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Classiques Garnier

La culture numérique institutionnelle

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Études digitales
    2017 – 1, n° 3
    . Variations digitales et transformation du milieu
  • Auteur : Giffard (Alain)
  • Résumé : L’article interroge les modalités et la mise en œuvre des institutions numériques.
  • Pages : 75 à 93
  • Revue : Études digitales
  • Thème CLIL : 3157 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Sciences de l'information et de la communication
  • EAN : 9782406085317
  • ISBN : 978-2-406-08531-7
  • ISSN : 2497-1650
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-08531-7.p.0075
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 05/11/2018
  • Périodicité : Semestrielle
  • Langue : Français
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La Culture Numérique Institutionnelle

Les politiques en faveur de la culture numérique sont déjà anciennes, datant dune trentaine dannées en Europe, un peu plus aux États-Unis ; et elles ont été relancées de manière assez nette dans la période récente. Cette ancienneté, cette relative permanence, la similitude des moyens employés et des résultats obtenus tendent à prouver que la culture numérique existe bien comme affaire publique et comme vision officielle. Selon cette vision officielle précisément, la culture numérique est une affaire de petite institution. Ses fondements juridiques sont incertains. Le plus souvent, les mesures la concernant figurent dans des programmes daction gouvernementale, documents de faible engagement, dans lesquels les notions de base sont rarement posées. Il ne semble pas quaucun Parlement ait jamais débattu de ces questions. À solide distance du droit, la culture numérique institutionnelle sabstient tout autant de participer aux débats théoriques. Une histoire intellectuelle de la culture numérique serait un tout autre essai, une analyse de la culture numérique comme mouvement aussi1.

Jessaie de restituer un domaine qui se voudrait ultra-opérationnel et ultra-pragmatique, mais qui dabord apparaît comme un ou plusieurs montages de mots, de notions, de rhétorique, didéologie. La consistance de ces montages successifs – me semble-t-il – est toute relative. On veut donner le sentiment que quelque chose est voulu ; mais la chose même est incertaine. Cependant, à travers les ratés, les paradoxes, les difficultés réelles des politiques publiques se dessine une tendance – certes contrariée – à prendre la mesure intellectuelle de la question technique, à progresser, de manière cahotique, de la raison computationnelle à 76linterprétation, dune vision purement instrumentale à la reconnaissance des subjectivités, du règne de laccès à lémergence de lexercice.

Litteratus, Literacy,
traduire « 
literacy »

On sait que, dans sa nouvelle acception, lexpression « culture numérique » nest rien dautre que la traduction de « digital literacy ». Peut-être trouvera-t-on ici quelque argument en faveur dune « culture digitale » ?

Comme le terme français « lettré », le terme anglais « literacy » est formé à partir du latin « litteratus ». Dans un article qui fait référence, le médiéviste Herbert Grundmann a analysé le couple litteratus-illiteratus. Jusquà la Renaissance du xiie siècle, « illiteratus » est celui qui ne sait ni lire, ni écrire, ni parler latin. Lillettré est donc assigné au monde extérieur à la culture écrite, culture dominante organisée autour de la religion, structurée par lÉglise et apanage des clercs. À partir du xiie siècle, le terme évolue : l« illiteratus » peut lire en langue vulgaire, mais il ignore le latin. « Laïc » est alors équivalent dillettré. « Litteratus » recouvre donc le triple étagement dune situation culturelle dominante : dabord – ce que lÉducation nationale appelle aujourdhui des « compétences » de base – les savoir-lire et savoir-écrire (les deux nétant pas à lépoque nécessairement appris simultanément) ; puis la maîtrise du latin, langue sacrée et littéraire, politique et administrative, bref, langue culturelle générique ; et finalement, lappartenance à la culture, au « monde lettré » des clercs, et à lorganisation ecclésiale.

Le terme anglais « literacy » hérite de cette complexité. Il signifie à la fois « alphabétisation », « culture écrite » ou « culture de lécrit », « culture lettrée ». On retiendra que « literacy » renvoie à trois polarités différentes : entre la possession ou non dun savoir initial ; entre la plus ou moins grande maîtrise dune culture écrite ; entre la compétence en soi et son usage social.

Dans le monde anglophone, le terme est dusage fréquent, en particulier dans des disciplines comme lanthropologie, et dans le domaine de léducation. Il y a des Literacy Studies, dont Goody est le représentant 77le mieux connu en France, et aussi des New Literacy Studies. Il faut enfin souligner que lUNESCO et les campagnes pour lalphabétisation ont largement contribué à la diffusion du terme et des études liées à la question.

