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Classiques Garnier

Introduction à la troisième partie

  • Type de publication : Chapitre d’ouvrage
  • Ouvrage : La Modernisation de l’État. Une promesse trahie ?
  • Pages : 115 à 116
  • Collection : Bibliothèque de l'économiste, n° 25
  • Thème CLIL : 3340 -- SCIENCES ÉCONOMIQUES -- Histoire économique
  • EAN : 9782406092650
  • ISBN : 978-2-406-09265-0
  • ISSN : 2261-0979
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-09265-0.p.0115
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 16/05/2019
  • Langue : Français
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La finance dentreprise offre un binôme sur lequel la recherche contemporaine sest forgée et dont la portée est très largement transposable au secteur public : celui du rendement et du risque, ce dernier étant en lespèce compris comme la variation possible du rendement attendu et commodément assimilé au concept statistique de variance de ce résultat. En effet tout investisseur potentiel sait que la recherche dun résultat certain, cest-à-dire non entaché de risque, saccompagne normalement de lacceptation par avance dun rendement faible. Lachat de Bons du trésor ou obligations assimilables du Trésor allemand ou français traduit de la part de lacheteur un arbitrage au profit de la sûreté du placement et au détriment de lespérance dun fort rendement. Inversement les placements les plus aléatoires ne sont acceptés quavec une espérance mathématiquement définie de rendement important, espérance qui implique par ailleurs une probabilité forte dêtre déçue. Pour sa part, dans la composition de son portefeuille dactivités et de ses choix de croissance, toute entreprise a de manière générale un arbitrage à opérer entre le niveau de rendement quelle ambitionne et le niveau de risque qui lui paraît acceptable.

La tension entre la recherche de la performance et lévitement du risque concerne lÉtat comme tout autre acteur. Il fait face à des risques de même nature que les entreprises, mais aussi à des risques dun autre type tels que par exemple ceux liés à des troubles à lordre public ou à des comportements de désobéissance civique. Un des risques fondamentaux ressentis par les dirigeants politiques est évidemment la perte dautorité, de légitimité voire de pouvoir consécutive à un échec électoral.

LÉtat doit donc gérer à la fois sa performance et lévitement du risque. Il doit moderniser ses façons de faire dans lune comme lautre de ces gestions. Cependant ces modernisations nont pas le même statut médiatique. La modernisation des outils de la performance répond en principe aux canons dune société progressiste. La rénovation de lévitement du risque ne bénéficie pas de cette aura. Si celle-là est annoncée à grand renfort de cuivres et trompettes dans les opérations transversales de lÉtat en particulier, celle-ci est peu claironnée et nest jamais intégrée dans ces grandes opérations. Si les initiés la perçoivent bien, le grand public lignore.

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La question qui se pose pourtant est celle de limportance relative de lune et de lautre dans les changements non pas annoncés mais réels de la gestion de lÉtat. Cest cette importance relative que la présente partie entend éclaircir.

Le lecteur non spécialiste pourrait être décontenancé par lanalyse menée dans les deux chapitres qui suivent, notamment par la technicité du langage gestionnaire. On peut en résumer les apports à deux constats majeurs.

Le premier est que la recherche dune meilleure performance par la modernisation reste en France modeste : en termes politiquement incorrects, ses résultats sont fort limités.

Le second est que la gestion de lévitement du risque donne une large part au contrôle interne, qui exprime la défiance traditionnelle du milieu bureaucratique.

Sous ces deux aspects, cest à lépreuve de leur mise en œuvre et de leur mode dappropriation au fil des années que la plus-value des apports novateurs de la modernisation publique est anesthésiée, rendant ces politiques compatibles avec les postures conservatrices.

Une lecture attentive de ces deux chapitres révèle une première série de raisons qui ne facilitent pas la marche vers la recherche de la performance et vers un traitement du risque qui ne soit pas obnubilé par la défiance. Elles seront reprises en détail plus avant dans les quatrième et sixième parties du livre.