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Classiques Garnier

Interprétations allégoriques et communauté discursive dans l’Ovide moralisé

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Encomia
    2019 – 2021, n° 43
    . varia
  • Auteur : Deleville (Prunelle)
  • Résumé : Le rapport qu’un remanieur entretient aux sources de l’œuvre qu’il réécrit est un puissant révélateur du discours qu’il veut construire. L’auteur de la version Z de l’Ovide moralisé inscrit ainsi son interprétation des fables ovidiennes dans le sillage de la querelle autour du Roman de la Rose. Son traitement du mythe de Pygmalion, pour lequel le premier auteur emprunte à Jean de Meun, lui offre notamment l’occasion de défendre l’amour conjugal contre l’avis de l’auteur du Roman de la Rose.
  • Pages : 87 à 101
  • Revue : Encomia
  • Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN : 9782406130949
  • ISBN : 978-2-406-13094-9
  • ISSN : 2430-8226
  • DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-13094-9.p.0087
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 24/08/2022
  • Périodicité : Annuelle
  • Langue : Français
  • Mots-clés : réécriture, allégorie, Pygmalion, tradition textuelle de l’Ovide Moralisé, réception de l’Antiquité, Roman de la Rose
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Interprétations allégoriques
et communauté discursive
dans lOvide moralisé

La riche tradition textuelle de lOvide moralisé, qui nous est parvenu par une vingtaine de manuscrits, ne cesse de susciter lintérêt des chercheurs. Létude de cette tradition, initiée par C. De Boer et F. Branciforti au début du xxe siècle, sest prolongée grâce aux travaux de M.-R. Jung puis grâce à ceux du groupe de recherche Ovide en français (OEF).1 Depuis quelques années, létude des sources de lOvide moralisé a connu un même regain dintérêt.2 Les recherches de lOEF conjuguent aujourdhui létude la tradition textuelle de lOvide moralisé 88à celle des sources de ce même texte.3 Le présent article sinscrit dans cette dynamique fructueuse. Nous avons ainsi souhaité interroger les possibles sources de lOvide moralisé, et dautres encore, à la lumière dune version atypique de la tradition manuscrite, celle de la famille nommée Z dans le stemma. Elle se compose de quatre manuscrits qui séchelonnent de lextrême fin du xive siècle jusquaux alentours de 1456. Le texte de ces copies présente une véritable réécriture de lOvide moralisé.4 Dun point de vue structurel, des interprétations historiques ont été ajoutées, dautres développées et le récit de la fable est parfois remanié. Au sein de ce groupe Z, deux représentants, Z3 et Z4, ne donnent pas à lire les allégories spirituelles constitutives de lOvide moralisé. Les trois aspects que lon retrouve dans Z3 et Z4 (suppression de la spiritualité, goût pour lhistoire et remaniement de la fable) impliquent et traduisent une lecture des Métamorphoses différente de celle que propose celui que nous appellerons lauteur original de lOvide moralisé, par opposition à son remanieur.5

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Cest cette nouvelle lecture que nous étudierons. En cherchant à savoir si le remanieur puise aux mêmes sources que lauteur original, nous voudrions cerner la communauté textuelle mais aussi discursive à laquelle se rattache ce nouvel auteur. Par communauté textuelle, nous entendons les textes que le remanieur partage avec lauteur original ou dautres auteurs. La communauté discursive renvoie plutôt au partage dun même point de vue que lauteur de lOvide moralisé ou dautres auteurs sur un sujet ou un texte.

Une relation directe
avec les commentaires latins ?

Comme lauteur de lOvide moralisé original et les commentateurs dOvide, le remanieur fait référence à la tradition de lintegumentum, notamment dans le prologue6 quil ajuste à laune du projet littéraire qui est le sien et qui consiste en la suppression des allégories spirituelles du texte.

Dans ce prologue, le remanieur se place encore plus que lauteur original de lOvide moralisé dans la tradition du commentaire allégorique. En effet, comme la montré Paule Demats, lauteur original de lOvide moralisé ne présente pas daccessus ad auctores, contrairement aux commentaires latins aux textes antiques.7 Dans laccessus, les commentateurs introduisent le texte commenté en faisant référence à son sujet, à son auteur, à lintention de celui-ci, et à lutilité du texte étudié.8 Or, ces références 90manquent dans lOvide moralisé original. Au contraire, le remanieur présente Ovide comme un clerc mout saige et ententis / et fort a lestude ententis (I, vv. 89–90). Il évoque ses autres ouvrages quil qualifie de ditiés, traitiés dont la matière est tout aussi bien subtile que légère (I, v. 95). Il distingue parmi les ouvrages ovidiens celui qui lintéresse, les Métamorphoses, quil définit comme une parolle dite en figure (I, v. 101). Il exprime le but dOvide, qui est pour lui celui des poètes de son époque : reveler leur doctrine (I, v. 109). Il rend ainsi compte de lintention didactique dOvide. Cette question de lintention, primordiale dans tout accessus ad auctores, lest aussi pour le remanieur. En effet, il évoque parfois lintention dOvide, ce que ne fait pas lauteur original.9 Il qualifie même d’‘antante10 (cest à dire de finalité, de but et donc en quelque sorte dintention) une exposition quil développe à la suite du récit fabuleux sur Tirésias. En cela, il semble sintégrer dans la tradition des commentaires latins, même si cela ne prouve nullement une dépendance directe à tel ou tel commentaire précis. Une telle relation intertextuelle pourrait émerger, en revanche, de létude des explications que fournit le remanieur.

