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Classiques Garnier

La médecine computationelle entre savoir et biopouvoir

  • Publication type: Journal article
  • Journal: Études digitales
    2016 – 2, n° 2
    . Le gouvernement des données
  • Author: Corteel (Mathieu)
  • Abstract: Medicine is gradually moving away from taking care of bodies to tackle the virulence of disease within the socius. By combining heterogeneous data and real-time monitoring of patients, Big Data invites us to question the emancipation of the predictive capacities of the politicized medicine of the living. Doesn't the virtualized body in this new medicine erase the norm that previously organized it?
  • Pages: 139 to 156
  • Journal: Digital Studies
  • CLIL theme: 3157 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Sciences de l'information et de la communication
  • EAN: 9782406070641
  • ISBN: 978-2-406-07064-1
  • ISSN: 2497-1650
  • DOI: 10.15122/isbn.978-2-406-07064-1.p.0139
  • Publisher: Classiques Garnier
  • Online publication: 08-12-2017
  • Periodicity: Biannual
  • Language: French
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LA MÉDECINE COMPUTATIONNELLE
ENTRE SAVOIR ET BIOPOUVOIR

INTRODUCTION

Avec le tournant clinique du xixe siècle initié par Cabanis, Pinel, Laennec et Bichat, la médecine définit la positivité de son savoir par une approche nominaliste des maladies qui soppose à lessentialisme des nosologies du xviiie siècle. Lordre en tableau qui agençait les maladies dans le jardin des espèces disparaît à la faveur dun regard attentif aux variations des manifestations morbides. Selon la phrase célèbre de Corvisart : « toute théorie se tait ou sévanouit toujours au lit du malade1 ». Le malade alité dans lorganisation structurelle de lhôpital va permettre de faire émerger un savoir par lattention du médecin aux variations morbides. La maladie ne se dévoile dès lors quà partir de ce que lon pourrait décrire comme une herméneutique. Le médecin devient exégète ; la maladie une œuvre occulte dont on ne peut épuiser le sens. La plasticité propre à chaque corps définit une sorte dindividuation de la maladie dans la tension morbide des chairs. Le savoir médical sétablit à partir de cela dans une lecture dynamique qui met au jour la logique de composition des diverses pathologies. Les diagnostics et pronostics restituent par lanamnèse des symptômes et la fréquence des signes, lordre des effets de surface qui, à la lumière du visible, traduisent ce qui se cache dans la nuit du corps. Linvisible que lon recherche dans le jeu incessant du dévoilement morbide anime tout le savoir clinique dont Foucault a défini les traits caractéristiques dans son ouvrage de 1963, Naissance de la clinique.

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Il me semble que lorganisation du savoir mise en évidence par Foucault dans cet ouvrage prend le pas sur le développement de la médecine contemporaine dont je propose ici létude. Comme le met en évidence Foucault, lincertitude au fondement du savoir clinique va faire apparaître le calcul de probabilité dans lordre du discours médical.

La médecine (clinique) découvre que lincertitude peut être traitée, analytiquement comme la somme dun certain nombre de degrés de certitude isolables et susceptibles dun calcul rigoureux (…) la probabilité est sans cesse invoquée, comme forme dexplication ou de justification, mais le degré de cohérence quelle atteint est faible. La raison nest pas dans la théorie mathématique mais dans les conditions qui pouvaient la rendre applicable2.

Le champ hospitalier qui a pendant longtemps été en marge de la pratique médicale navait pas encore établi une cohésion suffisante au niveau du recensement pathologique pour appliquer correctement le calcul de probabilités au niveau de la population et de lindividu. En effet lhôpital fut durant le Moyen-Âge et la Renaissance un lieu dinternement pour les vénériens, les prostitués, les pauvres et les fous. Il effaçait de lordre social les déviants sans aucune perspective thérapeutique. Si bien quà la fin du xviiie siècle quand il devient un lieu de soin, la collecte des données pathologiques nétait pas unifiée ni formalisée. Le développement hygiéniste de la politique qui se développe au cours de ce siècle va définir une organisation paradoxale de lhôpital. Comme la montré Foucault dans la politique de santé au xviiie siècle, il y a une sorte de double dynamique qui sinitie : on tend à réhabiliter lespace hospitalier comme centre thérapeutique, et, lon ouvre lhygiène en dehors de lhôpital. Le développement de la médicalisation familiale par une acculturation de la population développe une ouverture du savoir médical dans les foyers. Lhygiène devient une préoccupation familiale. La famille se préoccupe davantage des enfants. Il y a comme le note Foucault une « obligation dordre physique (soins, contact, hygiène, propreté, proximité attentive) ; allaitement des enfants par les mères ; souci dun habillement sain ; exercices physiques pour assurer le bon développement de lorganisme3 ». De même la purification des villes 141va développer une réflexion sur les maladies endémiques produites par lenfermement. Lhôpital est ciblé et lon tend à trouver des alternatives par le développement de lhospitalisation à domicile et des dispensaires qui évitent lenfermement. Toutefois comme le note Foucault : « la disparition de lhôpital ne fut jamais quun point de fuite utopique4 ». Le pouvoir politique entend faire de lhôpital une machine à guérir dans lordre de la technologie dÉtat. Et je crois que cest précisément ce qui rend possible la collecte des données au niveau médical dun point de vue historique.

