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Classiques Garnier

Introduction

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Introduction

Dans leur ouvrage Masculinités : États des lieux, Daniel Welzer-Lang et Chantal Zaouche Gaudron soulignent le manque détudes sur « les hommes et le masculin, leurs diversités sociales, leurs orientations sexuelles, les diverses positions quils occupent dans les sphères publiques et privées, et les conséquences que cela produit en termes de vécus individuels et/ou collectifs1 ». Force est de constater que la question de la masculinité, et même des masculinités, est peu explorée dans la littérature en France2, et plus encore au théâtre – quand bien même elle serait déjà abordée dans les études anglo-saxonnes3, notamment à travers la représentation du genre. Certaines pièces, de même que certains personnages mis en scène suggèrent que le genre se distingue par son ambiguïté : une femme peut par exemple se montrer « garçonne » (mannish), imiter une attitude masculine, cette qualité nétant 12pas exclusivement le fait dhommes comme le soulignent Jonathan Bollen, Adrian Kiernander, et Brice Parr dans leur ouvrage Men at Play4, de même que Judith « Jack » Halberstam dans Female Masculinity5 lorsquelle évoque la complexité du concept de masculinité. Au-delà de la dramaturgie et de la scène, existent ainsi des codes liés à la notion de masculinité qui traversent la société et la culture dans son ensemble. Ils sont appliqués, imités, mis en actes ou reproduits consciemment ou non, aussi bien dans lenceinte du théâtre, quen dehors de celle-ci. Ils constituent ce que lon pourrait qualifier de « configuration(s) masculine(s) ». Quelles sont-elles et comment fonctionnent-elles au théâtre ? Ce numéro tente de définir la manière dont la masculinité est envisagée et agencée dans la société, mais aussi reflétée par les arts de la scène. Il porte sur les mises en scène de la masculinité ou des masculinités afin didentifier et de mieux comprendre les constructions culturelles quelles articulent. Il interroge plusieurs thématiques : les signes et les marqueurs de masculinité(s), notamment les comportements, lutilisation du discours, les objets symboliques, lidée même de performance, et de contrôle de cette performance. Il sattache particulièrement à la critique et à limaginaire des masculinités, au mélange et à la confusion des genres, aux formes dhybridation et de transgression par rapport aux normes sociales ou culturelles. Finalement, il évalue le corps masculin dans ses rapports à la danse, au jeu de lacteur, au fait même de se produire sur scène en tant quhomme ou de jouer avec les codes visuels relatifs au masculin.

Le théâtre donne à voir ce qui ressortit au genre, que cela soit par le jeu de lacteur, le costume, les accessoires, la coiffure ou les répliques des personnages ; il le surexpose même, reflétant ses traits les plus caractéristiques, les exagérant souvent. La scène, la représentation devant ou pour un public, le corps et la voix des acteurs concourent à théâtraliser, stéréotyper ou au contraire, décomposer et/ou recomposer les multiples facettes du genre. Le théâtre contextualise également le genre, linscrivant dans une chronologie qui peut dès lors faire état de changements dans la manière de le concevoir, que ces changements soient relatifs à la réception quen font les spectateurs, quils aillent ou 13non à lencontre des normes, quils traduisent des préoccupations par rapport aux relations entre hommes et femmes ou quils incarnent un combat contre les discriminations à lencontre de certains hommes. Ainsi théâtre, sociologie et politique se croisent dans cette arène que constituent la critique et lécriture du genre tel quil se donne à voir ou imaginer. Le genre a son propre sous-texte, lorsque les fantasmes individuels prennent le relais du discours normatif. Lusage au singulier du terme « masculinité » fait par exemple référence au concept, à cette nébuleuse née de limaginaire collectif et fruit de processus visant à encadrer et régir les comportements en fonction des sexes et à partir dune conception du monde fondée sur landrocentrisme. Les questions de genre méritent donc dêtre interrogées au théâtre, et en particulier celles qui ont trait à la masculinité. En effet, la scène est un lieu conjuguant deux concepts essentiels de la masculinité : la performance / mise en scène et la composition/construction.

Lintérêt porté à lidée de performance dans sa relation aux genres a donné lieu à de nombreuses études depuis la parution de Gender Trouble6, ouvrage séminal de Judith Butler qui a mis en lumière la performativité des genres, ceux-ci ne se limitant pas à une différence de sexe mais provenant également de la répétition de certains actes ou certaines actions qui participent quotidiennement de la création dune identité particulière et qui sont le plus souvent dépendants de normes hétérosexuelles imposées, voire (ren)forcées. Le corps, de même que lidentité, sont en grande partie une construction sociale7. Les théories sur la masculinité montrent en effet que celle-ci est produite par différents facteurs comme la classe sociale ou lenvironnement culturel. La masculinité est conjoncturelle ; elle se définit et se construit dans sa mise en relation à quelque chose ou à quelquun8. Elle se veut plurielle, aussi devrait-on évoquer les masculinités plutôt quune masculinité, et examiner les formes, les qualités et les normes qui les façonnent. 14Celles-ci se distinguent par leurs variations dune culture à lautre, par leurs différences dune société à lautre, par la diversité des rapports qui régissent les personnes et qui poussent notamment les hommes à se différencier des femmes. En effet, lhistoire des « mentalités masculines » est corrélée à lhistoire des femmes soulignait Alain Corbin9 en 1984 alors que cette dernière suscitait de plus en plus lintérêt des universitaires.

