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Classiques Garnier

Résumés

  • Type de publication : Article de collectif
  • Collectif : L’Œuvre et ses miniatures. Les objets autoréflexifs dans la littérature européenne
  • Pages : 889 à 900
  • Collection : Rencontres, n° 307
  • Série : Littérature des xxe et xxie siècles, n° 29
  • Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN : 9782406063612
  • ISBN : 978-2-406-06361-2
  • ISSN : 2261-1851
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-06361-2.p.0889
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 29/06/2018
  • Langue : Français
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Résumés

Jan Herman, « La Table ronde, le Graal et le non-lieu de la fiction »

La Table, tout en étant un lieu réel dans la diégèse, est aussi, considérée au niveau plus abstrait de lautoréflexivité, un « non-lieu ». Cest de ce non-lieu quémane la fiction. La fiction nest pas seulement un discours sans référent, mais un discours qui provient dun lieu qui nen est pas un, dune source endogène, que le discours crée en lui-même, en y inscrivant un vide. Le Graal constitue un autre avatar de ce vide, où les premiers romans français pensent leur spécificité de textes de fiction.

Aziza Bourahla, « La branche dans Microcosme de Maurice Scève. Lhomme, le monde, le texte »

Larticle propose détudier le motif de la branche dans Microcosme de Maurice Scève et de montrer en quoi il est un objet autoréflexif qui met en jeu lœuvre et ses miniatures. Le parcours de lœuvre propose une progression qui part de la confusion entre lhomme et larbre vers le détachement et la mise à distance. Si cette dernière peut être perçue comme maîtrise du monde, elle met en jeu létirement qui se creuse entre la concentration du signifiant et la ramification polysémique du signifié.

Daniel Bergez, « Lobjet dans la scène amoureuse, ou le miroir double du désir et de lécriture »

Lécriture de la passion amoureuse mobilise nombre dobjets médiateurs (portraits, fenêtres, bijoux…) qui sinscrivent dans la « relation triangulaire » étudiée par René Girard dans ses analyses du désir mimétique. Ces objets réfléchissent aussi fréquemment lacte littéraire en une double spécularité, pulsionnelle et scripturale, dont on trouve des exemples chez Mlle de Scudéry, Guilleragues, Mme de La Fayette, Flaubert, Aragon. Cet effet de miroir ne fait jamais système mais enrichit la polysémie du texte.

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Sébastien Baudoin, « Lexpérience de la tombe chez Chateaubriand. Une chambre décho de lœuvre littéraire »

La tombe, dans les Mémoires doutre-tombe de Chateaubriand, est un objet singulier qui renvoie de manière spéculaire à lœuvre-monument qui lévoque. Elle se donne dabord à lire comme un texte-épitaphe mais figure surtout au centre dune mise en scène de la catabase sépulcrale, renvoyant à lentreprise du mémorialiste qui cherche à faire renaître un monde mort. Cest que la tombe nest autre que lœuvre elle-même, dont loutre-écriture cherche à sublimer lexpérience du temps.

Anne-Simone Dufief, « Le coffret de Sapho »

Le coffret joue différents rôles dans Sapho dA. Daudet. Cette boîte banale et prétentieuse sinscrit dans un système dobjets qui oppose authenticité provinciale et débauche parisienne. Reliquaire de lettres damour, elle joue un rôle dramatique dans une scène pivot : la boîte ouverte figure linconscient. Il est fait écho à lart de lécrivain : rempli de lettres, en vrac et sans ordre, il semble la mise en abyme dune écriture impressionniste qui fait la part belle à lépistolaire, à lemploi du fragment.

Mathieu Jung, « Voir le monde en petit. De quelques objets rousseliens »

Cette étude propose un aperçu de quelques objets autoréflexifs chez Raymond Roussel. Une épée miroitante, une étoile mise sous verre, une lentille enchâssée sur un porte-plume – autant dobjets par lesquels lœuvre et le monde réellement renversé de Roussel se donnent à voir.

