français
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Avant-propos

Le professeur Isamu Takata a consacré sa vie à l’étude de la Renaissance, et en particulier à celle de la poésie française du xvie siècle. C’est en 1948, alors que les décombres de la guerre couvraient encore le Japon, qu’il a commencé à étudier le français à l’Université Meiji, de Tokyo, et qu’il s’est pris de passion pour notre langue. Il a eu la chance d’avoir quelques professeurs exceptionnels, parmi lesquels Kazuo Watanabe, le traducteur de Rabelais, et c’est avec ce maître qu’il découvrit Ronsard, en étudiant les Discours des Misères de ce Temps. Ce fut une révélation et le début d’une liaison qui dure encore : depuis ses années d’étudiant, Isamu Takata n’a plus quitté le poète vendômois, tout en menant une vie fort active de savant mais aussi d’homme curieux du vaste monde. Après avoir découvert la France, ses universités, son mode de vie, ses paysages, sa cuisine, l’air et les musées de Paris et de ses provinces ainsi qu’un peu du reste de l’Europe, il retourna dans son pays pour transmettre l’enthousiasme que lui inspirait notre littérature du xvie siècle à ses étudiants de l’université Meiji, où il allait enseigner pendant plus de quarante ans.

Il est revenu plusieurs fois en France, qu’il a visitée à fond, il connaît la plupart des grands pays d’Europe et du monde. Ceux qui l’ont fréquenté savent qu’il est un merveilleux guide. Mais c’est au Japon qu’il faut avoir eu le privilège de le suivre pour savoir quel découvreur de son pays il est pour les visiteurs étrangers qu’il reçoit avec une généreuse amitié. Et c’est alors aussi qu’on se rend compte de l’immense prestige dont il jouit auprès de ceux qui ont le privilège d’avoir été ses élèves et qu’il a amenés à notre culture : étudiants, certes, mais mieux encore disciples. D’autant plus que son action ne s’est pas exercée seulement par son enseignement : il a su entretenir depuis un demi-siècle de nombreux contacts avec ses collègues étrangers et son activité s’est exercée dans de

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multiples domaines. Outre ses publications scientifiques, il a fait paraître de nombreux travaux de vulgarisation, mais aussi, surtout peut-être, des traductions. Notre ami est en effet un remarquable traducteur, qui a à son actif d’avoir rendu accessibles aux lecteurs japonais quelques titres français ou anglais de première importance, comme La Survivance des dieux antiques de Jean Seznec, L’Humanisme de Samuel Dresden, Les Académies en France au xvie siècle de Frances Yates, et même Nostradamus : imagine-t-on Nostradamus en japonais ? Mais c’est sans doute sa traduction de Ronsard qui est sa réussite la plus impressionnante : non, certes, la totalité de l’œuvre, proteste-t-il quand on lui en parle, simplement deux cents poèmes. Deux cents poèmes, « simplement », en effet ! Il n’existe aucune anthologie de cette ampleur consacrée à Ronsard en français. Encore moins dans d’autres langues. Sauf en japonais. Ce travail a demandé plusieurs années, et la qualité en a été récompensée par le Grand Prix de la Traduction Littéraire au Japon en 1985. Nul ne s’étonnera que le gouvernement français ait fini par se décider, en 1997, à le faire Officier dans l’Ordre des Arts et Lettres « en remerciement de sa contribution au rayonnement de la littérature française dans le monde ».

Admirateur passionné de Ronsard, Isamu Takata n’avait pas attendu 1985, cependant, pour faire connaître ce poète dans son pays. C’est dès 1965, encore jeune professeur, qu’il fonda la Société des Amis de Ronsard du Japon, société unique au monde probablement, puisque depuis sa fondation, elle se réunit une fois par mois – une fois par mois depuis 1965 ! – pour lire et commenter du Ronsard et des œuvres de la Renaissance française. Et ce n’est pas tout. Depuis 1988, la Société a pris l’initiative, sous l’influence de son président-fondateur, de faire paraître tous les ans un périodique désormais bien connu (et soutenu depuis de nombreuses années par le Centre National du Livre), la Revue des Amis de Ronsard (R.A.R.), qui publie pour partie en japonais (avec des résumés en français) et pour partie en français des articles de chercheurs travaillant dans divers pays à des questions qui intéressent la littérature

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française de la Renaissance, et en premier lieu, cela va de soi, la poésie de Ronsard et de la Pléiade.

Nous devons beaucoup à Isamu Takata. Désormais, il a pris sa retraite mais on ne l’imagine pas inactif : en témoigne le magnifique 20e volume de la revue R.A.R., consacré tout entier à Ronsard et paru en 2007. C’est alors que nous nous sommes dit qu’il fallait vraiment que de ce côté-ci du monde, nous lui témoignions notre amitié, notre reconnaissance et notre admiration. Nous le remercions d’être qui il est, et de faire ce qu’il fait si bien.