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Classiques Garnier

Les climato-sceptiques sont-ils sceptiques ? Le doute, entre science et politique

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Éthique, politique, religions
    2014 – 2, n° 5
    . Scepticismes en politique
  • Auteur : Larrère (Catherine)
  • Résumé : Conséquence de l’entrée des développements scientifiques et des innovations techniques dans le débat public, le doute n’est plus seulement un outil et un moteur du travail scientifique, il est de plus en plus instrumentalisé dans l’agitation idéologique et dans l’action politique. Nous voulons ici examiner ce que l’on a appelé l’écoscepticisme, le doute jeté sur la réalité de la crise environnementale, et plus particulièrement sur celle du changement climatique et de son origine anthropique.
  • Pages : 119 à 138
  • Revue : Éthique, politique, religions
  • Thème CLIL : 3133 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Philosophie -- Philosophie contemporaine
  • EAN : 9782812433580
  • ISBN : 978-2-8124-3358-0
  • ISSN : 2271-7234
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-8124-3358-0.p.0119
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 29/11/2014
  • Périodicité : Semestrielle
  • Langue : Français
  • Mots-clés : sceptisme, écoscepticisme, climato-sceptiques, développement durable
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Les climato-sceptiques
sont-ils sceptiques ?

Le doute, entre science et politique

Depuis les années 1960, un nombre croissant de scientifiques ont attiré lattention sur les dégradations environnementales qui affectaient la planète dans son ensemble, et ces mises en garde ont été suffisamment prises au sérieux pour que les gouvernements sen préoccupent, notamment en désignant des experts pour étudier la situation et proposer des remèdes. En 1988, le GIEC (Groupe intergouvernemental sur lévolution du climat, en anglais IPCC) a été créé par le PNUE (Programme des Nations Unies sur lEnvironnement) et lOrganisation Météorologique Mondiale (OMM) pour faire létat des connaissances scientifiques sur le changement climatique, évaluer les risques liés à ce changement, en cerner les conséquences probables, et envisager déventuelles stratégies datténuation et dadaptation1.

Ces mises en garde et ces évaluations nont pas convaincu tout le monde. À la suite de la parution en anglais du livre de Bjorn Lomborg, LÉcologiste sceptique2, on sest mis à parler déco-scepticisme, pour désigner le doute porté sur la réalité ou la gravité des problèmes environnementaux, et lon a qualifié de climato-scepticisme, « laffirmation volontaire de doutes sérieux sur les consensus scientifiques en matière de climat », et, notamment, la dénonciation des rapports du GIEC3.

La dimension politique de ces contestations ne fait aucun doute. À partir du moment où, en réponse au diagnostic présenté, une action

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politique est envisagée (taxes ou régulations diverses), la question du climat ne relève plus de la seule compétence scientifique, elle fait partie du champ politique. Cest bien la pertinence des mesures (et des dépenses) pour faire face au changement climatique que visent ceux qui mettent en cause les rapports du GIEC. Politique, le climato-scepticisme lest aussi par la façon dont ses promoteurs mobilisent les médias et sadressent à lopinion publique. Non, ce qui fait problème, cest la qualification de sceptique. Ceux qui sattaquent aux jugements scientifiques sur le changement climatique, ou, plus généralement sur les questions environnementales, ne revendiquent pas vraiment le terme : lappellation d« écologiste sceptique » napparait que dans le titre anglais du livre de Lomborg, dont la version originale, en danois, se limite à présenter « le véritable état de la planète », et Claude Allègre adopte la même posture affirmative de celui qui peut dire le faux parce quil sait le vrai, lorsquil dénonce « lImposture climatique ou la fausse écologie4 ». Ceux qui acceptent les conclusions du GIEC jugent le qualificatif immérité : cest « dévoyer quelque peu le beau vocable de sceptique », considère Bruno Latour5, que de parler de climato-scepticisme, et en anglais on emploie plutôt le terme de « denial », ce qui est traduit par « déni » mais aussi parfois par « négationnisme6 ». Laccusation impliquée par ce terme est lourde7, aussi les sociologues, qui veulent prendre une position plus distanciée, préfèrent-ils faire référence à d« autres visions » ou à des « points de vue dissonants8 ».

La façon même de qualifier la contestation des rapports du GIEC ferait-elle partie du débat ? Le problème vient de ce que le climato-scepticisme relève à la fois du discours scientifique et du discours politique et la question est celle de son appartenance à lun des deux domaines. « Lun des ressorts de la manipulation climato-sceptique consiste à donner pour véritable controverse scientifique ce qui nen est quune contrefaçon arrimée à des

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visées idéologiques », déclare Olivier Godard9. Les climato-sceptiques sont des imposteurs, fait écho Bruno Latour, toute lentreprise est un « camouflage », une « mimicry comme on en voit chez les insectes10 » : ils se font passer pour les sceptiques quils ne sont pas. Ils prétendent occuper la place, reconnue et respectée, du doute scientifique à lintérieur de la démarche scientifique, mais sont en fait extérieurs à celle-ci, et lancent des accusations qui nont de portée que médiatique et de visée que politique. Faire passer pour une critique interne ce qui est une dénonciation externe, jeter le doute sur la science pour mieux intervenir dans le champ politique, telle serait la démarche climato-sceptique, qui ne pourrait donc pas, à bon droit, être dite sceptique, si par scepticisme on entend le doute intégré au processus de recherche, au point den faire « intimement partie11 ». Ne peut-on donc étudier la dimension politique du climato-scepticisme sans mettre en cause la dénomination même de sceptique ?

