Résumés
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : La Perception, entre cognition et esthétique
- Pages : 263 à 266
- Collection : Rencontres, n° 156
- Série : Études de philosophie, n° 3
- Thème CLIL : 3916 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Philosophie -- Histoire de la philosophie
- EAN : 9782812461156
- ISBN : 978-2-8124-6115-6
- ISSN : 2261-1851
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-8124-6115-6.p.0263
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 25/02/2016
- Langue : Français
résumés
Raluca Mocan, « Expérience perceptive et monde de la fiction artistique. Notes sur la genèse du concept husserlien d’expérience et sur ses modifications »
Cet article interroge dans une perspective phénoménologique la relation qu’il peut y avoir entre les mondes fictifs créés par la scène théâtrale et le monde de l’expérience perceptive. L’élaboration progressive de l’expérience de phantasia chez Husserl permet de rendre compte de la puissance de monde qu’a la fiction, tout en étant vaine. Loin d’être le parent pauvre du réel, la fiction élargit ce dernier, rendant possible le surgissement du beau dans l’expérience.
Bogdan Rusu, « Symbolisme et perception chez Whitehead. Le sens et la possibilité de son “réalisme de profondeur” »
Cette étude montre qu’A. N. Whitehead répond au réalisme de Cambridge par une théorie du symbolisme. Appliquée à la perception, elle signifie que l’immédiateté de présentation et l’efficacité causale sont deux donations entretenant un rapport symbolique, dont la structure commune correspond à celle des sense-data. Une part essentielle de la démonstration de Whitehead consiste à prouver que nous percevons l’efficacité causale des choses, et que ce mode de perception est le plus fondamental.
Karl Sarafidis, « Le monde de la perception »
Cette contribution met l’accent sur les dimensions affective, pragmatique et holiste de l’expérience perceptive. La phénoménologie de la perception esquissée, rompant avec le primat de la représentation, se présente comme un retour au monde de la perception (Heidegger), sur lequel se greffe ensuite le monde des idéalités scientifiques. La « perception élargie » (Bergson) exprime ce rapport intuitif à l’horizon de toute donation, rapport d’un acteur aux prises avec un monde prédonné.
Lorenzo Bonoli, « L’expérience esthétique entre perception et cognition. Une réponse imaginative à une différence vécue »
Cet article généralise le modèle de l’herméneutique littéraire à toute expérience esthétique : percevoir, comme comprendre, engageant l’acquisition de contenus et l’élaboration du sens, médiatise un contenu donné à travers des formes symboliques qui conditionnent des attentes. La théorie de l’effet esthétique (Iser) permet de définir l’expérience esthétique comme le moment où l’œuvre contraint à une réorientation de notre façon de voir par la production de nouvelles formes symboliques.
Gilles Lévêque, « La spécificité de la relation esthétique »
Ce travail défend l’irréductibilité de l’expérience esthétique à une forme d’attention pragmatique aux choses ou à une relation cognitive au réel (Heidegger). Par opposition aux activités de connaissance pratique et théorique, la relation esthétique est pure contemplation, plaisir lié à la simple présence de la chose et non pas à la chose présente. C’est un rapport à un irréel qui se donne à voir sur la base des qualités perçues et détachées de leur contexte pratique.
Sandrine Darsel, « Regarder une photographie »
Cette contribution se demande ce que nous percevons lorsque nous regardons une photographie. La mécanicité supposée du processus photographique fournit le point de départ d’une remise en question de la présomption de réalisme : loin d’être un indice du réel, la photographie a un rapport d’œuvre par rapport à une source. C’est une image que l’on perçoit. La perception photographique est donc une perception aspectuelle, perception-connaissance élaborée, affinée et éduquée.
