Aller au contenu

Classiques Garnier

Introduction [de la première partie]

  • Type de publication : Chapitre d’ouvrage
  • Ouvrage : La Naissance du roman policier français. Du Second Empire à la Première Guerre mondiale
  • Pages : 23 à 24
  • Collection : Classiques Jaunes, n° 707
  • Série : Essais, n° 15
  • Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN : 9782406099659
  • ISBN : 978-2-406-09965-9
  • ISSN : 2417-6400
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-09965-9.p.0023
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 05/05/2020
  • Langue : Français
23

Introduction

Le roman policier propose une forme de récit nouvelle et particulièrement structurée. En France, il connaît une naissance longue et tourmentée. Il émerge au fil d’un demi-siècle d’expérimentations et de tâtonnements, et peine à se libérer des contraintes d’écriture et de publication du roman-feuilleton. L’invention, vers 1840, d’une forme de récit inédite par le poète américain Edgar Poe et l’intérêt grandissant pour le crime et la marche de l’enquête, à une époque où les méthodes policières connaissent une évolution déterminante, ouvrent la voie au roman d’investigation. La rencontre de ces thèmes littéraires et de ces faits de société nouveaux inspire les romanciers qui mettent au point un modèle original de roman, fondé non plus sur le récit du crime, mais sur sa reconstruction progressive à partir des données du crime accompli.

Aux origines du genre nouveau, le roman-feuilleton criminel et les romans noirs de la première moitié du xixe siècle avaient mis à la mode le thème criminel et la peinture des bas-fonds. Les romanciers, en veine de mystères, sondent les dessous de la grande ville et explorent les arcanes d’associations criminelles et de sociétés secrètes. Les grandes figures de héros du mal tout-puissants et de surhommes justiciers inventés par les romanciers de l’époque romantique, inscrits dans la lignée des bandits populaires glorifiés par les volumes de la Bibliothèque bleue et les « canards », les feuilles volantes relatant les faits divers, relayent la geste ancienne du brigandage et de la défense de l’ordre. La naissance du journal populaire à grand tirage, à une époque où la presse se voit fortement muselée, met au premier plan des matières autrefois secondaires et assure un succès éclatant au roman-feuilleton et au fait divers. Le développement du petit reportage, 24qui s’attache à couvrir les affaires les plus retentissantes, alimente le goût pour l’enquête et la résolution de mystères. L’enquêteur, le policier, jusqu’alors obscurs héros d’une basse œuvre policière, passent sur le devant de la scène et gagnent en prestige. La figure émergente du reporter, portée au rang de héros, concurrence bientôt les professionnels de l’enquête et tend à occuper la première place.