La traduction de « literacy » a toujours posé des difficultés aux Français. Cest ainsi que le célèbre ouvrage de Richard Hoggart sur le style de vie des classes populaires anglaises sintitulait « The Uses of Literacy ». Publié par les soins de Bourdieu, il devint, dans la traduction de J-C Passeron « La Culture du Pauvre ».

Pourtant la langue française avait disposé autrefois (du xve au xviiie siècle) du mot « littérature » pour exprimer une connaissance acquise à partir des livres. Ce sens faisait suite au terme populaire et plus ancien de « lettreüre » (du xiie au xive siècle) ce qui a incité Emmanuel Souchier à proposer « lettrure » pour traduire literacy.

Dans le domaine de léducation, literacy a été traduit sans grandes difficultés par « alphabêtisation ». Néanmoins la nécessité de spécifier différents niveaux de défaillance de la culture écrite a suscité la distinction entre « analphabêtes » et « illettrés », centrale dans les politiques publiques et qui suscitait lire et les sarcasmes de Guy Debord.

Les scientifiques français placés devant la nécessité de traduire la « literacy » des Literacy Studies semblent opter de plus en plus, à linstar des Québecois, pour le néologisme de « littératie ». Valérie Peugeot, auteur du rapport du Conseil National du Numérique, utilise indifféremment « culture numérique » et « littératie numérique ».

Pourtant bien que les deux termes soient donnés comme des équivalents de « digital literacy », ils ne sont pas strictement interchangeables. Les Français utilisent en effet le terme de « culture numérique » depuis assez longtemps, dans une acception plutôt floüe, qui pouvait valoir pour des termes anglais qui nincluaient pas « digital », comme « computer literacy » ou « information literacy ». En revanche, la « littératie numérique » est non seulement une traduction, mais aussi une adaptation ou une adoption de la notion de « digital literacy ». Finalement les deux appellations souffrent des mêmes équivoques. Sur le versant culture/literacy : les politiques visent-elles un savoir dinitiation, ou le cursus entre cette initiation et une connaissance approfondie, lettrée ? Sur le versant numérique/digital : raisonne-t-on de manière homothétique, en visant une culture qui soit à lordre du 78numérique ce quest la culture écrite à lordre de lécrit ? ou souhaite-t-on, au contraire, insister sur la continuité de la culture numérique avec la culture écrite, voire son appartenance et la nécessité de son rattachement à cette culture écrite ?

Littératies techniques

Le point de départ de la première culture numérique, la « computer literacy », est le développement de lordinateur personnel, au début des années 1980. Avant cette date, on connaît linformatique des informaticiens, et des informatiques appliquées comme linformatique documentaire, éditoriale. Dans le Rapport Nora-Minc, qui date de 1978, au chapitre « LÉtat face à lacquisition du savoir et du savoir-faire », il nest question ni de culture informatique, ni de son enseignement.

Le premier ordinateur personnel est réalisé en 1981. Cette innovation entraîne très rapidement les premières initiatives de « computer literacy ». La première librairie spécialisée en « computer literacy », cest-à-dire en livres sur linformatique, ouvre à Sunnyvale (Californie) en 1983.

Dans le domaine de lenseignement, la « computer literacy » est attachée au nom de Seymour Papert et a été mise en œuvre en France en 1985 avec le Plan informatique pour tous. De la même époque datent les premiers clubs de micro-informatique2.

Bref la « computer literacy » accompagne très directement le développement de la micro-informatique personnelle. Dans sa conception, elle nest rien dautre que le savoir techno-scientifique des informaticiens adapté aux utilisateurs de lordinateur personnel, au travail ou à domicile. Le Dictionnaire Masson dinformatique de 1990 traduit « Computer literacy » par « connaissances en informatique » et « culture informatique ». Curieusement, si lauteur du dictionnaire propose pour « computer literate » un prudent « qui connaît linformatique », il cède au remords en traduisant « computer illiterate » par « profane en informatique », ce qui nous ramène au Moyen Âge.

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Quand au contenu, il sagit dune présentation de lordinateur comme objet technique et dune initiation à linformatique, les deux semblant inséparables. Partout on essaie denseigner des rudiments de programmation. Le Plan Informatique Pour Tous, avec ses deux volets (équipement, nanoréseaux et formation des professeurs), correspond bien à cette orientation.

En réalité, deux logiques se combinent : une logique disciplinaire (le développement de linformatique comme matière scolaire et discipline scientifique) et une logique industrielle (la diffusion du PC, au travail, puis au domicile).

