353

Résumés/Abstracts

« Le Grand Entretien avec Jason W. Moore. Trajectoires du Capitalocène : des origines au digital »

Jason W. Moore est professeur de sociologie à l’Université de Binghamton aux États-Unis. Son travail porte sur la géohistoire et le développement du capitalisme. Ses recherches ouvrent le débat sur cette nouvelle époque géologique, dominée par les activités humaines selon certains scientifiques, l’Anthropocène, en arguant du fait qu’il s’agirait bien plutôt de celle du capital, le Capitalocène.

Pour Études digitales, Jason W. Moore a accepté de répondre à quelques questions concernant les origines du concept de Capitalocène, ainsi que son actualité en lien avec les technologies digitales. Une première partie est consacrée au dialogue critique qu’il invite à mener avec l’Anthropocène. Une seconde partie est consacrée aux mutations actuelles du capitalisme, à l’évolution du Capitalocène à l’heure des plateformes. L’entretien a été mené, retranscrit, et traduit par Fabien Colombo.

Mots-clés : Capitalocène, Anthropocène, technologies digitales, mutations du capitalisme.

“The big interview with Jason W. Moore. Trajectories of the Capitalocene: from the origins to the digital age”

Jason W. Moore is Professor of Sociology at Binghamton University, USA. His work focuses on geohistory and the development of capitalism. His research opens the debate on this new geological epoch, dominated by human activities according to some scientists, the Anthropocene, arguing that it is rather that of capital, the Capitalocene.

Jason W. Moore has agreed for Digital Studies to answer some questions about the origins of the concept of Capitalocene, as well as its current relevance to digital technologies. A first part is devoted to the critical dialogue he invites to conduct with the Anthropocene. A second part is devoted to the current mutations of capitalism, to the evolution of Capitalocene in the age of platforms. The interview was conducted, transcribed and translated by Fabien Colombo.

Keywords: Capitalocene, Anthropocène, digital technologies, mutations of capitalism.

354

Franck Cormerais, Fabien Colombo, Philippe Béraud, « Présentation du dossier. L’en-deçà de l’Anthropocène, le Capitalocène »

Franck Cormerais est professeur à l’Université Bordeaux Montaigne, laboratoire MICA EA 4426, responsable de l’axe E3D. Il est docteur en philosophie et en science de l’information et de la communication. Ses recherches portent sur l’anthropologie des techniques et sur les pratiques des TIC. Il a notamment corédigé La société éclatée, retour à l’objet local.

Philippe Béraud est enseignant-chercheur en économie. Il est responsable de formations de spécialité consacrées à l’ingénierie d’affaires à l’IMT Atlantique (Institut Mines-Télécom), et à l’ingénierie des services urbains en réseau à l’IEP de Rennes. Ses recherches portent sur l’économie des industries de réseau, l’économie numérique et l’économie du développement.

Fabien Colombo est doctorant en sciences de l’information et de communication à l’Université Bordeaux Montaigne. Diplômé en philosophie, en sociologie économique et en anthropologie, il s’intéresse aux études pluridisciplinaires sur les rapports entre sciences, technologies, et sociétés (STS).

Le concept de Capitalocène s’inscrit dans un renouveau du cadre techno-économique, où le numérique tend à s’ériger en maître d’œuvre des transformations des sociétés, des économies et de l’environnement. Au-delà des approches anthropocènes, le Capitalocène s’affirme comme un questionnement critique de la capture des ressources naturelles et des capacités humaines et sociales, remettant en cause les analyses économiques qui intègrent l’écologie dans les calculs d’opportunités.

Mots-clés : Capitalocène, Anthropocène, plateformes, externalités négatives, accumulation du capital.

Franck Cormerais, Fabien Colombo, Philippe Béraud, “Presentation of the file. Below the Anthropocene, the Capitalocene”

Franck Cormerais is a professor at Bordeaux Montaigne University. He is part of the Mediations, Information, Communication, and Arts (MICA) laboratory (EA 4426) and is in charge of its Digital Studies: From Data to Devices (E3D) axis. He holds a doctorate in philosophy and in information and communication science. His research focuses on the anthropology of technology and ICT practices. He is the co-author of La société éclatée, retour à l’objet local.