Lhôpital doit donc fonctionner comme une machine à guérir (…) dune façon positive, il faut lorganiser en fonction dune stratégie thérapeutique concertée : présence ininterrompue et privilège hiérarchique des médecins ; système dobservation, de notations, denregistrement qui permette de fixer la connaissance des différents cas, de suivre leur évolution particulière, et de globaliser ainsi des données portant sur une population et une période longue (…) lhôpital tend à devenir un élément essentiel dans la technologie médicale5.

Avec le développement du concept de « probabilité » lhôpital va progressivement améliorer lenregistrement des données médicales en vue de favoriser la connaissance des pathologies et daméliorer les soins. Un lien premier sétablit dès lors entre la combinatoire des données et la structure de lhôpital. Il y a comme une interdépendance. Selon la formule de Foucault : « une maîtrise conceptuelle de la probabilité en médecine impliquait la validation dun domaine hospitalier, qui, à son tour, ne pouvait être reconnu comme espace dexpérience que par une pensée probabilitaire6 ».

À mon sens ceci initie le programme de recherche médical qui va faire naître ce que je nomme une épistémê computationnelle dans lordre du discours médical. Et cest avant tout la structure hospitalière qui va permettre ce développement. Le calcul de probabilités est ainsi défini par une organisation structurelle de la technologie étatique en matière de santé. En effet, cette récolte des données définit par la société royale de médecine fait émerger le calcul de probabilités au niveau du savoir médical dans lélaboration de ce programme au cours du xixe siècle. Lépistémologie médicale ordonne le calcul de probabilité dans un agencement entre savoir 142et pouvoir au xixe siècle à la suite de la réorganisation des hôpitaux. Et cest seulement à partir de ce tournant initiant la biopolitique que se met en place une médecine prédictive ; dans le sens où cette dernière tend à développer des calculs de probabilités afin dorganiser lespèce et lindividu par une « gestion calculatrice de la vie7 ». Sorganise dès lors le biopouvoir entre discipline du corps individuel et régulation de lespèce. Selon les termes de Foucault : « dans les mécanismes mis en place par la biopolitique, il va sagir dabord, bien sûr, de prévisions, destimations statistiques, de mesure globales8 ».

Au xxe siècle alors que la médecine prédictive connaît un essor fulgurant avec le développement de la génétique, apparaît un tournant dans lorganisation des sociétés quil sagit ici de questionner. Gilles Deleuze dans un texte de 1990, intitulé post-scriptum sur les sociétés de contrôle propose un dépassement du modèle disciplinaire. La structure de lenfermement qui caractérisait la société disciplinaire seffacerait avec lémergence des théories de linformation et leur agencement au sein de la technologie dÉtat. Ce quil nomme « les sociétés de contrôle » définit selon lui lordre qui succède aux structures de lenfermement (hôpital, prison, caserne, atelier, école) dans lorganisation du pouvoir Étatique. Au niveau médical ceci aurait pour effet deffacer la structure hospitalière et son mécanisme denfermement, ce qui conduit, selon Deleuze, à une déconstruction de lindividu dans la connaissance des pathologies en formant un savoir portant sur ce quil nomme « une matière dividuelle ». Lon pourrait définir cette « matière dividuelle » dans la perspective du Big Data comme lensemble des données générées par les traces numériques dune population, et, traitées par un algorithme au sein dune organisation sémantique (modèle des métadonnées).

Dans le régime des hôpitaux : la nouvelle médecine « sans médecin ni malade » qui dégage des malades potentiels et des sujets à risque, qui ne témoigne nullement dun progrès vers lindividuation, comme on le dit, mais substitue au corps individuel ou numérique le chiffre dune matière « dividuelle » à contrôler9.

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Pour Deleuze, il y aurait un dépassement de lorganisation de lhôpital par le contrôle sur le potentiel pathogène. Cela signifierait que laspect disciplinaire de la biopolitique aurait disparu au xxe siècle pour laisser place à une administration générale de lespace dans lanonymat des données. Cest dans une perspective de rupture vis-à-vis de lordre du savoir-pouvoir disciplinaire que la société de contrôle apparaîtrait. À mon sens au niveau médical, on peut trouver des éléments qui problématisent cette approche. La médecine dans le dispositif biopolitique constitue précisément « un savoir qui porte à la fois sur le corps et sur la population, sur lorganisme et sur les processus biologiques, et qui donc va avoir des effets disciplinaires et des effets régularisateurs10 ». Comment donc sagence ce nouvel ordre sociétal ?