Le réviseur reprend systématiquement les expositions physiques et historiques issues des traditions dinterprétations stoïciennes et évhéméristes, que lon trouve aussi dans les commentaires latins.11 Les études quIrene Salvo-Garcìa a menées sur les sources latines de lOvide moralisé montrent que lauteur emprunte à Fulgence, aux Mythographes du Vatican.12 Les interprétations physiques et historiques de lOvide moralisé original sinspirent notamment de ces mythographes, mais par le biais des commentaires latins aux Métamorphoses, qui reprennent leurs textes. Le remanieur conserve ce type dinterprétations. Il recopie les 91explications naturelles présentes dans lOvide moralisé original, comme par exemple celle de la fable de Tirésias à propos de linfluence des saisons sur le développement des semences. Cette interprétation, que lon retrouve dès Fulgence,13 sest transmise aussi dans les commentaires latins comme celui dArnoul dOrléans ;14 cette interprétation est ainsi parvenue à lauteur de lOvide moralisé qui les lit sans doute parce quils 92sont recopiés dans les marges de son manuscrit des Métamorphoses.15 Et cest donc seulement de seconde main que lon note cette influence des commentaires latins dans la version Z du texte, dans la mesure où le remanieur recopie partiellement lOvide moralisé original.

Si le remanieur avait emprunté directement à ces commentaires, on peut supposer quil sen serait servi pour les expositions quil ajoute. Or, rien nest concluant à ce sujet. Un exemple paradigmatique, celui de Pygmalion, tiré du Livre X, nous en a convaincue. Le remanieur ajoute une exposition historique à ce mythe, qui évince linterprétation historique que contenait lOvide moralisé original. Selon le premier auteur, Pygmalion figure un puissant seigneur qui eut chez lui une pauvre fille, ignorante, mais dune grande beauté. Le seigneur, qui avait remarqué une telle beauté, décida alors de nourrir et déduquer la jeune fille. Une fois léducation de la jeune fille parachevée, le seigneur se maria avec elle. Le remanieur ne conserve pas cette interprétation, mais en propose une différente. Pour lui, Pygmalion représente un homme qui, malgré son désir de fuir les femmes et de rester chaste, se trouva un jour naturellement porté à aimer une demoiselle. Cette dernière demeura insensible à ses avances, à limage dune statue. Vénus réussit finalement à faire céder la jeune fille, que Pygmalion put alors épouser. Rien de similaire ne figure chez les mythographes ou dans les commentaires latins qui les reprennent et les complètent. Fulgence ne fournit aucune interprétation pour ce mythe, pas plus que les Mythographes du Vatican. Pour Arnoul dOrléans, Pygmalion fabriqua vraiment une statue divoire dont il usa comme dune vraie femme. La statue est plutôt figurée comme une poupée que comme une future épouse. Cette exposition na donc pas vraiment déléments en commun avec celle du remanieur qui interprète la statue comme la métaphore de la froideur de la dame. Pour sa part, Jean de Garlande nallégorise pas directement la fable de Pygmalion mais traite plus largement, au début de ses Integumenta, de lart de faire passer de lidéal au matériel, ce que lon peut symboliquement rattacher au mythe de Pygmalion. Dans le manuscrit Vat. Lat. 1479, nous lisons un commentaire16 qui se rapproche assez de lOvide moralisé original 93mais beaucoup moins de son remaniement. La glose latine explique que Pygmalion nourrit une très belle jeune fille pauvre, quil aima, protégea et épousa. Lexposition historique de lOvide moralisé original ressemble à cette glose, dans la mesure où il est question dune pauvre et jeune fille très belle que Pygmalion nourrit et épousa. En revanche, le remanieur ne traite pas de ces aspects, mais seulement du désir de se marier, ce qui reste très proche de la fable relatant le mariage du héros avec la statue que Vénus transforme en femme. Enfin, le commentaire Vulgate, que connaissait aussi probablement lauteur original, noffre quune succincte interprétation morale à propos de la mauvaise vie de Pygmalion et de son amour malsain pour une idole en bois.17 Lexemple de Pygmalion nous semble donc révéler que la réécriture de lOvide moralisé ne sinspire pas directement des commentaires latins que connaît et pratique lauteur initial du texte.

Pourtant, le remanieur appelle de ses vœux le retour à un mode dinterprétation des Métamorphoses qui pourrait être plus proche de la méthode et de lapproche des commentaires latins. Les commentaires latins ne sont pas spirituels comme peuvent lêtre ceux de lOvide moralisé. Par exemple, si pour Arnoul dOrléans Penthée représente le religiosus qui soppose à lébriété dAcétès,18 il nest pas pour autant érigé en figure du Christ comme dans lOvide moralisé. Or, cest exactement ce type dinterprétation spirituelle propre à lOvide moralisé que refuse de recopier le remanieur. Il préfère les interprétations physiques, historiques 94et morales qui sont conformes à la pratique des commentateurs. Pourtant, il ne semble pas sinspirer directement de leurs commentaires. Où trouve-il donc la matière pour développer ou ajouter des expositions historiques ?