Paule Plouvier, « Madame de ou les cœurs de diamant »

Parure précieuse qui passe de mains en mains et dont la présence semble destinée à faire miroiter les aléas de lamour, les « cœurs de diamant » que sont les boucles doreille de Madame de, chez Louise de Vilmorin, sont moins un objet soumis aux circonstances que la dynamique même du texte. Contenues dans le récit, elles se révèlent être ce qui produit le récit, la valeur diamant où se perd le cœur.

891

Geneviève Dubosclard, « “Une boîte à biscuits ou à berlingots” et la création du roman. À propos de lautoréflexivité dans LHerbe (1958) de Claude Simon »

Dans LHerbe, lobjet, « vieille boîte à biscuits ou à berlingots », savère capable de détenir un rôle de premier plan dans le récit et douvrir un champ dautoréflexivité, impliquant ce quest pour Simon, lexpérience de la création littéraire. Afin de rendre compte du passage dun niveau de lecture à un autre, sont étudiées les composantes dun récit gigogne et lélaboration de formes décriture où se discernent non seulement lancrage de la fiction mais aussi ce qui prélude à la pratique de lécriture.

Florence Lhote, « Objets autoréflexifs et activateurs mémoriels dans Des hommes de Laurent Mauvignier »

Cet article décrit la manière dont un objet, « une petite boîte bleu nuit », contribue dans le roman Des hommes de Laurent Mauvignier à la trajectoire du souvenir pensée à léchelle du récit. Cet objet, comme dautres dans lhistoire, est autoréflexif et sera qualifié d« activateur mémoriel » en tant quil fait sourdre le passé et lhistoire. Cet article étudie la mise en place de cette poétique des objets.

Dominique Meyer-Bolzinger, « Clôture et élan. Les valises de Modiano »

Chez Modiano, les bagages omniprésents constituent un accessoire premier révélateur du déracinement essentiel des personnages. Liés à lexil et à la fuite, ils protègent et transportent les objets précieux que lon ne veut pas abandonner, et qui définissent lidentité. Assimilée à une boîte à souvenirs déclenchant lécriture de la mémoire, la valise est ainsi à limage dune œuvre vouée au patient rassemblement de traces promises à la destruction.

Christine Ferlampin-Acher, « Artus de Bretagne, la couronne et le chapel de soucis »

La couronne de limage (lautomate) et le chapel de soucis dans Artus de Bretagne sont des « objets miniatures » résumant le sens des aventures du héros. La fée Proserpine et le clerc Estienne sont des doubles auctoriaux, la nigremance et les pouvoirs de la fée représentant deux aspects de lactivité poétique. Limage est dans cette perspective une fiction : elle aussi a une valeur métapoétique, tout comme la couronne, qui renvoie à la circularité du roman.

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François Rouget, « Lattraction et la transparence. Sur trois matières-objets de la poétique ronsardienne »

Laimant, lor et le verre structurent le processus décriture et limaginaire ronsardiens. Images miniaturisées et réflexives de lœuvre littéraire, ils sont choisis pour leurs qualités naturelles, de magnétisme, de brillance et de transparence. Mais surtout ils appartiennent tous à une histoire mythique dont Ronsard raconte les péripéties. Produits transformés, œuvres de lartisan, ils sassocient par analogie à lactivité du poète.

Sandrine Berrégard, « La circulation du sonnet dans lAmarillis de Du Ryer »

Dramatique, scénique et poétique : telles sont les trois fonctions majeures assignées à lobjet-poème dans lAmarillis de Du Ryer (1650). Dramatique dans la mesure où il participe à lélaboration de lintrigue en brouillant Amarillis et Philidor. Scénique dans la mesure où il fait entendre le discours (présumé) dun personnage absent, dont lexistence se réduit à sa parole. Poétique enfin dans la mesure où la forme spécifique du sonnet souligne la dimension proprement poétique du théâtre versifié.

Olivier Larizza, « Le portrait autoréflexif dans la littérature irlandaise. Melmoth lErrant de Charles Maturin et Le Portrait de Dorian Gray dOscar Wilde »

Cette étude, qui se rattache à la littérature comparée, révèle comment Charles Robert Maturin (1780-1824) préfigure Oscar Wilde dans lutilisation autoréflexive de lobjet-portrait romanesque. Celui-ci revêt, chez le père de Melmoth, une dimension pragmatique, performative et auctoriale, qui se retrouvera dans Dorian Gray, le chef-dœuvre de son petit-neveu. Leur portrait nous renseigne aussi sur les principes esthétiques à lœuvre chez les deux romanciers irlandais.