Chacune rencontre ses propres difficultés ou contraintes.

Du côté de lécole, il savère partout difficile dintégrer linitiation à linformatique au reste du cursus, y compris en mathématiques3 Il est dailleurs assez visible que la prééminence de linformatique ne facilite pas la conception de la culture informatique comme culture technique. Prévaut lidée générale que la même initiation vaut comme transmission des savoirs élémentaires de la science informatique (« computer science ») et comme apprentissage de lusage des ordinateurs. Mais la démonstration pratique de cette prééminence de linformatique est paradoxale : la micro-informatique qui semble – par la diffusion de la technologie – appeler lalphabétisation informatique et la rendre possible, tend dautre part à la rendre superflue, en banalisant et la technique et lusage.

Les industriels, de leur côté, tout en promettant cette banalisation rapide de la technologie, mesurent que les difficultés daccès sont un obstacle au développement du marché. En même temps, la rivalité, voire lexclusivité des formations de type commercial, dans lesquelles Microsoft se taille la part du lion, forment un obstacle à la mise en place dune culture informatique commune même initiale. Finalement la tendance à la banalisation technique, suffisamment effective pour précariser les formations de type scolaire, savère trop lente pour éviter que le besoin dune initiation du grand public se fasse ressentir.

Ce décalage pèse dautant plus fortement sur la culture informatique, et sur sa légitimité, quelle a acquis le statut de figure centrale de toute la 80culture technique. Lépoque pense la technique à travers linformatique, et la culture technique à travers la culture informatique. Cest ainsi que Jacques Ellul après avoir envisagé favorablement le développement de la micro-informatique, technologie légère que lhomme pourrait sapproprier, en vient, à partir du même exemple, à poser lexclusion réciproque de la culture et de la technique.

Finalement la « computer literacy » aura été une première réponse approximative, précisément à la « computer illiteracy », terme traduit en français par « illettrisme informatique », ou par le fumeux néologisme « illectronisme ». Elle est évidemment loin davoir disparu, comme savoir initial des futurs informaticiens, mais aussi sous dautres formes comme les opérations « Code for children » au Royaume Uni. Les questions soulevées par cette première culture numérique des années 80 nont pas reçu de réponses comme le démontrent précisément les débats sur lenseignement du codage aux enfants.

Une autre orientation est représentée par le courant de l« information literacy », apparu, en ce qui concerne la France dans la seconde moitié des années 90. Il est porté par les spécialistes des sciences de linformation, et par les professionnels directement concernés, bibliothécaires et documentalistes. Dans un premier temps, cette « culture de linformation » ou « culture informationnelle » combine une initiation à lusage de lordinateur et aux transformations numériques de linformation, des éléments des savoir-faire professionnels, et des notions des sciences de linformation et de la communication. Elle joue sur les deux usages sociaux du mot « information » : celle des informaticiens et celle des journalistes. Les publics visés sont essentiellement les collégiens, lycéens et étudiants. Cest donc assez logiquement que l« information literacy » sest étendue à la formation nécessaire pour évaluer et qualifier les contenus éditoriaux numériques. En effet, à partir des années 2000, la nécessité de développer une démarche dappropriation critique (« critical thinking ») est de plus en plus associée à la culture informationnelle qui tend à rejoindre la culture numérique.

Une troisième littératie technique na pas acquis réellement droit de cité en France, bien quelle occupe une place importante aux États Unis et en général dans le monde anglo-saxon : cest la « media literacy ». La « media literacy » est évidemment ce que veut transmettre léducation aux médias mais son importance réside moins dans lintégration de 81lordinateur à cette éducation, que dans le mouvement, inverse et antérieur, dauto-reconnaissance de lordinateur comme medium. Ce sont en effet des professionnels de lordinateur qui vont imposer cette nouvelle définition : lordinateur personnel est un medium. Ils ne sont pas informaticiens ; en général ils se définissent plutôt comme des designers. Leur activité ne porte pas sur le codage, lalgorithme, ou le traitement automatisé des informations, objets traditionnels de linformatique, mais sur les interfaces homme-machine. Pour eux les écrans ne sont pas seulement des périphériques destinés à produire une image de contrôle des opérations de traitement des données : ils sont devenus les espaces où se constitue une nouvelle sémiotique des textes, des images fixes ou animées. À peu près ignoré par linformatique classique et ses terminaux passifs, ce secteur dactivité explose avec la micro-informatique. De 1990 à 1995, Brenda Laurel publie « Lart du design de linterface homme-machine ». Dans cet ouvrage collectif où écrivent certains des designers les plus célèbres, Tim Oren signe un texte intitulé « Designing a new medium ». Rapidement lordinateur est qualifié de multimedia.

