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Classiques Garnier

Éditorial

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Cahiers Lautréamont
    2023, n° 5
    . varia
  • Auteur : Saliou (Kevin)
  • Résumé : Présentation du contenu de ce numéro et de l’actualité ducassienne.
  • Pages : 11 à 14
  • Revue : Cahiers Lautréamont
  • Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN : 9782406159957
  • ISBN : 978-2-406-15995-7
  • ISSN : 2607-754X
  • DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-15995-7.p.0011
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 22/11/2023
  • Périodicité : Annuelle
  • Langue : Français
  • Mots-clés : Lautréamont, Isidore Ducasse, Maldoror, éditorial, actualité, AAPPFID
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Éditorial

Le 24 novembre 2022, sous un beau soleil matinal malgré les rigueurs de novembre, on put voir des ducassiens affluer de toutes parts sur lesplanade de la Bibliothèque nationale François-Mitterrand. Après un report de deux années en raison de la pandémie de Co-VID, lAAPPFID pouvait enfin tenir le colloque quelle avait initialement souhaité organiser pour le cent-cinquantenaire de la mort dIsidore Ducasse. Grâce aux efforts dÉric Walbecq et de Frédéric Ramires, la ducassologie eut loccasion de faire un état des lieux de sa recherche devant le public présent dans la salle mais aussi, évolution des temps oblige, devant tous ceux qui suivirent depuis chez eux, via le lien Internet1.

Ce numéro des Cahiers Lautréamont contient quelques morceaux choisis de cette journée. Il nous était difficile de produire des actes à proprement parler car nous avions choisi des interventions aux formes diverses : lune très iconographique, lautre une lecture publique, une table ronde à la fin de la journée… Autant de moments délicats à restituer sur le papier, et dont cet éditorial rendra compte rapidement par une présentation succincte.

La journée sest ouverte par une allocution de Marie Delaubier, directrice des collections de la BnF, qui visait à rappeler la vie brève mais riche de la « comète » Isidore Ducasse ainsi que lavancée récente de la recherche ducassienne. Puis Éric Walbecq, secrétaire de lAAPPFID et coordonnateur des dons et des entrées à la Bibliothèque nationale, est monté à la tribune en compagnie de sa collègue Bérénice Stoll, chargée des collections du xixe siècle dans la réserve des livres rares. Au cours de cette communication à deux voix, les deux bibliothécaires présentent une large iconographie qui fait linventaire de la présence de Lautréamont dans les collections de la BnF, tant sur le site de Tolbiac quà Richelieu 12ou à lArsenal. Il serait sans doute fastidieux de tout rappeler ici, nombre de ces documents étant dailleurs déjà bien connus des ducassiens et en partie reproduit dans louvrage de Jean-Jacques Lefrère2. Nous nous contenterons dinsister sur une découverte : Walbecq et Stoll ont eu lidée daller consulter les registres du dépôt légal, ce qui navait jamais été fait, et dy retrouver, en 1868, la première mention du dépôt du Chant premier : une coquille sétait glissée, le scribe ayant noté pour titre « Les Chants de Maldolor ». Les psychanalystes se réjouiront de pouvoir gloser cet écart graphique, les partisans de lhispanité du poète savoureront, eux aussi, une nouvelle trace dun possible bilinguisme – nous penchons, pour notre part, pour une simple erreur de copie. Du côté des Poésies, au-delà des deux fascicules déposés au dépôt légal – lun des deux seuls jeux complets identifiés au monde –, exemplaires découverts par Gourmont et recopiés par Breton, on peut aussi voir les exemplaires dédicacés à Eugène Loudun. Lexposé se termine par quelques raretés supplémentaires, dont on pourra retrouver le détail dans la vidéo.