Pierre-Jean Dufief, « Lampes, sceaux et bibelots dans En 18.. des Goncourt »

Les Goncourt publient, en 1851, En 18.., un antiroman fantaisiste, décousu, qui pratique une timide mise en abîme avec lévocation du travail décriture. Les deux débutants sy mettent en scène, esquissent des silhouettes de personnages et dotent les objets dune valeur esthétique et métadiscursive. Les bibelots disent un goût déjà marqué de la micromanie, du morcellement, 893tandis que les formes sinueuses des objets, qui renvoient aux arabesques de la composition, expriment lattrait du rococo.

Pascale Auraix-Jonchière, « Ces bijoux qui “portent une histoire”. Objet et poétique dans lœuvre romanesque de Jules Barbey dAurevilly »

La présente étude examine les fonctions métadiscursives de ces objets intimes que sont les bijoux : bagues et médaillons qui circulent dans les fictions narratives de Barbey dAurevilly, tout au long de sa production. Chargés daffects, ils complètent le récit sur le mode de la suggestion et de lhypothèse et mettent en évidence les principes majeurs de lécriture.

Florence Fix, « En miniature et en totalité. La carte géographique dans lœuvre dOctave Mirbeau »

Octave Mirbeau, critique dart, romancier, dramaturge, conteur, prit part à nombre de polémiques et fit œuvre de tout. Il est alors tentant de relier les cartes géographiques de ces personnages avides de « tout » à la posture prise par lécrivain. Celui-ci toutefois ne cesse de dénoncer les travers de lécriture naturaliste et sa manie de la documentation. Il propose plutôt une carte que lon ne posséderait que pour en sortir, modèle dune écriture touche-à-tout mais non totalisante.

Sjef Houppermans, « Du Tez au Behuliphruen. La machine autoréflexive chez Roussel »

Toute lœuvre de Raymond Roussel se lit comme une imbrication de miroirs et de surfaces réfléchissantes. Dans Impressions dAfrique (1910), première application généralisée du fameux procédé roussellien, ce sont notamment deux machines, le métier à aubes et la machine à peindre, qui reflètent autant la formule esthétique que le corps désirant.

Denis Pernot, « Le Feu dHenri Barbusse, un roman-barda »

Proposant une lecture du chapitre xiv (« Le Barda ») du Feu dHenri Barbusse, larticle analyse les objets qui y sont nommés. Ceux-ci permettent de mieux comprendre comment lécrivain dramatise sa vision de la guerre, de mettre au jour les dimensions symboliques de lescouade quil a placée au centre de son récit et denvisager lensemble de son œuvre comme un 894roman-barda : de même quil montre ses personnages comme des chiffonniers, Henri Barbusse se donne à lui-même les traits dun chiffonnier de discours.

Yves-Michel Ergal, « “De petits lièvres en sucre et en chocolat” »

Dans quelques romans du début du xxe siècle, le héros et le livre finissent par se confondre avec lobjet devenu talismanique : le cigare « Maria Mancini », ou le phonographe, dans La Montagne magique de Thomas Mann, lobjet livre François le Champi dans Le Temps retrouvé de Proust, le savon de Bloom dans Ulysse de Joyce, la pierre à sucer dans Molloy de Beckett, ou encore le diamant dans Un barrage contre le Pacifique de Marguerite Duras.

Germain Tramier, « La poétique du filet de pêche dans La Beauté sur la terre de C. F. Ramuz »

Cet article traite de la fonction symbolique du filet de pêche dans le roman La Beauté sur la terre de Charles-Ferdinand Ramuz. Lobjet y acquiert un potentiel autoréflexif, permettant dincarner dans lœuvre les conceptions littéraires de Charles-Ferdinand Ramuz. Pleinement lié à lenvironnement rustique des personnages et de lauteur, il représente le métier décrivain dune manière concrète, comme étant lié à lartisanat. Il évoque, dans le même temps, le rapport problématique de lartiste à son art.