Significativement les réflexions de certains designers de cet ordinateur-medium vont croiser les recherches duniversitaires, notamment dans le domaine littéraire. Lhypertexte va être ce point de croisement, de convergence même selon la formule de Landow, où la technologie de Ted Nelson devait, semble-t-il, rejoindre les théories de Roland Barthes. Ce croisement, réel ou heuristique, appartient à lhistoire intellectuelle plutôt quinstitutionnelle de la culture numérique. Il signe cependant toute une série de bifurcations qui distinguent clairement les deux types de culture numérique, « computer literacy » et « media literacy ».

Première bifurcation : il devient difficile de continuer à définir lordinateur comme un outil. Laccent est mis, dans un esprit proche de Mac Luhan, sur la publication, la circulation, les relations du texte et de limage avec leur support, le parallèle avec le livre. À côté des langages de programmation apparaissent toutes sortes dautres langages précisément pour décrire et organiser la dimension médiatique. Après les données et les informations, caractéristiques des deux premières cultures numériques, le texte, longtemps refoulé, revient dans la « media literacy » sous la forme de lhypertexte. Finalement, après lapproche computationnelle caractéristique de linformatique, sentrevoit la possibilité dune approche interprétative, comme herméneutique du texte et 82du medium numériques. Elle sappuie souvent sur une sémiotique et une sémiologie des écrans, au risque doublier, comme Katherine Hayles le fait remarquer, que si « le livre est plat, le code est profond ». Rappelons quà la même époque, dans lunivers scientifique, les « computer humanities » prennent le tournant des « digital humanities ».

Brève histoire des politiques
de Culture Numérique

Le thème de la Digital literacy / Culture Numérique stricto sensu apparaît au tournant du xxie siècle, dans le contexte dune politique publique américaine, imitée rapidement par les gouvernements européens.

Cette politique entérine lévolution technologique, le passage du PC au Web, et aux technologies numériques. Cest déjà ce quindique lutilisation de « digital » à la place de « computer ». Un des aspects centraux est lanalyse du Web, notamment sous la forme du Web 2.0, comme media. Non seulement lordinateur est reconnu comme un medium, mais le numérique tout entier apparaît comme une constellation de médias. Le « John Hopkins Guide to Digital Media » fournit une bonne illustration de cette tendance. Il propose des articles sur la réalité augmentée, les blogs, la génération de textes, les livres électroniques, les jeux, lhypertextualité, les réseaux sociaux, tous considérés sous langle des médias numériques. Le Guide fournit aussi des entrées sur des questions de méthode comme la « culture participative », les « software studies », les stratégies de lecture numérique. De fait, la culture numérique, en particulier aux États Unis, est soit rapprochée, soit confondue sinon avec la « media literacy », en tout cas avec la « digital media literacy ».

La « Digital Literacy » est une partie de la réponse imaginée aux États-Unis pour faire face à ce que le Vice-Président Al Gore désigne en 1996 comme le « Digital Divide » (« Fossé Numérique »). Certaines régions, certains milieux, certaines professions, certaines personnes sont menacés de rester à lécart du marché de la société de linformation. La réponse de Gore tient en deux points : généraliser les infrastructures et les accès ; créer des lieux où chacun poura faire son apprentissage de 83lordinateur et de linternet. Plus le marché intérieur se sera élargi, plus vite se fera cet élargissement, plus lavance technologique américaine se transformera en hégémonie économique. Cette prépondérance de la stratégie économique détermine la conception dune culture numérique de rattrapage ; il sagit dinitier les retardataires pour accélérer la formation et lunification du marché. La culture numérique relève dune alphabétisation, dun accompagnement des débuts pratiques, mais adossés, dans le contexte américain, aux savoirs et savoir-faire des universités, et des industries, et stimulés par la vitalité du contre-courant de la cyberculture.