La masculinité fait lobjet en France depuis les années 2000 de publications en sociologie10 ou en histoire avec entre autres « Sois un homme ! » dAnne-Marie Sohn, Hommes et masculinités de 1789 à nos jours un ouvrage dirigé par Régis Revenin11 qui aborde la masculinité sous langle de la sexualité, du travail, de la guerre, de la religion et de la race, et plus récemment Histoire de la virilité sous la direction de Georges Vigarello (t. 1), Alain Corbin (t. 2) et Jean-Jacques Courtine (t. 3)12. De multiples critères peuvent être utilisés pour donner une interprétation de la masculinité comme lâge, le physique, léducation, le statut, le style de vie, lorientation sexuelle, lethnicité, le travail, les lieux auxquels la masculinité est rattachée ainsi que linfluence de cultures ou de sous-cultures. Les méthodologies utilisées par les historiens interrogent souvent la masculinité à travers les relations sociales, notamment les normes hétérosexuelles dominantes et la formation de lidentité, mais aussi à travers lidée dexpérience, cest-à-dire les relations ou interactions entre hommes et femmes, ou entre hommes exclusivement. De même, elles tiennent compte de plus en plus du ressenti des hommes, de leurs émotions et de leurs rêves, qui, sils restent souvent voilés, contribuent néanmoins à créer un espace de la masculinité où différentes forces 15peuvent sunir, sopposer ou se combiner, et qui peuvent évoluer au fil du temps13.

Laspect social, culturel et psychologique de la masculinité fait également lobjet de discussions entre chercheurs : selon eux, la masculinité ne tombe pas forcément systématiquement sous la coupe de normes patriarcales telles que les a définies la sociologue australienne Raewyn Connell. Daprès elle, masculinité et féminité sont intrinsèquement liées, signalant des différences culturelles et des fonctions sociales le plus souvent antagonistes14. Hommes et femmes présentent des caractéristiques et des qualités opposées qui transparaissent par exemple au théâtre sous lAncien Régime dans les ouvrages sur la poétique, comme ceux de Jules Pilet de la Mesnardière15 ou de Nicolas Boileau-Despréaux16, inspirés des préceptes dAristote et dHorace17. Les théoriciens érigent des normes relatives au comportement attendu dun jeune homme ou dune jeune femme, afin de « styliser » à la fois les âges et les sexes. Parallèlement dans des pièces comme LÉcole des femmes de Molière (1663) ou Les Folies amoureuses de Jean-François Regnard (1704) qui visent à tourner en ridicule, voire dénoncer le fonctionnement dune société fondée majoritairement sur une relation dominant/dominée, on observe une critique des règles fixées par la société. Cette relation binaire entre hommes et femmes a été plus fortement incriminée au xixe siècle et a permis, comme le souligne Todd W. Reeser, lémergence des études féministes au siècle suivant18. Paradoxalement, lattention sest portée alors presque exclusivement sur les femmes, la masculinité ayant été, de fait, négligée et parfois même rejetée dans les études universitaires. Par ailleurs, le discours féministe qui promeut une égalité entre hommes et femmes, traduit souvent une résistance à la masculinité, voire un rejet de celle-ci à travers sa critique19. En effet, la subordination de la femme 16à lhomme est centrale dans létude de Connell qui utilise le concept d« hégémonie masculine » pour qualifier cette relation de pouvoir entre les sexes, ce quArthur Brittan a également qualifié de « masculinisme20 ». Dans La Domination masculine21, Pierre Bourdieu explore quant à lui la vision et division du monde, telles que les conçoivent et les imposent les hommes, à tel point quelles deviennent « naturelles » à tous les membres composant ce type de société patriarcale, étant fruit de lhabitus et de linculcation dune hexis corporelle. Les femmes ont un statut inférieur et deviennent des objets. Elles doivent se conformer à lidéal quont les hommes, du féminin.