Jean-Michel Wittmann, « Le “culte coprophagique” des objets dans Le Feu follet, ou “la fin de la littérature” selon Drieu la Rochelle »

Pris isolément, les objets dAlain, dans Le Feu follet, sont des miroirs qui réfléchissent limage dun moi en train de se défaire. La collection dobjets, en revanche, constitue un microcosme. La valeur autoréflexive de ces objets est donc double : ils renvoient à la fois au feu follet (le personnage) et au Feu follet (le roman) et reflètent une éthique et une esthétique déterminées par le sentiment de la décadence, qui condamne la littérature à la négativité.

Jean-François Louette, « Quest-ce quun ziuthre ? (Sartre, “La Chambre”) »

Le personnage central de la nouvelle de Sartre intitulée « La Chambre », séquestré volontaire et à demi dément, prétend se défendre avec un ziuthre contre les statues volantes qui le menacent. Un ziuthre ? Au-delà de laspect 895biographique ou pathologique, sur un plan métatextuel, cet « assemblage de morceaux de carton » vaudrait comme image dune œuvre et dune écriture où lintertextualité joue un rôle décisif, voire comme figuration de la lecture.

Valentina Maini, « En écrivant Molloy, un bâton dans les roues »

Dans son roman en français Molloy, Samuel Beckett fait jouer ses personnages avec plusieurs objets : parmi eux, la bicyclette est lun des plus mystérieux. Elle semble cacher une signification secrète en symbolisant, en même temps, lœuvre dans laquelle elle apparaît et le procédé décriture de celle-ci. Cet essai cherche à démontrer la valeur autoréflexive de ce véhicule, en mettant en rapport la description quen fait lauteur avec la structure et la particularité du roman.

Philippe Legros, « Vitraux et tapisseries dans LEmploi du temps de Michel Butor »

Le roman de Michel Butor, LEmploi du temps (1956), est constitué du journal de Jacques Revel, un jeune français qui séjourne un an dans la ville fictive de Bleston, en Angleterre. Lauteur met en miroir lœuvre qui sécrit avec deux objets artistiques emblématiques de la ville, un vitrail du xvie siècle et des tapisseries du xviiie siècle. Par ce biais, Michel Butor traite du livre comme bel objet, de lesthétique du roman, de la réception et de la longévité de lœuvre littéraire.

Natacha Lafond, « Lobjet dans lœuvre de Salah Stétié et la muse lyrique »

Les objets sont dautant plus symboliques dans lœuvre du poète libanais francophone Salah Stétié, né en 1929, quils sont rares. Ils renvoient tous à lœuvre poétique elle-même et permettent de réfléchir à son inscription dans une riche tradition littéraire marquée par le lyrisme. Lexemple des quatre objets les plus représentatifs éclaire ainsi différentes facettes de la poétique stétienne.

Stéphane Chaudier, « Métatextuel ma non troppo. Lobjet dans les romans de Tanguy Viel »

Tanguy Viel nest pas un romancier né de la dernière pluie ; la naïveté nest pas son fort. Ses romans (qui sont aussi à leur manière des « fictions critiques ») 896comptent nombre dobjets métatextuels, qui constituent par leur présence même un commentaire oblique ou explicite sur le texte qui les contient. Létude présente une typologie des objets métatextuels chers à Tanguy Viel et propose, pour rendre compte de leur présence, de les relier à la question du vol, centrale dans les fictions de cet auteur.

Sofia Lodén et Vanessa Obry, « Les objets miroirs du récit dans la tradition européenne des aventures de Floire et de Blanchefleur »

Létude porte sur les variations de la représentation de deux objets dans la tradition médiévale européenne de lhistoire de Floire et de Blanchefleur : une coupe dor représentant des motifs troyens et un cénotaphe surmonté de deux automates. Le traitement de ces deux objets autoréflexifs témoigne dun acte de réception de la matière narrative et reflète les choix poétiques et idéologiques propres à chaque version analysée (textes français, allemands, scandinaves, anglais et italiens).

