Skip to content

Classiques Garnier

Résumés

  • Publication type: Article from a collective work
  • Collective work: La Personne, fortunes d’une antique singularité juridique
  • Pages: 251 to 255
  • Collection: POLEN - Power, Literature, Norms, n° 25
  • CLIL theme: 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN: 9782406114529
  • ISBN: 978-2-406-11452-9
  • ISSN: 2492-0150
  • DOI: 10.48611/isbn.978-2-406-11452-9.p.0251
  • Publisher: Classiques Garnier
  • Online publication: 07-28-2021
  • Language: French
251

Résumés

Alain Le Gallo, « La notion de personne. Un parcours »

La notion de personne a une histoire dont ce colloque a exploré quelques étapes, depuis ses lointaines origines romaines jusquà sa sacralisation contemporaine, notamment sous la forme des droits de lhomme, en passant par la laborieuse constitution de la personne divine, puis humaine, dans son essence, puis en acte, dans son extension et dans ses limites. Ce parcours se prolonge et se complique encore de la contestation même de cette notion, à lintérieur ou hors de sa culture dorigine.

François Saint-Bonnet, « Propos liminaire »

Certaines cérémonies de vœux religieux sapparentent à un rite mortuaire, au cours duquel le voile fonctionne comme un symbole deffacement et de renaissance, un changement de masque qui rappelle lancienne multiplicité des rôles assumés par la personne. Mais la personne contemporaine saffranchit de toute pression collective, verticale ou horizontale, lignée ou clan, de toute mascarade – du moins le croit-elle, car les nouveaux réseaux sociaux les voient ressurgir sous dautres formes.

Michèle Ducos, « Personne et droit dans le monde romain »

Persona désigne dabord au théâtre le masque, puis le personnage et le rôle. Appliqué à la vie politique romaine, il indique ensuite le rôle assumé par un personnage dautorité. Dès la République, il désigne chez les juristes lêtre humain intervenant dans une affaire, puis chez les philosophes, le caractère propre de lêtre humain. Enfin, sous le principat, se développe la notion de ius humanum qui conduit à respecter autrui en tant quhomme. Ainsi évolue dans le temps cette notion complexe.

252

Émilia Ndiaye, « Le barbare bégayeur et lorateur romain. Évolution dune identité fondée sur laltérité »

Les notions daltérité et didentité dans la constitution de la personne à Rome sont complexes. Les Romains passent de la dualité Grecs – ennemis perses à une opposition ternaire, accentuant la différence entre eux et le « bégayeur » sur tous les plans, linguistique, politique, moral… Cette altérité radicale se trouble par la suite, le Romain pouvant se révéler barbare dans ses comportements, les barbares de lEmpire devenant citoyens romains – sans oublier la nouvelle donne du christianisme.

François Ploton-Nicollet, « Sacralité et mise en scène de la personne impériale à Rome » 

Médiateur entre hommes et dieux comme Pontifex maximus, lempereur est un personnage à part dans la société romaine, et ce dès les débuts du principat. Sil nest pas dieu lui-même, il peut être fils de dieu, devenir dieu après sa mort, et faire de son vivant lobjet de célébrations rituelles dans les provinces. Cette contradiction se résout dans la cohérence dune sacralité multiple, variable selon les circonstances, mais toujours mise en scène dans liconographie et la littérature.

Arnaud Perrot, « La Trinité avec ou sans Personnes ? La mobilité du vocabulaire trinitaire chez Basile de Césarée »

Si dans le langage théologique Père, Fils et Saint-Esprit sont traditionnellement désignés comme les Personnes de la Trinité, lexpression occulte les débats suscités par les multiples solutions lexicales proposées pour exprimer la pluralité en Dieu. On reconnaît habituellement à Basile de Césarée le mérite davoir, face à cette profusion de formules, proposé une solution technique fixant lexpression du mystère trinitaire, et ainsi purifié le langage doctrinal de son temps.

Matthieu Cassin, « Comment définir lêtre humain – nature, individu, personne ? Recherche à partir des textes grecs chrétiens de lAntiquité tardive »

Grégoire de Nysse situe la nature au niveau de luniversel, tandis que la personne se limite au niveau dun atome individuel de cet universel, défini 253par un faisceau de propriétés ; les personnes divines, paradoxalement, peuvent être délimitées de manière plus complète, parce quelles sont stables et sans changement, contrairement à la nature humaine. La réflexion sur la relation entre les personnes divines conduit également à une réflexion sur les modalités de la filiation de lhomme à Dieu.

Pierre Magnard, « La notion de personne en théologie »

La « personne », point de fuite de la grammaire, serait une présence par défaut, le visage absent dUlysse, « présence en défaut ». Derrière le rôle, se donne en profondeur à lire le modèle trinitaire qui traduit la vie en Dieu. La lecture de saint Augustin informe ce désir en lhomme de ce qui est « sans visage, sans forme et sans nom : personne » (Christian Bobin).