Lemprunt à la littérature française

Le remanieur sen remet, pour ses interprétations historiques, aux domaines littéraires en langue vernaculaire. Il est difficile didentifier la source exacte de ses ajouts. Nous ne pouvons donc parler que dinfluences qui nous renseignent, néanmoins, sur la communauté textuelle ou surtout discursive dans laquelle sinscrit le nouvel Ovide moralisé. Le traitement de la fable de Pygmalion est instructif à cet égard.

Sylvia Huot a montré que lauteur original de lOvide moralisé a complété sa traduction du mythe de Pygmalion selon le récit quen donne Jean de Meun dans le Roman de la Rose.19 Nous supposons que le remanieur a reconnu cette référence au Roman de la Rose et sen est inspiré pour sa propre interprétation du texte. Il y insiste beaucoup sur la nature, comme une façon dexpliquer rationnellement lattirance sexuelle qua pu ressentir Pygmalion, malgré le vœu de chasteté quil avait fait. Le remanieur lexplique en ces termes :

Mais nature, quoi quil aviengne,

Contraint qua tout honme soviengne

De son euvre en affection,

Quel que soit loperacion.

Pymalion, qui ot esté

Ainssi longuement en chasté,

Dessiroit moult en son courage

Feme avoir belle, bonne et sage,

95

Car cest chousse trop naturelle

A tout masle davoir femelle.20

Linsistance sur la nature peut se lire comme un simple élément visant à rationaliser la fable, mais elle se rapproche aussi dune thématique centrale du Roman de la Rose de Jean de Meun. On pense notamment au discours de Raison à propos de lamour dit naturel :

Cest naturels enclinemenz

De vouloir garder son senblable

[]

Nature les i fait voer,

Force leur fait, cest chose voire.21

En outre, dans son récit du mythe de Pygmalion, Jean de Meun insiste passablement sur la nature. Il qualifie lamour du personnage pour une statue de contraire à la nature puis conclut néanmoins quil est naturel daimer. Chez Jean de Meun, le personnage de Pygmalion sexprime ainsi, en mettant laccent sur la nature :

Mais ceste amour est si orrible

Quel ne vient mie de nature.

Trop mauvaisement me nature :

Nature en moi mauvais fill a ;

Quant me fist forment savilla.

Si ne len doi je pas blamer

Se je vuell par amours amer.22

Comme Jean de Meun, le réviseur de la famille Z sen réfère à la nature. Il nourrirait donc son interprétation de références à la littérature vernaculaire, notamment lorsquil reconnaît que le premier auteur emprunte à cette littérature dans le récit de la fable.23

Ainsi, parce quil ne reprend pas directement les commentaires latins mais sinspire plutôt de la littérature vernaculaire, notre remanieur sinscrit dans une certaine communauté littéraire ou discursive. Cette communauté est 96aussi, sans doute, celle de lauteur de lOvide moralisé original, qui sinspire déjà de cette littérature.24 Mais, pour allégoriser la fable, le remanieur emprunte uniquement à la littérature vernaculaire, contrairement au premier auteur qui emprunte surtout aux commentaires latins pour ses interprétations.

Communauté discursive :
les adversaires du Roman de la Rose

Nous aimerions comprendre pourquoi le réviseur choisit des références littéraires plutôt que les commentaires latins aux Métamorphoses. Peut-être ce rédacteur na-t-il tout simplement pas accès aux commentaires latins. Selon Marc-René Jung, il na rien dun humaniste qui serait allé voir les textes latins, dOvide ou dautres auteurs.25 Une autre hypothèse peut être en jeu. Elle ne contredit pas la première et témoigne dun autre rapport aux Métamorphoses que celui de lauteur de lOvide moralisé initial : lexclusivité que le remanieur accorde à cette tradition vernaculaire exprime une volonté de nourrir une nouvelle communauté discursive centrée sur les goûts des lecteurs de la fin du xive siècle et du début du xve siècle mais aussi les polémiques littéraires qui animent cette époque. Nous pensons ici à la querelle autour du Roman de la Rose.

Comme la bien montré Pierre-Yves Badel, dès la fin du xiiie siècle, des auteurs se mettent à contester explicitement la misogynie et lobscénité qui ressortent de la lecture du Roman de la Rose.26 La condamnation de certains points du Roman de Jean de Meun nest donc pas nouvelle et se trouve même assez répandue avant que néclate dès 1401 la querelle du Roman de la Rose, qui oppose Christine de Pizan, Jean Gerson et Nicolas de Clamanges aux partisans de Jean de Meun, Jean de Montreuil et les frères Col.27 Or, comme nous lavons vu, le remanieur sinspire du Roman 97de la Rose. Lauteur original de lOvide moralisé emprunte aussi à ce texte et non seulement aux commentaires latins pour ses interprétations. Tel est notamment le cas pour linterprétation historico-morale des amours de Mars et Vénus, par laquelle lauteur conseille au mari trompé de laisser parler les médisants et de ne pas chercher à épier sa femme ni à révéler son adultère pour ne pas subir la colère de son épouse. Marylène Possamaï a prouvé que lauteur initial de lOvide moralisé reprend ici les propos de Jean de Meun qui condamne lui aussi la jalousie de Vulcain.28 Le discours de la Vieille fait en effet référence à ce mythe pour dire la folie de lépoux, folie qui consiste à chercher à prendre sa femme en flagrant délit dadultère et à révéler à tous cet adultère.29 Le même jugement transparaît dans les conseils que lauteur de lOvide moralisé donne aux maris dans son interprétation des amours de Mars et Vénus.30 Il affirme comme Jean de Meun que celui qui épie son épouse est folz.31 Pour conclure son exposé moral, il reprend le vers où la Vieille invite les femmes à tromper leur mari : Si les doit on aussi trichier.32 Mais il intervertit ici les rôles puisquil suggère aux hommes de tromper les femmes trompeuses, mais lidée centrale reste la même : Sel le triche, il la doit trichier (éd. C. De Boer, IV, v. 1629). Le Roman de la Rose a donc inspiré la moralisation de lOvide moralisé initial. Or, cette moralisation est modifiée dans la version remaniée du texte. Le réviseur a raccourci le passage et en a changé lissue au profit des femmes. Nous avons montré ailleurs que le réviseur reconfigure ainsi lextrait parce quil a reconnu le Roman de la Rose et quil ne souhaite pas aboutir aux mêmes conclusions que Jean de Meun.33 Au contraire, il fait partie des détracteurs de Jean de Meun.

