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Classiques Garnier

Actualités

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Cahiers Tristan Corbière
    2018, n° 1
    . « Ça ? »
  • Pages : 325 à 336
  • Revue : Cahiers Tristan Corbière
  • Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN : 9782406079347
  • ISBN : 978-2-406-07934-7
  • ISSN : 2608-5895
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-07934-7.p.0325
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 23/03/2018
  • Périodicité : Annuelle
  • Langue : Français
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Comptes rendus

Catherine Urien, Au pays de Tristan Corbière, La Riche, Diabase Littérature, 2017, 126 p.

En 2011, Jean-Luc Steinmetz faisait paraître le monumental Tristan Corbière, une vie à-peu-près. Louvrage, pourtant définitif, népuisait pas la veine de travaux plus modestes. Catherine Urien en propose lun des tout premiers depuis cette date.

Le parti poétique de lauteur consiste à se glisser dans les zones laissées vacantes par le matériau biographique. Catherine Urien multiplie ainsi avec bonheur les stases descriptives dune vie dont on ne sait en définitive que peu de choses. Cest en effet dans les interstices du factuel que sa prose se déploie, en une écriture poétique à plus dun titre, puisquil sagit dune part de sonder ces espaces vides que sont ces pauses non écrites, ou à linverse, ces parenthèses de non-écriture dans lexistence de Tristan ; et que dautre part, la démarche est servie par des effets de grossissement poétique, de zoom spéculatif, nourris dune communication empathique avec son modèle, et des effets bénéfiques de lenracinement de lauteur dans un pays quelle connaît dans ses caractéristiques singulières : Roscoff, la cité du viaduc, Santec, Callot, dessinent une toponymie familière. Catherine Urien sait tisser son évocation dextraits de lettres de Tristan à sa famille, sa mère ou Christine – et à laristocratique « Yours, Edouard » qui clôt certaine lettre, paraît curieusement répondre le « Yours, Henri », qui scandait la correspondance familiale dun autre artiste déjeté et doué, talentueux et contrefait, lui aussi, Toulouse-Lautrec. Elle sait enrichir sa trame de pans dune correspondance dont elle contribue à faire toucher du doigt la nerveuse nature, ou sengager sur la voie dun commentaire éclairant de lalbum Roscoff. Lauteur risque une hypothèse, déploie léventail des possibles ; des portes souvrent. Une rencontre avec Rimbaud est envisagée par lesprit, de façon embryonnaire ; celle avec Auguste Blanqui convainc 326tout également. Il eût été bon desquisser celle, attestée en létat actuel de la recherche, qui mit en contact Corbière et de Heredia à Douarnenez. Tout se tient, tant est préservée la ligne générale de lexistence, en ce puzzle biographique reconstitué par limaginaire. Chaque flèche tirée trouve sa cible – et significatif est que la seule erreur concerne le biographique, qui fait de la maison Bourboulon la maison de Bourdoulon.

Biographie de linterstice, donc. Mais il est des manques que Catherine Urien ne peut par définition combler, ceux dont elle évoque le travail ravageur, à travers linsuccès qui creuse Tristan, impuissant à posséder Marcelle. Cette errance au pays de Corbière, ce quon doit nous pardonner de baptiser ce voyage dUrien, se contente den faire affleurer la profondeur de façon lancinante, à travers une conduite quil est tentant de qualifier déchec. Sous lautorité de la muse Ironie, maîtresse corbiérienne, limpuissance se décline sous ses formes amoureuse (de Christine à Herminie, Tristan passe de Charybde en Sylla), picturale et artistique (touche à tout de génie quoique « Coloriste enragé, mais blême »), physique (« corps épave »).

