En dehors de cinq essais inédits : La philosophie testimoniale et l’historiographie du génocide, Considérations sur la théorie littéraire et anthropologique de l’étrangéisation, Étrangéisation morphologique et testimoniale, Étrangéisation conceptuelle et Parole étrangéisée du Sonderkommando Zalmen Gradowski, les écrits proposés dans ce volume ont été publiés dans la revue L’Intranquille. Les quatre derniers opèrent une reprise systématique de la théorie de l’étrangéisation de Frosa Pejoska1.

L’Intranquille est une revue fondée par Frosa Pejoska et moi-même. Nous l’avons dirigée ensemble à partir du numéro 1, en date de 1992. Ce mot intranquille est le produit de nos dialogues. En ce temps, aujourd’hui encore, fleurissaient des publicités, pour la poste, la banque, etc. sur la « confiance » et la « vie tranquille », donnant l’illusion que cette tranquillité de la servitude volontaire était la liberté. Ce fut là, pour l’esprit qui toujours nie, une source de critique créatrice. Nous n’excluons pas que ce mot ait surgi à la faveur d’une réminiscence inconsciente du titre en français de l’œuvre de Pessoa Livre de l’intranquillité. Si dette il y a, nous la devons à la traductrice Françoise Laye qui a réveillé ce néologisme du poète Michaux. Ce mot réveillé, intranquillité, aurait éveillé en nous cet autre mot : intranquille, un jour de 1991, à l’étroite terrasse du café La Grisette, située en face de la charmante statue éponyme près du Canal Saint-Martin, à l’angle du quai de Valmy et de la rue du Faubourg du temple, haut lieu de la Commune.

Intranquille est autre qu’intranquillité, dans la forme et dans le fond. Les pensées intranquilles développées dans la revue sont d’une autre nature qu’une intranquillité métaphysique. L’Intranquille a d’abord eu pour sous titre : « une libre contribution à la critique de la servitude » puis « une libre contribution à la critique de la servitude et de la désappartenance ».

2015