Les discours critiques sur le savoir-pouvoir du Big Data tels que les théories de la « gouvernementalité algorithmique » de Berns et Rouvroy se rattachent à mon sens à cette conception deleuzienne de la société de contrôle. Dans cette perspective la spatialisation de la maladie dépasse lhétérotopie de lhôpital. Comment donc expliciter la continuité et la discontinuité dans lordre du savoir et du pouvoir ? La spatialité de la maladie dans la société change-t-elle réellement ? Cest précisément ce que je tenterai dinterroger en mettant en évidence dans un premier temps le développement de lépistémê computationnelle dans le savoir médical à partir de lépistémologie foucaldienne de la clinique. Ceci nous permettra de comprendre comment lémergence de la probabilité établit un processus historique de différenciation entre la cognition humaine et la computation machinique qui va faire naître le Big Data en médecine. Enfin dans un second temps, jinterrogerai le dispositif de pouvoir qui entoure le Big Data dans le rapport à la biopolitique et à la société de contrôle.

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ÉMERGENCE DE LÉPISTÉMÉ
COMPUTATIONNELLE EN MÉDECINE

Le Big Data népuise pas la maladie. Il me semble quelle reste pour ce système comme pour la médecine clinique un « concept limitatif » – qui limite les prétentions à une connaissance universelle. Lon reste dans ce que lon pourrait appeler un savoir nominal de la maladie. Le savoir est dailleurs fondé sur les variations des maladies. Les ontologies sémantiques du Big Data doivent être flexibles pour bien comprendre les manifestations morbides. La subsomption dans des ordres sémantiques et sémiotiques se fait par des multiplicités parcourues de faits individuels ; cest précisément ce qui constitue le nominalisme clinique. Comme la mis en évidence Foucault, depuis le xixe siècle la sémantique qui spatialise et la sémiotique qui temporalise les maladies dans la positivité du discours médical, ne sordonne pas à des « universaux » mais à un système nominal. Le praticien produit par linférence empirique des symptômes un jugement synthétique a posteriori que lon nomme « diagnostic » – il spatialise la maladie dans le discours. Puis par le concours temporel de sa conscience, il produit une perception des fréquences autour des signes de la maladie. Il tend ainsi à restituer la logique de composition de la maladie par la formulation dun jugement synthétique a priori qui ordonne lensemble des signes dans la formulation du pronostic. Dès la naissance de la clinique le calcul de probabilités fait partie intégrante de cette perception des fréquences qui ordonne le pronostic. Comme lécrit Foucault « la clinique ouvre un champ rendu visible par lintroduction dans le domaine pathologique de structures grammaticales et probabilitaires11 ». Foucault en disant cela met en évidence un aspect qui me semble fondamental dans le savoir clinique, il sagit de ce quil nomme « le transfert des formes de lintelligibilité » :

Le modèle grammatical, acclimaté dans lanalyse des signes, reste implicite et enveloppé sans formalisation au fond du mouvement conceptuel : il sagit du transfert des formes de lintelligibilité. Le modèle mathématique est toujours implicite et invoqué ; il est présent comme principe de cohérence dun processus conceptuel qui sest accompli hors de lui : il sagit de lapport du thème de formalisation12.

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Dans le regard clinique il y a toujours et déjà une formalisation mathématique présupposée dans lordre discursif qui va au cours de lhistoire définir un transfert des formes de lintelligibilité humaine à celle de la machine. La latence de la formalisation mathématique est un aspect de la médecine clinique qui va permettre le développement technologique qui conduit à la médecine prédictive. Les signes cliniques définis par la fréquence sont toujours et déjà formalisés par le schème du nombre. Cest précisément ce qui constitue les données médicales. Les données en médecine ce sont des signes formalisés sous le schème du nombre. Cette épistémê va par la suite définir une distance narrative entre lordre grammatical et lordre probabilitaire. Les mots et les données vont se séparer à mesure que la technologie dobservation va se numériser. Les développements des théories de linformation qui conduisent à la génétique ainsi que les découvertes de limagerie médicale vont permettre dautonomiser la sphère du couple signe-donnée sous les traits de la computation. La capacité de calcul de la machine va sécarter de la cognition du médecin. Toutefois dans un premier temps, lon voit apparaître des systèmes experts qui entendent imiter la cognition du médecin. Le transfert entre la cognition et la computation apparaît historiquement dans une confusion première qui prolonge limplicite mathématique de lanalyse des signes.

La logique des raisonnements médicaux a fait lobjet de nombreuses et passionnantes études au cours des années 1970, lorsquon en espérait une possible informatisation du diagnostic ou, du moins, une aide de lordinateur à la décision. Le rêve de remplacer le médecin par un système expert sétant estompé, lassistance informatique au jugement médical sest ensuite déplacée vers limagerie et le vers le stockage dinformations13.

Il y a eu dabord dans le processus du transfert dintelligibilité, une confusion entre la cognition humaine et la computation puis progressivement lon sépara ces deux continents dans lordre de lépistémê computationnelle. Avec le stockage dinformation et les développements numériques de limagerie médicale à lorigine du Big Data en médecine, la formulation du jugement synthétique a priori du médecin sallie sans se confondre à la capacité itérative de la machine. Lensemble des examens paracliniques ou complémentaires se fait par le schème du nombre 146que traite la machine. Les données sont produites par une synthèse sémiotique pure qui détache le signe de la conscience temporelle du médecin pour entrer dans une temporalité machinique. Différence dans lordre du savoir entre la machine et lhumain. La machine calcul à une vitesse et un nombre de variables qui excèdent infiniment les capacités cognitives de lhumain. Ce qui permit un accroissement des capacités prédictives. Seulement, le médecin reste linstance légiférante dans le processus. Il initie les examens et discute les résultats. La machine nest quun instrument efficient qui définit lordre computationnel du savoir sans se confondre avec la cognition du médecin.

