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Classiques Garnier

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  • Type de publication : Chapitre d’ouvrage
  • Ouvrage : Dictionnaire Victor Hugo
  • Pages : 1079 à 1081
  • Collection : Dictionnaires et synthèses, n° 24
  • Thème CLIL : 3431 -- ENCYCLOPÉDIES, DICTIONNAIRES -- Encyclopédies et dictionnaires thématiques
  • EAN : 9782406146261
  • ISBN : 978-2-406-14626-1
  • ISSN : 2261-5938
  • DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-14626-1.p.1079
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 21/06/2023
  • Langue : Français
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Zehnacker, Jean-Paul

1941-

Engagé comme pensionnaire de la Comédie-Française, Zehnacker (ou Zennacker) la quitte pour tourner dans les rôles principaux de séries télévisées à succès, La Poupée sanglante (1976) puis LÎle aux trente cercueils (1979). Il interprétera une soixantaine de rôles centraux sur les scènes et les écrans. Il excelle dans la direction dacteurs, de Hamlet, quil monte en 1982 et dont il joue le rôle-titre, à Comme il vous plaira en 2016.

Zehnacker entretient, de son propre aveu, une « passion » pour Hugo, qui laccompagne depuis les années 1972-1973 où il interprétait Tholomyès et Javert dans Les Misérables, création collective du Théâtre des Amandiers sous la direction de Pierre Debauche. Il est de nouveau Javert dans une mise en scène par Jean Meyer de ladaptation de Paul Achard en 1975-1976 avec Jean Marais en Valjean, puis dans celle de Denis Llorca aux Arènes de Lutèce en 1999. Il coadapte le roman avec Gilles Magréau sous le titre Jean Valjean, le met en scène en 2010 et y tient le rôle-titre. Il linterprète encore dans une autre adaptation quil met en scène en 2012, Je mappelle Jean Valjean.

Il incarne en 1976 avec une verve généreuse Aïrolo dans Mangeront-ils ?, mis en scène par Mario Franceschi au Théâtre La Bruyère à Paris, puis, de 1976 à 1984, dans de nombreux festivals, et enfin, en 1985, au sein de la troupe des Acteurs de lÎle-de-France, dans sa propre mise en scène. Cest le rôle même de Hugo quil tient à partir de 2002 dans Le Rebelle, quil conçoit et présente en clôture du bicentenaire au Sénat, dans Ciel bleu, Ciel noir / Hugo poétique et politique, et dans deux pièces de Danièle Gasiglia : Répétitions mouvementées ou Victor Hugo et ses interprètes (mise en scène par lui-même et créée en 2010 à lauditorium du musée dOrsay à Paris) et Victor Hugo et George Sand, et sils sétaient rencontrés ?, présentée sous forme de lectures-spectacles en 2011. Il assure depuis 2005 la présence de Hugo dans le récital Le Cercle des poètes, donné en France, au Luxembourg et en Italie.

Naugrette, Laster, 2002.

→ adaptations des romans au théâtre.

Arnaud Laster

Zola, Émile

1840-1902

Comme beaucoup de sa génération, Zola est à seize ans un fervent romantique. Le 8 septembre 1860, l« humble admirateur » adresse une lettre au maître en exil dans laquelle il vante son esprit de liberté. Zola peine cependant à trouver sa place face à ce grand homme encombrant envers lequel il se montre très ambivalent. Les Chansons des rues et des bois manifestent ainsi que Hugo « naperçoit plus le monde quau travers de ses propres visions » [Mes haines 1866, dans Zola 1962-1970, t. 10, p. 81], alors quà propos des Travailleurs de la mer Zola loue sa capacité à créer des personnages typiques (« Gavroche, Jean Valjean, La