Philippe Béraud is a teacher-researcher in economics. He is the lead on specialized teaching in business engineering at IMT Atlantique (Institut Mines-Télécom), and in networked urban services engineering at the Institute of Political Studies (IEP) of Rennes. His research focuses on the economics of network industries, the digital economy, and development economics.

355

Fabien Colombo is a PhD student in information and communication science at Bordeaux Montaigne University. With degrees in philosophy, economic sociology, and anthropology, his focus is on multidisciplinary studies on the relationships between science, technology, and society (STS).

The concept of Capitalocene is part of a renewal of the techno-economic framework, where digital tends to set itself up as the mastermind of transformations in societies, economies and the environment. Going beyond Anthropocene approaches, the Capitalocene asserts itself as a critical questioning of the capture of natural resources and human and social capacities, calling into question economic analyses that integrate ecology into opportunity calculations.

Keywords: Capitalocene, Anthropocene, platforms, negative externalities, capital accumulation.

Jason W. Moore, « Le Capitalocène et la justice planétaire »

La crise que nous vivons n’est pas la faillite d’une espèce, c’est la faillite d’un système. Voici l’histoire d’un modèle interprétatif alternatif qui considère l’Anthropocène comme un discours biaisé qui blâme les victimes, ainsi qu’un mauvais marchepied pour le mouvement écologiste à venir. Nous vivons dans le Capitalocène, l’âge du capital. Qu’est-ce que le Capitalocène ? C’est une manière d’appréhender le capitalisme comme un système géographique et historique, interconnecté et structuré.

Mots-clés : Anthropocène, Capitalocène, capitalisme, écologie, modernité.

Jason W. Moore, “Capitalocene & planetary justice”

The crisis we are experiencing is not the failure of a species, it’s the failure of a system. This is the story of an alternative model which sees the Anthropocene as a biased discourse which blames victims and is a weak landmark for the new green movement. We are living in the Capitalocene, the Age of Capital. What is the Capitalocene? It is a way of understanding capitalism as a connective geographical and patterned historical system.

Keywords: Anthropocene, Capitalocene, capitalism, ecology, modernity.

Fabien Colombo, « Vers un Capitalocène de plateforme ? Éléments pour une articulation théorique »

Lorsque Srnicek définit le capitalisme de plateforme comme l’appropriation d’une nouvelle matière première, les données, celui-ci explique qu’« un 356rapprochement utile pourrait sans doute être établi avec le concept d’intrants bon marché de Moore, bien que cela dépasse le cadre de la présente étude ». L’ambition de cet article est d’explorer un tel rapprochement, en vue de proposer une articulation théorique entre le travail des deux auteurs, grâce au concept de « Capitalocène de plateforme ».

Mots-clés : Capitalocène, capitalisme de plateforme, technologie, appropriation, marxisme.

Fabien Colombo, “Towards a platform Capitalocene? Elements for a theoretical articulation”

When Srnicek defines platform capitalism as the appropriation of a new raw material, namely data, he explains that “a useful relation could perhaps be drawn to Moore’s concept of cheap inputs, although this lies outside the scope of this study”. The ambition of this article is to explore such a useful relation, in order to propose a theoretical articulation between the work of these two authors, thanks to the concept of “Platform Capitalocene”.

Keywords: Capitalocene, platform capitalism, technology, appropriation, marxism.

Paolo Vignola, « Écartographies. Une analyse pharmacologique du Capitalocène »

Docteur en philosophie, Paolo Vignola enseigne la Philosophie de la Littérature, la Théorie littéraire et la Littérature et Nouvelles Technologies à l’Université des Arts de Guayaquil en Équateur. Ses travaux sont dédiés à la philosophie française contemporaine – notamment Deleuze, Guattari, Simondon, Stiegler – à l’écologie politique et à la philosophie de la technologie.