On retrouve encore dautres arguments de ce débat autour duquel se construit une communauté discursive dans laquelle sinscrit alors le 98remanieur. Si lon reprend lexemple de Pygmalion, nous remarquons quil prend encore le Roman de la Rose à contre-courant. Nous avons souligné limportance de la référence à la nature comme un écho au traitement du mythe de Pygmalion dans le Roman de la Rose et à la question du désir naturel omniprésente dans ce texte. Nous avons vu que le remanieur souligne combien souhaiter le mariage est naturel, à travers le passage :

Dessiroit moult en son courage

Feme avoir belle, bonne et sage,

Car cest chousse trop naturelle

A tout masle davoir femelle.

Le substantif femelle ne désigne pas uniquement un animal de sexe féminin, mais désigne aussi la femme. Christine de Pizan dans la Mutacion de Fortune recourt dailleurs aux termes masle et femelle lorsquelle traite de la mort qui touche tout le monde, hommes ou femmes.34 Le remanieur ne compare donc pas lhomme et la femme à la bête. Bien au contraire, il traite dune pratique sociale et non animale quest le mariage. Pourtant, le terme peut être ambigu, puisquil renvoie aussi bien à la femelle animale. Cette ambiguïté semble inhérente à la langue médiévale. Mais elle peut aussi sinterpréter ici comme un nouveau signe dune confrontation implicite avec Jean de Meun, dune volonté de renverser la conception que cet auteur se fait de lamour. Il associe en effet, dans le discours de Raison, lhomme et lanimal en révélant le désir sexuel quils ont en commun. Pour Raison, lamour quelle appelle naturel est un amour que la Nature créa chez les bêtes comme chez les hommes. La Vieille dans son discours associe aussi lhomme et les animaux par le désir sexuel quils partagent. Le remanieur na pas la même définition que Raison ou la Vieille de lamour naturel qui pour lui est associé au mariage, un désir non pas libre mais normé.

En insistant ainsi sur le désir de tout homme de se marier, plutôt que sur lattrait de tout homme pour le seul plaisir35 comme le suggèrent Raison ou la Vieille, le remanieur exprime peut-être une opinion quil 99a en commun avec les adversaires de Jean de Meun. Par exemple, Jean Gerson reproche à ce dernier davoir tourné en dérision la chasteté conjugale et davoir condamné le mariage.36 Dans le passage du Roman de la Rose sur Pygmalion, Jean de Meun ne condamne pas vraiment le mariage. Mais cette condamnation apparaît en dautres passages du texte qui présentent le mariage comme anti-naturel. Tel est le cas du discours de la Vieille. Selon elle, le mariage éloigne de ce quelle appelle le naturel appetit.37 En outre, lAmi, qui fait parler le mari jaloux, qualifie le mariage de merveilleux usage, lopposant ainsi implicitement à la nature. Le remanieur contredit cette opinion en tirant la nature du côté du mariage. Pour lui, la nature ne porte pas au plaisir sexuel, comme laffirme par exemple la Vieille, mais au mariage. En cela son discours rejoint celui de Jean Gerson. En outre, dans son traité dune vision contre le Roman de la Rose, Jean Gerson donne la parole à Chasteté venue se plaindre devant la cour de Chrétienté contre lAmant du Roman. Chasteté rappelle que le mariage est prescrit par la nature, ce que défend le remanieur de lOvide moralisé. Chasteté reproche aussi à lAmant davoir conseillé dessayer toutes sortes de femmes sans faire de distinction. Notre remanieur insiste également sur le désir de lhomme davoir une seule et unique femme :38

Chacuns dessire par avoir,

– Se pueut chacuns par soi savoir –

Mes nul ni vouldroit compagnie.

Chascuns veult avoir seul samie,

Sil aime en riens ne ne tient chere.39

Un détour par le Roman de la Rose donne tout son sens à ce propos. La Vieille dit, par exemple, exactement le contraire. Pour elle les animaux et les humains aspirent à plusieurs partenaires. Il semble donc que la volonté de contredire Jean de Meun justifie la mention très étrange du remanieur :

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Mais nature, quoi quil aviengne,

Contraint qua tout honme soviengne

De son euvre en affection,

Quel que soit loperacion.