À limage de son sujet, la vraie trouvaille de lopuscule consiste en le choix dune rupture énonciative qui larde le récit de bribes de discours à la première personne. Lauteur prend en charge la voix dÉdouard devenu Tristan, et cette usurpation produit de beaux fruits. À ces décrochages de voix correspondent certains déplacements spatiaux, qui prolongent et amplifient les espaces de libertés vécus à partir de Roscoff ; linspiration et la forme de lautobiographie saccordent davantage à lexpression de cette relative reprise de souffle, déployée à travers une série de tableaux impromptus. Poème en prose filé sur de longues phrases descriptives – lune dentre elles phagocyte un chapitre tout entier – louvrage est chargé de références et puise aux sources de linnutrition poétique. Hormis de façon indirecte, son rôle nest pas déclairer la genèse des Amours jaunes, même si, de loin en loin, on serait tenté demprunter à Julien Gracq son titre En lisant en écrivant quand se dessine lapproche de la vocation poétique. Corbière lit, plagie et blague Hugo, lui qui, réaliste au pays des merveilles, exige fidélité de lexpression mais veut sortir du rang, désarticule le vers sans en contester le maintien.

Pour finir, il est un chapitre doté de sa valeur propre, qui évoque la rencontre putative du révolutionnaire Blanqui et du poète Corbière. En 1871, après les internements du Mont-Saint-Michel, de Belle-Île-en-mer, 327de Corte, Blanqui, inexpugnable enfermé, contemple LÉternité par les astres de lun des cachots du Château du Taureau, au large de Carantec. Qui sait si Tristan ne tire pas quelques bords alentour de Pen-Al-Lann, à quelques mètres de celui que Gustave Geffroy, autre admirateur de Corbière, nommera lEnfermé, mis au secret absolu. Catherine Urien sait que lhypothèse est audacieuse, mais point folle : lintervalle de la réclusion du prisonnier correspond aux dates du séjour roscovite de Rodolphe et Hermine. Plus, la ligne générale de lévolution de Tristan ne rejoint-elle pas à sa façon le parcours du vieux révolutionnaire sur ces dernières années, voué à un enfermement incompressible ? Tristan, au bout du compte, réduit au silence, défait de sa geste, « en fond troué dArlequin » ; limage récurrente dans louvrage du cormoran aptère, abandonné sur la grève, actualise en précisant son implication maritime, la métaphore de lalbatros ailleurs exploitée.

Samuel Lair

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Frédérick Houdaer, Pourquoi je lis… Les Amours jaunes, Lyon, Le Feu Sacré, coll. « Les Feux Follets / Pourquoi je lis… », 2015, 80 p.

Les pages de cet opuscule de belle qualité éditoriale captent un discours habité par la question de la lecture contemporaine de Corbière. Nous sommes ici en marge de la critique – quelle soit littéraire, universitaire ou journalistique –, comme de toute littérature consacrée. Le narrateur se remémore sa découverte du recueil de Corbière dans les années 1980, puis rappelle sa vie et son œuvre en même temps quil engage un dialogue fictif avec une jeune étudiante à qui il fait découvrir Les Amours jaunes. Malgré quelques approximations (mais là nest pas le propos), cette monographie se recommande comme écho lointain et actuel – une grave crise de la réception poétique les séparant – du Tristan Corbière de Jean Rousselot. Tentative dépuisement dun texte 328et dune légende, assez vite essoufflée mais plutôt retorse, où le plaisir décrire coïncide parfois avec celui de déplaire. Le dispositif consistant à « balader » Corbière dans le décor de nos trois dernières décennies ne manque pas non plus dintérêt. Une pointe désotérisme finit par confirmer limpression de lecture diffuse : quelque chose se joue ici du « reste » poétique de Tristan Corbière.

Benoît Houzé

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Deux spectacles

Le four théâtral de la pièce du petit poète est lune des stations de la passion littéraire qui ségrène dans « Paris ». Mais le théâtre daujourdhui semble affectionner la figure et les textes de Corbière, puisque trois projets de grande qualité sen nourrissent.