Pour répondre à cette question, il nous a paru utile de distinguer deux formes de contestations ou de débats : la controverse et la polémique12. La première se situe au sein de la communauté scientifique, la deuxième fait appel aux médias et intervient sur la scène publique. Lune a pour modèle le dialogue, lautre, la conflictualité. Nous verrons donc comment, faute davoir réussi à développer une controverse scientifique à lintérieur même du milieu scientifique, les climato-sceptiques ont lancé leurs attaques depuis le champ médiatique, en prenant à témoin lopinion publique. Mais si la contestation des résultats du GIEC, telle quelle a été menée, peut difficilement être qualifiée de sceptique, elle fonctionne bien comme une crise sceptique : elle conduit à retarder, voire à annuler laction. Cependant, en concentrant leurs attaques sur les incertitudes scientifiques, dans lidée de rendre inutiles les mesures politiques préconisées, les climato-sceptiques ne partagent-ils pas la conviction rationaliste que le savoir conduit à laction ? Si leur démarche peut difficilement être qualifiée de sceptique du point de vue cognitif, peut-on les considérer comme des sceptiques du point de vue pratique ? Cest ce dont on peut également douter, comme nous le verrons.

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Le rejet de la controverse

Claude Allègre affirme avoir droit au « doute scientifique13 ». Mais cest bien cette prétention qui a été rejetée par la très grande majorité du milieu scientifique, et cest la raison pour laquelle les accusations des climato-sceptiques nont pas provoqué de controverse à lintérieur de la communauté scientifique. Telle que Chateauraynaud et Torny la définissent, la controverse est le régime qui prévaut quand « des chercheurs et des scientifiques créent un espace commun pour la confrontation de méthodes et visant à qualifier, mesurer et interpréter les phénomènes14 ». Dans les questions climatiques, cet espace commun est celui de la recherche scientifique qui saccomplit, à travers le monde, dans les milliers de laboratoires qui se consacrent aux études portant sur le climat et dont le GIEC a pour vocation dexaminer les travaux, pour les synthétiser dans un très long rapport qui conseille certaines stratégies et dont le résumé est communiqué aux décideurs politiques. Cest tout au long de ce processus, impliquant communications, publications, conférences, que prend place la mise en cause constante des résultats, qui fait que la vérité daujourdhui est considérée comme lerreur de demain, et par laquelle le doute est intégré à la démarche scientifique. Les rapports du GIEC sont la synthèse, nécessairement provisoire, de ce processus en cours.

Les critiques, que lon a qualifiées de climato-sceptiques, ont porté sur les rapports du GIEC, les accusant de masquer les incertitudes, dexagérer la gravité du changement climatique, ou de se prononcer de façon trop assurée sur son origine anthropique. Ces critiques ne sont pas venues de lintérieur du processus de recherche, de lintérieur de lespace commun où les connaissances sont confrontées et modifiées, mais de lextérieur. Cest particulièrement net en France où, comme le rappelle Olivier Godard, les têtes de file des climato-sceptiques sont étrangers aux études climatiques, ou, tout au plus, comme cest le cas pour Allègre ou Courtillot, reconnus dans le domaine des géosciences, nont fait « que des incursions limitées et récentes dans le champ des

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études climatiques, quils ne connaissent pas bien15 » : les arguments quils présentent dans les médias débordent de beaucoup ce quils ont les moyens détablir. Aux États-Unis où les critiques portant sur les allégations de changement climatique sont beaucoup plus anciennes (elles ont précédé la constitution du GIEC), elles ont pu être le fait de scientifiques qui ont essayé de se faire reconnaître une légitimité égale à celle des experts climatiques du GIEC, mais ny sont jamais parvenus16. La contestation du changement climatique a toujours eu recours à des médias extérieurs au réseau des publications scientifiques pour se faire connaître.

Cela a profondément marqué le débat qui a entouré ces critiques : aussi bien les critiques que les réponses qui y ont été faites par des scientifiques ayant pris part au processus délaboration des connaissances climatiques ont toujours été adressées à un public de non-spécialistes. Comme « la vérification personnelle de résultats scientifiques approfondis reste évidemment hors de portée de tous les non-spécialistes (y compris des scientifiques dautres disciplines)17 », lobjectif est de rétablir la confiance dans ces porteurs de message que sont les membres du GIEC en tentant de convaincre le public que les erreurs ou les déformations prétendument relevées par les critiques rentrent dans le champ de ce qui, normalement, doit être repéré et corrigé dans le processus délaboration des connaissances. Il ne sagit donc pas dopposer des faits aux affirmations des climato-sceptiques, mais dexpliquer une démarche. Certes une réponse détaillée a été faite aux critiques portées contre les rapports du GIEC, une liste des erreurs commises a été fournie (notamment en ce qui concerne Allègre18), mais lessentiel de la réponse nest pas là. Celle-ci porte avant tout sur les méthodes employées (détablissement des données, de leur homogénéisation, de formulation des hypothèses, des formes et des raisons de la modélisation …) et sur les procédures détablissement du rapport (allers et retours entre les rédacteurs, appel aux critiques, possibilités de révision, discussions avec les politiques).