L’article vise à montrer comment le concept de Capitalocène implique un ensemble de cartographies, qui sont non seulement géopolitiques et économiques, mais aussi symboliques, philosophiques et épistémologiques, et dont le fonctionnement a changé à travers l’histoire. L’essai questionne le passage de la sphère politique proprement écologique et économique du Capitalocène en tant qu’écologie-monde à la dimension technocratique du présent, incarnée par le capitalisme de plateforme.

Mots-clés : Capitalocène, cartographie, colonialité du savoir, Guattari, Stiegler, entropie.

Paolo Vignola, “Cartography. A pharmacological analysis of the Capitalocene”

Paolo Vignola holds a PhD in philosophy and teaches philosophy of literature, literary theory, and literature and new technologies at the University of the Arts in Guayaquil, Ecuador. His 357work is devoted to contemporary French philosophy—especially Deleuze, Guattari, Simondon, and Stiegler—as well as to political ecology and the philosophy of technology.

The article aims to show how the concept of Capitalocene implies a set of cartographies, which are not only geopolitical and economic, but also symbolic, philosophical and epistemological, and whose functioning has changed throughout history. The essay questions the shift from the strictly ecological and economic political sphere of the Capitalocene as an ecology-world to the technocratic dimension of the present, embodied by platform capitalism.

Keywords: Capitalocene, cartography, coloniality of knowledge, Guattari, Stiegler, entropy.

Franck Cormerais et Philippe Béraud, « Bernard Stiegler et le Capitalocène. L’appréciation d’une controverse avec Jason W. Moore »

L’article se réfère à l’ouvrage de B. Stiegler, Qu’appelle-t-on panser ? Il ne s’agit nullement de résumer le ch. 4, « L’âge du capitalocène comme accélération de l’exosommatisation ». L’intention est de verser une pièce au dossier afin de voir comment y est abordée la problématique du Capitalocène. Le texte repose sur un montage d’extraits auxquels nous avons ajouté des commentaires. Il est ainsi possible de comprendre la position stieglérienne face à celle de Moore sur le Capitalocène.

Mots-clés : Bernard Stiegler, Jason W. Moore, Capitalocène, exosommatisation.

Franck Cormerais and Philippe Béraud, “Bernard Stiegler and the Capitalocene. Assessing a controversy with Jason W. Moore”

The article refers to Bernard Stiegler’s book, Qu’appelle-t-on panser? It is by no means a summary of chapter four entitled « L’âge du capitalocène comme accélération de l’exosommatisation ». Our intention is to put an exhibit on file to see how the Capitalocene issue is addressed. The text is based on a montage of excerpts to which we have added a few comments. It is thus possible to understand the Stieglerian position in relation to Moore’s position on the Capitalocene.

Keywords: Bernard Stiegler, Jason W. Moore, Capitalocene, exosommatisation.

Fabrice Flipo, « Plateformes et numérique à l’époque de l’Anthropocène »

Fabrice Flipo est philosophe ; il travaille sur l’écologie politique, la décroissance et les enjeux écologiques du numérique (La face cachée du numérique, 2013). Il a publié notamment Écologie autoritaire (2018) et Décroissance Ici et maintenant (2018).

358

Cet article revient sur la question du contrat naturel à l’époque de la modernité, avant de s’intéresser aux plateformes pour montrer que l’économie numérique est une rupture à l’intérieur d’une continuité, celle de l’économie productiviste, qui ne répond donc nullement aux enjeux écologiques contemporains. Il conclut à la nécessité d’une décroissance voire d’une collapsologie du numérique.

Mots-clés : collapse, écologie, philosophie, Anthropocène.

Fabrice Flipo, “Platforms and digital in the Anthropocene era”

Fabrice Flipo is a philosopher. He works on political ecology, degrowth, and the ecological stakes of the digital era (La face cachée du numérique, 2013). His publications include Ecologie autoritaire (2018) and Décroissance Ici et maintenant (2018).

