Dans la période qui suit la guerre, et surtout après les années 1970, on ne retrouve plus les relations habituelles entre catholiques et économistes. Les catholiques ont beaucoup changé, les économistes aussi. On ne trouve plus de catholiques éminents pour dénoncer les protestants comme hérétiques, pour associer la science économique à la Réforme, aux Lumières et aux droits de l’homme, et pour condamner radicalement la société moderne. On ne trouve plus de catholiques éminents pour promouvoir la corporation, pour exiger une place plus grande pour l’Église, et pour elle seule, dans la société. Les catholiques ne sont pas tous devenus des admirateurs du système capitaliste, mais ceux qui s’y opposent mettent en avant leur humanisme et pas leur foi.

Les économistes, eux aussi, ont changé. Ils se veulent des savants et construisent des modèles mathématiques. Les appréciations générales sur la liberté, la concurrence, le marché, le rôle de l’État, la démocratie ou l’avenir du salariat ont totalement disparu des débats académiques ou, plutôt, elles ne s’expriment plus dans les revues académiques. Sur tous ces sujets, les économistes n’interviennent désormais qu’à titre individuel, quand ils sont interrogés par des journalistes ou quand ils publient leurs mémoires.

Certains catholiques et certains économistes continuent d’exprimer des avis que l’on pourrait comparer sur les systèmes économiques, sociaux et politiques, mais ils s’expriment donc comme des humanistes ou des savants, et presque toujours à titre individuel.