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Le thème constant des critiques faites au rapport du GIEC est quil ne tient pas compte des incertitudes qui pèsent sur linterprétation quil fait des phénomènes climatiques (augmentation du CO2, son lien avec le réchauffement, limportance du réchauffement, son origine anthropique, a-t-il déjà commencé ?), et quil présente comme assurée une interprétation hautement contestée. La question du traitement de lincertitude dans le processus scientifique est donc au centre de la réponse faite au climato-scepticisme : « Comment le GIEC gère-t-il les incertitudes scientifiques ? » se demandent Jean-Pascal Van Ypserle (vice-président du GIEC, mais « qui sexprime alors à titre personnel ») et Bruna Gaino19. Il sagit de montrer que lincertitude nest pas lignorance, quil y a différentes sortes dincertitudes et quelles ont leur place dans le processus scientifique. Incertitude et certitude peuvent coexister : Jean-Pascal Van Ypserle et Bruna Gaino rappellent que les rapports tiennent compte de ce qui est considéré comme acquis et ne laisse plus place à lincertitude (lexistence de leffet de serre, son renforcement du fait des émissions dues aux activités humaines), mais mentionnent également les nombreuses incertitudes qui demeurent (notamment ce qui concerne « le rythme, lampleur, la répartition régionale de lévolution du climat20 »). Parmi ces incertitudes, certaines sont irréductibles (celles qui résultent de décisions humaines), dautres tiennent à des problèmes structurels (dus aux limites de la modélisation), dautres, enfin, sont liées à linsuffisance des données. Lorsque lon ne peut pas réduire ces incertitudes (en affinant les données), on peut les affecter de probabilités, ce qui permet de tenir, avec prudence, un discours probabiliste. Enfin, quand on ne peut pas sappuyer sur une évaluation probabiliste quantitative, on fait appel à la confiance, dont le niveau est exprimé par des expressions très codées (confiance « très élevée », « élevée »), le niveau de confiance devant être mis en relation avec la précision des phénomènes envisagés (parler d« érosion de la biodiversité » en général, nengage pas à grand chose).

On voit donc que lincertitude, bien loin dinvalider les connaissances acquises, a sa place dans le processus de connaissance, ce qui permet à Paul Edwards (auteur dune étude de référence sur la construction de

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la science climatique21) de dire que la connaissance du climat planétaire « reste provisoire et imparfaite », tout en étant « réelle et forte22 » (parce quelle sappuie sur un réseau mondial de collecte des données). La mise en évidence des méthodes est donc inséparable de la présentation des procédures (de la collecte des données à la confection des rapports) qui elles-mêmes sont liées à lexistence dun réseau institutionnel qui est celui de la communauté scientifique. Cest bien parce que les climato-sceptiques sont extérieurs à ce réseau (quels que soient leurs efforts pour faire croire quils en font partie) que lon peut retourner contre eux les critiques quils adressent au GIEC, en leur montrant quils laccusent de faire ce que, eux font : chercher à « faire reconnaître comme dauthentiques propositions scientifiques des hypothèses scientifiques non étayées ou des mensonges établis23. » La dissymétrie entre les positions climato-sceptiques et les rapports du GIEC nest pas seulement celle des arguments, cest celle des situations institutionnelles, et cest pourquoi ils ne peuvent être placés à égalité. En effet, les règles du doute scientifique ne sont pas seulement des règles de méthode, ce sont également des normes éthiques. Dans léthique de la science, telle que la formule Merton au milieu du xxe siècle, le « scepticisme organisé » (pas dargument dautorité, ne se fier quà lexpérience, suspendre son jugement en labsence de preuves) figure à côté des autres règles, que sont luniversalisme, le communalisme et le caractère désintéressé de la recherche24. Ces règles sont censées régir la communauté scientifique mais elles ne peuvent régir que ceux qui se reconnaissent comme membres de la communauté scientifique. Cest au sein de cette communauté que le doute scientifique, qui permet de faire progresser les connaissances par réduction des incertitudes, peut être pratiqué. Claude Allègre, qui ne fait pas partie de cette communauté, na pas droit au doute scientifique, contrairement à ce quil prétend.

La seule objection qui demeure à la façon dont ceux qui soutiennent le GIEC répondent aux critiques des climato-sceptiques est que la démonstration de la capacité du GIEC à prendre en compte les incertitudes nest

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concluante que pour les doutes, ou les incertitudes, qui ont leur place dans le paradigme dominant des recherches climatiques. À supposer que la question qui jette le doute remette radicalement en cause ce paradigme, elle ne serait pas entendue et ne pourrait pas être traitée. Il est peu vraisemblable que les critiques formulées par les climato-sceptiques soient de ce type. Mais serait-ce le cas, cela les contraindrait à poursuivre un débat qui, pour les spécialistes des sciences du climat, na plus de raison dêtre, et donc à passer de la controverse à la polémique.

La caractéristique de la controverse, selon Chateauraynaud et Torny, est en effet sa capacité à se clore sur un nouvel état des connaissances : une controverse est « une configuration inventée pour stabiliser quelque peu lappréhension des phénomènes25 ». Le rôle de la controverse est de réduire les incertitudes, et elle réussit quand elle y parvient : les rapports successifs du GIEC enregistrent le progrès de connaissances qui permettent une réduction suffisante des incertitudes pour que lon puisse se prononcer avec certitude sur certains points : à ce niveau-là, le débat est clos. Alors que la communauté scientifique, dans son immense majorité, admet, dès les années 1990, lorigine anthropique du réchauffement climatique26, les climato-sceptiques tentent au contraire de maintenir le débat ouvert, et pour cela, il leur faut se placer sur un autre terrain. Naomi Oreskes cite une note dun stratège du Parti Républicain, aux États-Unis en 2003, qui affirme : « le débat scientifique reste ouvert… les électeurs pensent quil ny a pas de consensus au sein de la communauté scientifique27. » En relançant la critique et le doute, les climato-sceptiques sortent donc de la controverse scientifique, dont ils nont jamais réussi à faire vraiment partie, pour se placer sur le terrain de la polémique, qui, elle, est ouvertement politique.