This article revisits the question of the natural contract at the epoch of modernity, before looking at platforms to show that the digital economy is a break within a continuity, that of the productivist economy, which therefore does not meet contemporary ecological issues. He concludes the need for a degrowth or even a collapsology of the digital.

Keywords: collapse, ecology, philosophy, Anthropocene.

Maxime Ouellet, « Capitalisme cybernétique et gouvernance algorithmique à l’ère de l’Anthropocène »

Maxime Ouellet est professeur à l’École des médias de l’UQAM. Il est chercheur au Centre de recherche interuniversitaire du la communication, l’information et la société (CRICIS). Son plus récent ouvrage s’intitule : La révolution culturelle du capital : Le capitalisme cybernétique dans la société globale de l’information, Montréal, Écosociété, 2016.

Cet article analyse le lien entre le déploiement des technologies numériques et la crise écologique. Nous soutenons que le capitalisme cybernétique participe à la dissolution des frontières entre le vivant et le non-vivant. Cette logique s’institutionnalise au sein d’une gouvernance algorithmique qui a pour prétention de « gérer » les problèmes environnementaux en temps réel tout en permettant une nouvelle dynamique de valorisation du capital à l’ère de l’Anthropocène.

Mots-clés : Capitalisme, cybernétique, gouvernance algorithmique, Anthropocène, technologies numériques.

Maxime Ouellet, “Cybernetic capitalism and algorithmic governance in the Anthropocene era”

Maxime Ouellet is a professor in the Media School at the Université du Québec à Montréal (UQAM). He is a researcher at the Intercollegiate Research Center for Communication, Information, 359and Society (CRICIS). His most recent book is entitled: La révolution culturelle du capital: Le capitalisme cybernétique dans la société globale de l’information (Montreal, Écosociété, 2016).

This article analyzes the link between the development of digital technologies and the ecological crisis. We argue that cybernetic capitalism participates in the dissolution of the boundaries between the living and the non-living. This logic is institutionalized within an algorithmic governance that aims to « manage » environmental problems in real time while allowing a new dynamic of valorization of capital in the Anthropocene era.

Keywords: Capitalism, cybernetics, algorithmic governance, Anthropocene, digital technologies.

Armel Campagne et Marc-Antoine Pencolé, « Le numérique, stade suprême du capitalisme fossile ? La base matérielle des plateformes, entre continuités et nouveaux antagonismes »

Armel Campagne est doctorant en histoire à l’Institut Européen Universitaire, et auteur sur ce sujet de Le Capitalocène. Aux racines historiques du dérèglement climatique (Divergences, 2017).

Marc-Antoine Pencolé est doctorant en philosophie au Sophiapol et travaille sur le numérique en philosophie sociale et en philosophie de la technique.

L’article propose une articulation des réflexions autour du numérique et du Capitalocène. Constater le coût environnemental des technologies numériques n’épuise pas l’analyse, car la numérisation de l’économie ne fait pas qu’accroître les effets environnementaux du capitalisme, elle réarticule ses points de tension. C’est en ce sens que l’avènement des plateformes participe du capitalisme fossile tout en en constituant un stade nouveau.

Mots-clés : Capitalocène, écologie-monde, capitalisme fossile, plateformes, numérique.

Armel Campagne et Marc-Antoine Pencolé, “Digital, the supreme stage of fossil capitalism? The material basis of platforms, between continuities and new antagonisms”

Armel Campagne is a PhD student in history at the European University Institute, and the author of Le Capitalocène: Aux racines historiques du dérèglement climatique (Divergences, 2017).

Marc-Antoine Pencolé is a PhD student in philosophy at Sophiapol and works on the role of digital technology in social philosophy and in the philosophy of technology.

360

The article proposes an articulation of the reflections around the digital and the Capitalocene. Noting the environmental cost of digital technologies does not exhaust the analysis, because the digitization of the economy does not only increase the environmental effects of capitalism, it also re-articulates its points of tension. It is in this sense that the advent of platforms is part of fossil capitalism while constituting a new stage in it.