Bénédicte Mathonat, « Personne et nature humaine chez Thomas dAquin »

La perfection de lindividualité dans la nature rationnelle caractérisant la « personne » peut-elle sappliquer à lhomme en tant que tel ? Le parti pris par Thomas dAquin dans la dispute médiévale sur lintellect séparé répond à ce questionnement : si la nature rationnelle en lhomme permet de lui donner le titre de personne, cest en raison de son unité substantielle de corps et dâme. Prise de position capitale pour lanthropologie, excluant toute mise à lécart de lordre corporel humain.

Enrique Martínez, « Le constitutif formel de la personne chez les commentateurs de saint Thomas dAquin »

Si la réflexion métaphysique et théologique sur lêtre personnel développée par Thomas dAquin est reconnue comme élément structurant de la culture occidentale, déterminer ce qui constitue formellement chez lui la personne est tâche difficile. Il nest donc pas étonnant de trouver des positions diverses chez ses commentateurs, Capréolus pour qui le constitutif est lesse, Cajétan pour qui il sagit de la subsistentia, enfin Johannes Baptist Lotz pour qui la conscience constitue la personne.

254

Michel Boyancé, « Le personnalisme contemporain et la question du bien commun »

Face à la montée de lindividualisme puis du totalitarisme, les philosophes personnalistes ont souhaité parler de primauté de la personne plutôt que de primauté du bien commun. Lintention était de rappeler la nature spirituelle de la personne, son éminente dignité, sa destinée irréductible à lunivers matériel et au politique. Mais peut-on réduire le bien commun à une finalité secondaire, à lheure où il revient dans la réflexion comme une solution à la domination de lintérêt général ?

Jean-Marc Joubert, « Marxisme et théorie de la personnalité »

Le marxisme nest pas tenu pour une « conception scientifique » du monde laissant beaucoup de place à lindividu. Marx écrivait : « Lessence humaine nest pas une abstraction inhérente à lindividu pris à part ». Mais aussi : « Les individus sont toujours partis deux-mêmes [] dans le cadre de leurs rapports historiques donnés ». Larticle présente la pensée de Lucien Sève qui a su investiguer à la fois les « formes historiques de la personnalité » et lautonomie réelle des individus.

Marion Delavaud-Souchet, « Le dit et le dire. La personne et son acte de langage »

La personne est présente, en creux et en charme, séductrice, dans la pragmatique du dire. La grammaire permet de traquer ces indices de séduction, dans lacte même du langage.

Laure Meesemaecker, « Lénonciation arborescente, le nouvel art poétique et la grammaire métaphysique de la personne chez lorientaliste Louis Massignon »

Lautofiction mystique et romanesque de Louis Massignon est un modèle visionnaire et inconscient du biographique sans la biographie, qui le rapproche aussi bien des Goncourt que de Roland Barthes. Ce quelle a dunique est emprunté à la fois aux écrivains de la Bible (Blaise Pascal et Léon Bloy) et à sa lecture amoureuse des mystiques arabes, composant une grammaire métaphysique de la Personne qui est, selon ses propres mots, « cohérente et coalescente ».

255

Alain Le Gallo, « Soupçons sur le personnage littéraire. Le cas Sarraute »

Dans LÈre du soupçon, en 1956, Sarraute a vigoureusement récusé la pertinence dune incarnation romanesque de la personne, et contesté quelle puisse justifier une intrigue en forme détude de la personnalité. Mais dans sa pratique narrative elle a pour le moins pris des libertés avec ses principes. Ce « soupçon » que dans ses romans comme dans son œuvre critique Sarraute fait ainsi peser sur le personnage va-t-il, peut-il aller plus loin que la recherche dune originalité formelle ?

Éric Pomès, « Actions et droits humanitaires »

La distinction personne/persona renouvelle le débat entre États appelant à un ordre international humanitaire et la majorité des autres, pour laquelle cette évolution constitue une nouvelle forme de colonialisme. En effet, lavènement des droits de lhomme, parachevant lintroduction de la « personne » en droit des gens et justifiant sa protection au travers des actions humanitaires, implique un retour de la persona qui confirme le cheminement du droit international vers plus dhumanité.

François Saint-Bonnet, « Fichiers, données numériques, big data. Labsorption de lindividu par la personne »

La modernité postule un individu libre des contraintes non indispensables à sa sécurité : un être singulier, non une personne. Pourtant, lutilisation généralisée du « fichage » par les États et les entreprises multinationales conduit à renverser ce paradigme. Le « fiché » est une personne, non un individu, lappréhension sociale de son être précédant et supplantant lappréciation de son impénétrable singularité. La post-modernité se montre ainsi moins hyper-individualiste quil ny paraît.

Emmanuel Brochier, « Les robots pourraient-ils devenir des personnes responsables ? »

Peut-on étendre le terme de « personne » à des artefacts ? Puisquil a pu semployer pour Dieu et pour lhomme, dont les intelligences sont sans commune mesure, pourquoi le support dune intelligence artificielle responsable dactions non programmées par lhomme ne serait-il pas lui aussi désigné comme une personne ? Une telle hypothèse engage cependant des positions transhumanistes, postule un matérialisme qui rend inconsistant le terme de « personne », et relève de labus de langage.