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Classiques Garnier

Éditorial

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : La Lettre clandestine
    2014, n° 22
    . Le baron d’Holbach et la littérature clandestine
  • Auteurs : Moreau (Pierre-François), Seguin (Maria Susana)
  • Pages : 11 à 12
  • Revue : La Lettre clandestine
  • Thème CLIL : 3129 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Philosophie -- Philosophie moderne
  • EAN : 9782812429439
  • ISBN : 978-2-8124-2943-9
  • ISSN : 2271-720X
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-8124-2943-9.p.0011
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 31/07/2014
  • Périodicité : Annuelle
  • Langue : Français
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Éditorial

La Lettre clandestine en est maintenant à son vingt-deuxième numéro. Autant dire qu’il s’agit là d’une clandestinité qui est devenue très publique. L’objet de cette publication est de mieux en mieux connu par les spécialistes, comme l’illustre le dossier thématique de cette année, consacré à l’un des acteurs centraux de l’univers de la clandestinité philosophique, le baron d’Holbach, auteur, lecteur, promoteur et éditeur de textes prohibés durant la seconde moitié du xviiie siècle.

Avec ce numéro, nous poursuivons le travail que cette revue avait entrepris dès ses débuts et qu’elle a continué à travers les changements de direction, de format et d’éditeurs, le renforcement de sa rédaction et l’élargissement de son lectorat : faire connaître l’autre Âge classique, l’autre époque des Lumières, tous ces courants libertins, clandestins, hétérodoxes, que l’on avait trop longtemps négligés mais sans lesquels précisément ces époques ne seraient pas ce qu’elles sont. Car la pensée des « grands » philosophes, les ouvrages des écrivains reconnus et des théologiens orthodoxes sont incompréhensibles si l’on ne tient pas compte de leur dialogue – même indigné, même dissimulé, même nié – avec cette foule d’anonymes ou de méconnus qui ont créé parfois, transmis souvent, transformé presque toujours les arguments, les références et les représentations qui constituent la force de la vie intellectuelle.

Ce travail comprend plusieurs axes auxquels les précédents numéros de notre revue ont été consacrés : la découverte et l’analyse des manuscrits qui composent le corpus clandestin et qui invitent constamment à sa redéfinition, l’identification et l’étude des publications ; le repérage du flux des idées, la connaissance des réseaux intellectuels et sociaux qui servent de base à cette circulation, qui la croisent ou la nourrissent ; la prise en vue des différents moyens par lesquels s’exerce ce magistère souterrain et quelles relations de réception, d’usage et de critique croisés il entretient avec les magistères officiels ; l’identification des acteurs

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de cet univers souterrain, non seulement les hommes de l’ombre mais aussi le rôle que des écrivains majeurs de cette période ont pu jouer dans l’élaboration et la diffusion de la littérature clandestine ou l’influence que ces textes ont pu exercer sur les œuvres majeures de l’Âge classique et des Lumières ; la diffusion des travaux scientifiques qui lui sont consacrés un peu partout dans le monde. Cela implique une certaine conception de la République des lettres : ni totalement transparente, ni totalement fermée, avec des canaux de diffusion divers et des degrés de liberté variables selon les temps, les milieux et les formes d’écriture. Cela suppose aussi une conception dynamique de l’histoire littéraire et des idées, jamais totalement prisonnière des périodisations établies à postériori, et surtout une vision ouverte des disciplines en action.

Il importe donc, pour parvenir à saisir tous ces aspects, d’obtenir la collaboration d’historiens, de littéraires, de philosophes : si l’objet est par lui-même transdisciplinaire, l’étude doit l’être aussi ; et c’est ce à quoi nous nous sommes attachés dès le début de nos travaux, d’abord grâce au séminaire de recherche organisé par Olivier Bloch à l’université Paris I, puis à travers notre journée d’étude annuelle, soigneusement organisée par Geneviève Artigas-Menant et Antony McKenna, et qui a servi de point de départ aux nombreux dossiers thématiques qui ont nourri notre revue : les grands auteurs des Lumières, le protestantisme, l’érudition, les sciences, le statut de la clandestinité, les relations intellectuelles avec l’Angleterre, les techniques de composition de la littérature philosophique clandestine, pour ne retenir que quelques exemples significatifs.

La nouvelle direction de la revue n’aura pas d’autre orientation : avec toute l’équipe, avec le responsable de la rédaction, Alain Mothu, nous nous efforcerons de marcher encore dans les chemins ouverts par Olivier Bloch, Antony McKenna et Geneviève Artigas-Menant, qui sont d’ailleurs toujours présents à nos côtés et sur les conseils de qui nous comptons comme toujours.

Pierre-François Moreau

Maria Susanna Seguin