Bernard Meulien, qui dit le texte de Corbière depuis les années 1980, a choisi la voie de lincarnation. Il joue Corbière, jusque dans le costume imitant liconographie qui entoure le poète ; la mise en scène, assez sobre, laisse le spectateur face à cette figuration et à quelques attributs emblématiques – une coquille dhuître, une baignoire-barque, une pipe. La connaissance profonde du texte corbiérien par lacteur – Meulien a une attention presque philologique aux textes, il a accompagné la publication des œuvres complètes de Gaston Couté – et son art des mimiques, inflexions et accents éclairent les poèmes de Tristan dune manière remarquable. Cette diction-jeu réalise parfois véritablement un texte qui dormait dans les pages des livres. Cest particulièrement le cas pour des poèmes « à dire » (pour reprendre lexpression de Tristan Tzara), comme La Balancelle : lextraordinaire richesse lexicale, phonétique, intonative et énonciative de ce texte éclate alors aux oreilles et aux yeux du spectateur. Bernard Meulien nous réconcilie avec la dimension 329« oratoire » de certains textes de Corbière. La « déclamation », fort critiquée depuis cent ans, et dont Tzara semblait regretter un peu de trouver quelques traces dans Les Amours jaunes, napparaît ici nullement comme un ronronnement verbal, mais comme un medium à part entière de laction poétique. Il est vrai quelle na plus grand-chose à voir avec les dictions pompeuses et stéréotypées que lon peut entendre dans certains enregistrements du début du xxe siècle.

La compagnie Le Poulailler (Poulainville, près dAmiens) présente quant à elle le texte de Corbière en duo : le poète, joué par Samuel Savreux, fait face à cette muse, maîtresse, amie, traitresse qui hante le texte corbiérien. Elle lui donne la réplique dans les poèmes dialogiques et dans quelques autres. La présence de ce pôle féminin de lécriture, joué par Émilie Gévart (vêtue de blanc, mais souvent couchée sur un lit pentu), change absolument le profil de lœuvre présentée. Les dictions très différentes des deux acteurs senlacent sans fusionner, dissonent parfois et placent au cœur du texte le « gouffre de lincommunicabilité » dont parlait Baudelaire. Ce contraste rend dautant plus forts les moments de connivence malicieuse. La distribution des rôles est également une distribution poétique : à la femme, souvent, lironie dernière, la parole du constat ; à lhomme, les envolées sans fondement et le cliquetis de mots. Car le texte est ici dit avec moins dintentionnalité que dans le spectacle de Meulien, ce qui permet de faire ressortir avec force les passages qui défient le sens ou la mise en voix – nous sommes parfois moins face à des phrases quà des segments sémantiques juxtaposés, qui rapprochent Corbière de certains textes dada. Ce parti-pris légèrement anachronique, confirmé par la diffusion de Moonlight serenade et la présence dramaturgique dune machine à écrire, est tout à fait salvateur : il participe à pointer lintempestivité de Corbière, mais aussi à porter son texte vers les rives de notre présent. Lon ne sétonnera donc pas du succès qua rencontré le projet auprès de publics lycéens.

Nous navons malheureusement pas encore pu assister au spectacle actuellement proposé par Henri Courseaux, dont nous espérons rendre compte dans un prochain numéro.

Benoît Houzé

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Musique

Emmanuel Tugny, Armor, daprès lœuvre de Tristan Corbière, Vila Mariana / rue Stendhal, 2017.