À cet égard, limitation de cette politique par les Européens relève de la bévue : lintérêt des pays européens plaidait (et plaide encore) pour une culture numérique élevée, exigeante, qui contribuerait à compenser les retards économiques et technologiques. Mais limitation de la politique du rattrapage entraîne une més-interprétation de la « digital literacy » : comme il sagit effectivement pour lÉtat américain de consolider la construction du marché du numérique, les gouvernements européens en tirent la conclusion que la culture numérique est fondamentalement commerciale, et que lEurope doit en quelque sorte former ses consommateurs. Cette perspective – si elle présente lavantage de figurer une position de surplomb modernisateur à légard dune société qui tarderait à sadapter – apparaît néanmoins problématique, tant lidée de former, avec les deniers publics, les utilisateurs de biens et services commerciaux semble manquer de légitimité. Les pays européens, à commencer par la Commission, se sortiront du paradoxe en posant une double limite aux politiques contre le fossé numérique : dans lespace, en les concentrant sur les populations ou les personnes éloignées ; dans le temps, en préconisant dabandonner leffort dalphabétisation numérique dès que le marché, selon la formule convenue, « aura pris le relais ». Cette politique semble limiter la littératie numérique à un savoir-faire des commencements ; mais ces commencements nont pas de suite, puisque la consommation prend le relais. Finalement la culture numérique, contournée comme question est évincée comme projet. Ce fut, selon des logiques spécifiques, le sort des deux programmes français des espaces culture multimédia et des espaces publics numériques.

Cest donc avec une certaine surprise, et même de lincompréhension, que les responsables des programmes publics européens découvrirent la 84relance de la « digital literacy » par ladministration Obama dès 2009. Aussi bien peut-on parler dune seconde politique publique de la culture numérique, exposée, ici et là, dans nombre de documents officiels, et plus ou moins traduites dans des mesures concrètes et des procédures dintervention4. Tous ces documents comportent un certain nombre de points communs qui constituent en quelque sorte le nouveau paysage conceptuel de la culture numérique officielle. Ils diffèrent suffisamment des conceptions qui prévalaient auparavant pour quon puisse parler de réorientation, même si elle nest pas toujours explicitée.

Le premier point, absolument central, est labandon de lidée que la technologie, à travers le processus de banalisation commerciale, pourrait par elle-même emporter les savoirs et savoir-faire nécessaires. La relance de la politique en faveur de la culture numérique, en Europe comme aux États-Unis ou dans les pays émergents, signe clairement léchec de la politique du rattrapage, cest-à-dire dune action conjoncturelle, provisoire, pour combler le retard de certains pays ou léloignement de certains groupes sociaux dans leur utilisation des nouvelles technologies. Quinze ans après, il apparaît que les inégalités numériques sont loin dêtre résorbées. Du point de vue de laccès, la séparation entre connectés et non connectés sest réduite, sans toutefois disparaître, et se combine maintenant avec des profils déquipement et des types dusage très différents.

Dautre part, sil subsiste toujours des « retards » ou des inégalités numériques, derrière le même niveau apparent daccès peuvent se présenter des modes dappropriation très différents par leur construction, leur contenu ou leur consistance. Un certain consensus se fait, par exemple, dans les milieux américains de la « digital literacy », pour délaisser, voire récuser les thèses sur la maîtrise technologique de la Génération Y. Cette position nouvelle, éclairée par les travaux dEsther Argittaï, nest pas sans lien avec la politique éducative de ladministration Obama.

En même temps, les Américains comme les Européens constatent une insuffisance de la formation professionnelle au numérique. Cette 85insuffisance est un phénomène remarquable : il est quantitatif (manque de professionnels formés), et qualitatif (difficultés à fusionner les différentes « cultures de projet » ou manières de travailler). Mais si des entreprises depuis longtemps informatisées et connectées se demandent comment intégrer la culture numérique, peut-être nest-il plus temps de relier systématiquement celle-ci à la résorption du fossé numérique ? Contrairement aux orientations du « fossé numérique », la deuxième version de la culture numérique sadresse donc à tous et est nécessaire à tous.

Cette nouvelle approche sannonce par une orientation éducative ou pédagogique qui contraste avec la période précédente. Puisque, par elle-même, la technologie nemporte pas nécessairement le savoir ou le savoir-faire approprié, il faut trouver une autre entrée. Signant lapproche éducative, la notion de « compétences » (« skills ») est omniprésente dans les documents officiels. Cependant, en dépit des tentatives pour produire des cadres et des processus décrivant systématiquement ces compétences, une lecture même rapide permet de constater quaucun discours général des compétences nemporte une large adhésion. On peut, toutefois, dans les approches officielles, distinguer au moins deux tendances très différentes.

