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Classiques Garnier

Avant-propos

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Cahiers Louis Dumur
    2023, n° 10
    . Pour qui la guerre ?
  • Auteurs : Dubosson (Françoise), Jacob (François)
  • Pages : 9 à 10
  • Revue : Cahiers Louis Dumur
  • Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN : 9782406159643
  • ISBN : 978-2-406-15964-3
  • ISSN : 2427-8084
  • DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-15964-3.p.0009
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 22/11/2023
  • Périodicité : Annuelle
  • Langue : Français
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AVANT-PROPOS

Nous avons choisi, pour ce dixième des Cahiers Louis Dumur, de réunir un certain nombre de chercheurs autour dune question – hélas – de nouveau dactualité. Louis Dumur pourfend en effet, notamment dans son œuvre romanesque, les « profiteurs de guerre », ceux qui ont intérêt, lors du premier conflit mondial, à déclencher, à voir se déclencher ou à voir se prolonger les combats, quels quen soient lhorreur et le coût humain. La description du banquier Tallatin sétend ainsi, dans La Croix Rouge et la Croix Blanche, sur deux pages dune particulière férocité et provoque, à Genève, un véritable scandale. Comment, écrit-on, Dumur peut-il se considérer légitime – parce que neutre – lorsquil appelle à repousser par les armes linvasion germanique ? Comment peut-il sopposer à ceux qui, derrière Romain Rolland, se situent « au-dessus de la mêlée » et préconisent la paix à tout prix ? À quoi bon user son talent – que nul ne conteste – à ressasser les éléments les plus saillants dun conflit que chacun souhaiterait pouvoir dépasser ? Et surtout, où mène ce réquisitoire contre Tallatin et tous ses semblables ?

En prenant pour base de travail la Première Guerre mondiale et lœuvre de Louis Dumur – mais non exclusivement – a donc été examinée cette question des « bienfaits » – pour quelques-uns – de la guerre et de la manière dont il sagit den rendre compte. Faut-il, comme Dumur, dénoncer les profiteurs de guerre par le biais dune expression artistique violemment engagée ? Doit-on, en bon historien, tenter de prendre la distance nécessaire à une juste évaluation des intérêts en jeu ? Jusquoù, dailleurs, faut-il étendre cette enquête ? Peut-on, derrière telle ou telle figure emblématique, incriminer des nations entières ?

On conçoit aisément le triple intérêt dune telle investigation. Elle se situe dabord dans le prolongement de la « revie » de lœuvre de Louis Dumur, sur lequel la thèse de Jacques Schroll est précisément en cours de rédaction. Elle interroge ensuite, sur un sujet assez peu traité, larticulation toujours sensible entre histoire et littérature, et appelle à 10de nouveaux développements sur des œuvres connexes (on peut notamment penser à Guerre de Céline, récemment paru). Elle invite enfin à une réflexion de portée plus générale sur la description de la guerre et de ses enjeux et sur la mise en perspective du premier conflit mondial. De quoi enrichir, on le conçoit, la relecture de notre propre actualité.

Cest pourquoi nous proposons dans ce numéro les contributions présentées lors des journées détude qui se sont tenues les jeudi 27 et vendredi 28 octobre 2022 à lUniversité Jean Moulin – Lyon 3, dans le cadre des activités du groupe MARGE. Une extension de la problématique « dumurienne » à dautres auteurs proches de Dumur (Remy de Gourmont ou Philippe Godet) ou plus éloignés dans le temps (Drieu la Rochelle, Henri Vincenot) nous permettra peut-être davoir une vue densemble susceptible, à défaut dapporter des réponses tangibles, de clarifier au moins les questions qui se posent réellement. Et qui, répétons-le, se posent – cruellement – aujourdhui encore.

Françoise Dubosson

François Jacob