Ceci nous conduit à la définition du Big Data selon les cinq V. 1o V = Volume : le traitement sétablit sur une quantité de données de lordre du pétaoctets 1015octets. 2o V = Vélocité : le traitement des données se fait en temps réel. 3o V = Variété : les données sont hétérogènes. 4o V = Véracité, la qualité des données est importante ; il faut donc évaluer ces dernières pour savoir si elles sont erronées ou incomplètes. 5o V = Valeur, il sagit de lutilité des données pour les services auxquels elles sappliquent. Dans le domaine de la médecine clinique les points 4o et 5o sont cruciaux, car la validité des données et les ordres dimportance sont ce qui permet lefficience du système. Ces deux critères sont établis par la cognition humaine qui doit sassurer de la véracité et de la valeur des données. En cela la signifiance et la subjectivation humaine sintègrent dans lordre du savoir entre cognition humaine et computation machinique. La métaphore computationnelle qui comprend la machine et le médecin sous fond du Même sefface donc par un dédoublement du savoir entre computation et cognition.

Ainsi, une sphère propre est définie pour la machine. Lordre temporel dans lequel elle établit ses calculs échappe à notre sémantique. Par exemple, lorsque je recherche le mot « homme » sur Google le moteur de recherche trouve 4866 pages de résultat en 0,30 seconde. Il sagit bien dun calcul qui échappe à la cognition humaine. Seulement, le modèle organisationnel du page rank de Google fut constitué par un certain Larry Page. La computation est machinique mais lordre est humain. La constitution de modèles reste arbitraire et définie par le choix de lingénieur. Se déresponsabiliser de nos actes et des agencements du pouvoir en promulguant une autonomie totale de la machine relève de lhypocrisie. La machine permet lefficience dun ordre prédéfini par lhumain.

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Dans le cadre de la médecine le Big Data sorganise dans plusieurs domaines du savoir. Le traitement des données sétablit 1o en bioinformatique au niveau histologique et génétique ; 2o en neuroinformatique au niveau de limagerie cérébrale ; 3o en informatique clinique au niveau des données du patient et 4o en informatique de santé publique (Public health informatic) au niveau des données de la population. Chaque domaine définit une organisation des modèles dans la compréhension du pathologique. Lorganisation la plus arbitraire me semble être celle développée en informatique de santé publique sur létude des épidémies.

Ceci apparaît historiquement avec la cartographie dynamique des épidémies proposée par Jeremy Ginsberg14 (ingénieur chez Google). Le système de Ginsberg fonctionne par la combinatoire de données hétérogènes référencées selon les mots-clés se rapportant aux symptômes du virus. Comme les personnes infectées recherches généralement sur Google leurs symptômes afin de comprendre leurs maux, lalgorithme use de leur activité pour prospecter lévolution dudit virus. Cela change de fait le modèle de la surveillance sociale des épidémies. La perspective panoptique dès lors est couplée à une perspective synoptique. Le « flutrends » de Google qui en naquit fut loccasion dun véritable tournant biopolitique. Je pense que la conception de « matière dividuelle » développée par Deleuze et reprise par Rouvroy et Berns se manifeste pleinement dans ce modèle de data mining (exploration des données). Les traces numériques a-signifiantes sont par la suite organisées pour définir une prédiction sur des aspects sociétaux. Lorganisation de lespèce sétablit dans la virtualité propre à la temporalité et la spatialité de la computation. Comme lécrivent Rouvroy et Berns :

La mesure de toute chose est « dividuelle », à la fois infra et supra personnelle, rhizomatique, constituée dune multitude de représentations numérisées, potentiellement contradictoires entre elles et en tout cas hétérogènes les unes aux autres. Cest cet « être » numérique constamment décomposé, recomposé, composite, qui intéresse à présent directement le pouvoir15.

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LA BIOPOLITIQUE À LèRE DU BIG DATA

Le Big Data définit une double dynamique biopolitique. On le retrouve dans ce dispositif de pouvoir sur la vie à un niveau individuel ainsi quà un niveau collectif. Au niveau de lindividu, le suivi en temps réel des données biométriques du patient définit une discipline du corps médiatisé. Lon surveille le corps de lindividu en temps réel par un dispositif technologique. Le rapport clinique qui consistait dans la palpation, lécoute, et le regard direct est élargi par des techniques dobservation et de surveillance panoptique dans le sens ou une minorité surveille une majorité.