Les travaux de Henry Jenkins (2006), spécialiste des médias, illustrent bien ce quon pourrait appeler lapproche utilitariste dans la définition des compétences caractéristiques de la culture numérique. Jenkins en identifie plusieurs : le jeu, la performance, la simulation, lappropriation, le multi-tâches, la connaissance distribuée, lintelligence collective, le jugement, la navigation transmédia, le travail en réseau, la négociation. Par exemple, la performance est définie comme la capacité dadopter des identités alternatives au service dune improvisation ou dune découverte. La démarche de Jenkins consiste à analyser les savoir-faire caractéristiques du numérique comme des compétences sociales génériques, relevant de ce quil appelle la « culture participative ». Des commentateurs ont, à juste titre, qualifié la liste de compétences proposées par Jenkins de « social literacy ». Lapproche par la « littératie sociale » peut se révéler non seulement problématique, mais aussi passablement risquée comme base dune politique des pouvoirs publics, ou comme référence pour un opérateur économique. Pour que la démarche soit intéressante, les compétences identifiées doivent être particulièrement précises, significatives, ce qui, 86indéniablement, fait lintérêt du schéma de Jenkins, mais maximise le risque dune erreur dappréciation. Lautre risque est de produire une tautologie en interprétant en termes de compétences la photographie des traits significatifs, des styles de travail et de comportement dune population numérique donnée, dans un espace donné, à une époque donnée.

Dans un contexte où les aspects « négatifs » de linternet et du numérique étaient de plus en plus discutés, notamment aux États-Unis autour du livre de Nicholas Carr, lapproche utilitariste par la littératie sociale ne pouvait manquer dêtre discutée. En effet, une des différences essentielles entre le contexte des premières littératies (« computer literacy », « information literacy ») et celui de la littératie numérique est le passage dune situation de consensus assez général sur les avantages de lordinateur et du réseau, à une ambiance totalement différente, caractérisée notamment par des conflits stratégiques mal connus mais suffisamment aigus pour ne pas être ignorés par le public, des menaces sur les libertés, et un débat international sur les effets psychologiques et cognitifs négatifs dun usage mal maîtrisé du numérique et sa capacité à sarticuler avec la culture classique. Ce débat ne se limite pas au refus dune délégation incontrôlée à la technique. Il souligne les phénomènes daddiction, de narcissisme, de surcharge cognitive, de perte dattention. Alors que lordinateur avait pu être présenté comme un allié dans la critique des médias audiovisuels, la nouvelle économie de lattention se révèle comme un psycho-pouvoir suscitant une certaine toxicité du numérique, un formatage des usages, voire une régression de la technologie.

Le nouveau dissensus numérique ne se limite pas aux États-Unis. Il sexprime en Europe, par exemple, avec lévolution de certains pionniers de linternet, comme Geert Lovink, qui remettent en cause les effets politiques et culturels de lhégémonie de Google.

Si la littératie numérique « sociale », à la manière de Jenkins, connaît un certain succès dans le secteur de la formation professionnelle, elle ne répond pas aux questions caractéristiques du nouveau dissensus. Dautres approches vont sy essayer : au fond elles consistent essentiellement à revenir à la source de toute littératie, cest-à-dire à la culture écrite.

Cest le cas, par exemple, du « Livre Blanc sur la littératie numérique et médiatique » rédigé par Renée Hobbs pour The Aspen Institute (2010). Hobbs donne cette définition de la littératie numérique et médiatique : 87une « constellation de compétences de la vie quotidienne (“life skills”) nécessaires à une participation complète à notre société riche en information et saturée de médias ».

Ces compétences sont définies comme un ensemble de capacités :

faire des choix responsables et accéder à linformation en localisant et en partageant des matériaux et en comprenant linformation et les idées,

analyser des messages sous diverses formes en identifiant lauteur, le propos, et le point de vue, et en évaluant la qualité et la crédibilité du contenu,

créer des contenus sous diverses formes, en faisant usage du langage, des images, du son, et des nouveaux outils et technologies numériques,

réfléchir sur sa propre conduite et son comportement de communication en appliquant des principes de responsabilité sociale et éthique,

développer une activité sociale en travaillant individuellement et en collaboration pour partager la connaissance et résoudre des problèmes au sein de la famille, du travail ou de la communauté, et en participant en tant que membre à la communauté.

Bien quon puisse aussi définir ce type de compétences comme une autre forme de littératie sociale, elles sont bien différentes de celles de Jenkins. Deux différences au moins méritent dêtre soulignées. Les compétences correspondant à la culture écrite, à la littératie traditionnelle prennent une place importante même si Hobbs semble singénier à contourner les notions classiques. On remarque que les récentes initiatives françaises pour une « éducation numérique » tendent aussi à prendre en compte larticulation entre culture numérique et culture écrite. Le point de vue éthique, influencé par la philosophie de lempowerment et de la responsabilité civique introduit une autre différence avec lapproche utilitariste de Jenkins : il sagit bien ici de définir non seulement ce quest la culture numérique, mais aussi ce quelle devrait être. À travers lempowerment, la problématique des capacités – et en dépit de leur caractère souvent équivoque – la culture numérique tend à discerner les logiques dappropriation, dimplication. La « media literacy » avait introduit dans ce champ linterprétation du texte ou du medium ; la 88littératie numérique, bien quon soit encore loin de lherméneutique du sujet de Michel Foucault, en vient à reconnaître le rôle des subjectivités individuelles ou collectives.