Ce modèle nest pourtant pas universel. Il est ainsi important de souligner que les hommes ont pu et peuvent également souscrire à dautres codes que ceux de la domination. Par ailleurs, la masculinité a évolué. Ainsi selon les universitaires, il serait réducteur de prétendre que seul le modèle hégémonique a prévalu dans les sociétés occidentales. Ils appellent ainsi à donner une vision plus nuancée de lhistoire de la masculinité en insistant davantage sur sa pluralité et ses variations au fil du temps. De nouvelles grilles de lecture peuvent par exemple servir à mieux comprendre celle-ci, comme la psychologie, la religion, la morale ou même le goût qui nest pas nécessairement exclusivement le fait de modes. Existe-t-il donc une part de masculinité naturelle, celle qui sopposerait à la masculinité prédéfinie et imposée par autrui et peut-elle transparaître ou être préservée dans le cadre social, si ce dernier savère le plus souvent fortement ritualisé et codifié ? Comme le soutient Erving Goffmann22, ce cadre social dicte ce que doit être la présentation de soi dans la vie quotidienne et donne naissance à des politiques de performance en public. Les mises en scène de soi dépendent de lorganisation sociale, des lieux de sociabilité devant être fréquentés, de la manière dinteragir et de lapparence requises en public. La masculinité, quelle soit une réponse collective ou non à une structure sociale hiérarchisée et normée, pose de multiples problèmes en ce quelle doit être rendue visible et, en un sens, affichée de façon ostensible comme si les individus de sexe masculin devaient prouver quils sont hommes, cest-à-dire quils devaient montrer et démontrer leur hombría.

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Cette masculinité prédéfinie qui se doit dêtre exhibée et mise en actes, trouve sa raison dêtre dans la performance, seule apte à prouver quelle est en conformité avec les normes idéologiques en vigueur. De fait, les hommes sont contraints à tenir un rôle en public et à agir en fonction de ce que la société attend deux, cest-à-dire moins en tant quindividus ayant leur propre personnalité et identité, quen tant que « mâles ». Dès lors, tout écart par rapport à la norme imposée devient problématique comme en témoigne The School for Scandal (1777) de Richard Sheridan. La comédie sinspire de faits réels : les déboires conjugaux du duc et de la duchesse de Devonshire et les rumeurs colportées à lencontre de la vie privée insatisfaisante du couple23. Comme le montre Grainne OHare, un homme émasculé par sa propre épouse, comme put lêtre le duc de Devonshire et comme il apparaît à travers le personnage de Sir Peter, devient vite la risée du public. Le théâtre, en étalant au grand jour de façon satirique la vie intime du duc et sa masculinité « défaillante », renforce la rumeur à lencontre de celui-ci, le rendant célèbre de façon négative. Lauteur de théâtre, et de façon plus générale la société, exercent ainsi une pression directe sur ceux qui ne respectent pas les codes de la masculinité tels quils sont conçus à une époque précise. Si le genre comique met en lumière les travers des hommes, il stigmatise également certaines formes de masculinité larvée ou déficiente en les ridiculisant et en rappelant les normes sur lesquelles se fondent la présentation de soi et la performance de la masculinité. Ainsi les vieux barbons, dont les ardeurs soudaines tranchent avec leurs capacités physiques, sont traditionnellement raillés parce quils symbolisent une masculinité affaiblie et, en un sens, inadéquate puisque la performance de celle-ci, autrement dit sa présentation, se révèle en réalité une non-performance due à un manque de vigueur sexuelle. La satire et la parodie ont certes une vertu morale, mais elles semblent aussi rappeler les normes idéologiques du genre, très souvent liées à lidée de prouesse et de manifestation publique de sa valeur et de ses capacités. Une masculinité prise en défaut, parodiée sur scène, dont limage est de surcroît relayée par la presse à scandale, à lexemple du cercle des Devonshire, ne revient pas seulement à véhiculer ces codes hégémoniques mais aussi à les réactualiser et les diffuser auprès du public, cest-à-dire à en contrôler la représentation 18et le sens. Néanmoins certains symboles de masculinité échappent parfois à cette forme de surveillance et dencadrement des mœurs. La plume dautruche par exemple, dont la signification devient instable à la fin du xviiie siècle, témoigne de la fragilité de certaines normes. En effet, de nouvelles formes de performance, en grande partie influencées par la mode et lémergence dune culture de la célébrité, contaminent la sphère politique et la représentation même de la masculinité. La plume dautruche, réservée à la famille royale et au Prince de Galles en particulier, qui faisait référence à une masculinité éprouvée et une virilité prouvée sur le champ de bataille, renvoie désormais à lépoque géorgienne à un caractère efféminé comme le suggère Miriam Handley24. Dans ce cas précis, lun des symboles de masculinité, dominant depuis le xive siècle dans le milieu aristocratique, ne parvient pas à être maîtrisé, se dissolvant progressivement à mesure que les femmes laccaparent et se lapproprient. Cette perte de contrôle et de repères contribue à faire naître un sentiment danxiété dans la société et à redéfinir la masculinité.