On peut établir cette médiation du regard médical dans la filiation historique du stéthoscope de Laennec et des techniques dobservation des variations morbides développées au xixe siècle. Par lécoute médiatisée du cœur Laennec faisait advenir le signe en labsence de tout symptôme. Lhypertension artérielle parfois asymptomatique chez le patient pouvait dès lors être perçue. La médiation par lutilisation de données en temps réel prolonge ce geste épistémologique par une surveillance étendue du patient. Seulement, à la différence du stéthoscope, avec le Big Data le signe prélevé est tout de suite converti dans la computation machinique en donnée. La temporalité qui était celle de la cognition du médecin disparaît de cette médiation pour rentrer dans une temporalité du temps réel ou, plus précisément, de la computation machinique. La relégation du corps dont on entend aujourdhui parler concernant limagerie médicale ou le calcul des données en temps réel me semble provenir de la disjonction entre la computation et la cognition. La temporalité et la spatialité de la machine diffèrent de celle permise par nos sens. Toutefois, lordre panoptique de la surveillance reste structurant pour ce dispositif ; il est médiatisé certes mais toujours présent dans son effacement.

Par exemple, pour ce qui relève des maladies non transmissibles, telles le diabète ou les maladies cardiovasculaires, elles font aujourdhui lobjet de systèmes de suivi en temps réel permettant de réguler la consommation des patients et de prévenir tous risques daggravation de la maladie (EPR « Electronic Patient Record »). On discipline le corps 149en établissant un système de surveillance par médiation au moyen dun support informationnel. Il y a une extension de la perspective panoptique dans le corps propre du patient. On retrouve ici le principe panoptique de leffacement de linstance surveillante dans le couplage de lhôpital et du moniteur numérique.

Lhôpital à mon sens ne disparaît pas et le regard médical non plus ; ils se transforment. Ils sétendent au-delà de la spatialité et de la temporalité humaine par la computation. La dimension computationnelle étend la discipline des corps en étendant la structure de lhôpital dans lespace privé du patient. Un jeu incessant sétablit dès lors non plus entre linvisible et le visible mais en le virtuel et lactuel. Les données virtuelles permettent dès lors lactualisation des corps dans lorganisation du pouvoir sur lindividu. Si un diabétique ou un individu cardiaque a un comportement à risque, on le lui signalera, et, si les données manifestent la venue dune crise, ce dernier sera reconduit à lhôpital. Le dispositif de surveillance sétend donc par la computation. À partir dune dimension proprement machinique le regard médical se développe dans un nouvel espace/temps.

Cet espace/temps sorganise dans un agencement normatif qui ne sétablit plus à mon sens dans la linéarité du couple possible/réel de la logique humaine mais dans la multiplicité du couple virtuel/actuel de la machine. Lordre du virtuel et de lactuel est à mon sens ce qui va définir la norme de la discipline et de la régulation. Cette dimension computationnelle va produire ces normes à partir dun principe de différenciation. Comme la mis en évidence Deleuze dans Diifférence et répétition le virtuel dans sa multiplicité va définir une individuation par un principe de différence en jeu dans le processus de lactualisation.

Lactualisation du virtuel se fait toujours par différence, divergence, ou différenciation (…) jamais les termes actuels ne ressemblent à la virtualité quils actualisent : les qualités et les espèces ne ressemblent pas aux rapports différentiels quelles incarnent ; les parties ne ressemblent pas aux singularités quelles incarnent. Lactualisation, la différenciation, en ce sens, est toujours une véritable création. Elle ne se fait pas par limitation dune possibilité préexistante (…) Sactualiser pour un potentiel ou un virtuel, cest toujours créer des lignes divergentes qui correspondent sans ressemblance à la multiplicité virtuelle16.

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Le problème pour la médecine prédictive devient ainsi le virtuel, le pré-pathologique, le potentiel à normer. La médecine prédictive par la computation qui porte sur une virtualité du corps va constituer la norme disciplinaire du biopouvoir qui porte sur lindividu au niveau infra-individuel des données. Ce qui par effet dindividuation définit à mon sens une discipline latente du corps. Lon retrouve ici le biopouvoir dans sa volonté de normer lindividualité par une actualisation de la « matière dividuelle ». On est là dans un mécanisme de contrôle qui nait dune extension du dispositif hospitalier et qui peut-être le conduira à disparaître par lextension du domaine de la normativité technologique. Mais ce nest là quune première interprétation de la biopolitique qui reste insuffisante.

La société de normalisation nest donc pas, dans ces conditions, une sorte de société disciplinaire généralisée dont les institutions disciplinaires auraient essaimé et finalement recouvert lespace – ce nest je crois, quune première interprétation, et insuffisante, de lidée de société de normalisation. La société de normalisation, cest une société ou se croisent, selon une articulation orthogonale, la norme de la discipline et la norme de la régulation17.

Cest dans ce croisement, je crois, que lon peut comprendre lorganisation biopolitique du Big Data. Comme nous lavons vu, au niveau individuel, une sorte de dispositif sintroduit dans le suivi en temps réel du patient. Lindividuation produite par la computation dans le couple virtuel/actuel se base à un niveau infra-individuel – les données sont ce qui actualisera la santé de lindividu ou du moins la norme disciplinaire. Au niveau de lespèce, la matière dividuelle est surpa-individuelle. On retrouve le dispositif sous la forme dune utilisation dune matière dividuelle, anonyme, asignifiante qui va permettre détablir une régulation par la prédiction, seulement, les données ici sont produites par la population elle-même. Cest par nos usages du web que laccumulation des données est permise. Au même titre que léconomie de lattention – le Big Data en santé publique va coupler lordre synoptique à lordre panoptique. Thomas Mathiesen, dans son article The viewer society, a mis en évidence quau tournant des années 1990-2000, la surveillance nest plus simplement organisée sous la forme du panoptisme. Avec lapparition des mass media la surveillance se conjugue 151à la synoptique, par laquelle la majorité surveille la minorité18. Ce qui est trompeur cest quau même moment où nous avons limpression de surveiller la minorité dirigeante par le moyen de linformatique toutes nos données sont accumulées dans des data centers et traitées pour établir des prospectives sur nos comportements sociaux, et au niveau sanitaire, réguler lespèce.