Keywords: Capitalocene, world-ecology, fossil capitalism, platform, digital.

Gérard Dubey, « La terre est ronde mais le monde est une plateforme. Paradoxe du Capitalocène »

Gérard Dubey est professeur de sociologie (HDR EHESS/2007) à Institut Mines-Telecom Business School depuis 2003, membre de l’École Doctorale de l’UFR de philosophie de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, co-directeur de la revue Socio-anthropologie (Éditions de la Sorbonne / CNRS), chercheur au CETCOPRA / Paris1 depuis 1990.

La numérisation du monde s’inscrit dans le long processus de délocalisation des nuisances et d’invisibilisation des lieux de pouvoir entamé à l’ère thermo-industrielle. Les phénomènes d’ubérisation montrent que les modèles taylorien-fordien s’adaptent bien aux nouvelles infrastructures numériques. Cet article interroge cette convergence sous l’angle de l’économie politique propre au capitalisme industriel d’un côté, de l’imaginaire social d’un monde hors-sol d’un autre côté.

Mots-clés : plateforme, ubérisation, économie politique, capitalisme industriel, imaginaire social.

Gérard Dubey, “The earth is round but the world is a platform. Paradox of the Capitalocene”

Gérard Dubey is a professor of sociology (HDR EHESS/2007) at the Institut Mines-Télécom Business School since 2003, a member of the Doctoral School of the philosophy education and research unit (UFR) at the University of Paris 1 Panthéon-Sorbonne, codirector of the journal Socio-anthropologie (Éditions de la Sorbonne/CNRS), and a researcher at the Center for the Study of Technology, Knowledge, and Practices (CETCOPRA)/Paris 1 since 1990.

The digitalization of the world is part of the long process of relocation of nuisances and invisibility of places of power begun in the thermo-industrial era. The phenomena of ubization show that the Taylorian-Fordian models adapt well to the new digital infrastructures. This article questions this convergence from the perspective of the political economy of industrial capitalism on the one hand, and the social imaginary of an above-ground world on the other.

Keywords: platform, uberization, political economy, industrial capitalism, social imaginary.

361

Philippe Béraud et Franck Cormerais, « Hypercapitalisme, l’accélération du Capitalocène. Financiarisation et plateformisation versus infrastructures contributives et internation »

Nous faisons l’hypothèse ici que l’hypercapitalisme est le régime d’accumulation et le capitalocène son externalité négative. Nous entendons par puissance informationnelle ce qui recouvre l’économie de l’information, mais aussi l’économie de la connaissance. Aussi, l’hypercapitalisme n’est pas une simple variante du capitalisme cognitif mais son aboutissement dans une forme de gouvernementalité renouvelée, où tend à s’imposer un nouveau régime de la monnaie et de la financiarisation.

Mots-clés : Hypercapitalisme, Capitalocène, régime d’accumulation, mondialisation, plateformisation, financiarisation.

Philippe Béraud and Franck Cormerais, “Hypercapitalism, the acceleration of Capitalocene. Financialization and platformization versus contributory and international infrastructures”

We hypothesize here that hypercapitalism is the regime of accumulation and capitalocene its negative externality. We understand by informational power what covers the information economy, but also the knowledge economy. Thus, hypercapitalism is not a simple variant of cognitive capitalism but its culmination in a renewed form of governmentality, where a new regime of money and financialisation tends to be imposed.

Keywords: Hypercapitalism, Capitalocene, regime of accumulation, globalization, platformization, financialization.

Jean-Max Noyer, « Des plateformes jusqu’en bas »

J.-M. Noyer est Professeur Émérite des Universités et Consultant (www.grico.fr), membre de l’IMSIC et de Paragraphe, Paris 8. Il est co-Directeur de la Collection « Intellectual Technologies », Ed. Wiley et ISTE, et de la Collection « Territoires Numériques », Éd. Mines-Paris Tech. Il est co-fondateur des Archives ouvertes SIC http://archivesic.ccsd.cnrs.fr et fondateur de la Revue Solaris.

