![Économie. Passé, présent, avenir - Annexe I](https://classiques-garnier.com/images/Vignette/BblMS01b.png)
Annexe I Définition et mesure du taux de rentabilité du capital investi dans une entreprise
- Type de publication : Chapitre d’ouvrage
- Ouvrage : Économie. Passé, présent, avenir
- Pages : 1135 à 1140
- Collection : Bibliothèque de l'économiste, n° 45
- Série : 1, n° 23
- Thème CLIL : 3340 -- SCIENCES ÉCONOMIQUES -- Histoire économique
- EAN : 9782406128991
- ISBN : 978-2-406-12899-1
- ISSN : 2261-0979
- DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-12899-1.p.1135
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 30/06/2022
- Langue : Français
Annexe I
Définition et mesure du taux de rentabilité
du capital investi dans une entreprise
Nous avons vu dans la première section de la première partie que l’activité d’ordre économique d’une entreprise était évaluée à l’aide d’une comptabilité dite « en compte de capital » et qu’une telle comptabilité avait pour objet de connaitre le taux de rentabilité du capital investi dans cette entreprise. Ce taux est celui de l’activité de production pour la vente de l’entreprise, celle dite d’« exploitation ». Il s’entend donc avant prise en compte de l’activité proprement financière de l’entreprise, celle qui consiste à prêter et emprunter. Ce taux est essentiel à prendre en compte par la direction financière à un double titre. D’une part, elle déduit du taux observé s’il est suffisant, en le comparant au taux d’intérêt moyen que lui coûte son endettement financier ordinaire au moment considéré, pour garantir une rentabilisation des capitaux propres (voir la formule de l’effet de levier). D’autre part, elle fait état à la direction de production du taux de rentabilité d’exploitation qu’elle doit atteindre, compte tenu de taux d’intérêt auquel elle peut emprunter, le taux visé devant être supérieur à ce dernier.
Comme tous les comptes des entreprises sont formellement identiques, il est possible d’en faire le total pour toutes les entreprises d’une économie nationale et, par conséquent, de pouvoir évaluer le taux moyen de rentabilité du capital investi dans celle-ci.
Il n’en reste pas moins que les taux qui sont couramment calculés ne sont de bons estimateurs de celui qui est recherché que sous des conditions tout à fait particulières du fonctionnement de l’entreprise dans le temps, des conditions qui sont rarement constatées.
La présente annexe traite de ces limites et propose la définition d’un taux de rentabilité qui permet de les surmonter. Un retraitement des comptes, tels qu’ils sont couramment établis en respectant les normes 1136internationales en vigueur, s’avère nécessaire pour le mesurer : évaluer aux prix actuels le capital fixe brut en place.
Deux taux de rentabilité simples
à évaluer et leurs limites
La façon la plus courante de mesurer le taux de rentabilité du capital investi dans une entreprise, avant de prendre en compte la diversité d’origine de ce capital (apport/endettement ordinaire), est de rapporter l’excédent net d’exploitation d’un exercice annuel au montant du capital restant avancé au titre de l’activité d’exploitation de l’entreprise, c’est-à-dire le total de la valeur des immobilisations nettes et de la valeur des stocks qui figurent à l’actif du Bilan en début d’année. Soit :
r1 = ENE / (KFN + KC)
Un autre taux est aussi utilisé. Il s’entend avant amortissement. Il s’agit du rapport entre l’excédent brut d’exploitation et le total de la valeur des immobilisations brutes et de la valeur de stocks. Soit :
r2 = EBE / (KFB + KC)
Il s’avère utile d’ignorer dans un premier temps le capital circulant avancé tenant à la présence de stocks de matières, de produits en cours de fabrication et de produits finis et de n’introduire sa prise en compte qu’in fine.
La limite du premier
Il suffit de comparer deux entreprises (A et B) qui auraient strictement le même fonctionnement d’exploitation (le même EBE) l’année considérée avec le même stock d’équipements fixes (le même KFB), la seule différence entre les deux étant que tout ou partie des équipements fixes de la seconde (B) ont été acquis à une date plus ancienne que ceux de la première (A). Dès lors le total des dotations aux amortissements 1137déjà imputées dans la seconde est supérieur à celui qui l’a été dans la première et l’on a, par conséquent : KFN (B) < KFN (A), pour KFB (B) = KFB(A). En retenant pour les deux entreprises la pratique de l’amortissement linéaire, on est assuré que les deux entreprises réalisent le même ENE. Par conséquent, on a :
r1(B) > r1(A)
Or, du point de vue de la direction de l’entreprise qui gère la relation ente la direction de production et la direction financière, le taux devrait être le même. Le taux r1 n’est donc pas une bonne façon de mesurer le taux r* tel que r*(B) = r*(A).
Ce que l’on constate est que le taux r2 ne présente pas cette limite puisque r2(B) = r2(A).
La limite du second
Il n’en reste pas moins que le taux r2 présente aussi une limite. Il suffit de considérer deux entreprises qui ont le même EBE et le même montant de KFB, mais pour lesquelles la durée de vie moyenne des équipements fixes de la seconde (B) est nettement plus longue que celle de la première (A). Dans ce cas, on a r2(B) = r2(A), alors qu’on devrait avoir r*(B) < r*(A). En effet, la durée sur laquelle le capital fixe avancé au départ peut être récupéré pour l’entreprise B est plus longue que pour l’entreprise A.