Élisabeth Schneikert, « Montaigne et le manuscrit chinois dans le Journal de voyage »

Lors de son séjour à Rome, Montaigne visite la bibliothèque du Vatican, où il voit un manuscrit chinois. La page énigmatique à laquelle est confronté le voyageur entre en résonance avec la recherche et la matière des Essais. Son papier « pellucide » et ses « caractères sauvages » installent une dialectique entre la transparence et limpossible déchiffrement. Le manuscrit chinois permet ainsi de sinterroger sur la tension entre opacité et clairvoyance, fréquente dans les Essais.

Daniel Brewer, « La chose qui circule. Récits de choses et réflexions sur lobjet littéraire »

Sous-genre romanesque anglais, le récit de choses se caractérise par une histoire narrée par un objet tiré du quotidien. Forme littéraire frivole, le récit de choses raconte un échange qui humanise lobjet et déshumanise lhumain. Cette forme sera lue comme symptôme du nouveau statut de lobjet dans une société marchande, mais aussi comme une réflexion sur la littérature elle-même, objet-produit qui est pris dans ce système déchange, et acte décriture-lecture qui lui résiste et le dépasse.

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Corinne Bayle-Goureau, « Le coffret dAurélia, boîte magique du récit nervalien »

Le coffret qui apparaît dans la seconde partie dAurélia accumule des souvenirs amoureux, orientaux et funèbres, dans la chambre du narrateur soigné pour sa folie. Son contenu hétéroclite emblématise le récit hétérogène qui réclame du lecteur une empathie pour entrouvrir sa propre boîte à reliques, fétiches ou talismans. Mais le coffret aux papiers déchirés, dévasté par laliéné, ne programme-t-il pas un récit refermé sur ses vides, ses manques, qui serait celui de limpossible vérité ?

Marta Caraion, « Autoréflexivité des objets dans la fiction du xixe siècle. Littérature et matérialité ».

Lautoréférentialité des objets dans la fiction du xixe siècle peut apparaître comme une stratégie de canalisation de la matérialité et dabsorption par la littérature dune réalité ressentie comme menaçante. Larticle souligne la fonction idéologique de lobjet autoréférentiel plaidant pour la suprématie de la littérature sur la matière, et interroge, en miroir de cette mission sérieuse, son envers ironique et dérisoire.

Frédérique Toudoire-Surlapierre, « Le téléphone proustien, échophone ou égophone ? ».

Pressentant que le téléphone constitue une invention décisive de son temps, Proust intègre cet objet de la modernité dans la Recherche. Instrument de la mémoire et du passé, cet objet permet moins dinstaurer un dialogue quil ne fonctionne comme un objet autoréflexif. Régressif et affectif, il reconduit le narrateur à son moi antérieur, rétablissant le continuum quil recherchait dans son existence.

Thomas Carrier-Lafleur, « La surenchère réflexive des romans de Blaise Cendrars. Démesure moderne et dédoublements romanesques dans Moravagine »

Explorant la multiplication de la dimension réflexive du projet romanesque de Blaise Cendrars via la propagation des machines et appareils qui lui servent dautant de supports, mais, surtout, de catalyseurs, le présent article sintéressera au désir des médias, à celui des objets de la littérature moderne 898et, en particulier, au fait que ceux-ci sont constitutifs dune certaine image de la modernité (celle, battante et conquérante, propre à la fin du xixe et à la première moitié du xxe siècle).

Thomas Steinmetz, « Résistances de lobjet, altération de lœuvre. La photographie dans Nadja »

Lobjet autoréflexif tend en principe à renforcer la cohérence de la fiction littéraire dans laquelle il sinscrit, par la façon dont il la représente et en éclaire certains principes. Dans Nadja, la photographie insérée, en même temps quelle figure le projet surréaliste – et parce quelle le figure – contredirait plutôt cette intelligence secrète de lœuvre avec sa miniature, en rejetant ce que la recherche de littérarité suppose dartifice.