Dans la mesure où Pygmalion a fait une statue qualifiée d’‘euvre dans le texte de la fable, et que le mot désigne bien une statue dans la langue ancienne, on peut penser que le mot euvre renvoie à cette statue. La rationalisation du texte porte dailleurs sur la métamorphose de la statue et lattirance quelle exerce sur Pygmalion. Mais le terme euvre est aussi équivoque. De son sens général d’‘acte, action,40 il peut désigner plus spécifiquement lacte de chair.41 Il est en effet question dans la fable, comme dans linterprétation, de lattirance physique du jeune homme pour la statue et de son envie de létreindre. Mais, par lemploi du terme affection, le remanieur tourne le désir du côté de lamour. La référence au souvenir présente en outre lamour comme naturel. Lassociation de la contrainte et de laffection inverse encore la primauté de linstinct sexuel et la réduction de lamour à ce désir instinctif qui sont exposées dans le Roman de la Rose de Jean de Meun.

Ainsi, le remanieur ne cherche pas seulement à rationaliser le désir fou de Pygmalion pour une statue, il tient aussi à exprimer ses réticences, partagées par dautres penseurs de son temps, vis-à-vis de laffirmation du Roman de la Rose de la toute-puissance et de la primauté naturelle du désir sexuel au détriment de lamour conjugal. Comme le remanieur, Christine de Pizan offre aussi une vision positive du mariage, contrairement à lopinion développée dans le discours du Roman de la Rose. Christine de Pizan pense dailleurs que la sombre peinture que le Roman fait du mariage ne peut que détourner de lui,42 ce qui est tout linverse du remaniement de lOvide moralisé qui justifie la raison dêtre du mariage.43

101

En ce sens, le remanieur nourrit une communauté discursive qui est celle du débat autour du Roman de la Rose. Sécarter des commentaires latins pour construire de nouvelles interprétations est la marque de lintérêt pour lexpression dun débat littéraire qui a connu un fort retentissement à lépoque de la réécriture de lOvide moralisé. Cette communauté ne diffère pas foncièrement de celle du premier Ovide moralisé, mais elle sen détache aussi car elle traduit dautres enjeux éthiques et littéraires. La question des sources et de leur emploi nous renseigne ainsi sur la vie dun texte et surtout sur la façon dont un auteur se situe par rapport à une tradition savante et littéraire, voire à une conception du monde. Telle est la nouvelle lecture des Métamorphoses que nous propose la version Z34 de lOvide moralisé : une lecture moins érudite quengagée.

Prunelle Deleville

Université de Genève ;
Université Lumière Lyon 2 (CIHAM UMR 5648)

prunelle.deleville@unige.ch

1 Voir les travaux de Cornelis De Boer, Francesco Branciforti, Joseph Engels, Marc-René Jung et les nouveaux éditeurs de lOvide moralisé. Cf. Philomena, conte raconté daprès Ovide par Chrétien de Troyes, ed. by C. De Boer (Paris: Librairie Paul Geuthner, 1909) ; Pyrame et Thisbé, texte normand du xiie siècle, ed. by C. De Boer (Amsterdam: Johannes Müller, 1911) ; Piramus et Tisbé, ed. and trans. by F. Branciforti (Florence: Olschki, 1959) ; J. Engels, Études sur lOvide moralisé (Groningen: Wolters, 1943) ; M.-R. Jung, La légende de Troie en France au Moyen Âge (Bâle: Francke, 1996), pp. 621–23.

2 Voir à ce sujet Paule Demats, Fabula, trois études de mythographie antique et médiévale (Genève: Droz, 1973); Frank T. Coulson, Ovids Metamorphoses in the school tradition of France, 1180-1400: Texts, manuscripts traditions, manuscripts settings, in Ovid in the Middle Ages, ed. by James G. Clark, Frank T. Coulson and Kathryn L. Mckinley (Cambridge: Cambridge University Press, 2001), pp. 48–82; id. Ovids transformations in medieval France (ca. 1100–ca.1350), in Metamorphosis. The Changing Face of Ovid in Medieval and Early Modern Europe, ed. by Alison Keith and Stephen Rupp (Toronto: Centre for Reformation and Renaissance Studies, 2007), pp. 33–60; Irene Salvo-Garcìa, Introduction aux sources de lOvide moralisé, Ovide Moralisé, Livre I, ed. by C. Baker, M. Besseyre, M. Cavagna, S. Cerrito, O. Collet, M. Gaggero, Y. Greub, J.-B. Guillaumin, M. Possamaï-Pérez, V. Rouchon Mouilleron, I. Salvo García, T. Städtler and R. Trachsler (Paris: SATF, 2018), vol. 1, pp. 193–223 (pp. 196–97). Voir aussi L. Endress et R. Trachsler, Économie et allégorie. Notule à propos des manuscrits Z de lOvide moralisé, Medioevo romanzo, 39, 2 (2015), 350–66. Thibaut Radomme tire aussi de pertinentes conclusions sur la lecture de lOvide moralisé à partir de létude de ses sources dans Le privilège des livres. Bilinguisme et concurrence culturelle dans le Roman de Fauvel remanié et dans les gloses au premier livre de l’‘Ovide moralisé, Droz, 2021.