Les plateformes offrent des fonctionnalités variées selon les régimes relationnels qu’elles portent, selon les traces qu’elles fabriquent ou captent, selon les opérations cognitives ou selon les inférences qu’elles mettent en œuvre. Elles assurent des fonctions cognitives et connectives essentielles qui animent les intelligences collectives. L’objet ici est de saisir les conditions de leur productivité et à l’occasion de soulever un certain nombre de questions anthropologiques et politiques.

Mots-clés : plateformes, infrastructure, scalabilité, écologie, valeur.

362

Jean-Max Noyer, “Platforms all the way down”

Jean-Max Noyer is a professor emeritus and consultant (www.grico.fr), a member of the Mediterranean Institute of Information and Communication Science (IMSIC) and Paragraphe, Paris 8. He is codirector of the “Intellectual Technologies” collection, Wiley and ISTE, and of the “Territoires Numériques” collection, Ed. Mines-Paris Tech. He is a cofounder of Archives ouvertes SIC (http://archivesic.ccsd.cnrs.fr) and the founder of the journal Solaris.

Platforms offer varied functionalities according to the relational regimes they carry, according to the traces they make or capture, according to the cognitive operations or inferences they implement. They provide essential cognitive and connective functions that animate collective intelligence. The object here is to grasp the conditions of their productivity and on the occasion to raise a number of anthropological and political questions.

Keywords: platform, infrastructure, scalability, ecology, value.

Annie Blandin, « La proposition de loi de lutte contre les contenus haineux sur Internet. Mise en perspective de l’article premier »

Annie Blandin est professeur à l’IMT Atlantique au sein du département « Systèmes réseaux, cybersécurité et droit du numérique », titulaire d’une chaire d’excellence Jean Monnet sur le thème de l’Union européenne et la société de l’information. Elle est également membre du Conseil national du numérique.

Cette chronique traite de la question de la régulation des contenus haineux sur Internet. Elle s’intéresse en particulier à l’article premier de la proposition de loi dite « Avia ». Pour justifié que soit l’objectif de lutte contre la haine, les moyens prévus posent de nombreux problèmes. Ils sont présentés ici avec la volonté d’élargir le débat en soulignant le risque de confusion entre fonctions régaliennes et activités d’entreprise tout en montrant combien il est difficile de réguler.

Mots clés : plateformes, régulation, contenus haineux, responsabilité.

Annie Blandin, “The proposed law to combat hate content on the Internet. A perspective on Article 1”

Annie Blandin is a professor at IMT Atlantique in the “Network Systems, Cybersecurity, and Digital Law” department, holding a Jean Monnet chair of excellence for the study of the European Union and the information society. She is also a member of France’s National Digital Council.

This chronicle deals with the issue of hate speech regulation on the Internet. It analyses in particular article one of the « Avia » law proposal. Though justified in the context of the fight againts hate speech, the means which are proposed raise a lot of 363issues. They are presented here in a way which widen the debate in order to highlight the risk of confusion between state activities and business activities, and showing at the same time how difficult it is to regulate.

Keywords: platforms, regulation, hate speech, liability.

Jean-Paul Fourmentraux, « Hacker le capitalisme. Technocritique de l’innovation numérique »

Jean-Paul Fourmentraux, Socio-anthropologue, est professeur en Esthétique et Histoire des arts et médias à l’Université Aix-Marseille. Il est également directeur de recherche (HDR Sorbonne) à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales, au Centre Norbert Elias (UMR-CNRS 8562) et membre initiateur du programme Art-Science-Société de l’Institut Méditerranéen d’Études Avancées (IMéRA, RFIEA).