Dix ans après la publication de Corbière le crevant (Paris, Léo Scheer, coll. « Laureli », 2007) qui cherchait autant à raconter une vie quà trouver une langue, Emmanuel Tugny revient à Corbière, cette fois à travers la musique. Cet album de sept pistes, correspondant chacune à un poème de la partie « Armor » des Amours jaunes, nest cependant pas le fruit dune longue maturation : Tugny la enregistré, en compagnie de Chloé Lavalou (diction des textes) et dune poignée dautres musiciens, en 48 heures (au Caire), et assume navoir pas voulu « ruminer1 » ses partis pris artistiques. Le résultat est plutôt de lordre du dispositif que de la traditionnelle performance musicale : des boucles sonores évolutives, où lon entend quelques sonorités orientales au milieu des guitares électriques et des percussions, cohabitent avec le texte, plutôt quelles ne l« accompagnent » ou ne lillustrent. Les mots (dits dune voix presque uniforme et un peu appliquée) et la musique forment donc deux lignes parallèles presque autonomes (sauf à penser, ponctuellement, à une relation de lordre de la transe). Une partie de la richesse textuelle corbiérienne (cahots intonatifs, tonaux, mimiques, rhétoriques, métriques) nest donc pas « captée » par cette manière de la réaliser à voix et à sons. Mais des courts-circuits, ou des phases, peuvent advenir : par flash, on entend alors une poésie fétichisée-dégradée, bretonne-déterritorialisée, et une lecture en dérive.

Benoît Houzé

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Un film ancien retrouvé

Nous avons eu la chance de visionner Les Amours jaunes, film de 22 minutes réalisé en 1949 par Alfred Chaumel, qui avait suscité à lépoque un fort intérêt à Morlaix et dont les bobines sont aujourdhui extrêmement difficiles à trouver. Ce court-métrage en noir et blanc a été réuni avec deux autres du même réalisateur, lun sur Rimbaud et lautre sur Daudet, dans le film Vagabonds imaginaires, sorti en 1950.

Cest une sorte de Légende de Tristan que Chaumel conte : le cinéaste na pas cherché à jeter sur lœuvre une lumière fondamentalement nouvelle, il a pensé son film à partir déléments biographiques et exégétiques en cours à son époque. Mais la facture caléidoscopique de cette œuvre est quant à elle tout à fait intéressante et singulière : le film alterne courtes mises en scènes cinématographiques de poèmes (« Le bossu Bitor », « La pipe au poète », « Le poète contumace »), images ethnographiques captant la vie quotidienne à Morlaix et Roscoff, plan de paysages, reconstitutions biographiques en caméra subjective et présentations dobjets et documents relatifs à Tristan. La narration chronologique, qui fond vie et œuvre, permet à cet arlequin-film de garder la netteté du mythe.

Cette œuvre constitue également un intéressant document détude pour les corbiériens puisquelle fut réalisée en étroite collaboration avec Jean de Trigon (1902-1968), érudit morlaisien et spécialiste du poète. Trigon, qui apparaît dans le film avec sa femme, a mis à la disposition de Chaumel sa collection de manuscrits et a sans doute permis au cinéaste de prendre contact avec les descendants de la sœur et des cousins du poète. Aussi apparaissent à limage, furtivement, des objets biographiques (la lampe dont labat-jour reproduit le Vésuve, quévoquera « Vésuves et Cie », des photos de famille, un album de marine) et des manuscrits (« Au vieux Roscoff », « Veder Napoli », « Un Riche en Bretagne »…). Certains de ces derniers ont été reproduits dans des ouvrages de Jean de Trigon, notamment son Tristan Corbière (Paris, Le Cercle du livre, 1950), mais il nous a été impossible de vérifier le caractère non inédit de chaque page montrée, nettement mais très brièvement, à lécran. Il faut donc espérer la numérisation de lœuvre, qui permettrait une 332meilleure diffusion et des arrêts sur image pour le moment techniquement impossibles.

Le film vaut enfin par la lecture des textes corbiériens par le célèbre Roger Blin, en voix off. Lacteur scande les poèmes de « Gens de mer » dune voix impétueuse et hachée ; on note cependant des accents plus modernes (mélodie intonative suraigüe) dans la restitution de « Ça ? ».

Benoît Houzé et Samuel Lair

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Ventes

Le passage en vente de documents relatifs à Tristan Corbière nest pas toujours remarqué par les chercheurs et amateurs du poète. Aussi consacrerons-nous régulièrement quelques lignes, dans la présente revue, à la recension de catalogues récents.