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Une polémique sans sceptiques ?

La polémique, selon Chateauraynaud et Torny, se distingue de la controverse, « par la liste beaucoup plus hétérogène des protagonistes qui peuvent y intervenir [], lintense participation des médias à lorganisation des arènes ou des tribunes dans lesquelles sexpriment les désaccords », et le surgissement de « figures de dévoilement et de dénonciation qui sont normalement exclues de la controverse au sens strict28 ». Cela correspond bien aux querelles climato-sceptiques qui font très largement appel aux médias, font intervenir des personnages très divers et font délibérément prévaloir, dans les débats, la dimension conflictuelle sur la dimension dialogique29. Olivier Godard rappelle ainsi comment le discours climato-sceptique « mêle arguments dallure scientifique et arguments de critique sociopolitique, reposant très largement sur des attaques fantaisistes et des attaques ad hominem », ce qui est une façon de contourner la confrontation scientifique pour délégitimer la science du climat, globalement (« il faut supprimer le GIEC », déclare Allègre, peu après la conférence de Copenhague) ; les climato-sceptiques présentent le tableau des connaissances scientifiques à partir dune vision politique ou religieuse du monde, celle de camps, ou de clans (les « réchauffistes »), où lon dénonce des dogmes, une « pensée unique », le GIEC est même caractérisé comme une « mafia30 ».

Sur le terrain de la polémique, les climato-sceptiques jouissent dune position dégalité qui leur était refusée dans la controverse scientifique ; les journalistes (tout spécialement lorsquil sagit de journalistes de politique générale et non plus de journalistes scientifiques) la leur accordent pour des raisons d« objectivité31 » (il vaudrait mieux dire dimpartialité) : des règles de la controverse scientifique (où la liste des participants est limitée, où lon fait la distinction entre propos scientifique et opinion), on est passé à celles du débat public, où la distinction entre science et

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opinion na pas cours et où sont censés pouvoir intervenir tous ceux qui font usage de leur raison (même si, dans lespace médiatique, il ny a pas de véritable égalité entre des participants qui sont précédés – et accompagnés – par leur réputation, leurs réseaux de connaissance …). Dans ce débat médiatique, les scientifiques sommés de se défendre, nont pas la partie facile, il leur est impossible, explique Olivier Godard, « de démontrer avec les moyens de la science la fausseté des assertions professées par les climato-sceptiques ; il est seulement possible daffirmer que ces assertions sont erronées et sans fondement32. » Cela peut expliquer que Jean-Pascal van Ypserle, vice-président du GIEC (et auteur, dans le volume sur les Controverses climatiques, dun article sur la façon dont les incertitudes y sont prises en considération), ait refusé de participer à ce quil considérait comme « un débat faussé » à la radio-télévision francophone belge, avec Itsvan Marko, professeur à lUniversité de Louvain, et auteur dun livre à charge sur le climat33. Cela conduit à considérer les climato-sceptiques plutôt comme des sophistes (aptes à manipuler lopinion à leur avantage, en faisant appel aux sentiments et aux émotions et pas à la seule raison), non comme des sceptiques (qui utilisent des arguments rationnels pour mettre en cause des affirmations).

Cela montre en tout cas que lon a quitté lexamen des seuls arguments pour se placer sur un terrain indéniablement politique où il est loisible détudier les stratégies de ceux qui y interviennent. Cest ce qui a été fait pour le climato-scepticisme, aux États-Unis notamment, par Naomi Oreskes et Eric Conway. En étudiant les attaques menées contre le changement climatique et le GIEC parallèlement à dautres affaires qui ont fait également intervenir des scientifiques contre la majorité de leur communauté (quil sagisse de la mise en doute des effets cancérigènes du tabac, ou de la défense de lInitiative de Défense Stratégique – IDS, autrement dite guerre des étoiles – boycottée par les scientifiques), ils ont mis en évidence les caractéristiques communes de ces interventions34.

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Le cas du tabac est exemplaire. Lalerte scientifique lancée sur la nocivité du tabac et les mesures visant à en diminuer la consommation quil fallait prendre pour arrêter les dégâts ont mis en danger les intérêts des industries du tabac. La stratégie retenue a visé non pas à attaquer frontalement les connaissances scientifiques mais à instiller le doute quant à la validité des résultats présentés comme assurés. On montre quune corrélation statistique nest pas une preuve expérimentale, ou on insiste sur limportance des prédispositions génétiques au cancer du poumon : les deux propositions étant vraies hors contexte, cela les rend vraisemblables dans ce contexte, permet de détourner lattention ailleurs (on va financer les recherches sur les prédispositions génétiques) et daffirmer la nécessité de prolonger les recherches. Il importe également que les incertitudes ainsi suscitées le soient par des scientifiques, afin de leur donner une crédibilité scientifique auprès du public. Un portrait du scientifique convenant à ce genre dintervention se dessine : prestigieux, mais dune certaine façon en marge de la communauté scientifique, soit quil ait occupé depuis longtemps des postes dadministration de la recherche qui le tiennent en dehors de la pratique effective de la recherche scientifique, soit quun incident de carrière ou une controverse ne lui aient pas permis davoir le succès auquel il pensait avoir droit. Entre le scientifique et les intérêts politiques ou économiques sinterposent des organisations écrans, des think tanks, tel lInstitut Marshall, fondé par des chercheurs chevronnés, qui donne lapparence de la recherche désintéressée, et que lon retrouve dans une série dinterventions : la défense de lIDS, la mise en cause des pluies acides, de la déplétion de la couche dozone, ou du changement climatique.