3 Létude que nous proposons sinscrit dans le cadre du projet de recherche Les sources de lOvide moralisé. Ce projet, porté par Olivier Collet et Richard Trachsler, et financé par le Fonds national suisse, regroupe les Professeurs Frank T. Coulson, Marylène Possamaï-Pérez, et les postdocs Lisa Ciccone et Pierandrea Martina. Notre équipe participe à la publication de deux commentaires latins aux Métamorphoses dOvide, que la critique a présentés comme de potentielles sources de lOvide moralisé: Un commentaire médiéval aux Métamorphoses. Le Vaticanus Latinus 1479, Livre I-V, ed. by Lisa Ciccone, trans. by Marylène Possamaï-Pérez, with the collab. of Prunelle Deleville; (Paris: Classiques Garnier, 2020) Commentaire Vulgate des Métamorphoses dOvide. Livres I-V, ed. by Frank T. Coulson and Piero Andrea Martina, trans. by Piero Andrea Martina and Clara Wille (Paris: Classiques Garnier, 2021).

4 Pour un développement de la notion, nous renvoyons aux travaux de Marc-René Jung, qui a le premier mis en avant les changements les plus manifestes de cette version. M.-R. Jung et J.-Y. Tilliette louent la qualité littéraire des moralisations de lOvide moralisé original, dans leurs articles: M.-R. Jung, Aspects de lOvide moralisé, in Ovidius redivivus. Von Ovid zu Dante, ed. by M. Picone and B. Zimmerman (Stuttgart: J.B. Metzler, 1994), pp. 149–72; id., Les éditions manuscrites de lOvide moralisé, Cahiers dhistoire des littératures romanes, 20 (1996), 251–74; id., Ovide, texte, translateur et gloses dans les manuscrits de lOvide moralisé, in The Medieval Opus. Imitation, Rewriting, and Transmission in the French Tradition, ed. by D. Kelly (Amsterdam; Atlanta: Rodopi, 1996), pp. 75–98; id., LOvide moralisé: de lexpérience de mes lectures à quelques propositions actuelles, in Ovide métamorphosé. Les lecteurs médiévaux dOvide, ed. by L. Harf-Lancner, L. Mathey-Maille and M. Szkilnik (Paris: Presses de la Sorbonne Nouvelle, 2009), pp. 107–22; J.-Y. Tilliette, LÉcriture et sa métaphore, in Ensi furent li ancessor, Mélanges de philologie médiévale offerts à M.-R. Jung, dir. by Luciano Rossi, C. Jacob-Hugon and Ursula Bähler (Alessandria: Edizioni dell Orso, 1996) vol. 2, pp. 543–58. Nous renvoyons enfin aux pages de notre commentaire littéraire sur le sujet, P. Deleville, Métamorphose des Métamorphoses. La réécriture de la version Z de l’‘Ovide moralisé (Paris: Classiques Garnier, 2022).

5 Par remanieur nous désignons lauteur dun Ovide moralisé sans allégories spirituelles, tel que nous le lisons dans les témoins Z3 et Z4. Pour ce texte, nous nous référons à notre édition critique: La réécriture Z de l’‘Ovide moralisé. Le manuscrit de base de cette édition est le Paris, BnF fr. 870, Z3. Pour le texte de lOvide moralisé original, nous citons lédition de C. De Boer, Ovide moralisé, poème du commencement du quatorzième siècle, publié daprès tous les manuscrits connus, ed. by C. De Boer, 5 vols (Amsterdam: Müller, 1915-1938; repr. Wiesbaden, Sändig, 1966-1986).

6 Pour plus de détails sur ce prologue et ses enjeux, cf. Prunelle Deleville, Réécriture de lOvide moralisé: enjeux du remaniement de la famille Z, in Ovidius explanatus. Traduire et commenter les Métamorphoses au Moyen Âge, ed. by Simone Biancardi, Prunelle Deleville, Francesco Montorsi and Marylène Possamaï-Pérez (Paris: Classiques Garnier, 2018), pp. 205–14.

7 Paule Demats, pp. 107–09.

8 Sur laccessus ovidien, F. T. Coulson et B. Roy, Incipitarium Ovidianum (Turnhout: Brepols, 2000).

9 Voir P. Deleville, LOvide moralisé et ses Métamorphoses christianisées, tradition ou innovation?, in Tradition, transition, innovation (à paraître).

10 Or est raison que je recorde / Lantante a quoy la fable acorde, P. Deleville, La réécriture Z, III, vv. 1007–08. Ces deux vers introduisent linterprétation augmentée à propos de Tirésias. Le remanieur y reprend notamment plus déléments de la fable. Il complète lexposition en établissant un lien entre la sentence de Tirésias et son interprétation selon le procédé physique de production des fruits: Cest ce pourquoy Tyrisiaux dist / Que plus trop la femme excite / Ou fait et que plus si delite / Que ne fait lome: cest le chaut / Qui de fructifier ne chaut (ibid., III, vv. 1033–37).