Ainsi le taux r1 est une bonne mesure de r* si la durée de vie des équipements est d’une année et c’est le taux r2 si cette durée de vie est infinie.
Le taux qui convient
pour une bonne évaluation de r*
En continuant à ignorer l’avance de capital circulant, la rentabilisation du capital avancé pour que l’entreprise dispose du capital fixe nécessaire est assurée si la chronique d’EBE est suffisante pour récupérer le capital fixe. On est donc assuré qu’une bonne mesure du taux r* doit faire intervenir la durée de vie des équipements fixes. Ceci étant, la proposition qui 1138vient d’être énoncée ne conduit simplement à définir le taux en question que dans des conditions tout à fait particulières de vie de l’entreprise dans le temps. Il faudrait que les conditions d’exploitation restent identiques dans le temps et que les prix d’acquisition des équipements fixes ne changent pas dans le temps. Sous ces conditions et en retenant pour simplifier une durée de vie unique notée T, le taux r qui ne présente pas les deux limites qui viennent d’être mises à jour est tel que :
(dans cette relation KFB et EBE ne dépendent pas de l’année n)
Il s’avère que cette expression est la même que celle qui donne l’annuité constante par laquelle une personne qui a emprunté une somme D au taux annuel i sur une durée de T années peut apurer cet emprunt, cet apurement comprenant à la fois le remboursement de la somme D et les intérêts dus chaque année sur la somme qui reste due (exemple : pour un emprunt de 2700 milliers d’euros sur une durée de 22 ans au taux fixé de 8 % l’an, l’annuité constante d’apurement est de 358,3 milliers d’euros1). En effet, cette annuité, notée AC(D, T, i), est telle que :
L’EBE se présente donc comme étant l’annuité constate par laquelle le capital avancé au départ (KFB se substituant à D) est récupéré en assurant une rentabilisation de ce capital au taux r (r prend la place de i).
Une mesure qui convient lorsque ces conditions ne sont pas réunies s’en déduit. Le taux retenu pour une année particulière est celui qui se constaterait si les conditions de l’année courante restaient inchangées dans le temps. Puisque ce sont les conditions propres à l’année courante qui sont prises en compte, il y a lieu que ce soit le cas pour l’évaluation du capital fixe brut, c’est-à-dire que le stock d’équipements fixes soit évalué aux prix actuels à l’état neuf des équipements en place et non pas, comme c’est le cas selon les normes comptables en vigueur, aux prix 1139historiques d’acquisition2. Quant à la durée T prise en compte, il s’agit de la durée moyenne de vie des équipements contenus dans le stock3.
Le taux r*(t) recherché est alors le taux tel que :
EBE(t) = AC[KFB(aux prix de t), r*(t), T]
Ce taux a le statut d’un taux d’intérêt réel. Il doit être comparé par la direction de l’entreprise au taux d’intérêt réel auquel la firme peut emprunter l’année t.
La prise en compte du capital circulant
Le propre du capital circulant est d’être une avance permanente : si elle est continuellement récupérée avec les ventes, elle doit être réengagée pour assurer la poursuite de la production et des ventes. Sa rentabilisation au taux r implique un prélèvement égal à r fois KC. Il n’y a pas lieu de réévaluer KC comme cela s’impose pour KF. Le taux recherché qui ne présente pas les mêmes limites que r1 et r2 est donc finalement tel que :
EBE(t) = AC[KFB(aux prix de t), r*(t), T] + r*(t). KC(t)
Les déterminant du taux
de rentabilité d’exploitation
De cette expression, on déduit quels sont les éléments qui participent à la détermination du taux de rentabilité d’exploitation ainsi défini. Ce sont principalement la part de l’EBE dans la valeur ajoutée (EBE / Y), la productivité apparent du capital fixe (Y / KFB(aux prix de t)) ou son inverse, le coefficient de capital, la durée moyenne de vie des équipements fixes et le poids du capital circulant (mesuré par KC / Y). Il y a 1140lieu d’ajouter que le taux de marge (EBE / Y) dépend de l’écart entre le salaire moyen chargé et la valeur ajoutée par emploi et de la part des impôts indirects dans la valeur ajoutée. En effet, on a :
EBE / Y = (Y − MSG – IMPI) / Y = 1 − WG / PR − IMPI / Y
Dans le temps, la variation de ce taux résulte des variations de ces éléments, variations qui comprennent une évolution en volume (ou en pouvoir d’achat pour le salaire moyen) et une évolution en prix.
1 Pour l’obtenir on se reporte à une table financière.
2 Cette norme diffère de celle qui s’est imposée, en provenance des EUA, pour l’évaluation des titres à l’actif du Bilan. La raison de cet écart est que, si le marché financier donne les valeurs vénales actuelles (l’année t) des titres détenus, l’opération de réévaluation du stock de capital fixe brut pose problème lorsque les équipements contenus dans le stock ne sont plus vendus, ce qui interdit que l’on puisse disposer de leur prix actuel. Par ailleurs, il n’existe pas de marché d’occasion pour beaucoup d’équipements, ce qui interdit d’apprécier la valeur vénale des équipements en place étant donnée leur âge.
3 Pour un équipement donné, la durée de vie en question n’est pas sa durée de vie effective prévisible qui a été impactée par les opérations de gros entretien qui ont pu avoir eu lieu, opérations qui ont nécessité une nouvelle avance de capital fixe et qui ont contribué à rallonger la durée de vie au regard de celle qu’il y a lieu de prendre en compte.