Depuis une dizaine d’années, le collectif au nom programmatique disnovation.org propose de prendre le contre-pied du capitalisme et des « propagandes de l’innovation ». Son mode opératoire consiste à décrypter et rendre public les stratégies occultes des GAFA. En ce sens, la disnovation apparaît comme une tactique de subversion possible. Une pratique de création irriguée par l’utopie du logiciel libre et défendant une éthique Hacker en rupture avec le capitalisme.

Mots-clés : contre-cultures numériques, disnovation, ethique Hacker, socio-anthropologie des techniques.

Jean-Paul Fourmentraux, “Hacking into capitalism. Technocriticism of digital innovation”

Social anthropologist Jean-Paul Fourmentraux is a professor of aesthetics and history of art and media at Aix-Marseille University. He is also director of research (HDR Sorbonne) at the School for Advanced Studies in the Social Sciences (EHESS) and at the Norbert Elias Center (UMR-CNRS 8562), and a founding member of the Art-Science-Society program of the Mediterranean Institute for Advanced Studies (IMéRA, RFIEA).

For the past ten years or so, the collective with the name programmatique disnovation.org has been proposing to take the opposite side of capitalism and the “propaganda of innovation”. Its modus operandi consists in deciphering and making public the hidden strategies of the GAFA. In this sense, disnovation appears as a possible subversion tactic. A creative practice irrigated by the utopia of free software and defending a hacker ethic that breaks with capitalism.

Keywords: digital counter-cultures, disnovation, hacker ethics, socio-anthropology of techniques.

364

Julien Bellanger, « Pratiques populaires et ré-appropriation sociale des technologies. PiNG, une association-laboratoire des cultures numériques »

Développeur de projets artistiques, culturels et techniques, Julien Bellanger co-fonde en 2004 l’association nantaise PiNG, plateforme d’exploration des pratiques numériques qui ouvre le Fablab Plateforme C en 2013. Engagé dans le croisement arts, sciences, technologies et sociétés, il développe principalement ces recherches et activités au sein de l’association PiNG.

À partir de la présentation des activités de l’association PiNG, l’article expose les enjeux actuels des lieux physiques d’appropriation des technologies. En revenant sur les conditions de productions de savoirs, leurs transmissions et l’évolution de la sémantique, nous essaierons de montrer comment une activité réflexive sur nos pratiques pose les conditions et les limites des pratiques d’éducation populaire en régime numérique.

Mots-clés : pratiques numériques, performances, évènements culturels coopératifs, éducation populaire.

Julien Bellanger, “Popular practices and social reappropriation of technologies. PiNG, an association-laboratory of digital cultures”

A developer of artistic, cultural, and technical projects, in 2004 Julien Bellanger cofounded the Nantes-based association PiNG, a platform for the exploration of digital practices, which opened the Plateforme C FabLab in 2013. Working at the intersection of art, science, technology, and society, he mainly pursues his research and activities under the auspices of PiNG.

Based on the presentation of the activities of the PiNG association, the article explains the current stakes of the physical places of appropriation of technologies. By going back over the conditions of knowledge production, their transmission and the evolution of semantics, we will try to show how an activity reflexive on our practices poses the conditions and the limits of popular education practices in a digital regime.

Keywords: digital practices, performances, cooperative cultural events, popular education.

Gerald Moore, « Cinq dates, trois titans »

Gerald Moore est enseignant à Durham University et à la School of Modern Languages and Cultures (UK). Il est également directeur associé du Centre for Culture and Ecology. Il est membre du conseil d’administration d’Ars Industrialis et du réseau Digital Studies basé à l’Institut de Recherche et d’Innovation du Centre Pompidou.

365

En apprenant la disparition de Bernard Stiegler avec lequel il travaillait depuis 2008, Gerald Moore évoque quelques-uns des moments importants qu’il a partagés avec le philosophe, moments empreints de complicité intellectuelle et d’amitié.

Mots-clés : Bernard Stiegler.