Dans le cas de la prédiction des épidémies on remarque que les données collectées sur Google ou encore Twitter permettent de définir lévolution en temps réel dune épidémie voire dune pandémie depuis sa source. Dans cette modélisation, les données sont organisées par un haut taux de volume, de variété et de vélocité, et un bas taux de véracité et de valeur. Cest là ce qui fait laspect le plus spéculatif du Big Data qui sélabore dans une capacité à établir des corrélations hasardeuses dans la masse hétérogène des données. Selon la formule de Peter Norvig (ingénieur chez Google) : « des modèles simples et une grande quantité de données surpassent des modèles plus élaborés fondés sur une quantité moindre de données19 ». Une étude de 201220 qui développa un système de collecte et de traitement des données à partir de Twitter (Social network enabled flu trends) a mis en évidence que laccumulation continue de données à partir des mots-clés permettait détablir des prédictions plus juste sur lapparition des grippes en les localisant précisément. Les données sont peut-être fausses ou erronées mais la masse permet dextraire une prédiction efficiente. Dans ce modèle, il sagit de définir des hot spot et dagir directement dessus avant la propagation de lépidémie ou de la pandémie. On retrouve ce principe de fonctionnement dans divers projets des organismes méta-étatiques tels que lOMS, lONU et LOCDE21. 152Il y a dans ces projets quelque chose de lordre de la gouvernementalité algorithmique de Berns et Rouvroy. Cette forme de gouvernementalité définit selon ces derniers un pouvoir latent, car lon impose une coercition douce, non pas sur lindividu, mais sur la « matière dividuelle » que constituent les données infra-indivudelles et supra-individuelles.

La puissance dun tel gouvernement réside donc dans son caractère essentiellement « inoffensif » : cest aussi à ce titre quon doit comprendre que ses sujets sont gouvernés par les traces quils laissent. Nulle naïveté ou paresse des sujets dans cette nouvelle forme de servitude volontaire (…) ce ne sont pas les sujets, les individus, qui se trouvent objectivés par les dispositifs dobservation et de prédiction, mais seulement – et cest en cela que le gouvernement statistique est inoffensif – leurs miroitements distincts et fragmentés, digitalisés, infiniment corrélables et donc « pertinents » à un niveau collectif (…) Ainsi fragmentés, « dividuels », les sujets deviennent eux-mêmes la source ultime, agissante, performante, de la construction du savoir qui porte sur eux, et des normes qui les régissent22.

Sous couvert de la computation on va dès lors pouvoir imposer une coercition qui sétablira sur la preuve a priori des données. Il y a un véritable problème dordre juridique qui va se mettre en place dans le sens ou le jugement va se former sur le dividuelle et non plus lindividuelle. En médecine le projet TBI (translational bioinformatic) entend développer dans ce sens une perspective biopolitique. Il sagit dun projet de mise en commun de toutes les données biologiques, cliniques, neurologiques et populationnelles afin de répondre aux questions de santé23. Ceci aurait à mon sens un effet de propagation de la norme de régulation au niveau de lespèce. Cest à ce moment-là que lon pourrait penser la fin de lorganisation hospitalière dans une organisation gouvernementale. On peut se méfier à mon sens de tels projets tant le développement de la surveillance de la population semble prendre une place prépondérante dans lordre sécuritaire des États. Le pouvoir latent dont parle Berns et Rouvroy est pertinent dans le sens où il porte sur une matière dividuelle. Car il est légal dutiliser des données anonymes (irréversibles) pour lutilisation de tels algorithmes. Les données personnelles médicales 153doivent faire lobjet dune anonymisation irréversible si on veut pouvoir les exploiter. Seulement, bien que les données soient anonymes et sans visages, lordre ou la modélisation va définir une norme de régulation. Car, la modélisation reste arbitraire dans le sens ou lon choisit détablir une norme pour faire corroborer le calcul.

Le logiciel PredPol qui permet lanticipation des crimes en identifiant des hot spot selon les taux de criminalités et des données hétérogènes, constitue un bon exemple pour comprendre ce problème. Le logiciel connu pour avoir fait baisser le taux de criminalité dans plusieurs villes telles que Chicago, sétablit en vérité sur une pétition de principe. Comme la montré Ismaël Benslimane24 PredPol ne comptabilise que les crimes constatés et ne répertorie que certains types de crime et de lieu. Lefficience du système est pour ainsi dire construite car le modèle est bien évidement biaisé de manière arbitraire. La cartographie dynamique est construite. Il y a un choix fait par les ingénieurs dans leur modélisation qui va définir lordre coercitif et légitimer lefficience du dispositif. Lon établit ainsi une norme englobante qui fait que tout le monde est potentiellement un criminel, et, lon identifie une norme plus restreinte qui déjà présuppose une criminalité dans certains espaces/temps définis – soi-disant par la computation. Cest précisément ce que fait PredPol pour se déresponsabiliser et justifier la coercition et les contrôles dans certains lieux publics.