Dans tous ces cas, on a appliqué la stratégie de lindustrie du tabac : insister sur le fait que la science nest pas sûre, quil nexiste pas de consensus entre les scientifiques, et quil serait prématuré ou inutile de prendre des mesures pour réduire le danger. « Le doute est notre produit » disait un mémo rédigé par lindustrie du tabac en 1969, et qui est parvenu à la connaissance du public : « il sagit du meilleur moyen de rivaliser avec lensemble des faits qui existent dans lesprit du public35 ». Pour désigner cette production délibérée dignorance, un mot a été inventé, celui dagnotologie36.

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Les « marchands de doute », ces « fauteurs dignorance37 » ne sont pas des sceptiques. En injectant sciemment de lincertitude, ils ont une connaissance assurée de ce quils veulent (pour les industries du tabac, continuer à produire des cigarettes). Aux États-Unis, le contexte politique de ces interventions est clair : cest celui de la défense du marché libre, et la condamnation de toutes les mesures réglementaires qui pourraient lentraver. Cest pourquoi la question environnementale, à partir du moment où elle en appelait à lintervention de lÉtat (et quelle avait dépassé, selon Naomi Oreskes, une première phase « esthétique » qui ne portait pas ombrage aux intérêts économiques et politiques des grandes industries) est devenue la cible des défenseurs du marché libre et notamment des Républicains qui ont fait de la dénonciation du changement climatique un de leurs arguments de campagne. La polarisation politique est très forte, aux États-Unis, autour de la question climatique, avec un clivage net entre républicains (qui mettent en doute le changement climatique) et démocrates (qui le prennent au sérieux). Le clivage va saccentuant : comme le montre létude de McCright et Dunlap, « la différence de 18 points entre les pourcentages de démocrates libéraux (67%) et de républicains conservateurs (49%) qui pensent en 2001 que le réchauffement climatique a déjà commencé à se manifester devient en 2010 une différence de 44 points – 74% pour les libéraux et 30% pour les conservateurs38. »

Une telle polarisation ne se retrouve pas en Europe, où il existe un accord entre politiques et scientifiques sur la réalité du changement climatique et où « les enjeux scientifiques du climat sont publiquement construits sur le registre du consensus » (la signature, en France, en 2007 du « pacte écologique » de Nicolas Hulot, par la grande majorité des candidats à lélection présidentielle en témoigne)39. La polarisation, jusque dans le milieu des années 2000, se ferait plutôt entre ceux qui ont connaissance du changement climatique (et qui y croient), et ceux qui lignorent, parmi lesquels on trouverait beaucoup dexclus de la

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mondialisation. Il ny aurait donc pas, à la différence des États-Unis de clivage politique net, entre droite et gauche, ou conservateurs et libéraux, mais plutôt une polarisation sociale, entre des élites cultivées, faisant confiance aux scientifiques, et des couches de population plus modestes, culturellement et socialement moins favorisées, qui ne sont pas au courant de ces questions. La percée du climato-scepticisme se ferait au milieu des années 2000, avant la crise financière, mais sera renforcée par léchec de Copenhague, en 2009. Lajout dun noyau issu de catégories plus favorisées aura pour effet de transformer une partie de cette ignorance en scepticisme passif (« jen ai entendu parler, mais je ny crois pas »), qui se déploierait aux extrémités de léchelle gauche-droite, provoquant une convergence entre climato-scepticisme et sentiment dêtre mis à lécart40.

Les climato-sceptiques actifs, ceux qui instillent le doute, nont pas daffiliation politique aussi claire quaux États-Unis : ils ne sont pas liés à un parti. Ils ne sont pas relayés non plus par des think tanks conservateurs, leurs interventions restent individuelles, portées par leurs personnalités propres. Plutôt quun ralliement à des positions néo-libérales anti-régulationnistes, on constate, chez eux, un attachement à des « valeurs productivistes, rationalistes, exprimant une forte défiance vis-à-vis de lécologie politique et une grande confiance dans la capacité des progrès technologiques à permettre de maîtriser ladaptation au changement climatique41 ». Cétait déjà lesprit de lappel de Heidelberg, signé en 1992, au moment du premier Sommet de la Terre à Rio, par de nombreux prix Nobel, qui proclamaient leur confiance dans « la science, la technologie et lindustrie ».

Cette configuration, plus idéologique que directement politique, nest pas absente des États-Unis. On y trouve en effet un certain nombre de climato-sceptiques partisans de la géo-ingénierie (des moyens techniques pour refroidir le climat, comme des projections de particules soufrées dans latmosphère par aérosols). Comment peut-on dire à la fois que le changement climatique nexiste pas ou quil est outrageusement surestimé et préconiser des moyens

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pour le réduire ? Cela montre en tout cas que le scepticisme des climato-sceptiques est très ciblé, puisque, à laffirmation dincertitude quant à certains résultats scientifiques, se joint la confiance dans les capacités techniques à faire face aux problèmes. On peut donc faire confiance à la science, quand elle se conjugue avec la technologie, lindustrie, et le marché libre comme le rappelaient les propos de Newt Gingrich (leader des conservateurs) en faveur de la géo-ingénierie : « La géo-ingénierie apporte la promesse dune réponse au changement climatique pour seulement quelques milliards de dollars par an. Au lieu de pénaliser les Américains moyens, nous aurions la possibilité de répondre au réchauffement climatique en récompensant linventivité scientifique … Stimulons lingéniosité américaine. Assez du diktat vert42. »

On veut bien admettre le réchauffement climatique si cela permet de stimuler lingéniosité américaine et de se passer de règlements. Si les climato-sceptiques ne sont décidément pas sceptiques sur le plan cognitif, le sont-ils du point de vue pratique ? Sinon leur stratégie, du moins ses effets peuvent-ils être dits sceptiques ?