11 Sur les commentaires médiévaux, lire F. T. Coulson, Ovids Metamorphoses.

12 Irene Salvo-Garcìa, pp. 193–223.

13 C. De Boer suppose que linterprétation naturelle de lOvide moralisé emprunte à Fulgence; Ovide moralisé, vol. 1, p. 295. Cf. Fulgence, Mythologies, ed. and trans. by Étienne Wolff and Philippe Dain (Villeneuve-dAscq: Presses Universitaires du Septentrion, 2013), pp. 88–91: Tirésias vit deux fois dans sa vie deux serpents saccoupler. Il les frappa les deux fois. La première fois il fut changé en femme et la seconde il retrouva sa forme dhomme. Cette expérience lui permet de répondre à Junon et Jupiter qui se querellent au sujet du plaisir amoureux. Selon lui, la part de lhomme dans le plaisir amoureux est de trois douzièmes et celle de la femme de neuf. Sensuit linterprétation à proprement parler: Tirésias est un symbole du Temps, cest-à-dire de lété perpétuel. Il frappe les serpents du feu de lardeur et est changé en femme, cest à dire en lardeur de lété. Lété est considéré comme le symbole de la femme car cest à cette époque que naissent toutes les plantes. Lautomne enserre la plante dans son corps masculin. Les deux divinités renvoient aussi au feu et à lair; lair aide plus au développement des semences que le feu. Enfin, le fait que Tirésias ait perdu la vue est associé à la saison hivernale quassombrissent les nuages flottant dans lair alors que Jupiter par ses vapeurs chaudes fournit à Tirésias la conception des productions futures, cest à dire la prescience.

14 Tiresias duos serpentes vidit concubentes. Quos cum virga percussisset in feminam conversus est. Iterum post longum temporis eos vidit concubentes. Quibus similiter percussis, in pristinam conversus est naturam. [Ideoque] cum Iupiter et Iuno de amoris qualitate certamen haberent, eum iudicem elegerunt. Ille dixit tres uncias amoris habere virum, VIIII mulierem. Iuno autem irata ei lumen ademit. Iupiter vero ei artem divinandi concessit in Grecia. Quam stupenda mutatio tantum est admiranda commentio. Gregi enim Tiresiam in modum temporis posuerunt quasi tereseon id est estiva perennitas. Ergo in verno tempore quod est masculinum quia in eo tempore est soliditas graminum, cum coeuntia sibi ad effectum animalia vidit, eaque virga id est furoris estu percussit, in temininum sexum convertitur id est in estatis fervorem vertitur. Ideo estatem in modum femine posuerant quia eodem tempore omnia suis emergunt patefacta folliculis vel foliis. Et quia duo sunt concipiendi tempora veris et autompni, iterum concepto prohibito, ad pristinam rediit formam vel immaginem. Autompnus enim masculino tempore omnia constringit. Deinde [duobus] elementis factus est arbiter, scilicet igni atque aere, de genitiva amoris ratione certantibus. Denique istum profertum iudicium: in fructificandis enim seminibus dupla aeris [quam] ignis suppetit materia, aer enim maritat glebis et producit in foliis et gravidat in folliculis. Sol vero maturare novit in granis. Nam ut hoc certum sit cecatum a Iunone, illa videlicet causa, quod hiemis tempus nubilo aeris caligante nigrescit. Iupiter vero occultis vaporibus conceptionalem fetum ei futuri graminis subministrat id est quasi presenciam naturat. Etiam ob hanc causam Ianus bifrons esse dicitur, eo quo preterita respiciat et futura, Arnolfo dOrléans, Allegoriae super Ovidii Metamorphosen, III, 4 (repr. from F. Ghisalberti, Arnulfo dOrleans: un cultore di Ovidio nel secolo XII), in Memorie del Reale Istituto Lombardo di Scienze e Lettere, 24 (1932), pp. 157–234, <http://www.iconos.it/le-metamorfosi-di-ovidio/libro-iii/tiresia/fonti-medievali/tirfm04/> [consulté le 24 mai 2020].

15 On peut lire cette interprétation dans Ovide moralisé, ed. C. De Boer, vol. 1, III, vv. 1137–88.

16 Nous remercions ici Lisa Ciccone et Marylène Possamaï-Pérez qui nous ont fourni la transcription et la traduction inédites du passage en question. Au f. 133v du Vaticanus latinus 1479: Hec est moralitas: Pygmalion fecit ymaginem eburneam quod puellam pulcherimam ex Indis partibus enutrivit; com omnes alias mulieres in odio haberet et ad ultimum illam adamavit, quia satisfacit hominem qui eum [?] nutrit et illam desponsauit et in veritate Pasum genuit. Hoc est verum.

17 Vito Santoliquido et Frank T. Coulson ont eu la gentillesse de nous laisser consulter leur transcription du passage.

18 Acestes enim sine cingulo dicitur, a grece, sine latine, ceston cingulum, inde Acestes sine cingulo id est dissolutus. Tales siquidem festa Bachi faciunt. Dissolutum igitur id est ebrium Pentheus id est religiosus ligavit et incarceravit ad horam id est a potacione retraxit. Postea Agave mater insana id est ebria, quia ebriis interesse non volebat eum interfecit. Sicut et multi adhuc ita interficiuntur in Anglia. Naute Bachum id est vinum in litore ut carius venderent navi imposuerunt. De quo nimium potantes in mare ceciderunt. Unde fictum est eos in pisces esse mutatos, Arnolfo dOrléans, Allegoriae, III, 7–8 <http://www.iconos.it/le-metamorfosi-di-ovidio/libro-iii/penteo/fonti-medievali/penfm04/> [consulté le 30 mai 2019]. Dans le commentaire Vulgate, Penthée est aussi présenté comme un homme religieux qui méprisa le vin (Commentaire Vulgate, Livre III, f. 33v). Le commentaire moral du Vat. lat. 1479 pour le même passage sintéresse seulement à livresse des marins (L. Ciccone et M. Possamaï-Pérez, Un commentaire médiéval, p. 599).