Au niveau médical on pourrait voir apparaître quelque chose de similaire dans la mise en place de zones de quarantaine. Par ailleurs, la vaccination de populations à risque – selon lespace/temps définit par la computation – pourrait ouvrir la norme à des actes sanitaires auto-justifiés par le modèle qui leur confère un pouvoir daction immédiate. Le Big Data au niveau de la population semble dessiner une organisation arbitraire de la norme régulatrice dans un système qui se justifie par lui-même et élève au statut de preuve ce qui nest en réalité que de lordre du probable. Ainsi, lon produit par une organisation gouvernementale de la probabilité une sorte dhypostase de la prédiction algorithmique ; lon fait dun calcul qui a pour fondement lincertitude une certitude inaliénable.

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CONCLUSION

Il semblerait que le Big Data en médecine apparaisse en filigrane du nominalisme de la médecine clinique, et, quil tend par une extension biopolitique à se défaire de lagencement hospitalier. Les capacités prédictives permises par ce nouveau dispositif de pouvoir nourrissent le rêve archaïque dune gestion toute politique de la santé. Selon la formule : « Si elle sait être politiquement efficace, la médecine ne sera plus médicalement indispensable25 ». La virtualisation du corps sous le schème du nombre permet une propagation latente de la norme disciplinaire et de la norme régulatrice. Tout se fait sans douleur par lallégresse dune volonté analgésique de la population. Servitude volontaire sans visage dans le flot dune matière dividuelle contrôlée. Lépistémé computationnelle – naissant de lincertitude nominale – traversa de manière implicite le savoir médical durant plus de deux siècles pour se métastaser en une certitude politique. Au cours de son évolution discursive, la prédiction devint de plus en plus certaine dans le discours. La capacité machinique à concevoir le corps comme une matière dividuelle permit de comprendre lordre de composition des maladies dans une dimension spatiale et temporelle dépassant la cognition humaine, et lordre hospitalier qui la fit naître. La structure de lhôpital contenait en son principe, lévénement de sa fin prochaine.

Le transfert dintelligibilité – qui sétablit dans la différence entre cognition et computation – inscrit louverture de la médecine dans leffacement de la sphère hospitalière. La capture de cette technologie par lappareil dÉtat repousse les limites de la norme régulatrice dans lorganisation interne de la matière dividuelle. Comme lécrivent Berns et Rouvroy : « la norme est immanente au corps statistique, un corps infiniment multiple de chiffres dont le métabolisme algorithmique produit et affine en permanence des corrélations à partir des bases de données en perpétuelle expansion26 ». La norme simmisce dans 155la modélisation des données. Lordre virtuel va – par un processus dindividuation – normer le corps. Lorganisation sanitaire tend à sétablir dès lors dans la sphère virtuelle par une actualisation de la structure computationnelle du savoir. Le couple savoir-pouvoir sallie au couple virtuel-actuel dans une perspective pré-thérapeutique. On délaisse le soin par la prévention ; imposition douce de la biopolitique dans limplicite des données.

La computation qui tend à prédire ainsi les épidémies, sest perfectionnée de manière exponentielle depuis les années 2010. Ce développement fulgurant semble parachever le développement de la biopolitique dans un système qui se légitime par pétition de principe. La modélisation organise la norme de lindividu et de la population dans la déresponsabilisation computationnelle. Lhypocrisie qui consiste à déplacer larbitrage politique vers la machine définit une approche gouvernementale qui se revendique comme neutre axiologiquement. La machine est pourtant parsemée de valeurs. Seulement, comme lon travaille de plus en plus sur une matière dividuelle anonyme et sans visage, le pouvoir simmisce par-delà le corps dans sa virtualité. Le pouvoir norme le corps actuel depuis sa virtualité. Cest par lactualisation des corps que la norme disciplinaire et régulatrice sintègre dans la technologie dÉtat.

Seulement, ceci ne fait et surtout ne fera aucunement disparaître les maladies. Aucun savoir ne parviendra à spatialiser et temporaliser la maladie dans des ordres sémantiques et sémiotiques. Le développement computationnel entend développer des certitudes sur le sol marécageux de la maladie. Lincertitude en fragilisera toujours les fondations. La maladie ne sépuise par car elle est coextensive à la vie et au vivant. Elle parcourt les vivants dans lexpression historiale de sa morbidité depuis la nuit des temps ; elle est à la fois aurore et crépuscule. Sans visage ni parole elle module les corps. Comme lécrivait Hésiode :

Des tristesses errent innombrables au milieu des hommes : la terre est pleine de maux, la mer en est pleine. Les maladies, les unes de jour, les autres de nuit, à leur guise, visitent les hommes, apportant la souffrance aux mortels – en silence car le sage Zeus leur a refusé la parole27.