Scepticisme et inaction politique

« Pourquoi la question des incertitudes est-elle importante ? » demandent Jean-Pascal van Ypserle et Bruna Gaino. « Parce que les décideurs ont besoin de pouvoir justifier leurs décisions et de mesurer les risques encourus suivant les différentes options. Conscient de ces besoins, le GIEC accompagne ses diagnostics dune description précise des incertitudes qui lentourent43. » Une telle distribution des tâches respecte le principe de la séparation entre lévaluation et la gestion des risques : le scientifique évalue et le politique décide. Mais, les experts du GIEC, qui, comme le remarque Valérie Masson-Delmotte, ne forment pas « une société savante », mais « une organisation tournée vers

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la production de rapports de synthèse44 », ne sen tiennent pas, en cas dincertitude, à la suspension de jugement que prescrit la règle du « scepticisme organisé », puisquils vont jusquà estimer, avec les degrés de croyance, une probabilité subjective. En transformant lincertitude en ignorance, les climato-sceptiques veulent imposer la suspension de jugement et ses conséquences : « dans le doute abstiens-toi » selon la locution populaire. Lobjectif des climato-sceptiques a toujours été, en mettant en doute le changement climatique, de rompre le lien entre le savoir et laction : « la base scientifique daffirmation de lexistence dun réchauffement dû à leffet de serre est trop incertaine pour justifier que lon prenne maintenant des mesures drastiques45 » déclarait, en 1990, après le premier rapport du GIEC, un des membres de lInstitut Marshall, que lon retrouve dans toutes les manipulations sceptiques, du tabac au réchauffement climatique. Étant donné les incertitudes, « il y a peu de risques à retarder les mesures politiques » faisait écho un journaliste conservateur, en 1992. Cest la même stratégie visant à retarder ou à annuler laction à légard du changement climatique que lon retrouve depuis. Les marchands de doute ne sont pas des sceptiques, mais ils visent à produire un effet sceptique, en empêchant laction.

Sans doute une telle annulation de laction ne peut-elle pas se faire, en politique, aussi radicalement quelle se fait, en morale, au niveau individuel, où la suspension du jugement conduit à lataraxie, à linsensibilité, à limmobilité, du sage sceptique. En politique, on ne peut pas sempêcher complètement dagir. Aussi considère-t-on généralement que leffet du scepticisme, en politique, cest le conservatisme. « Je hais la nouveauté », affirme Montaigne, qui reprend largument pyrrhonien de lobéissance aux lois de son pays. Cela nimplique pas un jugement positif sur celles-ci, mais simplement que ce qui est a, sur ce qui nest pas (devrait être, ou pourrait être), lincontestable avantage de lexistence, admissible même par des sceptiques. On sait de quoi il sagit, ce qui nest pas le cas de ce qui nexiste pas encore. À lépoque de Montaigne (comme à celle de Pyrrhon), ce qui est, ce sont les lois et coutumes dun pays, les mœurs anciennes, le mos majorum. Le conservatisme sceptique est alors traditionnaliste. Nous

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avons aujourdhui une conception plus dynamique de ce qui est, nous voyons la réalité comme un processus en cours. Le conservatisme daujourdhui cest de laisser se poursuivre ce qui est en cours, le « business as usual » que ceux qui sopposent aux mesures « drastiques » contre le changement climatique, préconisent. On peut donc à la fois être climato-sceptique (pour refuser le changement) et préconiser la géo-ingénierie qui fait partie de cette intrication dinnovation technique et de rentabilité économique qui caractérise le cours ordinaire des affaires, lalliance de la science, de la technologie, de lindustrie et du marché, sans intervention de lÉtat. La géo-ingénierie, comme la projection daérosols, ne requiert aucune entente interétatique, et peut même être le fait dentreprises privées.

Le climato-scepticisme, ainsi envisagé, tendrait plus à maintenir létat de choses existant quà empêcher que des mesures ne soient prises. Car il faudrait encore montrer quelles sont prises ou susceptibles de lêtre. Toute la discussion autour du climato-scepticisme suppose que lon admette un certain modèle de laction : diagnostic scientifique de la situation (rôle des lanceurs dalerte), évaluation des risques quelle présente, décision politique dintervenir. Cest dans ce schéma que les climato-sceptiques sont supposés intervenir en visant le moment où se forme le consensus qui commande laction. Et sans doute un tel schéma peut-il expliquer des actions environnementales réussies, comme linterdiction du DDT aux États-Unis, après la publication du livre de Rachel Carson, Silent Spring, au début des années 1960 : « un problème sérieux fut porté à lattention du public par un porte parole éloquent, et, agissant daprès les avis dexperts reconnus, le gouvernement a pris les mesures appropriées46 ». Faut-il pour autant considérer que les choses se passent nécessairement de cette façon ? « Doù vient cette idée que laction suit immanquablement la connaissance assurée ? » demande Bruno Latour, qui la juge naïve, et lui oppose la vision pragmatique où laction ne suit pas le savoir, mais où tous deux progressent dans leur interaction : « Laction et la connaissance vont de pair et marchent du même pas, explorant à elles deux, par une série de paris constamment relancés sur lavenir, lincertitude inhérente à toute situation47. »

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Avec la mise à mal de lidée que laction suit le savoir, tombe aussi la pertinence supposée de lattaque sceptique (prolonger le stade de la recherche pour retarder laction). Mais, du même coup, la question posée par le climato-scepticisme se déplace vers celle des motifs de laction. Car le climato-scepticisme existe, et il a des effets, mesurables : il a un public, moins important quon ne le craint parfois, mais existant48.