La masculinité peut être aussi contrôlée par lÉtat, étant généralement volontairement associée à des symboles de puissance. Au début du xixe siècle, lOpéra de Paris se conforme par exemple progressivement au projet napoléonien qui exalte le militaire comme le montre Andrea Christmas25. Cette masculinité martiale renvoie à lidée de « masculinité dure » (« hard masculinity26 ») qui se distingue chez un homme par le désir daccomplir des exploits, par une apparence sportive et par un comportement rustre, farouche et belliqueux, voire insensible. La perception du masculin au théâtre relève ainsi souvent dune mise en scène de la relation du héros au pouvoir, en particulier dans la tragédie classique cornélienne, ou le drame romantique hugolien comme le suggère Georges Zaragoza27. Néanmoins, dautres types de masculinités sont progressivement mis en valeur au xixe siècle, oscillant entre force athlétique, raffinement élitiste, émotivité exacerbée et extravagance vestimentaire28. 19La mise en concurrence de différentes masculinités aboutit à la fin du xxe siècle à une crise et un fractionnement de la masculinité comme il apparaît par exemple dans lœuvre de Yasmina Reza, dHenry Bauchau, de Michèle Fabien ou dans un certain nombre de pièces colombiennes et allemandes contemporaines29. Les normes de lhégémonie masculine de même que leur récit dans certaines productions culturelles sont mis en doute, dénoncés, souvent récusés, et permettent, de fait, que dautres formes de masculinité fondées sur légalité, le droit à la différence, et le respect des individualités soient rendues plus visibles et mieux acceptées par la société. Leffritement de limage traditionnelle de la masculinité a donné ainsi naissance à une critique du modèle hégémonique au théâtre au tournant du xxie siècle, celui-ci étant perçu comme monstrueux et porteur de souffrance, non pas uniquement chez les femmes, mais également chez certains hommes qui doivent se plier à une performance de la masculinité à laquelle ils nadhèrent pas ou quen partie. Certains personnages sont alors présentés dans les pièces de théâtre comme étant les victimes du patriarcat, en ce quils doivent fatalement faire face à un système contre lequel ils ne peuvent pas toujours lutter efficacement. Ils sont en effet contraints, lorsquils refusent de dominer ou ne peuvent faire montre dautoritarisme, à devenir complices30. Dans Die Beißfrequenz der Kettenhunde dAndreas Marber, Klaase incarne, comme le montre Matthias Eck, une performance de la masculinité fortement liée au succès professionnel, voire même dépendante de celui-ci puisquil en renforce limage glorieuse. Le sentiment de supériorité qui en découle permet dasseoir son autorité et de contrôler ses employés. Vishner que Klaase embauche dans son entreprise tente de ressembler à son patron, sinspirant du modèle hégémonique promu par celui-ci et fondé sur la compétition. Cependant Vishner ne parvient pas à incarner réellement cette masculinité ostentatoire, cette dernière restant plus idéalisée que réalisée.

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Paradoxalement, la domination masculine frappe dimpuissance ceux qui tentent de se soustraire à ses codes ; elle est porteuse de violence et engendre des discriminations parce quelle est étroitement liée à lidée de race, de classe et dorientation sexuelle. Ainsi les minorités et la communauté gay sont particulièrement visées, étant non seulement dévalorisées mais aussi opprimées. La forme la plus agressive de la masculinité hégémonique soppose de manière antagoniste à la « soft masculinity » symbolisée jadis par le « doucereux », le gentleman, et de nos jours par lhomme métropolitain, cultivé, attentionné, et affectueux que lon retrouve au théâtre à diverses époques avec leurs variantes : par exemple dans Astrate de Quinault au xviie siècle, dans la comédie larmoyante du xviiie siècle ou plus récemment dans A fuego lento de Patricia Ariza31 et certains solos autobiographiques de Guillaume Galienne. Ulysse Caillon suggère ainsi que la confession, souvent perçue comme féminine, permet de mettre en lumière différents vécus ; non pas une, mais des paroles masculines32. Elle donne à la scène un caractère intimiste lorsque les artistes souhaitent séloigner du modèle hégémonique ou, au contraire lui confère un caractère joyeux et railleur lorsque les artistes se mettent en scène et prennent de la distance avec eux-mêmes, se jouant avec humour du genre et faisant au public de fausses confidences.