19 Sylvia Huot, Rival Voices: Rewriting Ovid in the Roman de la Rose and the Ovide moralisé, in Les translations dOvide au Moyen Âge. Actes de la journée détudes internationale à la Bibliothèque royale de Belgique le 4 décembre 2008, ed. by An Faems, Virginie Minet-Mahy and Colette Van Coolput-Storms (Louvain-la-Neuve, Université Catholique de Louvain; Publications de lInstitut détudes médiévales, 2011), pp. 197–212 (p. 201). Sylvia Huot sappuie notamment sur la façon dont Pygmalion sadresse à Vénus comme celui qui aime non une simple statue divoire mais une statue semblable à une femme.

20 P. Deleville, La réécriture Z, X, v. 768–78.

21 Roman de la Rose, ed. and trans. by Armand Strubel (Paris: Le livre de poche, 1992), vv. 5766–77.

22 Ibid., vv. 20864–72.

23 Cest aussi le cas pour lexplication du mythe de Mars et Vénus, que nous évoquons par la suite, ou encore de celui de Callisto.

24 M. Possamaï-Pérez la bien montré dans la thèse quelle a consacrée à lOvide moralisé: M. Possamaï-Pérez, L’‘Ovide moralisé. Essai dinterprétation (Paris: Champion, 2006).

25 M.-R. Jung, Les éditions manuscrites de lOvide moralisé, p. 274.

26 Christine de Pizan, Le Livre des epistres du debat sus le Rommant de la Rose, ed. by A. Valentini (Paris: Classiques Garnier, 2014), p. 125.

27 Cette polémique a circulé sous la forme dun texte intitulé les Epistres du debat sus le Rommant de la Rose, dans lequel Christine de Pizan a publié ses interventions lors de cette querelle.

28 Marylène Possamaï-Pérez, Traduire Ovide au xive siècle: les amours de Mars et Vénus au livre IV des Métamorphoses et de lOvide moralisé, Médiévales, 75 (2018), pp. 81–96.

29 Roman de la Rose, vv. 14191–94.

30 Exposition en IV, vv. 1538–1619. Saucuns puet sa feme prouver / Et prendre en present avoultire, / Ne sentremete ja dou dire, / Quar cil qui dire li orroient / Pour fol et pour coup le tiendroient (Ovide moralisé, ed. C. De Boer, vol. 2, IV, vv. 1596–601).

31 Ibid., vol. 2, IV, vv. 1610–11.

32 Roman de la Rose, v. 13271.

33 Le vers du Roman de la Rose repris presque à lidentique dans lOvide moralisé original est changé en Il si vaut mieux du tout fier, cest-à-dire se fier aux femmes. À ce sujet, nous renvoyons à notre article: Tuit voir ne sont pas bon a dire: Ovide et parole proverbiale en langue vernaculaire, CRMH, 41 (2021).

34 DMF, http://atilf.atilf.fr/scripts/dmfAAA.exe?LEM=femelle;XMODE=STELLa;FERMER;;AFFICHAGE=0;MENU=menu_dmf;;ISIS=isis_dmf2015.txt;MENU=menu_recherche_dictionnaire;OUVRIR_MENU=1;ONGLET=dmf2015;OO1=2;OO2=1;OO3=-1;s=s120a36ac;LANGUE=FR [consulté le 24 mai 2020].

35 Roman de la Rose, vv. 4881–84.

36 Pierre-Yves Badel, Le Roman de la Rose au xive siècle, étude de la réception de lœuvre (Genève: Droz, 1980), pp. 211–12.

37 Roman de la Rose, v. 14094.

38 Le terme amie paraît ici ambigu puisquil ne désigne pas spécifiquement une épouse mais peut-être aussi une amante unique, selon la conception de la finamor. Pourtant, lexposition sur Pygmalion traite bien de mariage, conformément au récit de la fable.

39 P. Deleville, La réécriture Z, X, vv. 782–86.

40 TL s.v. uevre, col. 16.

41 DMF, <http://zeus.atilf.fr/scripts/dmfX.exe?IDF=dmfXdafef;ISIS=isis_dmf2020.txt;MENU=menu_dmf;OUVRIR_MENU=1;ONGLET=dmf2020;OO1=2;OO2=1;OO3=-1;s=s08302f0c;LANGUE=FR;FERMER;AFFICHAGE=2;MENU=menu_dmf;;XMODE=STELLa;FERMER;XXX=4;;> [consulté le 22 août 2021].

42 Pierre-Yves Badel, Le Roman de la Rose au xive siècle, p. 426.

43 Dans Métamorphose des Métamorphoses, nous avons montré que Christine de Pizan a pu trouver dans ce nouvel Ovide moralisé des arguments et des exemples pour son réquisitoire contre Jean de Meun. Elle imite, par exemple, les termes de lexposition quajoute le remanieur au sujet de Callisto. Il y stigmatise ceux qui font croire aux demoiselles quaimer est une chose naturelle et qui parviennent ainsi à séduire les jeunes filles et à nuire à leur réputation. Telle est, mot pour mot, lopinion que défend Christine de Pizan à travers la lettre de Sybille de la Tour dans le Livre du duc des vrais amants, justement construit comme une contre-écriture au Roman de la Rose de Jean de Meun.