Est-il temps déjà de tirer un bilan de cette littératie numérique officielle ?

Plusieurs évolutions importantes ont significativement transformé le parcours de ces politiques depuis une dizaine dannées : le passage de lordinateur au numérique comme objet technique de référence ; la nécessité dun effort de longue durée à la place de la politique de rattrapage ; labandon dune approche orientée technologie au sens étroit ; la nécessité daller au-delà dun simple savoir-faire dinitiation. On constate aussi une approche plus éducative, avec la nouvelle insistance sur les compétences ; un effort pour analyser les traits constitutifs de la littératie numérique sociale ; une insistance sur les aspects plus classiques de la culture écrite et leur évolution dans lenvironnement numérique.

Mais toutes ces transformations sont loin davoir été actées en bonne et due forme. Il nexiste pas de conception véritablement unifiée de la culture numérique. En témoigne la variété des littératies parfois évoquées : « media literacy », « technology literacy », « information, visual, communication, social literacies ». Le thème des « transliteracies » va dans le même sens.

Finalement la culture numérique officielle dans sa version la plus récente, la litératie numérique, reste une notion largement ouverte mais passablement imprécise. Son contenu et sa composition, sa construction et sa consistance sont mal établies.

Un schéma pour les politiques
en faveur de la culture numérique

Le schéma proposé ici ne consiste pas en une autre énumération des compétences caractéristiques de la culture numérique : il sagit plutôt dun cadre conceptuel général reposant sur plusieurs dimensions dont la combinaison permettrait de problématiser et comparer les différentes politiques en faveur de la culture numérique, et de proposer une ou plusieurs listes qualifiées de ces savoirs et savoir-faire. Il sagit en somme 89détablir les grands traits du cahier des charges dune politique publique en faveur de la culture numérique.

Trois dimensions génériques de la culture numérique doivent être prises en compte : la technologie, la formation et la pratique.

La conception de la technique est nécessairement le point de départ qui conditionne tout point de vue sur la culture numérique, tout modèle des compétences qui la composeraient, a fortiori, tout programme de formation : le concept initial de la technique devrait être explicité, ce quil nest que rarement.

Il convient de critiquer et écarter lillusion persistante selon laquelle la technique nest rien dautre quun régime de moyens, auquel il est loisible (« lordinateur nest quun outil », « la technique est neutre, tout dépend de lusage ») daffecter différentes finalités.

La société des hommes est médiatisée par la technique ; la technique participe à lindividuation des hommes. Et le numérique relève des techniques qui sont au cœur même de cette trans-individuation. Le système technique nest pas un ensemble dobjets, mais une relation, non seulement entre objets techniques – des ordinateurs et des réseaux – mais aussi entre ces objets techniques et les hommes. « On lie lhomme par la langue » : dit un proverbe fréquemment cité par Pierre Legendre. Cest la liaison de lhomme par la technique qui doit être pensée. La séparation entre « littératie technique » et « littératie sociale » revient donc à dissocier ce qui doit être pensé comme associé.

Les technologies du numérique devraient être définies de manière générique et synthétique, par une formule qui permette den saisir les multiples facettes, comme des technologies de lesprit, des technologies intellectuelles, cognitives et culturelles. Ce qui se joue du côté du numérique nest rien dautre que la vie de lesprit.

Les risques dune formation à la culture numérique réduite à linitiation ont été soulignés. Il ne devrait pas y avoir de confusion entre le savoir-faire initial qui conditionne la prise en mains par lutilisateur de lordinateur connecté, et les premiers éléments du savoir spécifique de la culture numérique.

Est-ce que pour autant, il serait suffisant de compléter cette initiation ? Les différents modèles proposés ont tendance à « alourdir les programmes », à déployer une sorte dambition encyclopédique dont lexplosion des literacies déjà évoquée forme le pendant.