Si le théâtre montre des individus hors-norme comme les héros et les guerriers sanguinaires des tragédies, il se plaît également à représenter des hommes hors des normes, dont les masculinités sont atypiques, voire improbables. La scène véhicule alors de nouvelles valeurs, nuançant la définition même de la masculinité, souvent confondue avec la verdeur. Cette virilité peut être affectée sur scène lorsquelle est sur-jouée par lacteur qui tente dinsuffler un surcroît de force à son personnage en criant et tempêtant, ou en bombant le torse comme il apparaît chez certains tragédiens de la période prémoderne jouant les héros avec un peu trop demphase, confondant la virilité (vis) avec loutrance ; mais elle peut aussi paraître naturellement efféminée lorsque par exemple le personnage est censé représenter un libertin séducteur au xviie siècle, dont la vigueur sexuelle ne fait pas défaut. Aussi la masculinité est abordée le plus souvent à travers la question dune virilité instable ou discordante, celle qui naît de situations 21troubles et équivoques comme on peut le voir dès le xvie siècle dans Le Laquais de Pierre Larivey (1579)33, ou celle qui combine deux éléments opposés chez le héros, lamour débilitant du galant homme et la vaillance du guerrier invulnérable, comme il apparaît dans lHercule mourant de Jean Rotrou (1634/1635)34. Elle peut être double lorsquun homme illustre tel Néron se transforme en un personnage ambivalent comme le montre Caroline Mounier-Vehier. Le rôle de Néron dans Le Couronnement de Poppée est en effet interprété au xviie siècle par un castrat dont la voix douce et aiguë, mais néanmoins puissante, semble en complète opposition avec limage de lempereur brutal et féroce devant être représenté35.

Si lenvironnement, notamment le milieu urbain, participe de la construction de la masculinité comme laffirme Cédric Corgnet dans son article sur la crise de celle-ci à la fin du xviie siècle36, peut-on dire que lenceinte théâtrale, lieu de la performance et de la mise en scène par excellence, mais également lieu de sociabilité avec ses spectateurs prisant théâtralité et théâtral37, interagit avec cette construction sociale de la masculinité et a un impact significatif sur celle-ci en infléchissant ou en modifiant sa définition et ses valeurs – mais non pas forcément sa nature ? Ainsi quelle est larticulation entre ce que propose lauteur de théâtre à travers lintrigue et les personnages quil invente – autrement dit son discours sur, voire sa critique de la masculinité –, ce que font les acteurs à travers leur manière dincarner la masculinité, et ce quen pense le public lorsquil assiste à la création théâtrale et à la représentation de masculinités ? Par exemple, la réception de pièces jouant du travestissement suggère quà certaines époques, ce dernier devient acceptable et même largement accepté par le public dès lors quil est 22montré sur scène et dans un cadre spécifique, celui du genre comique, parce quil a trait au jeu et au divertissement bien que dans la société « le transvestissement des hommes [soit] jugé dégradant car cest sabaisser à prendre létat féminin et ses vices traditionnels, la mollesse, la coquetterie, laffectation38 ». En outre, que des hommes jouent des rôles de femmes ne pose pas de problème en Europe à la Renaissance puisque celles-ci, en Angleterre notamment, ne sont pas autorisées à faire partie dune troupe. Endosser lhabit féminin fait partie de la tradition et les spectateurs de la première modernité ne questionnent pas réellement cet état de fait, parce que la banalisation du travestissement, mis à la mode par les auteurs, a rendu la pratique théâtrale convenable. Lorsque lactrice fait son apparition sur les scènes européennes, le travestissement reste en vogue : aux xvie et xviie siècles, nombre de personnages se déguisent au cours de la pièce et tentent de se donner un « air » et une allure masculins ou féminins, que cela soit de façon grotesque ou outrée, ou de façon si subtile que le changement temporaire de genre conduit à une situation troublée et des scènes équivoques, prisées des spectateurs. Au xixe siècle, certains sketchs de music-hall fondés sur lambiguïté sexuelle, joués par des femmes, suscitent un fort engouement de la part du public39. Lorsquelles transgressent, par leurs « impersonations » parodiques, les codes vestimentaires40, Vesta Tilley, Hettie King ou Bessie Bonehill questionnent les frontières du genre, de même que la définition et les normes de ce dernier41. Voir une femme en pantalon permet en effet un jeu érotique où virilité et sensualité convergent, le caractère ambigu et androgyne du spectacle séduisant à la fois le public féminin et masculin et donnant libre cours à un plaisir voyeuriste. Ce type de spectacle, où le genre, et où en particulier le masculin est théâtralisé, aboutit au xxie siècle à la création de la Drag King42.

