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Classiques Garnier

Explorations

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Considérant – Revue du droit imaginé
    2023, n° 5
    . varia
  • Auteurs : Bareït (Nicolas), Connil (Damien)
  • Résumé : L’étude des représentations du droit constitutionnel à l’écran témoigne à merveille de l’intérêt de l’exploration du droit imaginé. En effet, les films et les séries télévisées donnent à voir, fidèlement ou non, des institutions politiques en action, des pouvoirs exécutif et législatif incarnés, des Constitutions de tous horizons. Ce type d’étude invite encore à s’interroger sur le sens de l’exploration du droit imaginé, sur les façons d’y procéder et sur les objectifs à poursuivre.
  • Pages : 11 à 12
  • Revue : Considérant – Revue du droit imaginé
  • Thème CLIL : 3260 -- DROIT -- Droit général
  • EAN : 9782406147480
  • ISBN : 978-2-406-14748-0
  • ISSN : 2729-2177
  • DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-14748-0.p.0011
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 29/03/2023
  • Périodicité : Annuelle
  • Langue : Français
  • Mots-clés : droit imaginé, représentations, fiction, cinéma, littérature, connaissance, méthodologie
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EXPLORATIONS

Le cinéma permet douvrir les perspectives. Celles des spectateurs. Celles des critiques. Celles du droit imaginé, aussi. Car le « droit imaginé » – et cette revue, comme nous lindiquions dès le numéro douverture et avons essayé de le mettre en évidence dans chacun des volumes parus depuis – entend considérer autrement, largement et tout aussi attentivement les rapports quentretiennent le droit et la fiction, le droit et ses représentations, le droit et limaginaire juridique. De ce point de vue, le cinéma et lécran apparaissent, à coup sûr, comme un terrain dexploration que les juristes – aussi – peuvent investir à profit… Le droit imaginé, derechef.

Ce numéro de Considérant en est une nouvelle illustration à travers la publication des actes dun colloque organisé à Aix-en-Provence le 18 février 2021 par lAssociation des étudiants de lInstitut Louis Favoreu1. Le colloque, ambitieux et à la hauteur de son ambition, portait sur « Le droit constitutionnel à lécran », titre conservé pour le dossier du présent numéro. Les auteurs y invitaient à lexploration cinématographique. Les contributions réunies en témoignent.

Celles-ci proposent une sorte dOdyssée de lespace – géographique, au moins : de Hong Kong et son cinéma aux Pays-Bas de Paul Verhoeven, du Japon voire du monde de Miyasaki au Commonwealth de The Crown. Ce sont aussi bien des systèmes juridiques différents que des traditions diverses qui se trouvent alors questionnés, des pratiques et des habitudes multiples, des façons de penser le droit, de le mettre en œuvre ou de le pratiquer.

Mais cest également un Retour vers le futur, explorant la IIIe République sous lœil de Bertrand Tavernier ou les institutions libérales par le prisme des films « catastrophe », interrogeant lunivers Star Wars ou observant le contentieux constitutionnel comme impensé du cinéma. Il ne sagit pas seulement de voir la fiction pour la confronter à la réalité 12ou inversement. Il sagit aussi dobserver ce que lon ne voit pas. Du moins, pas toujours. Plus encore même, il sagit peut-être de chercher – par un pas de côté, de celui qui raconte ou de celui qui regarde – ce que lon pourrait voir.

Et pourquoi pas aussi quelque Rencontre du troisième type : le chef de lÉtat en chef de guerre, le ministre perdu dIn the Loop, de Gaulle et le gaullisme ou le Parlement entre réalités et fictions. Lexploration est multiple car le champ est vaste. Inépuisable, sans doute. Utile, assurément. Parce que lenjeu nest pas (pas uniquement, en tout cas) celui dune pause divertissante ou dun détour distrayant. Lexploration est bel et bien un moyen de réflexion, en tous les sens du terme.

Le cinéma nous renvoie une image autant quil nous incite à re-penser notre objet, à le reconsidérer. Pour dépasser, certainement, « les obstacles à la découverte que dressent le savoir illusion, les fausses certitudes2 ».

Lexploration se prolonge dailleurs en Varia, par une expérimentation pédagogique : pour enseigner le droit par limaginaire et même, plus exactement peut-être, pour enseigner le droit en passant – aussi – par limaginaire.

De telles explorations invitent alors à poursuivre le chemin. Il est toujours utile de mesurer la distance parcourue ; il est aussi important de savoir avancer. Mais dans quel sens ? Vers quelle direction ? Avec quels objectifs ? Pour quelles finalités ? Telles sont les questions quil conviendra ensuite de se poser. Le questionnement ne devrait-il pas désormais trouver une nouvelle orientation ? Au travers dinterrogations peut-être davantage méthodologiques. Comme pour marquer une étape ou passer un cap. Pour affermir la réflexion autant quen affirmer la spécificité. Celle des juristes comme des non-juristes, quil sagisse de littérature, de cinéma ou dautres formes de représentations. Pour se doter doutils, importés dautres disciplines ou créés sur mesure3, quil faut encore discuter et éprouver. Autour de cet objet singulier : le droit imaginé.

Nicolas Bareït et Damien Connil

1 À linitiative de Frédéric Sédat avec Cédric Aguzzi, Manon Bonnet, Théo Brillanti-Derien, Evan Lagune, Servane Le Dû, Arnaud Morando et Julien Padovani.

2 Boorstin, Daniel, Les découvreurs, Paris, Robert Laffont, coll. Bouquins, 2004, p. 5.

3 V. la célèbre distinction proposée par Claude Lévi-Strauss entre le bricoleur et lingénieur dans La Pensée sauvage (1962), Œuvres, Paris, Gallimard, coll. La Pléiade, 2008, p. 576.