Une explication donnée au climato-scepticisme est celle de la dissonance cognitive. La théorie en fut formulée par un psychologue, Léon Festinger, à la suite de lobservation quil avait faite dune secte religieuse, dans les années 1950. Celle-ci avait annoncé que la fin du monde se ferait à une date précise par une inondation dont les membres de la secte seraient sauvés grâce à lintervention de lextra-terrestre dans lequel ils croyaient. Réunis le jour dit, pour attendre le vaisseau spatial qui devait les emporter, les membres de la secte ne changèrent pas leurs croyances quand ils ne virent ni inondation, ni vaisseau. Ils déclarèrent aux journalistes quils avaient reçu un message de lextra-terrestre leur annonçant que leur bonne conduite lavait convaincu de les sauver, eux et tous les Terriens, en renonçant à linondation. Festinger tire de là lidée que toutes les fois quune tension entre les éléments de lensemble mental dune personne engendre un inconfort psychique, « quelque chose doit être abandonné » pour réduire lattention ou la dissonance et rétablir lharmonie ou la consonance49.

Cest cette théorie que Clive Hamilton applique au climato-scepticisme, caractérisé comme une forme de déni. Il y a dune part le déni actif, celui de ceux qui répandent les arguments climato-sceptiques, en identifiant des complots, en ayant recours à de faux experts, en triant sur le volet les données et les articles scientifiques qui vont dans leur sens, en formulant des attentes impossibles à satisfaire par ce que la recherche scientifique peut prouver ou réfuter. Il y a, dautre part, le déni passif, celui du public. Cest surtout celui-là qui peut sexpliquer en termes de dissonance cognitive : la réalité du changement climatique remettant en cause non seulement les croyances mais tout un ensemble de modes de vie ou de façons de faire, on accueille toutes les raisons de ne pas croire au réchauffement : on cherche des boucs

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émissaires (en expliquant que ce sont les autres qui sont responsables : les Américains pour les Norvégiens, les Chinois pour les Américains, quant aux Français, ils se félicitent que grâce à lénergie nucléaire, ils ny soient pour rien), on entretient un optimisme irréaliste, mais conforme aux croyances acquises, dans les solutions techniques, on pense que, de toute façon, on ne peut rien y faire … Cest ainsi que, selon Clive Hamilton, « nous sommes tous des climato-sceptiques », nous refusons de croire à ce qui nous dérange trop et cherchons toutes les raisons de nous conforter dans la certitude que notre vie va continuer sans changement50.

Lexplication est conforme à la conception (sceptique) de David Hume, selon laquelle ce nest pas la raison qui nous fait agir, mais les sentiments ou les passions, et que la raison peut tout au plus éclairer nos passions, pour renforcer notre action51. Si bien que celui qui, finalement, se trouve le plus proche dun enseignement sceptique, ce nest pas un climato-sceptique, mais un critique du climato-scepticisme.

Le climato-scepticisme utilise, plus ou moins adroitement, des procédés visant à déstabiliser les savoirs acquis et à installer lignorance. Il le fait à des fins qui nont rien à voir avec la poursuite de la connaissance. Cest une démarche politique : en acceptant de discuter avec les climato-sceptiques, on risque dêtre piégés en leur reconnaissant une légitimité quils nont pas52. Les attaques sceptiques contre ce que lon appelle « la science du climat » natteignent pas leur but. Leurs dommages sont collatéraux. Lidée dun espace public où chacun pourrait faire usage public de sa raison et que gouvernerait une éthique de la discussion est remise en cause quand on découvre la diversité des régimes du débat : à ceux de la controverse et de la polémique, il faut aussi rajouter, comme le font Chateauraynaud et Torny, le procès (il y a eu des épisodes judiciaires du climato-scepticisme53) et la crise54 (on nest pas encore allé jusque-là). Mais le climato-scepticisme met également en cause le schéma darticulation du savoir et de laction par lintermédiaire de lexpertise

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sur lequel sappuient beaucoup décologistes et dans lequel ils placent leurs espoirs : du savoir de ce qui se passe, doit découler laction. Si cest celà la rationalité de laction, il est à craindre que nous soyons bien peu rationnels.

Catherine Larrère

Université Paris I –
Panthéon-Sorbonne,
Centre de philosophie contemporaine

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Bibliographie

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1 Voir les « Principles Governing IPCC Work » sur www.ipcc.ch.

2 Bjorn Lomborg, 2001.

3 Edwin Zaccai, François Gemenne, Jean-Michel Decroly (éd.), 2012, Controverses climatiques, sciences et politique, Paris. Dans cette publication dune partie des communications présentées à un colloque international qui sest tenu à Paris on octobre 2010, on trouvera une bibliographie des controverses climatiques, particulièrement, pour ce qui concerne la France, dans le chapitre rédigé par Olivier Godard (« Les controverses climatiques en France », p. 117-140).

4 Claude Allègre, 2010.

5 Bruno Latour, 2012 p. 14.

6 Aaron M. McCright et Riley E. Dunlap, « Déni organisé et polarisation politique autour des changements climatiques aux États-Unis », Controverses climatiques, p. 178, note 13 (NdT).

7 Puisquelle compare les climato-sceptiques à ceux qui nient lexistence des chambres à gaz pendant la deuxième guerre mondiale.

