Aller au contenu

Classiques Garnier

Résumés

  • Type de publication : Article de collectif
  • Collectif : Esthétique de la guerre - Éthique de la paix. Un siècle de littérature sur la Grande Guerre
  • Pages : 305 à 309
  • Collection : Rencontres, n° 472
  • Série : Littérature des xxe et xxie siècles, n° 40
  • Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN : 9782406105831
  • ISBN : 978-2-406-10583-1
  • ISSN : 2261-1851
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-10583-1.p.0305
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 08/02/2021
  • Langue : Français
305

Résumés

Jochen Mecke, Pierre Schoentjes et Anne-Sophie Donnarieix, « Introduction. La littérature de la Première Guerre mondiale entre éthique et esthétique (1914-2020) »

La Grande Guerre a fait lobjet de nombreuses détudes, mais peu dentre elles se sont penchées sur la dimension esthétique des œuvres en question. À lheure où la page des commémorations de 14-18 a été tournée, ce volume se propose dinterroger lamplitude des formes et leurs évolutions de lépoque du conflit jusquà nos jours. La perspective se veut volontairement large, attentive au roman comme à la poésie, aux lettres, aux nouvelles, aux journaux, aux textes dramatiques ou aux films.

Jochen Mecke, « Les récits de la Grande Guerre. Forme narrative et éthique de lesthétique »

Cet article examine les romans classiques de la Grande Guerre écrits par danciens combattants dans une perspective éthique induite non pas par le contenu mais par la forme esthétique de ces textes. On montrera que limpassibilité des descriptions constitue une réponse à la question des possibilités de la littérature face à la description de la mort. Ce faisant, ces textes développent aussi une position éthique au travers dune poétique qui prend le contrepied des récits de guerre traditionnels.

Wolfgang Asholt, « Une esthétique avant-gardiste de la guerre ? Poèmes de guerre dApollinaire et de Cendrars »

Lavant-garde entretient une relation ambiguë avec la guerre. Les Futuristes italiens la saluent, les poèmes de guerre des Calligrammes de Guillaume Apollinaire en chantent les beautés et en font un paradigme pour lEsprit nouveau. Seul Blaise Cendrars, lautre représentant de lavant-garde poétique davant 1914, développe une position critique : « La guerre au Luxembourg » 306est lexemple dune distanciation (poétique) pendant la guerre et sous la censure telle que la pratiquent après 1918 les Surréalistes.

Thabette Ouali, « Esthétique et éthique dune écriture de la Grande Guerre. Les Croix de bois de Roland Dorgelès »

À partir de son expérience du front, Roland Dorgelès écrit un roman relatant des moments marquants, des impressions de vécu, dans une absence totale de morale ou didéologie. Il associe stratégie esthétique et perspective éthique. Le glissement de lécriture autobiographique à une écriture universelle inscrit le roman dans une visée testimoniale : contre loubli des frères darmes en mémoire dune guerre qui, bien que dévastatrice de lhumanité, révèle de ce quelle a de plus précieux, son humanité.

Johannes Klein, « Témoignages de la Grande Guerre dans les journaux et lettres du front. Le vrai, le bon et/ou le beau ? »

Le premier événement majeur de lhistoire où le témoignage se transforme en phénomène de masse est la Grande Guerre. De nombreux témoins affirment queux seuls peuvent raconter la vérité. Témoigner de la guerre, cest aussi un acte moral, et le « bon » correspond alors souvent au vrai, non au beau. Or les carnets et lettres ne possèdent-ils pas une certaine esthétique ? Et nentraîne-t-elle pas des problèmes éthiques concernant les relations entre le vrai et dautres interprétations du « bon » ?

Timothée Pirard, « Guerre et esthétique du dégoût chez Céline »

En héritier de Nietzsche et Bergson, Céline confère à la sensibilité une primauté sur lintellect. Comment ce point de départ fondamental dans lappréhension du monde donne-t-il un caractère particulier à sa représentation de la guerre, expérience extrême de lesthétique et de léthique ?

Jean Kaempfer, « Le tueur timide »

La représentation de la mort volontairement infligée est rare, dans les récits de la Grande Guerre, où elle se cantonne pour lessentiel aux scènes dassaut. À chaque fois, elle fait lobjet dune effervescence axiologique notable : cest 307que, dans le corps à corps, une fureur guerrière se réveille, qui rapproche le soldat de lassassin. Comment résorber cette équivalence ? De leffroi pacifiste à lexaltation épique, les réponses varient…

Teresa Hiergeist, « “Mon cheval, ce grand malheureux”. Le cheval comme figure de réflexion éthique dans les textes littéraires de lentre-deux-guerres »

Historiquement, les chevaux sont étroitement liés aux conflits militaires, mais les innovations techniques de la Grande Guerre sonnent le glas de cette ère et les chevaux disparaissent des champs de bataille. Ce changement laisse des traces dans leurs représentations littéraires : sils reflétaient avant souvent lhéroïsme de leurs propriétaires, ils deviennent désormais des figures critiques du progrès civilisateur, de conflits de conscience et dune opinion ambivalente face à lÉtat.

