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Classiques Garnier

Principes d'édition et toilette du texte

  • Type de publication : Chapitre d’ouvrage
  • Ouvrage : L’Estoire de Brutus
  • Pages : 233 à 235
  • Collection : Textes littéraires du Moyen Âge, n° 33
  • Série : Translations romanes, n° 1
  • Thème CLIL : 3438 -- LITTÉRATURE GÉNÉRALE -- Oeuvres classiques -- Moyen Age
  • EAN : 9782812432477
  • ISBN : 978-2-8124-3247-7
  • ISSN : 2261-0804
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-8124-3247-7.p.0233
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 02/03/2015
  • Langue : Français
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PRINCIPES D'ÉDITION
ET TOILETTE DU TEXTE



Parce qu'elle donne à lire une traduction conservée dans un manuscrit unique, notre édition est assez naturellement bédiériste dans son esprit nous avons corrigé le texte à chaque fois qu'il ne faisait pas sens, sans chercher, notamment en mettant à contribution l'Historia regum Britannie latine, à en restituer un état antérieur à celui qui nous est conservé dans le manuscrit Paris, BnF, fr. 17177. Quoique cette copie soit fiable et comporte peu d'erreurs, elle n'est pas dénuée de leçons fautives qu'il convenait d'amender. Toutes nos corrections sont accompagnées d'une note de bas de page  : en cas d'erreurs bénignes (oubli d'un tilde, omission d'une ou plusieurs lettres dans un mot qui reste aisé à deviner...), nous nous sommes contentée de citer la leçon rejetée. Lorsqu'il était moins évident de déterminer quelle était la correction à apporter, nous avons fait état de la source d'où nous avons tiré l'amendement proposé. Il s'agit le plus souvent de L'Estoire de Brutus elle-même lorsque la cohérence du texte est en jeu. Certaines corrections ont été puisées à l'Historia regum Britannie en latin, le cas échéant.
Si l'on en croit l'expertise récente des historiens de l'art, le manuscrit BnF, fr. 17177 aurait été copié et décoré dans les années 1280-13001. Cette fourchette chronologique assez étroite, que l'étude de la langue du texte n'a ni démentie, ni permis de préciser, fournit un terminus ad quem pour la composition de L'Estoire de Brutus. Même à l'échelle réduite de ces deux décennies, la prononciation de certains phonèmes est délicate à établir. Tel est notamment le cas des hiatus dont le premier élément est un [e] central. En effet la réduction de tels hiatus a été progressiveZ
1 Doris Oltrogge, Die Illu.rtration.rzyklen..., p. 22.
2 H En syllabe initiale et intérieure, devant voyelles accentuées ou inaccenruées, [...] la chute de e central a été générale au cours de la période qui va du xn~` au milieu du xv` [siècle]  » (Fouché, t. II, p. 516; nous soulignons).
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et les graphies enregistrent le phénomène avec suffisamment de retard pour qu'il ne faille guère espérer en trouver trace dans un texte aussi précoce que L'E.rtoire, de surcroît rédigé en proses. Puisque l'édition du texte nous contraignait à prendre parti, nous avons considéré que la langue du copiste conservait les hiatus. En conséquence, nous avons employé le tréma, notamment pour les passés simples, les imparfaits du subjonctif ou les participes passés qui, au xlie siècle, présentaient des hiatus de manière assurée.
Par ailleurs, la copie se caractérise avant tout par l'hétérogénéité de ses graphies. Notre édition respecte les usages fluctuants du copiste, tant pour ce qui est des graphies que de la coupure des mots (on trouve par exemple la préposition atot tantôt en un seul mot, atot ou atout, tantôt en deux, a tout). L'écriture du xllie siècle distingue clairement les u des n et des m ; en revanche les u et les v y sont identiques. C'est donc en tenant compte de la forme averoieZ que le radical du futur du verbe avoir a été édité avr-. De même, pour le futur du verbe savoir, le radical navr- a été retenu en vertu de la forme saveront3. Lattent aigu est employé uniquement pour les -é finaux toniques ; il l'est à la finale absolue, et aussi dans le cas des terminaisons toniques -és et -éz. Dans ce dernier cas, l'emploi de l'accent aigu est nécessaire du fait de la présence de plusieurs finales -ez atones4. Dans le cas des monosyllabes, l'accent aigu sur -é à la finale sert à différencier les homonymes  :l'adverbe nes n'est pas accentué contrairement au pluriel du substantif nef (nés).
En matière de toilette du texte, nous avons suivi les recommandations exprimées dans les Conseils de l'École nationale des chartes5. De surcroît, notre transcription respecte les subdivisions internes de L'Estoire de Brutus telle qu'elle s'offre à lire dans le manuscrit BnF, fr. 17177  : les alinéas qui subdivisent notre édition interviennent au niveau des pieds de mouche qui ponctuent cette copie unique. Au sein de ces paragraphes, qui sont parfois massifs, nous avons intercalé des subdivisions internes
1 « D'une façon ordinaire, l'e a cependant continué à s'écrire jusqu'à la fin du xvte siècle et même au-delà » (ibid.).
2 § 161.8.
3 § 95.38.
4 Voir l'étude de la langue, « Graphies  », remarque n° 39, p. 202.
5 Conseils pour l'édition des textes médiévaux, vol. I  : Conseils généraux, éd. Françoise Vielliard et Olivier Guyotjeannin... et Conseils pour l'édition des textes médiévaux, vol. II  :Textes littéraires, éd. Pascale Bourgain et Françoise Vielliard...
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servant de points de référence pour l'apparat critique. Celles-ci suivent la numérotation des chapitres qui prévaut dans l'édition de référence de l'Historia regum Britanniel. Ainsi le chapitre 8 du texte latin trouve-t-il un équivalent, dans L'Estoire de Brutus, sous la forme du § 8. Néanmoins, comme les chapitres de l'Historia n'ont pas toujours les mêmes dimensions ni les mêmes limites que les paragraphes matérialisés dans le « Brut » vernaculaire, certains chapitres latins se sont trouvés scindés en deux ou trois paragraphes, qui sont alors distingués par des lettres minuscules. Ainsi le chapitre 7 de l'Historia regum Britannie, qui est subdivisé dans la traduction en deux paragraphes, est-il scindé dans L'Estoire de Brutus en § 7a et § 7b.
Toutes les rubriques du manuscrit ont été éditées en italiques. Un tel traitement concerne non seulement la rubrique initiale du folio 82v, mais aussi les gloses aux prophéties de Merlin. Ces gloses, clairement distinguées des prophéties elles-mêmes dans le manuscrit par une encre de couleur, le sont donc aussi dans notre édition par des italiques. Lorsque le copiste a légèrement déplacé la frontière qui, pour le sens, délimitait prophéties et gloses —soit qu'il ait transcrit en rouge des segments de texte qui faisaient partie intégrante des prophétiesZ, soit, plus rarement, qu'il ait consigné en noir des segments de glose3 —, nous l'avons suivi pour faire alterner caractères romains et italiques. Toutefois, pour que la délimitation sémantique entre prophéties et gloses soit également perceptible, les gloses ont été éditées entre parenthèses.
On rencontre dans L'Estoire de Brutus, principalement rédigée en prose, une poignée d'octosyllabes à rimes plates4. Cette poignée de vers étant copiés à longues lignes dans le manuscrit, nous avons respecté l'usage du copiste, renvoyant aux notes critiques la mise en valeur de ces segments versifiés.
1 HRB Reeve, 2007.
2 Voir par exemple, § 112 (3), 113 (11), etc.
3 § 112 (4) par exemple («  Osoaus  »).
4 Par exemple au § 158a.