8 Jean Baptiste Comby, « Les médias face aux controverses climatiques en Europe », in Controverses climatiques, p. 159 (note 5).

9 Olivier Godard, « Les controverses climatiques en France », Controverses climatiques, p. 133.

10 Bruno Latour, Postface, Controverses climatiques, p. 246.

11 Valérie Masson-Delmotte, « Sciences du climat, Quelles sont les incertitudes qui font débat ? », Controverses climatiques, p. 56.

12 Nous empruntons cette distinction (qui donne au terme de controverse un sens plus restreint que son sens habituel) à Francis Chateauraynaud et Didier Torny, 2013, p. 80-83.

13 Claude Allègre, « Le droit au doute scientifique », Le Monde, 27 octobre 2006.

14 Chateauraynaud et Torny, Les Sombres Précurseurs, p. 80.

15 Olivier Godard, « Les controverses climatiques en France », in Controverses climatiques, p. 129.

16 Voir létude très détaillée de Naomi Oreskes et Erik M. Conway, 2010, chapter 6, « The Denial of Global Warming », p. 169-215.

17 Zaccai, Gemenne, Decroly, Controverses climatiques, introduction, p. 29.

18 S. Huet, 2010. S. Foucart, 2010.

19 Jean-Pascal Van Ypserle et Bruna Gaino, « Comment le GIEC gère-t-il les incertitudes scientifiques ? », in Controverses climatiques, p. 77-96.

20 Ibid., p. 83.

21 Paul M. Edwards, 2010.

22 Paul M. Edwards, « La complexité des données climatiques », in Controverses climatiques, p. 73.

23 Olivier Godard, « Les controverses climatiques en France », in Controverses climatiques, p. 132.

24 R. Merton, 1942.

25 Chateauraynaud et Torny, Les sombres précurseurs, p. 80.

26 Voir lenquête de Naomi Oreskes, « The scientific consensus on climate change. How do we know we are not wrong ? » in J. DiMento et P. Dougham, 2007, p. 65-100.

27 F. Luntz, cité par Naomi Oreskes, « Les marchands de doute aux États-Unis. Comment et pourquoi une poignée de scientifiques se sont mis en travers de la vérité sur le changement climatique », in Controverses climatiques, p. 98.

28 Chateauraynaud et Torny, Les sombres précurseurs, p. 82.

29 Selon Antoine Lilti, il y a deux paradigmes de la controverse (au sens large du mot) : le dialogisme et la conflictualité. Voir Antoine Lilti, 2007.

30 Olivier Godard, « Les controverses climatiques en France », in Controverses climatiques, p. 124.

31 Jean-Baptiste Comby, « Les médias face aux controverses climatiques en Europe », in Controverses climatiques, p. 164.

32 Olivier Godard, « Les controverses climatiques en France », in Controverses climatiques, p. 133.

33 Thierry Libaert et Dominique Bourg, « Faut-il débattre avec les climato-sceptiques ? » Le Monde, 23 octobre 2013.

34 Naomi Oreskes et Eric Conway, Merchants of doubt, ouvrage cité. Voir aussi David Michaels, Doubt is Their Product : How Industrys Assault on Science Threatens your Health, New York (NY), Oxford University Press, 2008, et Stéphane Foucart, La fabrique du mensonge, Paris, Denoel, 2013.

35 Cité par Naomi Oreskes, Controverses climatiques, p. 106.

36 Robert Proctor et Londa Schibienger, 2008.

37 Lexpression est de Robert N. Proctor pour qualifier les cigarettiers, entretien avec Mathias Girel, Critique, no 799, 2013, p. 996.

38 Aaron M. McCright et Riley E. Dunlap, « Déni organisé et polarisation politique autour des changements climatiques aux États-Unis », in Controverses climatiques, p. 182.

39 Jean-Baptiste Comby, « Les médias face aux controverses climatiques en Europe. Un consensus fragilisé, mais toujours structurant », in Controverses climatiques, p. 161.

40 Jean-Paul Bozonnet, « Le contre-récit climatique dans lopinion européenne. Émergence et signification sociale », in Controverses climatiques, p. 195-219.

41 Valérie Masson-Delmotte, « Sciences du climat. Quelles sont les incertitudes qui font débat ? », in Controverses climatiques, p. 46.

42 Cité par Clive Hamilton, 2013, p. 228.

43 Jean-Pascal van Ypserle et Bruna Gaino, « Comment le GIEC gère-t-il les incertitudes scientifiques ? », art. cité.

44 Valérie Masson-Delmotte, « Sciences du climat. Quelles sont les incertitudes qui font débat ? », in Controverses climatiques, p. 45.

45 Cité par Oreskes et Conway, 2010, p. 192.

46 Oreskes et Conway, 2010, p. 216.

47 Bruno Latour, Postface, Controverses climatiques, p. 248.

48 Voir les chapitres de Jean-Baptiste Comby et Jean-Paul Bozonnet dans Controverses climatiques.

49 Leon Festinger, 1957. Nous suivons ici la présentation quen fait Jon Elster, 2003, p. 48.

50 Clive Hamilton, « Nous sommes tous des climato-sceptiques », in Controverses sceptiques, p. 221-244.

51 David Hume, 1740, Traité de la nature humaine, III, I, I, 1993, p. 57.

52 Olivier Godard, « Les controverses climatiques en France », Controverses climatiques, p. 133.

53 Voir le chapitre 6 de Merchants of doubt, dOreskes et Conway.

54 Chateauraynaud et Torny, Sombres précurseurs, p. 83-85.