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La maladie na pas de parole. Elle marque les corps du sceau de lineffable. Traduire la maladie dans des ordres sémantiques et sémiotiques constitue le projet heuristique de la médecine. La beauté et la faiblesse dun art aussi fragile que nécessaire. On propagera la norme disciplinaire et la norme régulatrice dans le social, la maladie ne disparaîtra pas pour autant. Selon la formule de Foucault : « ironie de ce dispositif : il nous fait croire quil en va de notre libération28 ».

Mathieu Corteel

Université Paris-Sorbonne, (Paris IV)

1 J.-N. Corvisart, Préface à la traduction dAuenbrugger, Nouvelle méthode pour reconnaître les maladies internes de la poitrine, Paris, 1808, p. vii.

2 M. Foucault, Naissance de la clinique, Paris, PUF, Coll. Quadrige Grands Textes, 2009, p. 97-98.

3 M. Foucault, « La politique de santé au xviiie siècle » in Dits et écrits T. III 1976-1979, Paris, Gallimard, coll. Bibliothèque des sciences humaines, 1994, p. 19.

4 Ibid., p. 25.

5 Ibid., p. 26.

6 M. Foucault, Naissance de la clinique, op. cit. p. 98.

7 M. Foucault, Histoire de la sexualité I, La volonté de savoir, Paris, Gallimard, coll. Tel, 2011, p. 184.

8 M. Foucault, « Il faut défendre la société », Cours au Collège de France. 1976, Paris, Gallimard Seuil, Hautes Études, 1997, p. 219.

9 G. Deleuze, Pourparlers, Paris, Les éditions de Minuit, 1990, p. 247.

10 M. Foucault, « Il faut défendre la société », Cours au Collège de France. 1976, op. cit., p. 225.

11 M. Foucault, Naissance de la clinique, op. cit. p. 105.

12 Ibidem.

13 A. Fagot-Largeault, « Calcul des chances et diagnostique médical » in Médecine et philosophie, P.U.F, coll. Éthique et philosophie morale, Paris, 2010, p. 36.

14 Ginsberg, Jeremy, « Detecting influenza epidemics using search engine query data », Nature 457, 2009, p. 1012-1014.

15 A. Rouvroy et T. Berns, « Le nouveau pouvoir statistique » Ou quand le contrôle sexerce sur un réel normé, docile et sans événement car constitué de corps « numériques »…, Multitudes, 2010/1 no 40, p. 94.

16 G. Deleuze, Différence et répétition, Paris, PUF, coll. Bibliothèque de philosophie contemporaine, 1972, p. 274-275.

17 M. Foucault, « Il faut défendre la société », Cours au Collège de France. 1976, op. cit., p. 225.

18 Thomas Mathiesen (2008) The Viewer Society : Michel Foucaults “Panopticon” Revisited, reprinted in Chris Greer (ed.) Crime and Media : A Reader, p. 506–20. London : Routledge.

19 Viktor Mayer-Schönberg, Kenneth Cukier, Big Data, la révolution des données est en marche, Trad. Hayet Dhifallah, Paris, éd Robert Laffont, 2014, p. 53.

20 Achrekar H, Gandhe A, Lazarus R, Yu SH, Liu B (2012) Twitter improves seasonal influenza prediction In : International Conference on Health Informatics (HEALTHINF12). Nature Publishing Group, based in London, UK, Vilamoura, Portugal, pp 61–70.

21 Voir sur ce point, les rapports de lOCDE de lONU et de lOMS : OECD (2013), ICTs and the Health Sector. : Towards Smarter Health and Wellness Models, OECD Publishing ; ONU (2014), A world that counts : mobilising data revolution for sustainable Development, http://www.undatarevolution.org/report/, dernière visite décembre 2014 ; WHO (2011), Comparative Analysis of national pandemic influenza preparedness plan, WHO Publishing.

22 A. Rouvroy et T. Berns, « Le nouveau pouvoir statistique » Ou quand le contrôle sexerce sur un réel normé, docile et sans événement car constitué de corps « numériques »…, Multitudes, 2010/1 no 40, p. 97.

23 Chen J, Qian F, Yan W, Shen B (2013) Translational biomedical informatics in the cloud : present and future. BioMed Res Int 2013 : 8.

24 Ismaël Benslimane, Étude critique du système danalyse prédictive appliqué à la criminalité : PredPol, URL : http://cortecs.org/wp-content/uploads/2014/10/rapport_stage_Ismael_Benslimane.pdf, dernière visite septembre 2015.

25 Michel Foucault, Naissance de la clinique, Paris, PUF, Quadrige Grands Textes, p. 34.

26 A. Rouvroy et T. Berns, « Le nouveau pouvoir statistique » Ou quand le contrôle sexerce sur un réel normé, docile et sans événement car constitué de corps « numériques »…, Multitudes, 2010/1 no 40, p. 98.

27 Hésiode, Opera et dies, trad. P. Mazon, Paris, Les Belles Lettres, 1947, p. 89.

28 M. Foucault, Histoire de la sexualité I, La volonté de savoir, op. cit., p. 211.