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Classiques Garnier

Avant-propos

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Avant-propos

Dans la plupart des langues le langage sert de matériau à la production de textes métriques. La métrique générale a pour but délaborer un système de notions et de principes qui puissent servir à décrire les traditions métriques à travers le monde. Ce système doit permettre de caractériser les points communs et les différences entre elles. Il doit aussi permettre, au sein dune même tradition, de comparer les époques, les genres et les poètes.

Par analogie avec la description des langues, appelons « grammaire métrique » la description des régularités qui sous-tendent lorganisation métrique dun morceau en vers. Ce livre est consacré à la grammaire métrique des passages en alexandrins dans le théâtre de Racine1.

Différentes approches sont concevables en métrique générale. Notre perspective est celle de la métrique générative. Pour une introduction à la métrique générative, nous ne saurions trop recommander la lecture des chapitres 2 à 5 de Fabb 19972. Depuis larticle de Halle et Keyser 1966 qui en est le point de départ, la métrique générative sest diversifiée en une famille de programmes de recherche dont Blumenfeld 2016 donne une bonne vue densemble.

En ce qui concerne la métrique française, les travaux de Cornulier et de Verluyten nous ont été une source constante dinspiration et il nest pas possible dexagérer limportance de notre dette à leur égard. Comme le nôtre, les travaux de ces deux auteurs se situent dans la perspective de la métrique générale. Cornulier a élaboré une méthode danalyse distributionnelle qui lui a permis de mettre au jour diverses régularités systématiques propres à lécriture métrique. Il a par ailleurs étendu 12lanalyse métrique au-delà du vers en interprétant la distribution des rimes comme sous-tendue par une organisation métrique hiérarchisée à plusieurs niveaux (vers, module de strophe, strophe). Verluyten opère dans le cadre de la métrique générative et dans ses travaux les rapports entre constituants grammaticaux et constituants métriques tiennent une place centrale.

Nous adressons nos vifs remerciements à Timothée Premat, Donca Steriade et à Benjamin Storme, qui ont lu et commenté des fragments de versions antérieures de ce livre, à Dominique Sportiche et à Alain Rouveret, qui ont répondu à plusieurs de nos questions sur la syntaxe du français, et enfin à Jean-Louis Aroui et aux participants au séminaire de métrique générale de l EA STIH de Sorbonne Université pour leurs commentaires au cours de deux séances consacrées à ce texte à l automne 2019. Mais toute erreur est notre entière responsabilité.

1 Les mètres autres que lalexandrin napparaissent que dans les passages lyriques et les stances de La Thébaïde, Esther et Athalie, la lettre (v. 1135 sq.) et les v. 1266 et 1268 de Bajazet, et enfin loracle de Calchas (v. 57 sq.) dans Iphigénie. Le nombre total dalexandrins est 18 507. Pour leur dénombrement pièce par pièce, voir la fin de lAnnexe II.

2 Voir aussi Fabb 2002. Pour une approche qui met en rapport division en vers et mémoire à court terme, voir Fabb 2015.