Depuis les enchères « Ludovic Alexandre » de 20072, la pièce la plus remarquable passée en vente est une lettre de Tristan Corbière à sa tante Christine Puyo. Les lettres dadultes de Tristan sont excessivement rares : cest ici la cinquième dont quelque texte nous soit parvenu. Elle constitue un nouveau témoignage de « lamitié amoureuse3 » que Jean Vacher-Corbière signalait naguère dans son Portrait de famille. Nayant pu entrer en contact avec lactuel propriétaire de cet important document, nous devons nous borner à donner la description du manuscrit et la citation partielle de son texte présentées par le catalogue de vente (les guillemets indiquent les citations textuelles). Un an et demi avant la magnifique lettre à la même déjà connue, cette missive, qui semble plus brève, montre un art consommé de lanecdote épistolaire :

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« Mr Ed. Corbière remercie tout plein cette bonne langouste de Tolède de sêtre montrée aussi pleine de homard » … Mais leur petite Saint-Jean a « failli dégénérer en St Barthélemy, homard et tout [] Une vraie huile, du reste, que louverture de cette petite fête, Bouquet4 et Bonnet5 sétant déjà, la veille, aimé plein la voiture de St Pol6, le Bouquet coiffé du Bonnet et le Bonnet fleuri du Bouquet. Une vraie huile je vous dis. Cette huile na cessé de régner tout le dîner jusque par le travers dun gâteau de riz : conversation coulante : mâchoire de chien de mer, empaillage au point de vue de lenfant – céramique – histoire de Talma – Cest alors que maman et papa organisent comme toujours un de ces épisodes conjugaux qui ne ratent jamais, vous savez. Bonnet en profite pour porter un toast aux liens sacrés du mariage quil déclare la seule fin de lhomme de la femme et de lenfant, les vieux garçons sont immoraux, nont pas raison dêtre, et meurent abrutis à la fleur de lâge en épousant leur servante à tout faire ! – Bouquet à ces mots se lève solférino et évoque limage de Véronique – Bonnet, fort de son épouse et de lenfant, persiste et démontre quil est physiquement impossible quun vieux garçon soit vierge, par conséquent il est déshonoré !… (Ici une pose, chacun courbe la tête et attend la foudre) ». Corbière continue à raconter cette dispute entre ses amis qui veulent se battre… Lintervention des assistants évite la sortie des adversaires, Mme Bonnet explique que son mari est méridional, donc vif, et Bouquet est isolé dans la salle à manger vide, « où quelques fumigations de nicotine ont amené une réaction, un rire salutaire la détendu et le reste de la soirée sest passé à appeler Bonnet du mot qui ne peut se prononcer devant des femmes ». Il évoque les suites de cette soirée animée, et dessine les convives autour de la table : lenfant, Bonnet et Denis7, Bouquet (debout, brandissant sa chaise), Mme Bouquet, « moi8 »…

Remarquons également la mise en vente récente dun tableau jusquici inconnu de Gaston Lafenestre, peintre et ami du poète, qui lavait rencontré à Roscoff. Ce petit maître na laissé, dans la mémoire des historiens 334de lart, que le vague souvenir dun peintre animalier : une partie de son œuvre est pourtant maritime. Une meilleure connaissance de cette veine lafenestrienne permettrait peut-être de mieux comprendre le rôle du peintre dans la genèse du lalbum Louis Noir, qui présente, en premier feuillet, sa signature biffée et contient deux marines. Ainsi ce minuscule tableau « Bateaux près dun môle à marée basse9 » (11,7 x 9 cm), daté de 1867, dont le « môle » peut faire penser à celui de Roscoff. Il témoigne dune sensibilité coloriste et dun art du cadrage qui durent sans doute enthousiasmer le jeune Corbière.

Benoît Houzé

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Veille bibliographique
(2015-2017)

Éditions

Corbière, Tristan, Les Amours jaunes, éd. J.-P. Bertrand, Paris, Garnier-Flammarion, 2018.