Augustin Voegele, « Jules Romains et son cerceau. Limpuissante légèreté de la littérature »

Le cerceau de Louis Bastide, qui parcourt les rues du Paris des Hommes de bonne volonté, est capable de réunir autour de lui les âmes éparses de la cité : en cela, il est pareil à la conscience narratrice et créatrice qui informe limmense roman unanimiste de Jules Romains. Mais la circularité sans matière, ou presque, de ce jouet denfant dénonce linanité de la fiction, et le pessimisme de lauteur, qui constate limpuissance de la littérature à sauver le monde de la ruine.

Yona Hanhart-Marmor, « Lobjet et lécriture dans Le Planétarium »

Cet article analyse le statut de lobjet dans Le Planétarium de Nathalie Sarraute. Objet qui permet une double mise en abyme de lœuvre, représentant lexacte antithèse de lécriture sarrautienne, ou au contraire se faisant image fidèle de cette dernière. Autour de lui se nouent de la sorte les interrogations fondamentales du roman, portant sur lessence du travail de lécrivain ainsi que sur le lien toujours problématique entre lœuvre littéraire et le réel.

Llewellyn Brown, « Topologie de lobjet autoréflexif chez Samuel Beckett. Le sac de Comment cest, “une voix une vie” »

À peine différencié de lomniprésente boue, le sac de Comment cest reflète les enjeux esthétiques de ce livre. En tant que contenant, il sinscrit dans le 899registre imaginaire : les quelques objets quil réunit composent un monde marqué par laccumulation culturelle. Toutefois, cest le sujet lui-même qui, réduit au mutisme, risque lenfermement dans le sac. La voix – qui fait la substance de ce livre – lui offre le moyen de rejeter limaginaire au profit dune pratique vivifiante du langage.

Marc Rettel, « Les bagages de LHomme aux valises dEugène Ionesco. Mise en scène dune sémiotique autoréflexive »

Les bagages du Premier Homme sont le dispositif spéculaire central de LHomme aux valises. Symboles de linconscient, elles sont lorigine de toutes les situations dramatiques qui se présentent au personnage et conditionnent une dramaturgie en miettes. En même temps, elles sont au cœur de la quête identitaire du protagoniste. La troisième valise, perdue, contenant le manuscrit du personnage, évoque lœuvre en tant quœuvre et inscrit la mythopoeïa personnelle dans une mythologie universelle.

Charline Pluvinet, « Le chapeau de lécrivain. Enrique Vila-Matas, le voyageur le plus lent »

Cet article explore limage de lhomme au chapeau, voyageur mystérieux, qui apparaît sur nombre de couvertures des livres dEnrique Vila-Matas : le chapeau se révèle métonymie de lécrivain, définissant un mode dêtre littéraire qui serait marqué, pour une part, par la nostalgie (le souvenir notamment de Robert Walser) tout en dessinant une relation présente au monde et à la littérature fondée sur la discrétion, limitation créatrice, laffirmation paradoxale de soi par limage dune absence.

Éric Wessler, « Le tableau imaginaire des Onze de Pierre Michon. Un objet aux limites de la fiction romanesque »

Dans Les Onze, Pierre Michon invente un tableau pour matérialiser une vérité sur la Révolution française que les historiens ne peuvent formuler correctement ; cet objet défie donc le langage. Pourtant, la toile ne se suffit pas à elle-même : il faut la commenter pour en trouver le sens, et ce commentaire doit impérativement prendre la forme dun récit romanesque qui séloigne de lobjet. Celui-ci, source du roman et appui de lécrivain, révèle le pourquoi et le comment de la littérature selon Pierre Michon.

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Luc Fraisse, « Ouverture. Les objets autoréflexifs éclairés par la critique de la conscience »

Une conscience souvre au monde, des objets apparaissent devant ses yeux, rencontrent sa sensibilité, se forment dans son imagination, se conservent dans son souvenir. Pourquoi et comment certains de ces objets symbolisent-ils le travail de lécrivain ou la forme de son œuvre ? Georges Poulet, Gaston Bachelard et Jean-Pierre Richard, a priori peu intéressés par lautoréflexivité, finissent par en déchiffrer admirablement les objets.