Daniel Aranda, « Un “spectacle magique et terrifiant”. Les zeppelins dans la littérature de guerre française entre 1914 et 1918 »

De 1914 à 1918, la littérature populaire française représente les zeppelins comme autant dincarnations des tares de ladversaire germanique. Transformer leur activité belliqueuse en spectacle de foire permet de désamorcer leur capacité de nuisance. Objets tératologiques, les dirigeables allemands suscitent la répulsion esthétique comme la réprobation morale. Leur mise à mort est le dénouement obligé des scènes où ils apparaissent, sans que la compassion ne doive saisir le héros ou le lecteur.

Tamar Barbakadze, « Catherine Colomb et Virginia Woolf. “Raconter” la guerre à travers des métaphores »

Woolf et Colomb se défient des mots, auxquels, à leurs yeux, peuvent être attribués des significations ambiguës, essentiellement à lépoque moderne. Face aux conflits « sans précédents », dans leurs romans, la réalité historique reste implicite, esthétisée, cachée sous les métaphores. Cette contribution cherche à comprendre quelles alternatives Woolf et Colomb proposent aux modes de représentation du phénomène de la guerre et quels médiums elles utilisent pour en exprimer le caractère grotesque.

308

Nicolas Bianchi, « En rire, malgré tout ? Éthique dun rire romanesque de la Grande Guerre »

Peut-on rire de la Grande Guerre ? Voilà lune des brûlantes questions éthiques que ne manquèrent pas de soulever les nombreux romans que produisirent soldats et écrivains de larrière depuis le conflit. En étudiant leurs seuils, leur réception ou leur inscription dans un champ littéraire en pleine mutation, le présent article entend éclairer les résistances quils rencontrèrent, mais surtout la grande tolérance dont ils bénéficièrent, pour de multiples raisons quil sagira ici de préciser.

Christian von Tschilschke, « La défiguration comme défi éthique et esthétique dans les représentations littéraires et cinématographiques de la Grande Guerre »

Comment les récits littéraires et audiovisuels de la Grande Guerre arrivent-ils à traiter le phénomène à la fois éthiquement et esthétiquement provocateur des « gueules cassées » ? Afin de répondre à cette question, lanalyse sappuie sur un corpus qui va des récits « classiques » jusquà La Chambre des officiers (1999) de Marc Dugain, adapté à lécran en 2001, et qui marque un tournant dans lhistoire de la représentation des blessés du visage.

Stefan Schreckenberg, « Éthiques et esthétiques de la Grande Guerre chez des auteurs de la génération des petits-enfants »

Contrairement aux écrivains-combattants qui veulent témoigner des horreurs de la Grande Guerre, la génération de leurs petits-enfants cherche à réaliser le deuil et à se réconcilier avec le passé sans perdre de vue les responsabilités éthiques qui accompagnent cette entreprise. Au début du xxe siècle, alors que les derniers témoins ont disparu, la Grande Guerre devient un lieu de mémoire culturel. La contribution se propose danalyser trois romans de Claude Simon, Jean Rouaud et Jean Echenoz.

Anne-Sophie Donnarieix, « Articuler le cri. Voix et voies narratives de la Grande Guerre chez Laurent Gaudé »

Si elle reste marquée par lœuvre des écrivains-témoins, la littérature contemporaine sur la Grande Guerre ne répond plus aux mêmes enjeux 309qualors : il sagit moins de décrire la guerre que de sonder à travers elle la douloureuse mémoire du siècle passé, et dinterroger les formes à donner au texte littéraire pour quil y parvienne. Le roman de Laurent Gaudé, Cris (2001) en propose un exemple innovant, en développant un langage empêché qui vient paradoxalement dynamiser les voies/x du récit.

Abdoulahi Aissatou, « Dire la guerre. Le Clézio et la quête itérative de la paix »

Lœuvre de Le Clézio est habitée par le thème de la guerre. Il sagira dans cette contribution danalyser la représentation de la Grande Guerre, décrite selon une visée panoramique, au front comme à larrière, pendant et après le conflit. En analysant les procédés de réécriture et les répercutions aussi bien physiques que psychologiques de la guerre sur les soldats et les civils, on montrera aussi comment la structure narratologique permet de souligner le pacifisme de lauteur.

Thomas Keller, « De LHomme que jai tué à Frantz. La paix naura pas lieu »

À travers lanalyse de la pièce LHomme que jai tué (1921) de Maurice Rostand, du film Broken Lullaby (1932) dErnst Lubitsch et du film Frantz (2016) de François Ozon, cet article veut revenir sur lhistoire dun fantasme : celui du soldat français, vivant, qui vient remplacer dans sa famille le fils allemand mort. Un fantasme qui repose sur lidéal dun projet réconciliateur entre la France et lAllemagne, et dont lesthétique cinématographique met aussi à jour les limites.

Pierre Schoentjes, « Modeler une autre guerre. Glaise de Franck Bouysse : 14-18, lart et la nature »

Prolongeant ici ses études en écopoétique, Pierre Schoentjes lit Glaise de Franck Bouysse sur la toile de fond du Grand troupeau de Jean Giono. En déplaçant la perspective en milieu rural, le roman de Bouysse illustre aussi que la littérature contemporaine de notre début de xxie siècle est moins réticente que par le passé de prendre pour sujet cette nature campagnarde… un temps suspecte en raison des compromissions éthiques et esthétiques du roman du terroir.