90

Une vision différente de la formation à la culture numérique peut être envisagée. En tant que technologies de lesprit, les technologies numériques ne sont pas de simples services de la vie quotidienne dont lappropriation pourrait seffectuer en quelque sorte de manière spontanée, au fil de lutilisation. La culture numérique se prolonge à lhorizontale par la pratique – ou plutôt, comme on va le voir, par un certain type de pratique – et, à la verticale, par le développement de la personne, dans loptique de ce quon appelle lempowerment, la promotion des capacités, ou capabilités humaines. Le plan ainsi formé par ces deux directions est celui de la vie de lesprit dans une société qui sindividue autour de la technique et de la culture numérique. La culture numérique est nécessairement critique : elle ne sincline pas devant le formatage des techniques et des usages par lindustrie. Elle nest pas simplement objective, et encore moins instrumentale ; elle suppose et soriente vers une culture de soi, une implication du sujet. Ce sont là les fondements véritables dune formation sérieuse et humaniste à la culture numérique.

La culture numérique est une culture technique. Sa formation ne consiste pas dabord en savoirs extérieurs à la technique : ici la vieille notion d« art » demeure éclairante. Mais elle nen reste pas moins une littératie. Autrement dit, elle nest pas un univers de savoirs quune tendance centrifuge irrésistible éloignerait toujours plus du reste de la culture. Au contraire la combinaison entre les savoirs et savoir-faire qui composent la culture numérique, comme culture secondaire, et ceux qui relèvent de la culture classique, culture première, est une question absolument centrale de la littératie numérique. Penser la formation à la culture numérique nécessite dabord de penser la spécificité de son régime de secondarité.

Insister sur la dimension « pratiques » du schéma de la culture numérique, cest dabord rappeler que la culture numérique, comme toute culture technique, suppose une situation empirique et expérimentale : elle ne peut pas être acquise seulement dans les livres ou les revues ; elle nécessite d« aller sur le terrain », cest-à-dire de se mettre devant un ordinateur.

Mais il faut aussi souligner le rôle des pratiques – cest-à-dire des pratiques culturelles numériques – dans le développement même de la littératie numérique. Ce point est particulièrement important pour les lieux et organismes, tels que les espaces publics numériques en 91France, auxquels on a pu demander – dans la logique de rattrapage – de savoir dabord « faciliter laccès », puis « développer les usages », sans comprendre la nécessité dune construction de la culture numérique appuyée sur les pratiques.

La notion de pratique – et son application aux pratiques culturelles numériques – est ici la pierre de touche. Ce que, depuis Michel de Certeau, veut signifier cette notion de pratiques culturelles, cest lautonomie, quelle soit celle des destinataires des politiques publiques, du public ou des consommateurs de loffre industrielle de biens ou services culturels. « Pratique » veut dire : le public nest pas strictement déterminé par linstitution ou le marché. Cest cet écart entre une position de cible et une position active de sujet, qui révèle le projet dappropriation culturelle, distinct de celui dadaptation des habitudes du consommateur.

Le contexte des pratiques est donc décisif. Il faut sortir du modèle indifférencié de laccès, cest-à-dire de la consommation, et souligner limportance des lieux et des moments où sagencent la transmission et lappropriation par un sujet qui sefforce de construire consciemment une expérience de mise en pratique de la littératie numérique. La méthode et lexercice, à la place de laccès et de la consommation, sont les marques dune culture numérique parvenant à maturité et se reconnaissant comme culture de soi.

Alain Giffard

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1 Sur la culture numérique comme mouvement, je me permets de signaler le « Manifeste pour la culture numérique » écrit avec léquipe de lAssociation PING, en particulier Julien Bellanger et Thomas Bernardi, in : PING, Parcours numériques, 2014.

2 Le club MICA dAnglet, créé en 1985 existe toujours et fait partie des « Espaces publics numériques ».

3 Quinze ans plus tard, cette intégration savérait encore difficile. Le rapport Kahane sur lenseignement des sciences mathématiques indique ainsi (p 271) : « Si (le rapport) est suivi deffet, cest-à-dire si lenseignement des mathématiques en France intègre des concepts venus de linformatique et ranime des sujets que linformatique renouvelle, ce sera une première mondiale. »

4 En mai 2010, la Commission Européenne intégrait à son « Agenda numérique européen », un objectif intitulé « Renforcer la culture, les compétences et linclusion numériques ». Elle évoluait ensuite de cette perspective d« inclusion » vers une priorité à la formation professionnelle. – En France, le Conseil National du Numérique publiait, en novembre 2013, un rapport intitulé : « Citoyens dune société numérique » suivi de plusieurs recommandations, dont « Faire de la littératie (numérique) pour tous le socle dune société inclusive ».