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Cependant, la réception du travestissement diffère lorsquil sagit dendosser le rôle dun enfant, toute sexualisation du personnage étant exclue. Le fait quune actrice interprète un personnage dadolescent nest généralement pas perçu comme quelque chose de choquant. Il nen va pas de même lorsquun jeune homme ou un homme adulte tentent dincarner un chérubin quil soit de sexe masculin ou féminin comme le suggère Julien Daillère43, leurs attributs masculins comme la pilosité du visage ou une voix grave pouvant être trop visibles et dénaturer la candeur et linnocence de lenfant44. Le travestissement reste populaire encore de nos jours avec par exemple le spectacle du Goujon Folichon45 lorsquun demi visage de femme et les stéréotypes du glamour apparaissent sur scène, se mêlant harmonieusement au masculin, ou avec les spectacles du cabaret Michou, lart de devenir « femme » étant porté à sa perfection par les transformistes. Cette forme rêvée de genre où le masculin rencontre, voire traverse le féminin à travers limitation de gestes et de postures propres à certaines célébrités, rappelle, à travers une hyper sexualisation et « sensualisation » du jeu scénique, que le corps et la voix de lartiste peuvent donner lieu à des formes hybrides qui dépassent les archétypes du genre comme le suggère Lorraine Alexandre46 ou qui les renforcent comme il apparaît dans le flamenco. Le corps de la danseuse, contrairement à celui du danseur, est central car subordonné au regard du spectateur hétérosexuel, qui, au-delà de lémoi artistique, recherche à travers la danse le plaisir dêtre séduit par des mouvements érotiques47. Dans ce contexte, la construction de la masculinité renvoie 24à deux éléments essentiels, lhypo- et hyper- qui peuvent être appliqués à la corporéité, la visibilité, ou la « constructabilité » de celle-ci à travers le développement social qui codifie les comportements, voire même les pensées et la sexualité. La masculinité semble dès lors liée à lidée de centrage, cest-à-dire de dimension et de proportion (quelle part de masculin et quelle part de féminin). Celles-ci se manifestent à travers lethos (ce à quoi on ressemble), la présentation de soi (le style ou laccessoire qui symbolise le genre en fonction du lieu et de la culture dominante), le corps même et les différents habitus qui, en définitive, définissent les frontières du genre et les configurations de la masculinité.

Les personnages masculins mis en scène au fil des siècles font état de pratiques sociales propres à leur époque qui naissent de normes, mais aussi de limaginaire lorsquelles sont idéalisées. On peut dès lors sinterroger sur la relation entre genres théâtraux et « genrification » même de la scène. Au-delà des choix de lauteur, de la dramaturgie et de lintrigue, quel est limpact des codes du genre théâtral, sur la représentation du masculin ou du féminin ? Ainsi de la poétique dramatique classique déjà mentionnée, qui, lorsquelle codifie le genre tragique ou comique et les personnages, le fait dans une perspective scénique – quelle donne ou non naissance à des formes de théâtralisme –, mais non pas forcément réaliste ou figurative. La comédie tend par exemple à montrer des stéréotypes, ou tout du moins des personnages dont le caractère appartient souvent à une catégorie distincte, surtout à lâge classique. Cette galerie de types simplifie, parfois à lexcès, le masculin en différents traits plus ou moins grossiers comme le matamore des années 1640 toujours enclin à croiser le fer avec ceux quil rencontre et qui nest lui-même quun mauvais acteur de la masculinité puisque derrière le masque de la témérité se cache une grande couardise. Le père, lamant, le serviteur, le paysan étoffent cette galerie. En outre, la scène présente souvent des personnages distordus, dont les traits de caractère sont ridiculisés ou « troubles », et dont le comportement va souvent à lencontre des codes en vigueur. Ainsi le père veuf se transforme en vieux barbon courant le vert-galant, laristocrate libertin, loin des champs de bataille auquel il ne participe plus, paraît efféminé. Il gesticule, porte rubans et parle dun ton suraigu. Cela dit, il multiplie les conquêtes amoureuses. La scène est elle-même, dans certaines circonstances, créatrice 25de masculinités outrées, dévoyées, ou simplifiées parce quelle sattache à représenter des types sans réelle complexité « psychologique », reflétant imparfaitement cette construction sociale quest la masculinité, mais étant, en contrepartie, à lorigine de constructions culturelles sur la masculinité. La période moderne, en séloignant des règles classiques et en rendant à lhomme fragilité et douceur, a su donner de nouvelles voix à la masculinité, nuançant ou rompant avec les stéréotypes, voire les dénonçant. Si lépoque et les mœurs construisent ou déconstruisent la masculinité, la scène nen expose que limage à travers le corps des acteurs et le travail de création artistique. Aussi pourrait-on arguer que le théâtre, tout en neutralisant la masculinité lorsquil la met en scène, en démontre parallèlement laspect subjectif et normatif lorsquil la met en pièces.

Sabine Chaouche

Sunway University, Malaysia
et Université dOxford

1 Daniel Welzer-Lang et Chantal Zaouche Gaudron (dir.), Masculinités : États des lieux, Érès, 2011.

2 Katherine Astbury et Marie-Emmanuelle Plagnol-Diéval (dir.), Le Mâle en France 1715-1830 : représentations de la masculinité, Bern, Lang, 2004 ; Daniel Maira et Jean-Marie Roulin, Masculinités en révolution de Rousseau à Balzac, Saint-Étienne, Publications de luniversité de Saint-Étienne, 2013 ; B. Banoun, A. Tomiche et M. Zapata (dir.), Fictions du masculin dans les littératures occidentales, Paris, Garnier, 2014. En 2014 se sont tenues trois séances consacrées à la virilité et aux représentations du masculin à la Renaissance à linitiative de Choréa, suivies en 2015 dun colloque en Sorbonne intitulé « DAdonis à Alexandre. Cartographie du masculin de la Renaissance aux Lumières dans les littératures européennes » qui se proposait daborder la question dans la littérature, mais non pas spécifiquement au théâtre.