Corbière, Tristan, Les Amours jaunes, préf. François Rannou, dessins Jean-Luc Verna, Toulouse, Gwen Català éditeur, 2017.

Traductions

Corbière, Tristan, Gli amori gialli, trad. Luca Salvatore, [avec une introduction de Lorella Martinelli et Renzo Paris, une note de Mario Richter et un essai di Giovanni Bogliolo, texte français en regard], Novara, Arcipelago Edizioni, 2015.

Ouvrages

Houdaer, Frédérick, Pourquoi je lis… Les Amours jaunes, Lyon, Le Feu Sacré, coll. « Les Feux Follets / Pourquoi je lis… », 2015.

Urien, Catherine, Au Pays de Corbière, La Riche, Diabase, 2017.

Articles universitaires

Cornulier, Benoît (de), « Corbière pouëte précieux dans lalbum de Roscoff ? », dans Le Chemin des correspondances et le champ poétique, À la mémoire de Michael Pakenham, [LCC dans la présente bibliographie], coll. dir. Steve Murphy, Paris, Garnier, 2016, p. 195-214.

Cornulier, Benoît (de), « Sur la valeur taratantara du mètre 5-5 chez Verlaine, Corbière et Baudelaire », Revue Verlaine, no 13, 2015, p. 195-214.

Houzé, Benoît, « Deux parodies de chansons par Tristan Corbière », LCC, p. 351-370.

Lair, Samuel, « Sutter-Laumann, lecteur des Amours jaunes en 1887 », LCC, p. 371-384.

Raffi, Maria Emanuela, [CR de la traduction précitée par Luca Salvatore], Studi Francesi, vol. LX, no 179, 2016, p. 356-357.

Saint-Amand, Denis, « Dhideusement beaux rossignols de la boue. Oxymore et modernité », LCC, p. 557-570.

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Williams, Heather, [CR de Tristan Corbière, ffocsoR, éd. B. Houzé, Huelgoat, Françoise Livinec, 2013], Nineteenth-Century French Studies, vol. 45, no 3-4, printemps-été 2017.

1 Voir Stéphane Guihéneuf, « Tristan Corbière inspire Emmanuel Tugny », Le Télégramme, 3 juillet 2017.

2 Livres anciens et modernes, [catalogue de la vente aux enchères du 28 juin 2007], Paris, Alde, 2007.

3 Tristan Corbière, Portrait de famille, Monte-Carlo, Regain, 1955, p. 32.

4 Michel Bouquet (Lorient, 1807 – Paris, 1890), peintre, ami de la famille Corbière, habitait à Roscoff une maison située en face de celle où logeait Tristan.

5 Nous ne savons presque rien du couple Bonnet dont il est question ici. Le mari avait manifestement des opinions conservatrices sur le mariage et ne concevait pas quun sexagénaire comme Bouquet puisse décemment vivre seul avec une domestique (la « Véronique » évoquée plus bas) sans se marier. Tristan fera de nouveau référence à ce différend dans la lettre de novembre 1870, où il rapporte avoir dit à Bouquet, soudainement devenu patriote : « je ne vous donne pas deux mois pour croire au trône et à lautel, et trois mois au plus pour légitimer devant Monsieur Bonnet les liens qui vous unissent à Véronique ! ».

6 Saint-Pol-de-Léon, à quelques kilomètres de Roscoff. Le repas décrit se tient en effet probablement dans la maison des Corbière, où Tristan ne vivait pas toujours seul, à Roscoff.

7 Sans doute le « docteur Denis », médecin roscovite évoqué dans la lettre à la même de novembre 1870.

8 Artcurial, 16 octobre 2013, [catalogue de vente], Paris, Artcurial, lot 67.

9 Tableaux modernes et contemporains (de 1870 à nos jours), [catalogue de vente], Bayeux, Maîtres Bailleul et Nentas, 11 novembre 2017, lot 38.