Résumés
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Histoire d’une révolution électorale (2015-2018)
- Pages : 301 à 306
- Collection : Rencontres, n° 403
- Série : Science politique, n° 3
- Thème CLIL : 3284 -- SCIENCES POLITIQUES -- Histoire des idées politiques
- EAN : 9782406091455
- ISBN : 978-2-406-09145-5
- ISSN : 2261-1851
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-09145-5.p.0301
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 29/03/2019
- Langue : Français
Résumés
Bruno Cautrès et Anne Muxel, « Introduction »
L’élection d’Emmanuel Macron en 2017 est un événement atypique dans l’histoire de la Ve République : introduction d’une force « centrale » en dehors de la bipartition gauche-droite, victoire d’un candidat non soutenu par les partis traditionnels, création ex nihilo d’un électorat à partir du lancement d’un tout nouveau mouvement politique, En Marche. Basé sur une enquête longitudinale portant sur plus de 7 000 Français, l’ouvrage est une chronique politique de cette révolution électorale.
Gilles Finchelstein, « Primaires, là où tout commence… et où beaucoup s’explique »
Pour la première fois, les deux partis de gouvernement ont organisé des primaires pour désigner leur candidat et rien de la séquence électorale de 2017 ne peut être compris sans l’analyse de ces primaires. À droite comme à gauche, le vainqueur a été inattendu, en raison d’une mobilité inédite dans la semaine précédant le scrutin. À droite comme à gauche, une logique identitaire a prévalu et le candidat a été politiquement et idéologiquement polarisé, laissant vacant un immense espace central.
Anne Muxel, « La tentation de rester hors-jeu de la décision électorale »
Les effets de la crise de la représentation politique sur la participation électorale restent bien visibles. Le renouveau profond de l’offre politique n’a pas entraîné de sursaut de la participation électorale, alors même que l’intérêt pour l’élection, et peut être du coup pour le seul spectacle de l’élection, est resté élevé tout au long de la séquence. La tentation de l’abstention a été plus forte qu’en 2007 et en 2012, et s’est faite entendre tout au long de la campagne.
302Daniel Boy et Arnaud Mercier, « Les fluctuations des cotes d’amour des candidats »
Pour l’élection présidentielle française de 2017, la récurrence de la question sur la cote d’amour prêtée aux candidats dans l’enquête par panel permet de faire de cet item un baromètre de l’évolution de l’image des candidats. En mettant en lien cette cote avec le jugement des panelistes sur les qualités personnelles des candidats, nous dégageons les traits constitutifs de leur cote d’amour afin d’établir quelques corrélations possibles entre leur image et les intentions de vote en leur faveur.
Thierry Vedel et Madani Cheurfa, « Liker, twitter, voter »
2017 confirme la banalisation de l’internet comme moyen d’information électorale. Son utilisation dans le domaine politique est encore marginale. Si deux tiers des électeurs ont un compte sur les réseaux sociaux, seule une minorité s’y exprime politiquement et elle est la plus politisée et la plus diplômée. Au-delà de la recherche d’information, l’internet n’est pas (encore) devenu un espace majeur du débat politique. Ce qui ne signifie pas qu’il soit sans importance dans la compétition électorale.
Martial Foucault et Pavlos Vasilopoulos, « Les électeurs votent aussi selon leur personnalité »
Comment rendre compte de l’instabilité électorale au cours de la campagne présidentielle de 2017 ? Cette contribution met en évidence le ressort psychologique individuel lié aux traits de personnalité pour mieux comprendre les raisons qui ont poussé près de 30 % des électeurs à changer de candidat préféré au cours des trois mois précédant le premier tour de l’élection. La figure de l’électeur rationnel est ici mise en débat par l’émergence d’un électeur émotionnel.
Arnaud Mercier, « Des débats télévisés enfin décisifs sur le vote »
La plupart des analyses de l’impact électoral des débats télévisés montrent qu’il est rare que le débat modifie le sens du scrutin. Pourtant, lors de la présidentielle 2017 des intentions de vote ont bougé suite à un débat télévisé, provoquant chez les téléspectateurs un nouvel arbitrage entre participation et abstention, ou entre deux candidats. C’est tout particulièrement le cas 303positivement pour Jean-Luc Mélenchon, en mars 2017 et négativement pour Marine Le Pen durant l’entre-deux tours.
Jérôme Jaffré, « La trace des Primaires dans le vote présidentiel »
Dans l’échec que représentent les Primaires des Républicains et du Parti socialiste s’inscrit le fait que leurs vainqueurs n’ont même pas franchi le premier tour de scrutin. Mais aussi le fait que ceux qui y ont participé sont nombreux à ne pas avoir voté pour le vainqueur. Beaucoup de participants viennent moins pour choisir un candidat que pour éliminer un postulant, ce qui pour l’avenir pose le problème de restreindre davantage ou pas l’accès à ce type de consultation.
Brice Teinturier et Amandine Lama, « La stupéfaction face à l’incroyable chute de François Fillon »
Programmé pour l’emporter, François Fillon va faiblir dans les intentions de vote dès janvier tout en restant le vainqueur le plus probable. La chute qu’il subit est donc directement liée aux révélations du Canard Enchaîné, qui produisent une rupture radicale de son image. La stratégie de victimisation du candidat lui permet de reprendre quelques points à droite sans changer fondamentalement la donne. Elle renforce également la défiance à l’égard de la démocratie, des médias et de la justice.