3 Michael Mangan, Staging Masculinities: History, Gender, Performance, New York, Palgrave MacMillan, 2002 ; Carla J. McDonough, Staging masculinity: Male Identity in Contemporary American Drama, McFarland, 2006 ; Darren Goins, Performing Masculinities, VDM, 2008 ; Jonathan Bollen, Adrian Kiernander, et Brice Parr, Men at Play: Masculinities in Australian Theatre since the 1950s, Amsterdam, Rodopi, 2008 ; Brian Singleton, Masculinity and the Contemporary Irish Theatre, Basingstoke, Palgrave Macmillan, 2011 ; Karl Kippola, Acts of Manhood: The Performance of Masculinity on the American Stage, 1828–1865, New York, Palgrave MacMillan, 2012 ; Kenneth Krauss, Male Beauty: Postwar Masculinity in Theater, Film and Magazines, Albany, New York, SUNY Press, 2014.

4 J. Bollen, A. Kiernander, et B. Parr, op. cit., p. 1.

5 Judith Halberstam, Female Masculinity, Durham, Duke University Press Books, 1998.

6 Judith Butler, Gender Trouble: Feminism and the Subversion of Identity, Londres, Routledge, 2006.

7 J. Butler, Bodies That Matter: On the Discursive Limits of Sex, Londres, Routledge, 2011.

8 Joan W. Scott, « Gender: A Useful Category of Historical Analysis », in Gender and the Politics of History, New York, Columbia University Press, 1988, p. 28-50 ; John Beynon, Masculinities and Cultures, Buckingham, Open University Press, 2001 ; Michael Kimmel and Jeff Hearn, Handbook of Studies on Men and Masculinities, Londres, Sage publications, 2005.

9 Alain Corbin, « Le “Sexe en deuil” et lHistoire des femmes », Le Temps, le Désir et lHorreur, Paris, Aubier, [1984] 1991, p. 91.

10 Daniel Welzer-Lang (dir.), Des Hommes et du masculin, Nouvelles Approches des hommes, Toulouse, Presses Universitaires du Mirail, 2000.

11 Régis Revenin (dir.), Hommes et masculinités de 1789 à nos jours, Paris, Éditions Autrement, 2007. Consultable à : https://www.cairn.info/hommes-et-masculinites-de-1789-a-nos-jours--9782746709881.htm

12 Anne-Marie Sohn, « Sois un homme ! » La Construction de la masculinité au xixe siècle, Paris, Seuil, 2009 ; Georges Vigarello (dir.), Histoire de la virilité, de lAntiquité aux Lumières, Paris, Seuil, 2015, t. 1 ; Alain Corbin (dir.), Histoire de la virilité, Le Triomphe de la virilité, Le xixe siècle, Paris, Seuil, 2015, t. 2 ; Jean-Jacques Courtine (dir.), Histoire de la virilité : la virilité en crise, xx-xxie siècle, Paris, Seuil, 2015, t. 3. Voir également sur lhistoire britannique, John Tosh, Manliness and Masculinities in Nineteenth-Century Britain: Essays on Gender, Family and Empire, Harlow, Pearson Longman, 2005.

13 Karen Harvey et Alexandra Shepard, « What Have Historians Done with Masculinity? Reflections on Five Centuries of British History, circa 1500–1950 », Journal of British Studies, vol. 44, no 2, Avril 2005, p. 274-280.

14 Raewyn Connell, Masculinities, Cambridge, Polity, [1995] 2005.

15 Jules Pilet de La Mesnardière, La Poétique, Paris, A. de Sommaville, 1640 ; J.-M. Civardi (éd.), Paris, Honoré Champion, 2015.

16 Nicolas Boileau-Despréaux, Art Poétique, Paris, Gallimard, 1985, vers 374-390.

17 Voir la Poétique et la Rhétorique dAristote, ainsi que lÉpître aux Pisons dHorace.

18 Todd W. Reeser, Masculinities in Theories: An Introduction, Chichester, Wiley-Blackwell, 2010, p. 8.

19 T.W. Reeser, op. cit., p. 34.

20 Arthur Brittan, Masculinity and Power, Oxford, OUP, 1989.

21 Pierre Bourdieu, La Domination masculine, Paris, Seuil, 1998.

22 Erving Goffman, The Presentation of Self in Everyday Life, Achor, 1959.

23 Voir larticle de Grainne OHare, « The Art of Gossip. Stage, Satire, and Emasculation in The School for Scandal ».

24 Voir larticle de Miriam Handley, « Flying the Feather: George, Prince of Wales and the Performance of Masculinity on the Late- Eighteenth-Century Stage ».