Les communications de Michel Pierssens, Jean-Luc Steinmetz et Gérard Touzeau, ainsi que la mienne, sont reproduites dans ce volume, auquel il ne manque que celle de Julien Brault, qui na pas pu nous parvenir à temps. Nous remercions la Bibliothèque nationale de France de nous avoir donné lautorisation de les reproduire. Parmi les autres temps forts de cette journée, il faut encore mentionner la projection du film de Jean-Christophe Averty, Beau comme, court-métrage expérimental de 9 minutes réalisé en 1990 et peu connu du grand public, ainsi que la lecture du texte lyrique que Philippe Soupault consacra à Isidore Ducasse, par Milie van Bariter, metteur en scène, dramaturge et membre de lOutrapo. La journée se conclut par une table ronde animée par François Angelier de France Culture, en présence du romancier Simon Liberati.

Le présent Cahier nest cependant pas un volume dactes de colloque : il comprend, comme les années précédentes, la poursuite des enquêtes en cours relatives à la vie et à lœuvre dIsidore Ducasse. Sil souvre douloureusement sur une série dhommages à trois ducassiens décédés cette année, il apportera dans sa suite au lecteur, nous lespérons, le plaisir de nouvelles découvertes. En premier lieu, la saga familiale des Ducasse se poursuit à Cordoba, avec le récit des trois mariages dAmelia Ducasse, lhéritière 13du moulin. Gérard Touzeau continue ses recherches et nous propose un candidat potentiel pour Joseph Durand, le dernier dédicataire des Poésies. Les études de texte sont également nombreuses dans ce volume. Bertrand Combaldieu sintéresse à latomisme et à la présence du terme « atome » dans Les Chants de Maldoror. Siméon Lerouge identifie une nouvelle source à travers le récit du passage de la comète dOrgueil dans le Sud-Ouest de la France. Enfin, Giovanni Berjola sintéresse à lentrecroisement du sexe et de la violence dans lœuvre. Mathilde Ollivier et moi-même poursuivons la relecture des Chants de Maldoror à la lumière des théories queer, avec deux articles, lun consacré à la misogynie de Ducasse, lautre à un close reading de la strophe de lhermaphrodite. Cette année, les études sur la réception de lœuvre sont marquées par lémergence dun nouveau document : une lettre de Léon Bloy qui apporte un élément supplémentaire à sa relation avec lœuvre. Cette carte nous est présentée par Michel Brix et Émile Van Balberghe. Dautres contributions sintéressent à la réception italienne, espagnole, roumaine et française de lœuvre, y compris chez des auteurs contemporains comme Nelly Kaplan ou Simon Liberati. Le volume se termine sur les traditionnels compte rendus, « Ongles secs », « Gloses et glanes ».

Au moment où nous achevons ces lignes et sommes prêts à rendre notre copie à léditeur, nous apprenons la mort de Philippe Sollers. Sollers était le chef de file de la revue Tel Quel, devenue ensuite LInfini. Il avait produit, à la fin des années 60, un article critique, « La Science de Lautréamont3 », qui lança ce quon pourrait appeler la troisième phase de la réception critique de lœuvre de Ducasse, après celle des symbolistes puis celle des surréalistes. Toute sa vie durant, Sollers semploya à célébrer Les Chants de Maldoror et les Poésies (quil parvint à plagier intégralement à travers ses différents ouvrages), non sans succomber à son tour au péché dinflation verbale quil avait lui-même dénoncé chez les surréalistes. Son commentaire, dinspiration structuraliste, fera lobjet dune étude approfondie dans notre prochain numéro.

Kevin Saliou

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Ouvrages cités

Lefrère, Jean-Jacques, 2008, Lautréamont, Paris Flammarion.

Sollers, Philippe, 1967, « La Science de Lautréamont », Critique, no 245, octobre 1967, p. 791-833. 

1 On pourra retrouver la vidéo de cette journée sur YouTube. URL : https://www.youtube.com/live/T-03TZZCjgs?feature=share [consulté le 15 février 2023].

2 Jean-Jacques Lefrère, Lautréamont, Paris, Flammarion, 2008, 233 p.

3 Philippe Sollers, « La Science de Lautréamont », Critique, no 245, octobre 1967, p. 791-833.