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Esmeralda, Quasimodo » font partie de « toutes ces figures amies dont nos têtes et nos âmes sont pleines » [LÉvénement*, 3 et 14 mars 1866, dans Zola 1962-1970, t. 10, p. 384]). Cest peut-être après avoir lu les commentaires élogieux de Zola sur LHomme qui rit[Le Gaulois, 20 avr. 1869] que Hugo lui envoie le premier volume de son roman que « lauteur de LHomme qui rit » dédie à « lauteur de Thérèse Raquin » [Gasiglia-Laster, 2007, p. 37]. Le 21 mai 1869, il adresse encore à ce « robuste et noble esprit » La Voix de Guernesey. Le 25 octobre 1871 enfin, à la parution de La Fortune des Rougon, il écrit ces quelques mots dencouragement : « Votre comédie est tragique. [] Vous avez le dessin ferme, la couleur franche, le relief, la vérité, la vie. Continuez ces études profondes » [BNF, Naf 24520, fo 311]. Pourtant, la rupture est déjà consommée. Elle date de la Commune : Zola appelle à la soumission des communards et soutient laction politique de Thiers ; surtout, celui quil traitera de « prophète en zinc » [Le Figaro, 13 juin 1881] incarne à ses yeux une politique trop romantique, cest-à-dire quarante-huitarde.

Sil ne conteste que rarement la suprématie de Hugo poète et apprécie parfois le romancier, Zola se montre beaucoup plus acerbe à lencontre du dramaturge. Il voit dans Marie Tudor ou Ruy Blas une rhétorique enflée, une religiosité pontifiante, et dénonce la fascination de Hugo pour les époques révolues. Dans Nos auteurs dramatiques[Zola 1962-1970, t. 11, p. 585 sqq.] et surtout dans une série darticles du Voltaire[30 mars-4 avr. 1879, t. 12, p. 301 sqq.], il attaque ce théâtre qui tient « le siècle non par les idées, mais par les mots » [t. 11, p. 602]. La violence de sa campagne néchappe à personne. Certains y voient le signe de la rivalité entre les deux hommes, tel Gill* dans son poème satirique « LOccidentale » [Lune rousse, 13 avr. 1879] qui sachève sur « Hugo, de LAssommoir, sétait torché… lairain ! » La caricature* nest peut-être pas si éloignée de la réalité. Daprès Léon Daudet*, Hugo disait de Zola : « Tant quil naura pas dépeint complètement un pot de chambre plein, il naura rien fait » [Daudet, 1914, p. 76]. Et, niant linfluence du naturalisme en France (en dehors du cercle des amateurs dobscénités) au nom du caractère « malsain » et « mauvais » de ses romans – notamment de LAssommoir – [Barbou, 1880, p. 283 sqq.], il leur refuse même la moindre chance de passer à la postérité.

Malgré la virulence de ses attaques, Zola ne cessera en politique de se réclamer dun certain Hugo : lancien exilé, lennemi obstiné de la censure et de la peine de mort. Ses romans subissent manifestement son influence : il compose par exemple Le Ventre de Paris avec, comme arrière-plan, le Paris grouillant et monstrueux de Notre-Dame de Paris dans lequel Marjolin apparaît comme un avatar de Quasimodo. Ailleurs, lexpression de « bête humaine » lui vient de la Préface de Cromwell et de William Shakespeare ; le nom de Gervaise, probablement de Notre-Dame de Paris. Plus profondément, le roman zolien, dans ses descriptions visionnaires de paysages ou de foules, est très proche de la manière hugolienne. Zola est donc habité par Hugo, comme il le confie à Jules Huret : « Il y a en moi cette contradiction : nourri de Hugo et de Musset, jai eu beau combattre en moi le romantisme, je suis resté dans mes goûts un romantique indécrottable ! » [Mitterand, 1999-2002, t. 2, p. 1073].

Le 31 décembre 1873, à loccasion des obsèques de François-Victor Hugo, cest le poète quil salue par-delà le défunt : « Victor Hugo a été ma jeunesse, je me souviens de ce que je lui dois. [] Tous les écrivains français doivent se lever pour honorer un Maître et pour affirmer 1081labsolu triomphe du génie littéraire. » Sa prière sera exaucée puisque les deux hommes reposent aujourdhui dans le même caveau (no XXIV) du Panthéon.

Armonstrong, 2004 ; Barbou, 1880 ; Becker C., 1993 ; Charles D., 2017 ; Daudet, 1914, 1992 ; Dezalay, 1984, 1985 ; Gasiglia-Laster, 2007 ; Guermès, 2003 ; Hamon, 1995 ; Mitterand, 1999-2002 ; Murphy B., 1988 ; Ripoll 1973 ; Roman, 1998b ; Vernier, 2008 ; Zola, 1962-1970.

→ 1848 ; décadents et symbolistes ; Ulbach ; voix de VH.

Clélia Anfray