25 Voir larticle dAndrea Christmas, « Militarization and Masculinity at the Paris Opéra, 1789-1814 ».

26 David Gilmore, Manhood in the Making: Cultural Concepts of Masculinity, New Haven, Yale University Press, 1990.

27 Voir larticle de Georges Zaragoza, « La masculinité dans le drame hugolien ».

28 John MacInnes, The End of Masculinity: The Confusing Sexual Genesis and Sexual Difference in Modern Society, Buckingham, Open University Press, 1998 ; John Tosh, A Mans Place: Masculinity and the Middle-class Home in Victorian England, Londres ; New Haven, Yale University Press, 1999.

29 Voir les articles suivants : Hélène Jaccomard, « “Art” de Yasmina Reza ou l“immense vulnérabilité” du masculin » ; Benedetta de Bonis, « Œdipe nest pas roi. La crise de la masculinité dans lœuvre dHenry Bauchau et de Michèle Fabien » ; Gabriella Serban, « Trois dynamiques de représentation des mutations des masculinités. Le cas du théâtre colombien » ; et Matthias Eck, « Theatre and the Stage as an Arena for Male Gender Fantasies ».

30 R. Connell, op. cit.

31 Voir G. Serban, op. cit.

32 Voir larticle dUlyse Caillon, « Confessions masculines : quelle(s) masculinité(s) dans les solos autobiographiques dhommes au théâtre ? ».

33 Voir larticle dAudrey Gilles-Chikhaoui, « Figures masculines et langue virile dans Le Laquais de Pierre de Larivey ».

34 Voir larticle dHendrik Schlieper, « Mort et renaissance du héros tragique. Hercule mourant de Rotrou ».

35 Voir larticle de Caroline Mounier-Vehier, « Néron ou la masculinité paradoxale dun rôle de castrat dans un opéra vénitien du xviie siècle. (LIncoronazione di Poppea, Monteverdi et Busenello) ».

36 Cédric Corgnet, « Une masculinité en crise à la fin du xviie siècle ? La critique de lefféminé chez La Bruyère », Genre & Histoire [En ligne], 2 | Printemps 2008, en ligne depuis le 13 juillet 2008. URL : http://genrehistoire.revues.org/249

37 Sur le concept du théâtral, voir lintroduction de Sabine Chaouche (dir.), Le Théâtral de la France dAncien Régime. De la présentation de soi à la représentation scénique, Paris, Honoré Champion, 2010.

38 C. Corgnet, op. cit., non paginé.

39 Allison Neal, « Mashers and murderers. Music hall male impersonators and their depiction in Neo-Victorian fiction », European Drama and Performance Studies, no 5, 2015, p. 145-162.

40 David Kuchta a montré que la « grande renonciation masculine », concept développé par J.C. Flugel dans les années 1930 a conduit les hommes à adopter une tenue vestimentaire stricte qui tranchait avec lexcentricité des dandys. Voir D. Kuchta, The Three Piece Suit and Modern Masculinity, Berkeley, University of California Press, 2002.

41 A. Neal, op. cit., p. 146.

42 Voir Del LaGrace Volcano et Judith “Jack” Halberstam, The Drag King Book, Serpents Tail, 1999 ; Andryn Arithson, Drag King Camp: A New Conception of the Feminine, thèse de Master soutenue en 2013 à lUniversité du Colorado ; Kerryn Druisdale, « Tactile Places: Doing Sensory Ethnography in Sydneys Drag King Scene », Journal of Media & Cultural Studies, vol. 30, no 2, 2016, p 206-217 et Lisbeth A. Berbary, Corey W. Johnson, « En/Activist Drag: Kings Reflect on Queerness, Queens, and Questionable Masculinities », Leisure Sciences, vol. 39, no 4, 2017, p. 305-318. Voir également sur le phénomène inverse : Michael Moncrieff, Pierre Lienard, « A Natural History of the Drag Queen Phenomenon », Evolutionary Psychology, vol. 15, no 2, 2017 et Caitlin Greaf, « Drag Queens and Gender Identity », Journal of Gender Studies, vol. 25, no 6, 2016, p. 655-665.

43 Voir le témoignage de Julien Daillère dans ce volume sur son spectacle La petite fille moche était barbu/e.

44 Voir larticle de Maialen Berasategui, « Les transgressions paradoxales. Masculinités et âges dans les théâtres denfants sous la monarchie de Juillet ».

45 Voir les entretiens à la fin de ce volume : avec Julien Fanthou, Gerald Elliott et Denis DArcangelo.

46 Voir larticle de Lorraine Alexandre, « Fragments, pour une décomposition des archétypes de genre » dans le présent volume.

47 Voir larticle de Fernando López Ródriguez, « La construction du tablao à partir du regard masculin hétérosexuel ».