Gabriele Sofia, « L’expérience perceptive du spectateur. Une hypothèse croisée entre théâtre, neurosciences et phénoménologie »
Cet article part du postulat de l’anthropologie théâtrale : l’acteur doit surprendre le spectateur en créant une multiplicité d’actions possibles dérogeant aux règles quotidiennes. Cette hypothèse est mise en relation avec la neurobiologie du système miroir : la simple vue d’une action provoque chez l’observateur une activation motrice immédiatement comprise. Acteur et
observateur ne partagent donc pas des émotions mais un espace d’action, fondé sur un processus de constitution conjointe du monde.
Pauline Nadrigny, « L’objet sonore comme Gestalt. La théorie de la forme appliquée à l’écoute »
Cette étude analyse la portée et les limites d’application de la Gestalttheorie à la perception des objets sonores, et se pose la question de l’élément esthétique dans la réception musicale. Le chapitre suit l’évolution de Pierre Schaeffer entre le « retour au concret » des années quarante et la perspective d’un nouveau solfège des objets sonores vers la fin des années soixante, et tente d’expliquer la nécessité finale de réintroduire des paramètres d’identification et d’historicité musicale.
Davide Vago, « La Recherche de Marcel Proust. De la perception des couleurs au style »
Cette contribution s’intéresse à la perception et au rendu stylistique des couleurs dans la Recherche du temps perdu de Marcel Proust. La conception d’une couleur non plus vue mais pensée, participant à la vision du monde proposée dans une œuvre d’art, soulève des questions sur la nature de la perception, en même temps que sur les ressorts d’une esthétique littéraire. Au sens où il se traduit dans l’écriture, le chromatisme pourrait être vu comme un « comparant du travail stylistique de l’écrivain ».
Sandrine Morsillo, « Expériences d’expositions. Perturbation des perceptions et confusion des sens »
Cet article montre comment les dispositifs artistiques éclairent notre expérience sensible et intelligible du monde. Incorporant le travail perceptif au sein même de l’œuvre, les dispositifs immersifs transforment le spectateur en « déclencheur » de l’œuvre (A. V. Janssens, J. Turrell), en « personnage de fiction » (P. Sorin) ou en « co-auteur » (B. Gadenne). Le dispositif rappelle ainsi que la perception du monde n’est pas possible sans un corps en mouvement et en action.
Bruno Trentini, « L’expérience esthétique. La conscience sensible des perceptions prises entre l’acte et la connaissance »
Cette étude convoque la voie enactive et la psychologie de la perception pour avancer l’hypothèse suivante : l’expérience esthétique surgit lorsque le lien naturel entre la perception et l’action se trouve modifié. La perception et la cognition sont dans une relation complexe d’influence réciproque basée sur des révisions perceptives, comme on en voit dans les tableaux de Michel Granger, révisions par lesquelles le spectateur devient conscient de son propre processus perceptif.
Bérengère Voisin, « L’Homme sans qualités de Robert Musil et ses effets de lecture. Expérience perceptive et expérience de pensée »
Cette contribution interroge ce qui dans L’Homme sans qualités de Robert Musil va à l’encontre d’un pacte de lecture traditionnel. Le roman explore le sens du possible au moyen d’une expérience de perception et de pensée d’une simplicité et d’une efficacité déroutantes : le lecteur fait l’expérience d’une pensée visuelle et concrète lorsqu’on lui donne à réfléchir l’abstrait et, réciproquement, fait l’expérience d’une vision abstraite lorsqu’on lui donne à percevoir le concret.
Pierre-Louis Patoine, « Lire de tout son corps. Une application du modèle neuroesthétique de la lecture empathique »
Ce travail défend l’idée que la littérature se prolonge en sensations tactiles, musculaires ou viscérales grâce à une lecture empathique. Il plaide pour ce mode de lecture comme expérience globale sollicitant le corps sensible, contre l’herméneutique de la raison. L’exemple de la réception des body genres littéraires (Guide de Dennis Cooper, A Million Little Pieces de James Frey) éclaire la nature de la lecture empathique, qui repose sur un mécanisme de simulation automatique.