Gerald Moore, “Five dates, three titans”

Gerald Moore is a lecturer at Durham University and the School of Modern Languages and Cultures (UK). He is also associate director of the Centre for Culture and Ecology. He is a member of the board of Ars Industrialis and of the Digital Studies network based at the Institute for Research and Innovation at the Centre Pompidou.

Upon learning of the death of Bernard Stiegler, with whom he had worked since 2008, Gerald Moore recalls some of the important moments he shared with the philosopher, moments marked by intellectual complicity and friendship.

Keywords: Bernard Stiegler.

Vincent Puig, « Prendre soin de l’informatique et des générations »

Vincent Puig est directeur de l’Institut de Recherche et d’Innovation du Centre Pompidou qu’il a créé avec Bernard Stiegler en 2006 pour travailler au développement et à l’expérimentation de technologies et de méthodes contributives. L’IRI entend poursuivre ses projets de recherche et d’économie contributive en fidélité à la pensée de son fondateur.

Bernard Stiegler, philosophe, innovateur, expérimentateur laisse une œuvre indissociable des objets numériques qu’il a inspirés dans les institutions qu’il créa. Objets numériques dont il avait une connaissance organologique. L’Association des Amis de la Génération Thunberg-Ars Industrialis, le collectif Internation-Digital Studies et l’équipe de l’IRI sont déterminés à prolonger son œuvre pour ouvrir un à-venir aux sociétés humaines, et prolonger son combat contre l’entropie croissante.

Mots-clés : Bernard Stiegler, Institut de Recherche et d’Innovation, Objets numériques, Ars Industrialis, Digital studies.

Vincent Puig, “Taking care of IT and generations”

Vincent Puig is director of the Institute for Research and Innovation at the Centre Pompidou, which he created with Bernard Stiegler in 2006 to develop and experiment with contributive 366technologies and methods. The IRI seeks to pursue its research and contributive economy projects in keeping with the thinking of its founder.

Bernard Stiegler, philosopher, innovator, experimenter leaves a work inseparable from the digital objects he inspired in the institutions he created. Digital objects of which he had an organological knowledge. The Association of Friends of the Thunberg-Ars Industrialis Generation, the Internation-Digital Studies collective and the IRI team are determined to extend his work to open a future for human societies, and to continue his fight against growing entropy.

Keywords: Bernard Stiegler, Research and Innovation Institute, Digital objects, Ars Industrialis, Digital studies.

Michał Krzykawski, « L’idiodiversité, le sens et la raison de traduire. Hommage à Bernard Stiegler »

Michał Krzykawski est professeur associé à l’Université de Silésie à Katowice, où il dirige le Centre for Critical Technology Studies. Ancien collaborateur de Bernard Stiegler, il est également membre du Collectif Internation, fondé à l’initiative de celui-ci.

Cet article introduit le concept d’idiodiversité dans le sillage du concept d’idiotexte proposé par Bernard Stiegler. Ayant le travail de traduction pour mode opératoire privilégié, l’idiodiversité peut être vue comme une alternative à la traduction devenue calcul automatique. Or, cet article se veut surtout un témoignage de traducteur et un hommage à la pensée de Bernard Stiegler, fait depuis l’espace même de la traduction de ses travaux.

Mots-clés : Bernard Stiegler, idiome, affection, affect, amitié, entropie, croyance.

Michał Krzykawski, “Idiodiversity, the meaning and reason for translating. Tribute to Bernard Stiegler”

Michał Krzykawski is an associate professor at the University of Silesia in Katowice, where he directs the Centre for Critical Technology Studies. A former collaborator of Bernard Stiegler, he is also a member of Collectif Internation, founded by the latter.

This article introduces the concept of idiodiversity in the wake of the concept of idiotext proposed by Bernard Stiegler. Having translation as the preferred operating mode, idiodiversity can be seen as an alternative to translation that has become automatic calculation. However, this article is above all a translator’s testimony and a tribute to Bernard Stiegler’s thought, made from the very space of the translation of his works.

Keywords: Bernard Stiegler, idiome, tenderness, affect, friendship, entropy, belief.