Pierre Bréchon, « Les naufragés du Parti socialiste »
L’effondrement de Benoît Hamon à la présidentielle s’inscrit dans le contexte d’éclatement du Parti socialiste sous le quinquennat Hollande. La contribution analyse les trajectoires de vote entre la présidentielle et les législatives, et montre que les socialistes continuent à perdre des soutiens mais retrouvent aussi des électeurs qui avaient boudé l’hypothèse Hamon. Il revient également sur le devenir du camp socialiste, plus divisé que jamais, à la veille de l’élection européenne.
Luc Rouban, « De Bayrou à Macron, la décomposition du centrisme électoral »
Les électorats de François Bayrou et d’Emmanuel Macron ne se distinguent guère sur le terrain sociologique mais se séparent sur le terrain des valeurs 304économiques. Emmanuel Macron ne réussit à séduire qu’une partie de l’électorat centriste. La décomposition électorale du centrisme met au jour ce qui fonde le macronisme ou le « progressisme » : un social-libéralisme pro-européen réunissant surtout les bénéficiaires de la mobilité sociale ascendante.
Mathieu Gallard, Federico Vacas, Stéphane Zumsteeg, « Les électeurs perdus du grand perdant »
Donné largement favori pour remporter l’élection présidentielle après sa victoire lors de la Primaire de la droite, François Fillon ne finira qu’en troisième position cinq mois plus tard. Qui sont les électeurs qui l’ont abandonné au cours de la campagne ? Forment-ils un bloc sociologique et idéologique homogène et en quoi se démarquent-ils du socle électoral resté fidèle ? Enfin, vers quels candidats se sont-ils tournés ?
Gilles Ivaldi, « La tentation populiste et ses fluctuations »
Cette contribution examine les itinéraires individuels et le rôle joué par le populisme et ses fluctuations dans l’évolution des choix électoraux tout au long de la séquence électorale de 2017. Les attitudes populistes ont influencé les trajectoires des électeurs et les mouvements que ces derniers ont opérés entre les divers candidats dans les mois qui ont précédé le scrutin.
Pascal Perrineau, « Marine Le Pen. Les panélistes y croient puis doutent… »
Rarement les auspices avaient été aussi favorables au Front national. L’immigration, le terrorisme, la demande d’autorité, l’antipolitique étaient au rendez-vous. Marine Le Pen n’a pourtant pas été à la hauteur des circonstances. Les ennuis du parti, le manque de crédibilité de la candidate, les hésitations stratégiques ont entraîné une défidélisation des soutiens de la première heure. Après la défaite, les conditions favorables sont néanmoins réunies pour une résilience électorale.
Bruno Cautrès, « Jean-Luc Mélenchon. Les panélistes y croient et ne sont pas déçus »
En déclarant sa candidature à la présidentielle très tôt, Jean-Luc Mélenchon a capitalisé sur le désarroi des électeurs de gauche. Il bénéfice tout au long du panel électoral de cet effet d’amorçage. Seul Benoit Hamon semble, pendant un 305court moment, pouvoir enrayer cette dynamique. Le noyau dur des électeurs fidèles est rejoint par des ralliés en cours de campagne. En revanche un petit groupe de décrocheurs va coûter à Jean-Luc Mélenchon sa place au second tour.
Luc Rouban, « Les cadres et les ouvriers dans le “nouveau monde” »
L’affaiblissement du vote de classe ne vient ni de la convergence sociale des ouvriers et des cadres au sein d’une grande classe moyenne ni d’une convergence politique que les élections de 2017 auraient favorisée mais de la fragmentation de chaque univers socioprofessionnel. Au vote de classe s’est substitué un vote de classement à partir des représentations que les panélistes peuvent avoir de leur mobilité sociale. Mais le premier perdure néanmoins sur la question européenne et le vote FN.
Gilles Finchelstein, « Gauche-droite, fin de la partie… ? Vraiment ? »
Le clivage gauche droite est-il mort en 2017 ? Bien des apparences plaident en ce sens, et notamment l’élimination inédite de François Fillon et Benoît Hamon, les seuls candidats à s’en réclamer. Le positionnement des panélistes sur l’échelle gauche droite demeure pourtant, de manière paradoxale, le critère sans doute le plus robuste pour déterminer leur vote et la butte témoin d’une France idéologiquement fracturée dans laquelle les extrêmes ne convergent pas et les modérés convergent peu.
Jérôme Jaffré, « L’édifice fragile du macronisme électoral »
Le macronisme électoral présente trois fragilités. Il nie le clivage gauche/droite alors qu’au premier tour de la présidentielle, il a principalement capté un vote de gauche. Il a détruit le système politique traditionnel sans véritablement le refonder. Son mouvement La République en Marche est avant tout un club de supporters. Faute de s’affranchir d’une victoire portée par la France heureuse, il a laissé prospérer une division entre la France des catégories aisées et la France des délaissés.
Sylvie Strudel, « Quand le premier de cordée dévisse »
Emmanuel Macron n’a gagné en 2017 que grâce à un équilibre maintenu entre promesses de verticalité et d’horizontalité et promesses de gauche et de 306droite. Comment le « en même temps » a-t-il résisté à l’exercice du pouvoir ? En dix-huit mois, on observe l’effritement des soutiens hybrides socialement et politiquement qui avaient assuré sa victoire. Ces diverses logiques d’exit s’expliquent par des signaux asymétriques envoyés par les politiques mises en œuvre.
Bruno Cautrès et Anne Muxel, « Conclusion. De la présidentielle aux élections européennes »
La révolution électorale évoquée dans ce livre relève d’un processus loin d’être achevé : l’issue est incertaine quant à l’avenir du macronisme et quant aux grands équilibres au sein des deux familles de la gauche et de la droite. Néanmoins nombre de signes actuels montrent qu’il s’agit d’une reconfiguration durable de l’espace politique français, en tout cas sur le moyen terme.